Souvenirs de saké
d'Osamu Dazaï

publié dans Le Club des Gourmets et autres cuisines japonaises, P.O.L., 2013 ; rééd. #Formatpoche, 2019.
Choix et présentations : Ryoko Sekiguchi - Traduction : Ryoko Sekiguchi et Patrick Honnoré

« Souvenirs de saké », dis-je, mais il ne s'agit pas de parler d'un saké qui se souviendrait de quelque chose. Le sens de ce titre est plutôt : « Souvenirs liés au saké », ou mieux : « Souvenirs liés au saké et à ma façon de vivre, tourné vers le passé, toujours centré sur des souvenirs liés au saké » ; cela faisait long pour un titre, et j'ai craint qu'il donne l'impression que je me moquais du monde. J'ai finalement décidé de le laisser tel quel : « Souvenirs de saké ».

Ces derniers temps, ma santé n'étant pas fameuse, je m'étais sagement tenu éloigné du saké, jusqu'au jour où cette abstinence m'a paru absurde. J'ai ainsi demandé à ma femme d'en faire réchauffer et j'y ai goûté, à peine un petit pichet de deux gô (1). J'ai alors pris conscience de plusieurs choses.

Il n'y a pas à dire, le saké, ça se boit dans de petits godets, et à petites lampées. C'est l'évidence. J'ai commencé à boire du saké au lycée (2), mais à l'époque, je trouvais cela âpre et trop fort en odeur. J'avais du mal à en ingurgiter même un petit verre. Moi, je faisais partie de la tribu des hommes qui effleurent et s'humectent à peine les lèvres de leur verre de curaçao, de peppermint ou de porto en jouant les gandins, et je détestais, je méprisais, je frémissais d'effroi devant les autres élèves qui alignaient les pichets de saké en faisant un raffut de tous les diables. Si si, je vous jure que c'est vrai.

Je finis néanmoins par m'habituer au saké, au prix d'un long, pénible et franchement ridicule périple. Dans les soirées avec geishas, afin d'éviter que celles-ci se moquent de moi, je me forçais à boire à petits traits ce breuvage que je trouvais amer. Arrivait alors inévitablement le moment où je me levais d'un bond pour courir aux toilettes et tout vomir en pleurant, à l'agonie. Ensuite, blême, je mangeais un kaki que la geisha m'épluchait. Par la force des choses, j'ai fini par m'y habituer, car tels sont les pouvoirs de la coercition.

Puisqu'un godet de rien du tout me faisait un effet effroyable, autant dire que je considérais l'acte de boire du saké dans un grand verre, froid, ou associé à de la bière, comme l'équivalent d'une tentative de suicide.

D'ailleurs, jadis, boire seul était chose fort peu élégante. On demandait nécessairement à quelqu'un de vous accompagner pour vous servir à chaque fois. Déclarer qu'il n'y a de vraiment bon saké que bu seul était considéré comme de la dernière vulgarité et les prémices de la débauche. Rien que de descendre un godet cul sec faisait retourner sur soi des yeux écarquillés, alors se servir soi-même plusieurs verres coup sur coup, cela vous forgeait une réputation de soûlard invétéré et vous fermait définitivement les portes de la belle société.

Si deux trois petits verres provoquaient un tel scandale, que dire d'un saké bu dans un grand verre, ou dans un gobelet à thé : c'était une affaire à se retrouver dans le journal. Le théâtre de l'école Shinpa use abondamment de ce ressort pour la scène clé :
« Ah ! Ma sœur ! Laisse-moi boire, je t'en supplie ! » fait la jeune geisha qui vient de rompre avec son bel amant, tirant vers elle son gobelet à thé
rempli de saké, que son aînée tente de retenir. Les corps tanguent d'un côté, de l'autre...
« Je te comprends, Ko'umé, oh oui, je te comprends fort bien ! Mais il ne faut pas ! Tu passeras sur mon cadavre avant que je te laisse boire dans un gobelet à thé. » Pour finir, elles tombent en pleurs dans les bras lune de l'autre. C'est la scène la plus excitante de toute la pièce, d'une tension à couper le souffle.
Si le saké est froid, la scène tourne au sordide :
L'intendant, assis sur ses genoux relève un instant la tête et glisse légèrement sur le tatami vers la patronne pour lui parler à voix basse. Parler lui coûte, mais sa décision semble prise.
« Permettez que je vous dise une chose...
- Allez, dis-moi tout. Plus rien ne peut m'étonner le concernant » répond la patronne.
Nous sommes semble-t-il dans la scène où la mère et l'intendant s'inquiètent de la débauche du fils et héritier de la boutique.
« Eh bien, puisque vous m'y autorisez... Ne soyez pas surprise...
- Parle, te dis-je !
- Eh bien, le jeune maître s'introduit tard la nuit dans les cuisines, et... au saké froid... » À peine a-t-il prononcé ce dernier mot que l'intendant se jette en larmes contre le sol ; la mère part à la renverse en criant :
« Horreur ! »
Sifflement de vent glacial.
C'est que boire son saké froid était presque considéré à égalité avec les crimes les plus sordides. Ne parlons même pas de shôchû (3), qui n'apparaît que dans les histoires de spectres et de fantômes.

Les temps ont bien changé. La première fois que j'ai bu du saké froid, plus exactement que j'ai été forcé d'en boire, c'était chez le critique Tsunatake Furuya. Enfin, j'en avais peut-être bien fait l'expérience avant, mais le souvenir de cette soirée me reste extraordinairement vivace. Je devais alors avoir vingt-cinq ans, je participais à la revue Le Phoque qu'il dirigeait et dont le bureau était domicilié à son adresse. Je me rendais donc assez souvent chez Furuya, et là je buvais le saké de Furuya en écoutant les théories littéraires de Furuya.
À l'époque, Furuya savait être d'excellente compagnie quand il était en forme, mais savait aussi se montrer d'humeur massacrante quand il ne l'était pas. Je me souviens d'un soir de début de printemps. À peine étais-je arrivé chez lui que Furuya me dit :
« Tu viens boire, c'est ça ? » d'un petit ton méprisant qui me mit de mauvaise humeur. Ce n'est pas comme si j'étais perpétuellement son invité non plus.
« C'est une façon de recevoir un ami, ça ? » lui répondis-je en m'efforçant de sourire.
Furuya sourit légèrement de même :
« Mais tu vas boire.
- Éventuellement.
- Éventuellement, des clous ! Tu vas boire, pas vrai ? » À l'époque, il pouvait avoir un côté assez insistant. J'allais partir. Furuya appela sa femme :
« Eh ! Il doit rester cinq gô de saké dans la cuisine. Apporte-le moi. Tu peux amener directement la bouteille. » Je me dis que j'allais rester encore un peu, finalement. La tentation du saké est terrible. Sa femme arriva avec une grande bouteille, à demi pleine.
« Cela ? Vous ne le réchauffez même pas ? demanda-t-elle.
- C'est inutile. Sers-le donc dans ce gobelet à thé. » Il était assez arrogant, aussi.
La colère me prit et je bus d'un trait sans un mot. Si j'ai bonne mémoire, c'était la première fois de ma vie que je buvais pour de vrai un saké froid.
Furuya me regarda boire, immobile, les bras croisés dans son kimono, puis commença à faire des commentaires sur ma tenue.
« Tu portes un bon sous-vêtement, comme toujours. Mais tu le portes de façon à ce qu'on le remarque, et ça, c'est une hérésie. » Ce sous-vêtement me venait de ma grand-mère, de ma région natale. Je commençais à l'avoir franchement mauvaise, je me resservis seul un plein gobelet du premier saké froid de ma vie, et le sifflai. Il ne me soûlait toujours pas.
« Le saké froid, c'est comme de l'eau. Ça ne me fait aucun effet.
- Ah, tu crois ça. Mais ça va venir. » Je vidai sans tarder ce presque litre.
« Je rentre.
- Ah bon. Je ne te raccompagne pas. »
Je sortis seul de chez Furuya. Marchant dans la rue noire, une tristesse terrible me saisit, je me mis à chanter à mi-voix un couplet de la chanson de la courtisane Okaru :
Je pars pour être vendue...
Tout à coup, ce qui s'appelle tout à coup, l'ivresse vint. Non, décidément, le saké froid n'est pas de l'eau. Une ivresse terrible. Un énorme tourbillon se soulevait au-dessus de ma tête, mes pieds flottaient, je me frayais un chemin parmi les nuages, pagayant avec mes bras. Puis je m'écroulai.
Je pars pour être vendue...
chantonnais-je. Je me relevai, tombai de nouveau, le monde se mit à tourner autour de moi à une vitesse vertigineuse.
Je pars pour être vendue...
Seule ma voix me parvenait, au-delà d'un brouillard lointain, frêle et misérable comme le son dun moustique :
Je pars pour être vendue...
De nouveau je tombai, de nouveau je me relevai, j'étais couvert de boue jusqu'à mon « bon sous-vêtement ", j'avais perdu mes socques et je dus prendre le train en chaussettes.
Depuis, j'ai bu du saké froid des centaines et des milliers de fois, mais jamais plus je n'ai subi pareille épreuve.

J'ai un autre souvenir nostalgique et inoubliable lié au saké froid. Mais avant de le raconter, je dois donner quelques explications sur le type de relation que j'entretenais avec Sadao Maruyama.
La guerre du Pacifique avait déjà commencé depuis un bon moment, et nous étions au début de l'automne, quand je reçus une lettre de Sadao Maruyama troussée à peu près comme suit :
Je voudrais bien vous rendre visite, si cela ne vous dérange pas. Je viendrai avec un autre type que vous devriez rencontrer aussi.
Maruyama, je ne l'avais jamais rencontré ni n'avais jamais échangé la moindre lettre avec lui. Je le connaissais de bonne réputation comme acteur, et je l'avais vu jouer. Je lui répondis qu'il pouvait venir quand il voulait, en joignant un plan sommaire pour venir chez moi.
Quelques jours plus tard, j'entendis s'annoncer quelqu'un, de cette voix caractéristique que j'identifiai immédiatement à celle que j'avais entendue sur scène. Je me levai pour lui ouvrir.
Maruyama était seul.
« Et votre compagnon ? » Maruyama eut un sourire et dit :
« Le voici. » Il sortit alors de son baluchon une bouteille de Tommy Whisky et la posa sur la première marche de l'entrée.
Il a un joli humour, pensai-je, admiratif. À l'époque, et aujourd'hui encore, il était impossible à des gens comme nous de nous procurer du Tommy Whisky, ni même du shôchû.
« Et si vous n'y voyez pas d'inconvénient, au risque de passer pour un pingre, pourrions-nous boire ensemble uniquement la moitié ?
- Entendu. » Il doit apporter l'autre moitié ailleurs, me dis-je. Ce qui était pour moi parfaitement compréhensible, compte tenu de la rareté d'un whisky de cette qualité. J'appelai mon épouse.
« Apporte une bouteille vide ! » Maruyama m'arrêta tout de suite.
« Non. Je voulais dire : buvons ce soir la moitié ensemble, et je vous laisse le reste. » Un très joli humour, pensai-je en retenant un cri d'admiration.
Nous autres, quand nous rendons visite à un ami avec une grande bouteille de saké, c'est pour la descendre en entier avec lui, qui trouvera cela parfaitement normal. En cas d'extrême besoin, il nous arrive même d'avoir recours à la méthode dite de « la pêche à la daurade avec une crevette ", qui consiste à rendre visite à quelqu'un avec deux bouteilles de bière que l'on commence par boire. Cela ne suffisant évidemment pas à se sentir à l'aise, le maître de maison est bien obligé d'ouvrir sa réserve.
Quoi qu'il en soit, c'était la première fois que je recevais un visiteur aussi smart et poli.
« Ma foi, dans ce cas, buvons-la ensemble en entier ! » La soirée fut fort agréable, Maruyama protestant que j'étais la dernière personne en qui il pouvait avoir confiance dans le Japon d'aujourd'hui, me priant de rester en contact. Je me sentis une poussée d'orgueil proprement honteuse, et me voilà à me vanter et à insulter le monde entier à haute voix. Le calme Maruyama dut finir par en avoir assez et me dit :
« Bon, alors, je ne vais pas tarder à prendre congé.
- Tu n'y penses pas ! Il en reste encore un peu !
- Gardez-le comme ça ! Un de ces jours, quand vous vous apercevrez qu'il vous reste encore un fond de whisky, vous verrez, ce n'est pas désagréable ! » Il parlait en homme d'expérience, manifestement.
Je le raccompagnai jusqu'à la gare de Kichijôji, et au retour, je me perdis dans le parc et buttai bille en tête contre le tronc d'un grand cèdre.
Quand je me vis dans le miroir le lendemain, je manquai détourner les yeux : j'avais le nez rouge et tout enflé. Cela me plongea dans un abîme de mélancolie. Quand je me mis à table pour le petit déjeuner :
« Que prendrez-vous pour apéritif ? Il reste un peu de whisky ", me proposa mon épouse.
Sauvé ! Oui, il faut toujours garder un peu d'alcool ! Quelle exquise attention de la part de Maruyama qui m'avait donné ce conseil ! Sa bonté me laissait éperdu d'admiration.
Par la suite, Maruyama m'invita souvent par télégramme, ou en venant me chercher en personne, pour m'introduire dans des lieux où l'on trouvait de bons alcools à profusion. Les attaques aériennes sur Tokyo se faisaient de plus en plus fréquentes, mais les invitations aux soirées arrosées de Maruyama ne diminuaient pas. Et même en me ruant à la caisse pour payer au moment opportun, la réponse était invariablement : « Monsieur Maruyama nous a déjà réglés. » À ma grande honte, j'avoue n'avoir jamais réussi à payer une seule fois.
« Akita, à Shinjuku, vous connaissez, n'est-ce pas ? Ils seront ouverts ce soir pour la dernière fois. Allons-y ! »
La veille au soir, les bombes incendiaires avaient plu sur Tokyo.


(1) 180 ml environ. (Toutes les notes sont des traducteurs.)
(2) Équivalent du début de l'université dans le système scolaire actuel.
(3) Le shôchû est un alcool distillé (de grain ou de pomme de terre, par exemple), alors que le saké proprement dit est un alcool de fermentation basse.

 

AVANT-PROPOS de Ryoko Sekiguchi

Récemment, j’ai constaté une chose curieuse : qu’est-ce que ça bouffe alors, dans les romans japonais ! Les personnages mangent. Beaucoup. Souvent. La scène de table, ou plus largement l’acte d’absorber aliments et breuvages, fait figure de motif immanquable de la fiction moderne et contemporaine.

Je me suis rendu compte de cela lors d’une résidence d’écrivain : en 20112012, j’avais organisé des rencontres mensuelles sur le thème de cuisine et écriture, au cours desquelles, à chaque fois, je distribuais au public une nouvelle de littérature japonaise porteuse du thème de la nourriture, traduite et publiée spécialement pour l’occasion. Évidemment, je n’ai eu aucune difficulté pour trouver des nouvelles traitant du thème en question, bien au contraire, je n’avais que l’embarras du choix. Dans la fiction japonaise, non seulement les personnages mangent dans des situations diverses et variées, mais de plus, le champ éditorial japonais autorise les plus grands écrivains à publier des essais sur la cuisine parallèlement à leur travail romanesque, sans que cela soit réservé aux écrivains « grand public », ni un passe-temps pour auteur à court d’idée entre deux œuvres « sérieuses ». Écrire sur la nourriture ou sur la cuisine fait partie des thèmes ouverts au travail de tout écrivain au sens plein du terme, tout comme écrire des critiques de cinéma ou des essais sur le théâtre. Cela n’est d’ailleurs aucunement limité au domaine littéraire, on trouve autant à manger dans les films ou les mangas : les scènes de table sont pour ainsi dire la marque de fabrique de la création japonaise.

Pour moi, qui ai été élevée dans le bain culturel japonais, cela était une évidence. Je n’en ai pris conscience qu'en discutant avec le public de ces rencontres, qui s’étonnait de constater la place qu’occupe le thème de la cuisine dans la littérature japonaise à toutes les époques. Il est vrai qu’en comparaison, dans les romans français d’aujourd’hui, les personnages doivent certainement se cacher pour se nourrir car on les voit rarement mettre quelque chose dans leur bouche. Quant à imaginer un écrivain de renom écrire un livre de cuisine... Sans user d’un pseudonyme, j’entends...

Enfin, les choses sont en train de changer, peut-être : aujourd’hui, je remarque que le thème de la cuisine fleurit dans tous les domaines ici, sous le biais de collaborations avec le design, la photographie, l’art contemporain. N’y manque encore que la littérature. Alors que c’est précisément dans le domaine narratif, me semble-t-il, que le thème de la nourriture pourrait prendre toute son envergure ; ne s’associe-t-il pas à merveille avec tout autre thème ? Autrement dit, le thème de la nourriture m’apparaît comme le « bol » idéal pour contenir le plat que l’on veut.

La richesse de ce qu’est susceptible de contenir ce « bol », le lecteur s’en apercevra en parcourant le présent livre : le signe que l’on est encore vivant, comme Shiki Masaoka, le réformateur du haïku moderne ; ou celui de la découverte de ce que signifie se sentir vivre, dans une description de la confection des sushis par Kanoko Okamoto ; une imagination fantaisiste sous la plume de Kôzaburô Arashiyama et le rire piquant des contes du XIIe siècle ; dans un livre de cuisine du XVe siècle, les noms des « 100 curiosités au tôfu » ressemblent plutôt à des poèmes, et le poète agronome Kenji Miyazawa offre une nourriture céleste à sa jeune sœur ; Rosanjin, notre Grimod de La Reynière à nous, fait le récit d’un épisode authentique à la Tour d’Argent quelques années après la guerre ; Kafu Nagai analyse crûment la barrière infranchissable des classes sociales ; l’un des auteurs japonais les mieux connus en France, Osamu Dazai, évoque des souvenirs de saké, breuvage indéfectiblement lié pour lui aux séparations et aux départs ; au contraire de Jun’ichirô Tanizaki qui mêle gastronomie et sensualité, dans une quête du désir à la limite de l’érotisme.

En définitive, en littérature, ce « bol », l’acte de manger, ne peut exister seul, c’est précisément sa grande force. Contrairement à d’autres thèmes qui prennent difficilement sauce avec un autre sujet, ce « bol » exige toujours un voire plusieurs accompagnements : telle une bouche béante, le bol accueille, mêle thèmes et formes et en fait un plat chaque fois différent, que le lecteur savourera à sa convenance. Une fois cet outil magique acquis, il est difficile de s’en séparer, raison pour laquelle la littérature japonaise s’y appuie avec autant de constance, le déploie sous tous ses aspects, s’en inspire avec autant de variété... et se laisse délicieusement dévorer par lui, c’est bien la moindre des choses.

Ryoko Sekiguchi
dont nous avions lu La Voix sombre


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