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Nous avons lu pour le 9 février 2025
Compartiment pour dames de Anita NAIR

Découvrez ›NOS RÉACTIONS sur ce livre

  DES INFOS AUTOUR DU LIVRE
Le livre
Les livres d'Anita Nair

Les traductrices

Repères biographiques

Interviews

Écrivaines indiennes

• Le livre traduit, avec trois éditions, le livre en vo

Compartiment pour dames, Livre de poche, 2019
Picquier, 2002
Picquier poche, 2004
Compartiment pour dames, Albin Michel, 2016
Ladies Coupé,
Penguin
, 2001
Traduction de l'anglais (Inde) Marielle Morin
Quatrième de couverture :
Akhila est employée aux impôts. Éternelle célibataire, cette quadragénaire n'a jamais été libre de mener sa vie comme elle l'entendait : toujours la fille, la sœur, la tante de quelqu'un, celle qui fait vivre la famille. Sur un coup de tête, elle prend un aller simple pour Kanyakumari, une petite ville balnéaire du sud de l'Inde. Dans l'intimité du sleeping – le fameux "compartiment pour dames" – qu'elle partage avec cinq autres compagnes, Akhila ose poser la question qui la hante depuis longtemps : une femme a-t-elle vraiment besoin d'un homme pour être heureuse et épanouie ?
Compartiment pour dames est le best-seller qui a révélé Anita Nair. C’est un livre délicieux, chaleureux, qui nous ouvre le cœur de ces femmes indiennes dont nous sommes finalement proches, mais c’est aussi un texte engagé sur le sort qui leur est réservé aujourd’hui encore.

• 10 livres d'Anita Nair publiés en France

Elle a publié des nouvelles, de la poésie, des livres pour enfants.
Voici les livres traduits en français dans l'ordre de leur publication en Inde. Le premier traduit est celui que nous lisons.

- Le Chat karmique (Satyr of the Subway & Eleven Other Stories, 1997), nouvelles, trad. Marielle Morin, Picquier, 2005 ; rééd. Picquier poche, 2008. Épuisé.

- Un homme meilleur (The Better Man, 2000), trad. Marielle Morin, Picquier, 2003 ; rééd. Picquier poche, 2006. Épuisé. Son premier roman.

- Compartiment pour dames (Ladies Coupé, 2001), trad. Marielle Morin, Picquier, 2002 ; rééd. Picquier poche, 2004 ; rééd. Albin Michel, 2016 ; rééd. Le Livre de poche, 2019.

- Les Neuf Visages du cœur (Mistress, 2005), trad. Marielle Morin, Picquier, 2006 ; rééd. Picquier poche, 2010. Épuisé.

- L'Inconnue de Bangalore (Cut Like Wound, 2012), trad. Dominique Vitalyos, Albin Michel, 2013 ; rééd. Le Livre de poche, 2015
.

- Quand viennent les cyclones (Lessons in Forgetting, 2010), trad. Dominique Vitalyos, Albin Michel, 2010 ; rééd. Le Livre de poche, 2013.

- Dans les jardins du Malabar (Idris: Keeper of the Light, 2014), trad. Dominique Vitalyos, Albin Michel, 2016 ; rééd. Le Livre de poche, 2019.

- L'abécédaire des sentiments (Alphabet Soup for Lovers, 2015), trad. Dominique Vitalyos, Albin Michel, 2018.

- La mangeuse de guêpes (Eating Wasps, 2018), trad. Patricia Barbe-Girault, Albin Michel, 2020.

• Trois traductrices

La traductrice de Compartiment pour dames est la première à faire connaître Anita Nair en français.

- Marielle Morin, chez Picquier : 4 livres traduits en 2002, 2003, 2005, 2006. Présentation de par Marielle Morin =>ici ou =>là.

- Dominique Vitalyos, chez Albin Michel : 5 livres traduits en 2010, 2013, 2015, 2016, 2018. Présentation de Dominique Vitalyos =>ici et le détail de ses traductions sur son blog =>là.

- Patricia Barbe-Girault, chez Albin Michel : le dernier livre traduit en 2020. Présentation de Patricia Barbe-Girault =>ici ; a fait une thèse sur Salman Rushdie ; entretien sur la traduction =>là.

Quelques repères sur son parcours et sa vie à Bangladore

Formation, débuts professionnels

- Née au Kerala en 1966
- Licence en langue et littérature anglaises.
- Anita Nair voulait devenir journaliste. Elle commence par travailler pour Aside, un magazine de Madras, mais sans réussir à en vivre. Elle se marie à 20 ans avec son amour rencontré à 16 ans, d'une caste inférieure, et enchaîne alors les petites boulots comme la vente immobilière, est pigiste pour différents magazines, travaille dans la publicité.

À vingt-cinq ans, je me suis retrouvée sans emploi. L’agence de publicité pour laquelle je travaillais a été reprise par un autre groupe et tous les anciens employés se sont sentis si mal à l’aise que la plupart d’entre nous sommes partis… Mon oncle qui vit à New York m’a invitée à séjourner chez lui et je suis donc allée à Manhattan. La plupart des gens qui voyagent ont un objectif précis : ils sont soit des touristes, soit là pour affaires ou pour rendre visite à leur famille… Je ne faisais rien. Je me contentais de me promener dans Manhattan, puis de parcourir les États-Unis, à la recherche de Dieu sait quoi, mais quand je suis revenue en Inde, j’avais déjà décidé de ce que je voulais faire. Cela a pris un certain temps, mais vers vingt-sept ans, ces mois d’introspection m’ont rappelée à l’ordre et un jour, j’ai commencé à écrire. J’ai écrit les trois premiers paragraphes de Satyr of Subway et j’ai su avec certitude que j’avais enfin trouvé une voix. (Entretien avec Vishwanath Bitee, The Criterion, 2 mars 2015)

Carrière littéraire
- Premier livre publié en 1997 : un recueil de nouvelles inspirées pour partie de son séjour à New York, intitulé Satyr of the Subway (Le Chat karmique), qui lui permet de gagner une bourse pour compléter sa formation au Virginia Center for the Creative Arts en 1998 (scoop : ce centre américain a une antenne en France, une coquette résidence d'artistes "Le Moulin à nef" dans le Tarn-et-Garonne...)
- Deuxième livre et premier roman en 2000, Un homme meilleur, publié par Penguin India et premier livre d'un auteur indien à être publié par Picador USA.
- Le succès s'installe à partir de 2001 avec Compartiment pour dames.
- Elle crée un cours d'écriture, Anita's Attic, de 12 semaines (creative writing course & mentorship program). On peut la voir en 2012 en vidéo =>ici.

Vie personnelle
- Elle vit à Bangalore avec son fils et son mari, Suresh Parambath, qui travaille dans la publicité (les potins amoureux =>ici). La grand reporter Sylvie Kauffmann la rencontre à Bangalore quelques années après qu'a démarré son succès (Le Monde, 25 avril 2007). Extrait :

Pour parvenir jusqu'au refuge d'Anita Nair, il faut un certain sens de l'orientation, une bonne dose d'ingéniosité et pas mal de patience. Le lotissement fermé, quasiment introuvable, dans lequel est nichée sa jolie maison jaune est une "gated community" à l'indienne, à la périphérie de Bangalore : haut portail avec gardes, piscine, quelques grosses maisons séparées par des terrains en friche. À l'extérieur, des enfants jouent pieds nus devant de petites échoppes.
La romancière Anita Nair (
Un homme meilleur et Compartiment pour dames, éditions Philippe Picquier) est "tombée amoureuse de Bangalore" il y a dix-sept ans. Elle travaillait dans la publicité et arrivait de Chennai, anciennement Madras. Bangalore "était alors une petite ville charmante, nonchalante. Un peu paresseuse, les déjeuners duraient trois heures, les magasins fermaient pendant la sieste". Le charme a opéré pendant dix ans. "À Chennai, il y a la prohibition, tandis qu'à Bangalore, on va dans les pubs boire un verre, j'adorais ça." "Puis la circulation s'est intensifiée, les rues sont devenues bruyantes, on s'est mis à couper les arbres. C'est à ce moment-là qu'on a décidé de s'éloigner." "On" : son mari et son fils, 14 ans. "Depuis trois ou quatre ans, les gens arrivent de Mumbai, de Calcutta, l'argent du high-tech coule à flots, tout le monde est pressé. Fini les déjeuners languissants !" Elle s'est éloignée, mais elle est restée. Contrairement à Mumbai ou Delhi, villes de grande culture littéraire, Bangalore n'a "ni clubs ni cliques" : elle peut s'y isoler pour écrire.

- "Le Bangalore d'Anita Nair", Émilie Grangeray, Le Monde, 28 juin 2013 : "Originaire du Kerala (État du sud de l'Inde), la romancière habite aujourd'hui Bangalore, dans le Karnataka qu'elle nous fait visiter" :

Mahesh Shantaram pour M Le magazine du Monde (portfolio en ligne =>ici)

"C'est la ville des extrêmes. À un bout du spectre, on trouve la cité cosmopolite, moderne et dynamique, où les choses évoluent à toute vitesse."

"Le quartier de Shivaji Nagar n'aurait jamais pris pour moi la même importance si je ne m'étais pas lancée dans mon premier roman véritablement urbain, il y a trois ans de cela. Pour l'écrire, je comptais me laisser guider par la ville autant que par les personnages. J'ai donc passé quelques jours à arpenter inlassablement les petites rues de Shivaji Nagar. Mais ce sont mes balades nocturnes qui ont réellement provoqué l'étincelle créatrice. En soirée et jusque tard dans la nuit, le secteur du dépôt de bus grouille d'activité, les marchands ambulants installent leurs voiturettes au bord de la chaussée et l'énergie ambiante se réverbère dans les ruelles et les allées environnantes."

Interviews

- Intéressante interview en anglais dans une librairie, 10 ans après le succès de Compartiment pour dames (Ladies Coupé), NDTV (télévision indienne), 21 décembre 2011, 6 min.

- Entretien avec Céline Laflute pour Evene.fr, octobre 2006. Extrait :

Comment expliquez-vous que vous ne fassiez aucun cas du fait d'écrire en anglais, contrairement à Arundhati Roy par exemple ?
Je suis une sorte d'anomalie parce que j'écris en anglais sur l'Inde rurale et l'Inde des banlieues. Le plus souvent, les romans écrits en anglais en Inde sont tournés vers le monde urbain. J'essaie de me servir de l'idiome local autant que possible car, dans les situations que je crée, l'anglais n'est pas souvent parlé. J'aime aussi saisir l'Inde telle qu'elle est, l'Inde dans laquelle je vis, avec le moins de nostalgie et de compassion possibles. Heureusement, la chose semble acceptée, non seulement à l'étranger, mais aussi en Inde — l'épreuve de vérité incontournable ! J'ai réalisé que bien qu'une culture soit plutôt relative à une région, la condition humaine est universelle. C'est l'écriture de qualité qui triomphe et s'élève au-dessus des différences culturelles...

Lisez Amitav Ghosh, I. Allan Sealy, M. Mukundan, Kamala Das.

Autres écrivaines indiennes
Parmi les noms cités, Kamala Das est une femme, poétesse, non traduite.
Arundhati Roy, mentionnée dans la question, est devenue célèbre avec son
roman Le Dieu des Petits Riens. Elle est l'auteure aussi de Le Ministère du Bonheur Suprême. Elle est également militante et a écrit de nombreux essais.
La liste est ouverte, car Anita Nair est la première Indienne programmée.


Et voici NOS RÉACTIONS sur le livre



Les lectrices

Ce 9 février 2025, nous étions 12 à avoir découvert le livre :
• en direct (8) : Anne, Claire Bo, Felina, Laetitia, Marie-Yasmine, Nelly, Patricia, Sophie de Paris
• en visio (1) : Agnès
• par écrit (3) : Joëlle ; sans avoir fini le livre, livrant juste une impression : Anne, Flora.
Prises ailleurs (4) : Aurore, Claire Bi, Stéphanie, Sophie de Nice.

Des irréconciables

• Sont nettement négatives et ont bien failli descendre du train : Joëlle, Nelly.
• N'ont pas encore été conquises — on ne sait jamais s'il y avait un coup de théâtre — et sont prêtes à balancer dans la catégorie suivante : Anne, Flora, Marie-Yasmine.
• Sont définitivement mitigées, mais restent pacifistes : Agnès, Laetitia.
• Sont positives, voire plus, et font le voyage sans se plaindre des cahots :
Claire Bo, Felina, Patricia, Sophie
.

La succession des avis

Anne, malade et n'ayant pas terminé le livre
Pour l'instant mon impression est assez mitigée.

Flora, n'ayant pas non plus terminé le livre
J'ai lu environ la moitié du livre.
Je suis mitigée : il se laisse lire facilement, mais je ne suis pas captivée par les différentes histoires de ces femmes.
Je ne sais pas si ça vient du sujet, de la manière dont c'est écrit, mais je n'ai pas accroché.

Joëlle
Dans les années 70, il y avait un musicien indien très célèbre qui s'appelait Ravi Shankar (plus connu peut-être maintenant pour sa fille, Norah Jones). Il avait donné un concert à Pleyel et j'étais allée l'écouter. Le concert m'avait paru bien long et un peu ennuyeux. Ce livre m'y a refait penser.
Je l'ai lu jusqu'au bout, mais j'ai quand même dû me forcer.
Je n'ai pas une vocation rentrée d'ethnologue et donc, les mœurs étranges de ces personnes, leurs codes compliqués, ça ne me parle pas.
On est centré sur les relations homme/femme, le mariage, la famille, sujets qui ne m'intéressent pas non plus. On parle sans arrêt de nourriture (ce qui pourrait être sympa mais est juste obscur), de maquillage, de bijoux, de vêtements. C'est probablement tout ce à quoi ces pauvres femmes peuvent penser, mais de mon point de vue c'est tout de même très limité et ça ne fait pas un livre. Bien sûr je devrais m'apitoyer sur le sort de ces femmes, tout m'y invite. Mais à quoi bon ?
Le compartiment du train est un prétexte pas très bien exploité selon moi. À part un bref moment où il est fait allusion aux odeurs et aux détritus, quelques arrêts, on pourrait aussi bien être dans n'importe quelle pièce fermée.
Pourtant, le voyage est assez long : j'ai regardé le parcours sur Google Maps et j'ai vu qu'en train il fallait compter une vingtaine d'heures. Ce n'est donc pas qu'un voyage de nuit et je suis surprise que Akhila, qui voyage pour la première fois, n'ait seulement jamais regardé le paysage. Pourtant, vu la distance, il y aurait sûrement des changements intéressants. Mais ce n'est pas décrit.
En outre j'ai été submergée de termes exotiques, appelant une explication qu'on ne trouve qu'en fin de livre. C'est absolument mal pratique, il aurait vraiment fallu mettre des notes (de bas de page ou de fin de chapitre) mais pas ce glossaire décourageant.
Quand je lis — et ce n'est pas le pire exemple — "Tout le monde sait qu'un Dharmavaram est un succédané du Kanchipuram" je me demande vraiment ce que je dois en penser. Suis-je totalement inculte et stupide ? Ou est-ce qu'on se moque de moi ?
Pour finir sur une note positive, j'ai apprécié les nombreux changements de voix narrative, entre le narrateur omniscient, les monologues intérieurs, les récits à la première personne, les dialogues, ainsi que les retours en arrière : j'ai trouvé que c'était bien construit.
Et je n'oublie pas le sentiment de petite victoire personnelle que j'ai éprouvé à la lecture de l'ultime page. J'en étais venue à bout. C'est un plus !

Claire
Pour ton interrogation sur "Tout le monde sait qu’un Dharmavaram est un succédané du Kanchipuram", lis le paragraphe précédent : on lui offre un sari et elle dit que la crème des saris vient de Kanchipuram alors qu'on lui en refile un de Dharmavaram, donc même une nulle en saris comme moi peut comprendre...

Felina
J'ai beaucoup aimé le roman.
Je ne connaissais pas l'auteure.
Le livre m'a tout de suite happée par le sujet et par l'écriture, claire, fluide et rythmée.
Je connaissais un peu la condition féminine en Inde, que je savais vraiment pas idéale, mais ce texte m'a vraiment fait connaître dans le détail la situation d'infériorité de la femme.
J'ai apprécié la polyphonie des voix féminines, et comment chaque personnage représente une facette différente des femmes indiennes, avec ses propres aspirations, ses contraintes et ses combats.
Certaines histoires étaient plus développées que d'autres. Et j'ai été très intéressée par celle d'Akhila bien sûr, la protagoniste, mais aussi par celle de Prabha Devi et sa décision de reprendre le contrôle de sa vie en apprenant à nager et également par Margaret, qui se venge de son mari tyrannique en le gavant de choses à manger.
Je n'ai malheureusement découvert qu'à la fin du livre, le glossaire. Mais dès qu'il y avait un mot que je ne connaissais pas et qui m'empêchait la compréhension du texte, j'allais le chercher sur Internet. En particulier, j'ai cherché tous les noms de plats à manger, ce qui a permis un véritable voyage dans la cuisine indienne...
Les thèmes abordés, tels que la liberté, l'identité, la famille, l'amour, la tradition et la modernité, sont universels et invitent à la réflexion sur la place des femmes dans toutes les sociétés, pas seulement l'Indienne.

Agnès
J'ai pris le train avec ces dames et je suis allée jusqu'au bout du voyage, mais sans être transportée.
Ce roman m'a fait penser au film All We Imagine as Light qui met en scène des femmes indiennes et décrit leur condition, ainsi que leurs désirs de liberté.
Le sujet du livre m'a intéressée, mais j'ai trouvé le procédé trop répétitif — chaque femme raconte son histoire au personnage principal qui espère y puiser une réponse pour mener sa propre vie.
Le dernier témoignage est celui qui m'a le plus accrochée, sans aucun doute pour la relation amoureuse entre les deux miss anglaises et celle, sensuelle, entre la jeune femme et la riche épouse qui l'emploie. Mais c'est aussi l'histoire la plus affreuse et la plus violente (le viol, l'avortement non abouti, l'enfant abandonné).
Pour conclure, mon avis est mitigé.

Nelly
Tout d'abord je dirais que je n'ai jamais eu très envie d'aller en Inde. À la suite de témoignages de voyages, j'ai plutôt ressenti une crainte envers ce pays, et ce livre ne m'a pas donné plus envie de le découvrir. En parallèle de la lecture, j'ai vu aussi le film All We Imagine as Light où j'ai trouvé des longueurs, des choses qui me sont étrangères, et que je ne parviens pas à trouver intéressantes. Globalement j'ai trouvé le film ennuyeux.
En ce qui concerne Compartiment pour dames, après avoir lu le premier chapitre, j'étais consternée et me suis demandé si j'irais au bout de ce livre qui m'a semblé "nunuche", mais me suis quand même accrochée.
Je n'ai pas aimé les explications détaillées sur des sujets matériels sans intérêt. Il n'y a pas assez de profondeur, pas assez d'imagination.
Malgré tout, même si c'est inégal, il y a des moments où je me suis laissé faire.
J'ai eu du mal à retenir les noms compliqués des personnages, qui sont cependant bien dépeints. Aucun homme n'est sympathique.

(Marie-Yasmine et Claire citent alors le mari de Janaki, Prabhakar, patient et attentionné dans le mariage arrangé.)

J'ai réussi à sourire, à rire, avec la scène de l'œuf, même si ce n'est sans doute pas le but recherché.
J'ai aussi eu des difficultés à retenir les histoires ; à part Akhila qui se raconte à travers le récit des autres femmes, il n'y a pas de fil conducteur. C'est un livre triste, qui manque de peps et il y a des considérations très convenues dans la manière de raconter. Je n'y ai pas vu d'humour. Même l'histoire d'amour d'Akhila est accablante, tant elle est atténuée par les principes et les règles à respecter.
Le style est parfois ampoulé, par exemple dans une scène de sensualité : "Avec mes doigts, ma bouche, avec mes yeux et mon âme, j'irriguai ce corps desséché. Je fis pleuvoir une averse de plaisir sensuel qu'elle recueillit avec l'avidité de celle qui est condamnée à errer pour toujours dans le désert et a perdu tout espoir de jamais découvrir une oasis."
J'ai eu un sursaut d'intérêt au chapitre 10 avec la relation entre deux femmes, mais c'est décevant.
J'ai dû faire encore un effort pour terminer.

Laetitia
J'ai une connaissance plutôt limitée de la littérature indienne.
Je me souviens avoir lu — et apprécié — en 2005 Babyji ; j'avais alors rencontré l'auteure, Abha Dawesar.

Mon avis sur le livre Compartiment pour dames est mitigé : le voyage m'a paru quelquefois bien long !
J'ai tout d'abord eu des craintes avec le premier chapitre : des phrases un peu "clichés", un style pas forcément très recherché — voire kitsch.
Et cette problématique centrale : une femme a-t-elle besoin d'un homme pour vivre et s'épanouir ?
D'autres réserves : j'ai trouvé le procédé du "cheminement" à la fois du train et des pensées pas très subtil et trop systématique ; les chapitre sont inégaux et plus ou moins intéressants ; le glossaire : utile, mais des notes en bas de page auraient également été bienvenues en complément.

Quelques points positifs :
- la dénonciation de la condition des femmes et de la domination masculine ; le poids de la religion, des traditions — les règles de la caste brahmane
- le dépaysement — à travers notamment les spécialités culinaires !
- le roman donne une place conséquente et la parole aux femmes
- les 6 points de vue : le passage à des focalisations différentes "casse" la monotonie, laquelle peut quelquefois s'installer
- 6 femmes, 6 personnalités différentes ; celles qui m'ont le plus intéressée sont Margareth et la dernière femme, Marikolanthu
- l'humour : la comparaison des personnes à des éléments chimiques (chapitre 6).

Sophie
Je suis entrée facilement dans le livre. Il y avait beaucoup d'ingrédients qui me donnaient envie : l'Inde (qui me fascine et me fait peur à la fois), un récit qui se passe dans un train de nuit (j'adore), des histoires de femmes.
Je me suis sentie en connexion avec Akhila dès les premières pages. J'ai été touchée par cette femme indépendante, qui s'est sacrifiée pendant des années au profit de sa famille. Sans mari ni enfants à 45 ans. Rêvant d'évasion et d'espace. Avide de vie et d'expérience. Brûlant de quitter sa carapace et d'aller à la rencontre des autres. Et qui a peut-être laissé passer la chance en quittant son jeune amant il y a des années.
J'ai lu le livre avec plaisir, certaines des histoires plus que d'autres, en particulier celles de Margaret et de Marikolanthu. J'ai aimé ces deux personnages à la psychologie complexe et évolutive. Globalement, j'ai apprécié la façon dont l'autrice plonge dans l'intériorité des personnages et leurs différentes facettes.

Quelques regrets, cependant, qui n'entachent pas mon ressenti positif.
J'espérais me dépayser avec cette lecture, mais il y a assez peu de scènes descriptives de l'Inde. J'aurais aimé aussi plus de scènes dans le train, le compartiment. Partager avec ces femmes la sensation du déplacement, du temps et de l'espace. Je pensais faire un voyage au sens géographique et finalement le voyage s'est avéré surtout psychologique.
Je me demande si la société décrite dans le livre reflète l'Inde d'aujourd'hui. J'imagine un pays où la pauvreté est prédominante, où la vie est dure, violente pour les femmes. Le monde décrit par Anita Nair est globalement préservé, un peu aseptisé.
J'aurais aimé que Akhila continue son chemin au-delà des normes, qu'elle ne reste pas dans le schéma hétérosexuel qui la ramène vers Harri. Que la réponse à la question "une femme a-t-elle vraiment besoin d'un homme pour être heureuse et épanouie" soit "pas forcément d'un homme". Ce côté "mainstream" et hétéronormé du livre m'a retenue tout au long de la lecture.

Patricia
J'ai bien aimé lire ce livre. J'ai trouvé l'écriture fluide et facile. La construction m'a plu. Même s'il y a parfois des lourdeurs, je me suis laissé emporter par les histoires de chacune de ces femmes. Je ne me suis pas ennuyée car les différentes histoires ne sont ni trop longues, ni trop courtes. Parfois j'ai mélangé les noms de certains personnages, mais sans gravité par rapport à la compréhension du livre.
D'ailleurs, je verrais bien une adaptation dans un film sous forme de huis clos dans un train d'où l'on ne sort que par des flash-back.
Le livre décrit d'une part le mode de vie des Indiens. D'abord l'hygiène : ils passent leur temps à se laver corps, dents, visage, mains ; et après, les toilettes. L'alimentation dont il est beaucoup question, sujet qui m'intéresse, est végétalienne : aucun produit animal, même pas les vers à soie. En revanche elle parle également souvent de compléments alimentaires et de manger des œufs que quand on est malade. Il ne faut pas prendre le soleil pour ne pas bronzer. Et des choses étranges comme dessiner le kolam le plus beau possible pour montrer que notre foyer est harmonieux.
D'autre part, et c'est le côté le plus intéressant, de très nombreux thèmes sont abordés, comme la corruption ("pots de vin" aux impôts), la religion, les mariages arrangés, l'inceste, le viol, l'avortement, le devenir des femmes veuves, l'homosexualité, les règles sociales, la prostitution, etc. ; il ne faut pas remettre en cause l'ordre social, malgré les aberrations. Il s'agit de bourgeoises, ayant fait pour certaines des études universitaires et qui sont d'ailleurs moins enclines à apprendre à être une bonne épouse et une bonne mère : c'est le cas d'Akhila, qui est quand même à la base une rebelle (n'aime pas les kolams, préfère la culture occidentale, mange des œufs, etc.). Mais aussi brillantes soient-elles, elles finissent toujours sous la coupe de quelqu'un et abandonnent leurs vrais désirs.
Le sujet de la différence de classes et du rapport maître/employé est abordé également avec la dernière femme, qui s'était isolée par rapport aux autres au début. Elle paraissait avoir beaucoup vécu, plus sûre d'elle. Cela s'explique par le fait qu'en tant que pauvre et employée de maison, elle a subi des choses encore plus horribles, en comparaison avec les femmes du wagon.
En Inde, comme partout avant, la femme appartient, dans l'ordre, à son père, puis à son mari, puis lorsqu'ils ne sont plus là, à la mère puis, si la mère n'est plus là, à la sœur ou aux frères, ou à son fils ou fille parfois en vieillissant, etc. Je remarque que ça ne vient pas à l'esprit de ces femmes de s'émanciper, peut-être par peur de la stigmatisation sociale. Il leur faut une amie qu'elles rencontrent par hasard pour leur faire comprendre que c'est possible pour une femme d'être seule, ou bien il faut un voyage dans le train et rencontrer d'autres femmes avec qui parler.
On voit aussi que même si les couples sont bien ensemble, ça n'est pas aussi bien que ça : migraines, dépressions, cachets pour dormir, etc.
On voit que chaque femme a une histoire et se confie volontiers sans honte aux autres. À mon avis, ça a un côté libérateur, comme en psychanalyse. Elles savent qu'elles ne se reverront jamais.
Concernant le thème du voyage pour se retrouver, réfléchir ou faire un bilan de sa vie, c'est un thème récurrent dans la littérature, mais aussi dans chacune de nos vies. Ça m'est aussi arrivé de partir seule à l'étranger (en l'occurrence au Portugal) suite à une séparation. À qui cela n'est pas arrivé ?...
D'ailleurs cela me fait penser au livre précédemment lu à Lirelles Les grandes aventurières, où on voit Isabella Bird, écossaise, en 1831, à 40 ans, souffreteuse et vieille fille, à qui on prescrit un voyage, retrouver la vie.
Je me suis souvenue aussi de deux autres livres sur le même thème, lus il y a quelque temps :
Deviens celle que tu es de Hedwig Dohm, grand-mère de la femme de Thomas Mann, qui raconte le réveil d'une femme vieillissante qui cherche à retrouver son indépendance et décide de mettre tout son argent dans les voyages contre l'avis de son fils
Un matin je suis partie d'une journaliste américaine, Alice Steinbach, qui tout à coup cherche à faire un point sur sa vie qui ne lui convient plus. Elle décide de faire un grand voyage en train dans toute l'Europe, Paris, Londres, Rome, etc. J'ai beaucoup aimé ce livre.
Conclusion, le voyage et les rencontres faites lors de voyages sont souvent thérapeutiques.
J'ai pensé aussi à un livre et un film indiens évoquant des amours entre femmes :
Babaji (2006), de la romancière Abha Dawesar
Fire (1996), un film de Deepa Mehta : j'ai adoré !

Marie-Yasmine qui a lu en VO Ladies Coupé et qui a, à son habitude, concocté quelque douceur en lien avec le livre, livre où d'ailleurs la cuisine a une grande place — cette fois des naans : sa recette=>ici.
Mon contact avec la littérature indienne jusqu'à présent se limitait à une série de romans historiques et à pas mal de cuisine et de yoga. J'avais hâte de me plonger dans le livre et d'en découvrir plus, mais sur ce point j'ai été un peu déçue.
Le thème du train et du voyage est malheureusement un prétexte peu développé, mais le style est agréable avec des tournures très visuelles et de jolies métaphores. Il y a cependant pas mal de répétitions.
Le rythme est très inégal et je m'y suis perdue. J'étais parfois suspendue aux histoires des femmes rencontrées par l'héroïne, regrettant qu'elles passent si vite et un peu frustrée par le survol rapide de toute une vie ; mais le fil rouge principal sur l'héroïne m'est souvent tombé des mains. Je n'ai pas réussi à finir le livre à cause de ces longs moments d'ennui.

Je garde toutefois quelques pépites de cette lecture :
• Le passage où l'héroïne transgresse les règles de sa caste en croquant dans des œufs. J'aime beaucoup le thème des tabous alimentaires et je trouve que ce passage sert très bien l'histoire d'émancipation de l'héroïne.
• Le passage très émouvant où la jeune fille maquille sa grand-mère mourante parce qu'elle sait que c'est ce qu'elle aurait voulu. Ici aussi cette histoire montre une magnifique transgression des codes oppressants et un bel acte d'amour filial.
• Toute l'histoire de la professeure qui reprend le contrôle sur sa vie en manipulant son mari toxique grâce à la nourriture. Je voudrais un livre entier sur cette histoire où une femme complètement à la merci de son mari reprend son agentivité avec les maigres moyens à sa disposition.

Au final je ne suis pas très convaincue par cette lecture. Je ne comptais pas reprendre ma lecture, mais les révélations des autres avis de Lirelles m'ont cependant peut-être convaincue de poursuivre !

Claire Bo
Je rejoins Felina et Patricia, tout en ayant des réserves qu'alimentent les avis négatifs, car je suis influençable...
Mes impressions positives viennent du fait que j'ai été continûment intéressée par l'aspect documentaire sur l'Inde (l'histoire de l'œuf m'a paru sidérante) ; le poids de la famille est effrayant. Les histoires, édifiantes certes, m'ont paru plutôt palpitantes. L'enjeu du livre — l'émancipation de chacune — ne m'a pas du tout laissée indifférente. L'artifice — le voyage donnant lieu au récit des parcours — a marché pour moi, tel un jeu. J'ai trouvé fluide le passage d'une femme, puis une autre, au personnage principal, et la construction bien fichue sur la durée, tel un meccano. La midinette toujours présente en moi a été satisfaite à plusieurs reprises.
Certes, il ne faut pas se lasser, car le programme est annoncé par l'artifice déployé, et je pense que c'est l'une des raisons qui peut causer de la déception. Il est difficile de s'attacher aux personnages, mais cela ne m'a pas paru grave. Le risque principal pour moi est l'aspect démonstratif : c'est un peu lourd quant aux révélations qui adviennent, avec un petit côté "développement personnel" : comment se trouver, etc.
Le dernier récit me semble le moins vraisemblable, par une narration à la première personne trop chiadée pour cette femme décalée socialement, et de plus avec un récit comportant toutes les misères du monde, comme si l'auteure y fourguait tout ce qu'elle n'avait pu placer.
Quelle que soit la qualité du film, j'ai été très contente d'avoir vu en parallèle le film All We Imagine as Light qui m'a donné des images de ces femmes, avec un sujet similaire, réalisé par une femme indienne en plus. J'étais plongée dans leur univers, je les voyais. Il y a même un compartiment pour women only...
Je serais curieuse de connaître concrètement les réactions au livre quand il est sorti en 2001 : ce fut un grand succès, d'accord, mais qu'est-ce qui se dit alors ? Le livre appelle à une émancipation qui semble peu évidente dans cette société sclérosée sur bien des points.
Autant je comprends que le rythme déçoive, autant je m'étonne qu'on ne trouve pas de fil directeur : un personnage principal (qui ne s'intéresse pas du tout aux paysages qu'elle traverse mais à ces femmes qui alimentent sa réflexion) et la question qui la mène.
Le côté kitch désigné par Laetitia ou l'aspect ampoulé par Nelly me font penser au cinéma Bollywood et ses aspects rose bonbon (je connais mal, mais j'avais apprécié l'expo au Musée du quai Branly).
D'Indiens, je ne connais pas la saga lue par Marie-Yasmine, ni Babyji lu par Laetitia et Patricia. J'
ai lu quelques livres : de Salman Rushdie Haroun et la mer des histoires, de Rohinton Mistry L'Équilibre du monde (grandiose !), de Naipaul (prix Nobel) À la courbe du fleuve et L'énigme de l'arrivée ; et aussi Ami de ma jeunesse et Une étrange et sublime adresse d'Amit Chaudhuri, découvert par la traductrice Simone Manceau (qui a traduit tous ses livres), rencontrée au club de lecture de l'ancienne librairie Violette and co... Mais je n'ai lu hélas qu'une seule autrice : Arundhati Roy pour Le Dieu des Petits Riens.
Si l'Inde par certains côtés fascine — je suis fascinée —
, une étrangeté parfois choquante tient aussi à distance ; ainsi, je me souviens en Inde des inscriptions dans des temples pourtant très fréquentés par des touristes, du type : "Women who have their period are prohibited entering the temple" — vraiment choquant :
Ne parlons pas des viols collectifs en Inde, répétés. Face à un univers qui peut être repoussant, je trouve que cela vaut la peine de sortir de sa "zone de confort" pour découvrir, à travers le livre d'une romancière, les façons dont les femmes peuvent un peu s'en sortir. Bien entendu, il faut que la narration tienne sa lectrice, et comme pour tout roman, ce n'est pas gagné d'entrée de jeu.
Je trouve la fin du livre ouverte et pas du tout triste, car l'héroïne s'est dégagée d'une forme d'emprisonnement et choisit sa vie amoureuse et sexuelle.
Enfin, qui d'entre nous ne serait pas sensible à cette question qui court tout du long du livre : peut-on vivre sans homme ?...


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