Ce
qui m'a marquée dans la traduction J'ai lu avec intérêt l'article de Ridha Boulaâbi dénonçant les gros défauts de la première traduction : "La première version traduite en français, de Fady Noun, offre au lecteur français une vision complètement édulcorée de limaginaire oriental sur lOccident, gommant presque systématiquement les critiques de lorientalisme qui rythment le texte arabe. " (Ridha Boulaâbi, "De Tayeb Salih à Abdelwahab Meddeb : Saison de la migration vers le Nord ou vers lorientalisme ?", Recherches & Travaux, n° 95, 2019)/ Qui est donc l'auteur de cet article ? Ridha Boulaâbi, maître de conférences en littératures francophones à l'université de Grenoble, vient de publier : Orientalism Writes Back : quand la littérature francophone du Maghreb met en fiction la pensée postcoloniale, éd. Paul Geuthner (éditions parisiennes qui concernent le Proche-Orient, le Moyen-Orient et lExtrême-Orient), 2024. Il avait dirigé Les Orientaux face aux orientalismes, 2013 et publié L'Orient des langues, 2011. Son approche met en lumière une censure idéologique : aussi cruelle que Moustafa, j'aimerais avoir le traducteur sous la main pour le passer à la question... J'ai
regardé pour ma part la traduction d'excisée et celle
de la description du clitoris dans trois traductions :
PREMIER EXEMPLE Dans notre livre, avec la deuxième traduction, p. 12 : Bint Mahjoub dit en riant : Dans la première traduction, p. 21, pas d'excision :
Traduction anglaise avec une note d'un spécialiste indiquant que chrétienne serait mieux approprié qu'infidèle, mais le mot contraire d'excisée est bien présent (uncircumcised) :
Une note :
DEUXIEME EXEMPLE Dans notre livre, avec la deuxième traduction,
Dans la première traduction, l'expression non excisées disparaît ou - pire ?- est remplacée par impures. Quant à la désignation poétique du clitoris, la phrase devient complètement absurde avec une histoire de prière !...
Traduction anglaise des deux extraits, analogue à notre version :
L'introduction du roman en anglais est intéressante, avec un parallèle avec Au cur des ténèbres de Conrad. Elle évoque aussi le mouvement Nahda (renouveau ou renaissance) qui cherchait, à partir du milieu du XIXe siècle, à reconstruire la civilisation arabe après des siècles de déclin sous la domination de lEmpire ottoman et à faire face à la menace de limpérialisme européen, en soudant d'une part l'héritage arabo-islamique et d'autre part la civilisation européenne moderne, notamment ses réalisations scientifiques et technologiques : loin de concevoir les deux comme contradictoires ou incompatibles, les intellectuels de Nahda considéraient la seconde comme le prolongement naturel du premier, compte tenu des grands progrès des connaissances scientifiques et humanistes que les Arabes médiévaux civilisation avait produits et qui ont contribué dans une large mesure à la renaissance européenne des XVe et XVIe siècles. Dans l'article sur la traduction, j'ai été intéressée d'apprendre qu'il a fallu qu'en France évolue lorientalisme classique, resté cantonné dans létude de lOrient ancien, des langues orientales et de la religion et que lorganisation du savoir, au sein de lInstitut détudes islamiques de la Sorbonne, montrait qu'il était réfractaire à toute ouverture sur lOrient contemporain... => Retour à la page Saison de la migration vers le Nord |