Le 7 février 2021, nous avons discuté à distance du livre :

Le génie lesbien d'Alice Coffin
Grasset, 2020, 240 p.

Présentation du livre
En apéritif érotique
Liens liés au livre : lesbiennes activistes, groupes, livres, spectacles...
Réactions dans la presse : articles, radio, télé
Et les réactions de notre groupe LIRelles sur le livre

 

 

PRÉSENTATION DU LIVRE

Quatrième de couverture :

"Enfant, je m’imaginais en garçon. J’ai depuis réalisé un rêve bien plus grand : je suis lesbienne. Faute de modèles auxquels m’identifier, il m’a fallu beaucoup de temps pour le comprendre. Puis j’ai découvert une histoire, une culture que j’ai embrassées et dans lesquelles j’ai trouvé la force de bouleverser mon quotidien, et le monde."

 
 

Journaliste dans un quotidien pendant plusieurs années, la parole d’Alice Coffin, féministe, lesbienne, militante n’a jamais pu se faire entendre, comme le veut la sacrosainte neutralité de la profession. Pourtant, nous dit-elle, celle-ci n’existe pas.

Dans cet essai très personnel, Alice Coffin raconte et tente de comprendre pourquoi, soixante-dix ans après la publication du Deuxième sexe, et malgré toutes les révolutions qui l’ont précédé et suivi, le constat énoncé par Simone de Beauvoir, "le neutre, c’est l’homme", est toujours d’actualité. Elle y évoque son activisme au sein du groupe féministe La Barbe, qui vise à "dénoncer le monopole du pouvoir, du prestige et de l’argent par quelques milliers d’hommes blancs." Elle revient sur l’extension de la PMA pour toutes, sur la libération de la parole des femmes après #Metoo ; interroge aussi la difficulté de "sortir du placard". Et sans jamais dissocier l’intime du politique, nous permet de mieux comprendre ce qu’être lesbienne aujourd’hui veut dire, en France et dans le monde.

Combattif et joyeux, Le génie lesbien est un livre sans concession, qui ne manquera pas de susciter le débat.

   
 

EN APÉRITIF ÉROTIQUE : "Une de mes séquences de télévision préférée au monde"

"Un échange entre la chanteuse Catherine Lara et la journaliste Denise Glaser pendant l'émission Discorama en 1962. On y voit, en noir et blanc, Catherine Lara, dix-neuf ans à l'époque, et Denise Glaser, assises face à face. La tension amoureuse, érotique, lesbienne en fait, emporte tout. Denise Glaser pommade le bras de sa chaise, se caresse le genou, sourit à n'en plus finir. Catherine Lara prend sa guitare, parle, troublée, joue quelques notes d'une mélodie magique, et devise sur le refrain sans terminer ses phrases. J'ignore comment on peut ne pas avoir envie d'être lesbienne après ces images-là. Elles me transportent de jubilation, d'amour, de volupté."

Alice Coffin, Le génie lesbien, p. 181

Fascinante dans sa façon de mener des entretiens intimes, Denise Glaser anima l'émission culturelle Discorama de 1959 à 1975. Voici le document télévisuel "historique" avec Catherine Lara, commenté par Alice Coffin... : https://www.youtube.com/watch?v=rfLsabGTJ04

 
   
 

LIENS recensés par Agnès concernant l'activisme lesbien :
personnalités lesbiennes militantes, groupes, associations, mouvements, sites, livres, articles, spectacles

Personnalités lesbiennes militantes
Voici certains des noms qu'elle cite dans son livre :

Un nom qui n'est pas cité :

  • Caroline Fourest, journaliste, essayiste et réalisatrice française, militante féministe, pour les droits des homosexuel.les et la laïcité, a présidé le Centre gay et lesbien de Paris pendant le débat sur le PaCS, auteure d'un livre, Inna, sur la leader des Femen, l'Ukrainienne Inna Shevchenko, publie et réalise avec sa compagne Fiammetta Venner (voir l'article sur leur couple).

Groupes, associations, mouvements

Blogs, sites Livres Articles, textes Spectacles
 
   
 

UNE SÉLECTION DE RÉACTIONS DANS LA PRESSE concernant Le génie lesbien :
articles, interviews presse écrite, radio, télé

Articles

Des titres d'abord, orientant la lecture, avec le début de l'article :

Des articles :

Interviews presse écrite

Radio

Télé
 
   
 

Et les réactions de notre groupe LIRelles sur le livre :
les éloges, des questions, des réserves

AVANT LA LECTURE

  • Certaines avaient eu vent des polémiques suscitées :
    - par Alice Coffin, élue au Conseil de Paris, en rapport avec le soutien de Christophe Girard, adjoint à la maire de Paris, à Gabriel Matzneff, dont nous avions fait la connaissance (odieuse) en lisant le livre de Vanessa Springora (nos avis ICI)
    - ou/et par le livre d'Alice Coffin à travers de nombreux médias (voir ci-dessus).
  • C'est donc avec un a priori parfois favorable et le plus souvent pas très positif - voire une réticence - que certaines ont abordé le livre. D''autres, au contraire, étaient d'autant plus motivées qu'elles souhaitaient se faire leur propre avis, sans se laisser influencer par les réactions vives de certains médias. Ou prévoyaient d'essayer de distinguer le livre et la femme, quand la voix de celle-ci ou sa façon de parler faisaient d'emblée obstacle... Bref, tout cela peut conduire d'emblée à un soulagement, comme pour Flora qui est en cours de lecture : "Le livre est moins excessif que je le pensais - pour le moment - sur l'avis de l'autrice sur les hommes".
  • D'autres ne savaient rien, n'avaient rien vu, et découvraient donc, vierges..., le livre d'Alice Coffin.

APRÈS LA LECTURE

Les éloges

  • La satisfaction est générale, le contentement partagé d'avoir lu ce livre et de l'avoir lu "à" Lirelles. Après l'avoir lu, nous sommes convaincues qu'il ne fallait pas que notre groupe le manque. C'est un livre qui compte pour nous et qui compte tout court : un livre important. C'est unanime, même si des variations existent dans la réception positive du livre, même si des réserves se sont exprimées, au point que Sophie restera "partagée", Stéphanie "mitigée", quand d'autres adhèrent bien davantage (Mathilde à 90%), voire "passent l'éponge" sur certains aspects (Nathalie) : l'intérêt effectif du livre l''emporte.
  • Plusieurs ont fait état avec enthousiasme de l'effet suivant du livre : "ça fait du bien !" ; le livre peut même avoir un caractère d'"exutoire" (pour Agnès) ou avoir un rôle "galvanisant" (pour Lucie), qui change des livres où règne la "passivité" (Joëlle). Il a été ressenti comme un "coup de vent frais", voire un "ouragan bienvenu" pour Marion.
  • Un mot est revenu : le mot courage, accompagné de l'admiration qu'il suscite pour Alice Coffin. Courage sur divers plans : dans les actions militantes, pour faire le livre et pour assumer les risques voire le danger (Alice Coffin a une protection policière) dus à la haine qu'elle suscite. Nelly a même évoqué son "envergure" pour essuyer les critiques. Son énergie a été soulignée.
  • La densité d'informations a été appréciée. Marion s'exclame : "il était temps que les lesbiennes aient quelque chose d'autre à se mettre sous la dent que la théorie queer". C'est un livre documenté : un "gros travail de synthèse" souligne Laetitia. S'il est vrai que nombre de références demandent des recherches pour bien voir de quoi il s'agit, cela tombe bien, Agnès a fait ce travail pour nous (ci-dessus). Certaines actions étaient connues par les unes (la Barbe), par d'autres pas. Le métier de "journaliste medias" a été découvert par toutes.
  • L'analyse a été appréciée concernant l'invisibilité, le mot même de lesbienne, la prétendue ouverture du monde culturel, le rôle des modèles ou de leur absence (celle qui amène Alice Coffin à remplacer les images des modèles construits par les hommes par d'autres et donc à "éliminer" celles-ci...)
  • Ce livre informe, mais aussi favorise la prise de conscience. Il m'a "recadrée", dit Nelly.
  • Des prétendus excès montés en épingle dans les médias (éliminer les hommes) se démontent à la lecture. Plusieurs ont trouvé au contraire que le livre était bien plus subtil, tout en ayant un caractère coup de poing, correspondant au tableau sur certains points insupportable qui est dénoncé. Un sentiment d'injustice a parfois été ressenti face au contraste polémique/lecture elle-même.
  • La lecture est facile, grâce à l'écriture simple, "fluide" pour Patricia, directe (comme si on était dans un face à face pour Agnès), ce qui est appréciable pour un "essai" ; le mélange de registres de langue contribue à la vulgarisation de son propos. Le livre est de plus pas trop long... Celles qui ont lu Paul B. Preciado Je suis un monstre : rapport pour une académie de psychanalystes distinguent bien la difficulté de l'essai "universitaire", plus "prise de tête" avec le livre d'accès plus aisé que nous avons lu. Lucie a fait un rapprochement avec La tyrannie de la réalité de Mona Chollet. Le texte de Yuri sur le Pulp a été remarqué et apprécié, avec une écriture tranchant sur le reste.
  • Le livre est bien construit. Le fait de mêler des aspects personnels au service de l'analyse a été très apprécié : ce mélange politique/intime est bien agencé. L'évocation tendre des deux compagnes a même pu toucher. Le parallèle avec l'alcoolisme de l'autrice est judicieux.
  • L'humour a été souligné.

Des questions

  • "Je ne parviens pas à saisir complètement sa redéfinition des lesbiennes, notamment la scission qu'elle réalise entre l'orientation sexuelle ou affective et la 'définition' du lesbianisme, constate Ingrid. Si certaines l'ont comprise, je suis preneuse".
  • "Je regrette qu'elle y soit allée si fort alors que je suis d'accord" dit Patricia. Nathalie et Claire se demandent si sa façon de faire, c'est-à-dire sa façon de dire, ne la dessert pas, si elle ne prête pas le flanc à des critiques qui se retournent contre elle, si elle ne tend pas des verges pour se faire battre. Militer c'est être stratège, sa stratégie est-elle la bonne ?
  • La conclusion ne rend-elle pas son combat un peu vain ? "Je n'ai pas de solution mais je n'ai pas d'hésitation" : elle fonce, mais où ? (Joëlle rappelle que les activistes savent qu'on ne gagnera jamais, mais qu'il faut continuer...)
  • "Être lesbienne fait de moi une meilleure journaliste". On peut s'interroger sur son affirmation : une journaliste lesbienne sera-t-elle vraiment plus compétente en tant que journaliste ?
  • Pourquoi a-t-elle passé sous silence le fait qu'elle a rejoint sa mère à la Barbe (c'est anecdotique, mais elle évoque bien son père formidable), sa démarche d'entrée en politique (comment se plie-t-elle à la discipline de parti ?) et le nom de Caroline Fourest, une journaliste militante lesbienne importante : on peut se demander quel désaccord les oppose (voir post critique).
  • Si moi, lesbienne, par PMA légalisée, je donne vie à un fils, comment je fais si je suis les principes d'Alice Coffin ? se demande Stéphanie.

Des réserves

  • Si certaines ont une adhésion quasi totale au livre, un point achoppe : même si nous avons envie de privilégier les créatrices ou le faisons effectivement, nous ne suivrons pas Alice Coffin dans son refus - du moins momentané - de fréquenter les œuvres des hommes. Finalement c'est l'excès dont on accuse le livre que plusieurs réserves illustrent...
  • Trop de références non explicitées donnent une impression d'"entre-soi", regrettent certaines. De même, le livre a semblé à plus d'une trop américano-centré. Les optimistes attendent qu'Alice Coffin fasse le même travail de mise en valeur pour la France. Une vue américano-centrée et de plus trop idéalisée par rapport aux USA : Mathilde souligne qu'Alice Coffin dans son enquête aux USA a été reçue par une certaine élite et que dans l'Amérique trumpienne, la vie des lesbiennes n'est pas aussi rose qu'elle le laisse entendre - une idéalisation de l'Amérique que regrette aussi Aurore.
  • Même si elle encense son père, la généralisation à propos de la violence des hommes se combine à l'absence de mention de la violence qui existe aussi au sein de couples de lesbiennes. La formule "génie lesbien" peut séduire ou "porter", mais il correspond aussi à une forme d'idéalisation de la lesbienne ; or la lesbienne peut aussi être pire que certains hommes. C'est donc une pensée trop binaire qu'on peut lui reprocher.
  • A propos des personnalités qui ont fait leur coming out et ne souhaitent pas pour autant être des porte-drapeaux, plusieurs d'entre nous ne suivent pas Alice Coffin quand elle dit : "cette absence de responsabilité m'a toujours révoltée" (p. 108) ; Marie-Claire y voit là de l' intolérance.
  • Si l'aspect plaisant de la lecture était présent, à la longue la lecture a été éprouvante pour Sophie, fatigante pour Claire, le ton acerbe y est pour quelque chose pour la première et la pugnacité se fait épuisante pour la seconde.
  • Des raccourcis parfois pourraient relever d'une forme de mauvaise foi, si ce n'est de malhonnêteté, signale Laetitia. Face aux questions parfois pertinentes des journalistes, l'auteure du livre a eu quelquefois du mal à se défendre. "Sa théorisation du génie lesbien ne m'a pas convaincue", regrette Ingrid. Elle décortique l'invisibilité mais elle passe sous silence, déplore Aurore, les couples lesbiens qui favorisent la visibilité (séries par exemple) ou encore - témoignent les anciennes - le rôle irremplaçable qu'a eu Lesbia Magazine de 1982 à 2012 et qui n'est pas cité. Sur ces points-là, elle est donc moins convaincante.

Plusieurs d'entre nous n'auraient pas lu livre si nous ne l'avions programmé :
nous nous félicitons nous-mêmes pour notre choix....
Merci LIRelles et merci Alice Coffin pour ces deux heures passées avec vous.

 
 
 
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