Hernoul-le-Fin (ou Arnoult fin) et Arnolfini désigneraient une seule et même personne en raison de leur similitude phonétique relève quelque peu du tour de bonneteau. ll a de plus l'inconvénient de nous faire oublier qu'une tradition attestée dès le Roman de la Rose et bien vivante encore du temps de Molière (voir l'Arnolphe de L'École des femmes), voulait que le prénom Arnoul - Arnoult, Hernoul, Arnolphe, Arnaud, Arnuphle - fût donné comme surnom aux maris trompés (1).

Saint Arnoul était le patron des cornards, des coquillards, des cornificetur, des coupeaux, des jeannins, des cous, des vuihos, des lourches, des racoupis – des cocus. De quel Arnoul s’agit-il ? Nous n’en savons rien. L’Église n’en recense pas moins de sept : Arnoult des Yvelines, Arnulf de Metz, Arnoul des Flandres, Arnoul d’Angleterre, Arnoul d’Orléans, Arnoux de Gap et Arnoulf de Soissons. L’un d’eux, ayant laissé sa femme vierge et l’ayant conduite pour plus de sûreté au couvent, aurait été assassiné des années plus tard par les valets de cette dame, mécontents qu’il eût ainsi ruiné leur fortune. Un autre, subitement quitté par son épouse, entra dans les ordres et mourut évêque. “Je n’ai rien fait de bon dans ma vie”, auraient été ses dernières paroles – mais la vie des hommes de ce temps est faite de rumeurs invérifiables

On disait des cocus qu’ils appartenaient à la “confrérie Saint-Arnoul”, qu’ils “logeaient à l’hôtel Saint-Hernoux”, qu’ils “devaient une chandelle à saint Arnoul”. Hernoux du temps de Rabelais désigne le cocu. (2)

(1) Exposé documenté sur cette question in : Théodore Lorin, Quelques conjectures sur le nom d'Arnolphe appliqué par dérision aux maris trompés, in Travaux de l'Académie impériale de Reims, vol. 20 n° 1, 1854, p. 88-95.
(2) Rabelais, Œuvres, Paris, Landois éd., 1836, vol. 7, Glossaire, p. 61

Jean-Philippe Postel
L’Affaire Arnolfini,
Actes Sud, 2016
Extrait du chapitre IV "Hernoul-Le-Fin avec sa femme", p. 35-36

 

 


Quand Voix au chapitre lit L'affaire Arnolfini :
http://www.voixauchapitre.com/archives/2019/arnolfini.htm