Le Temps de vivre »
ou «
LÉvadé
de
Boris Vian (1954)
Il a dévalé
la colline
Ses pieds faisaient rouler des pierres
Là-haut, entre les quatre murs
La sirène chantait sans joie
Il respirait lodeur des arbres
De tout son corps comme une forge
La lumière laccompagnait
Et lui faisait danser son ombre
Pourvu quils me laissent le temps
Il sautait à travers les herbes
Il a cueilli deux feuilles jaunes
Gorgées de sève et de soleil
Les canons dacier bleu crachaient
De courtes flammes de feu sec
Pourvu quils me laissent le temps
Il est arrivé près de leau
Il y a plongé son visage
Il riait de joie, il a bu
Pourvu quils me laissent le temps
Il sest relevé pour sauter
Pourvu quils me laissent le temps
Une abeille de cuivre chaud
La foudroyé sur lautre rive
Le sang et leau se sont mêlés
Il avait eu le temps de voir
Le temps de boire à ce ruisseau
Le temps de porter à sa bouche
Deux feuilles gorgées de soleil
Le temps de rire aux assassins
Le temps datteindre lautre rive
Le temps de courir vers la femme
Il avait eu le temps de vivre.
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