Rares
critiques du film Orlando de Sally Potter...
Le
film passe à la Mostra de Venise
D'une
grâce constante et obstinée, et extremely anglaise, Sally
Potter, danseuse, chorégraphe, chanteuse et féministe, n'a
pas eu peur de grand-chose, si ce n'est d'elle-même, pour réaliser
Orlando, film tentant comme le péché et décevant
comme la vertu. Virginia Woolf, avec son roman homonyme, offrait une métaphore
tourmentée et allusive de sa passion saphique du moment, Sally
Potter met la passion aux oubliettes et, pour entreprendre son voyage
dans le temps, lui préfère l'élégance languide
de l'esthétique préraphaélite.
Orlando, jeune gentilhomme fortuné, n'a pas un destin banal ; il
vit quatre cents ans en ne vieillissant que d'un jour. De 1600 à
maintenant, il saute en souplesse de l'état de chouchou timide
d'Elisabeth I à celui - épanoui -
de fille mère contemporaine. Car, entre-temps, Orlando sera devenu
Orlanda, se contemplant au réveil dans son miroir et disant : "Pas
de différence, exactement la même personne, sauf le sexe."
Bien vu. Sauf que Sally Potter, pour faire passer en douceur son message
féministe, enlève toute émotion à cette bouleversante
métamorphose : on dirait simplement que l'impeccable Tilda Swinton
a trouvé du Earl Grey plutôt que l'Orange Pekoe habituel
dans son tea pot du matin.
Il reste qu'Orlando est un somptueux album d'images, un grand ballet
spatio-temporel orchestré avec une habileté étonnante
et un goût sans faille qui laisse les yeux éblouis et le
coeur sec. Il n'aura pas suffi de louer les talentueux services des décorateurs
de Peter Greenaway (Jan Roelfs et Ben Van Os), ni d'allumer beaucoup de
bougies à la Barry Lyndon de Kubrick, pour extraire de ce très
beau sujet toute l'ambiguïté, la cruauté et la souffrance
sous les dentelles, qu'il exigeait. (Le
Monde, 12 septembre 1992)
Et quand le film passe à la télévision
En 1600, un jeune poète est le favori de la reine Elisabeth Iere.
A la suite de divers événements, il devient immortel, puis
se transforme en femme. D'après le roman de Virginia Woolf, une
parabole sur la quête de la personnalité pendant quatre siècles.
Décors baroques et splendeur esthétique. Est-ce suffisant
? (Le
Monde, 30 janvier 1994)
Quand
Voix au chapitre lit Virginia Woolf : http://www.voixauchapitre.com/archives/2019/woolf_orlando.htm
|