Paris cause, Paris discute, Paris écrit, Paris lit. A Paris,
tout le monde lit, comme le constate un voyageur allemand du temps :
"On lit en voiture, à la promenade, au théâtre,
dans les entr'actes, au café, au bain. Dans les boutiques, femmes,
enfants, ouvriers, apprentis lisent; les laquais Usent derrière
les voitures ; les cochers lisent sur leurs sièges ; les soldats
lisent au poste et les commissionnaires à leur station."
Gagné par la frénésie de lecture, Lawrence Sterne
séjournant à Paris lit le chiffon de papier dans lequel
son valet La Fleur lui a apporté son petit déjeuner ; il
en insère, dit-il, la traduction dans son Voyage sentimental
en France et en Italie. Du chancelier au cordonnier, tout le monde
a la fureur de l'imprimé, on y cherche les lumières de la
philosophie. Les Lumières : terme maçonnique. Il y a en
France des centaines de loges maçonniques, dont le grand maître
est le comte d'Artois. On y rencontre le marquis de Bouille, La Fayette
retour d'Amérique, la princesse de Lamballe (dont la tête
charmante finira au bout d'une pique), des savants, des artistes, des
avocats, des prélats. Dans ces sociétés de pensée,
on concilie la foi et la raison, la liberté et l'autorité,
l'égalité et les distinctions sociales. On propage les idées
nouvelles. Mais celles-ci ne sont pas l'apanage des classes dites cultivées.
Les idées se diffusent partout, à travers le pays entier,
par exemple à partir de ces points d'éclatement et de redistribution
que sont les relais de la poste aux chevaux. C'est que les maîtres
de poste eux aussi lisent, parlent à tout le monde, diffusent nouvelles
et brochures. L'un de ces maîtres de poste, Drouet, orientera le
cours de l'histoire en arrêtant à Varennes le roi en fuite,
sachant fort bien ce qu'il faisait. Extrait
de la préface de Pierre Bertaux Voix
au chapitre a programmé Goethe en février 2021
http://www.voixauchapitre.com/archives/2020/goethe.htm |
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