NOS RÉACTIONS à la lecture de
La soupe aux herbes sauvages

d'Émilie CARLES (1900-1979)
publié en 1977, Pocket, 352 p.

Voici un aperçu des réactions d'Agnès, Claire, Ingrid, Joëlle, Laetitia, Muriel, Nelly, Patricia, Sandra, Sophie
lors de notre première semaine littéraire du 10 au 17 juillet 2021

   
 

Ce qui a été apprécié lors de notre tour de table
- Le livre lu avant de se retrouver donnait un avant-goût de ce que nous allions voir : c'était donc une bonne idée pour commencer notre séjour alpin ; nous étions en effet à Vars à moins de 60 km des lieux où se déroulent la plupart des événements vécus par Émilie Carles.
- Sa vie traverse le siècle : elle naît en 1900 et meurt en 1979. Alors qu'elle a vécu une vie rappelant le Moyen Âge, elle a une distance permettant l'analyse ; elle est vraiment entre deux mondes puisque sa vie se termine par des manifs très "gilets jaunes" où elle a un rôle moteur.
- C'est une femme moderne, ouverte, engagée, féministe, anticolonialiste, pacifiste, antiraciste ; ses valeurs relatives à l'éducation sont avant-gardistes et très actuelles ; elle est extrêmement courageuse, a une énergie impressionnante, un amour de la vie sans faille, une compréhension des autres qui inspirent le respect.
- On pense à Annie Ernaux, du fait de son origine et son changement de "classe", et sa traversée rappelle Les années lu dans le groupe. On pense aussi à une autre auteure que nous avons lue : Marguerite Audoux, qui fut bergère et fut aussi célèbre en son temps avec le Femina en 1910.
- Plusieurs d'entre nous se rappellent leur famille vivant dans un milieu paysan.
- La construction est intéressante avec ses deux parties : c'est un témoignage pour les unes, un essai pour les autres, en tout cas un récit plein de talent, avec d'innombrables histoires dans le récit ("dès qu'elle raconte une anecdote, on est happée"), aux effets de réel indéniables. Nombreux sont les moments insoutenables de dureté de la vie, mais aussi de méchanceté des gens : ces drames donnent une dramaturgie au livre.
- Son couple, très beau, émouvant, ajoute une touche de romantisme qui contraste avec le tragique des vies.
- On constate la façon à l'époque dont les corps sont traités, oubliés, de même que les sentiments.
- L'école a une véritable mission sociale dont le rôle est parfois rejeté par les paysans ("alors, vous me les donnez", implore Émilie).
- L'évocation de la guerre - des guerres - rend bien compte des logiques, des horreurs, des turpitudes.
- Les pages sur la lecture sont étonnantes : ses vertus, mais aussi des références qu'on n'attend pas (Le voyage au bout de la nuit de Céline).
- Un livre qui a déclenché notre enthousiasme : un livre à lire, à relire, à faire lire...., en tête des 4 livres lus dans la semaine pour plusieurs d'entre nous.

Avis rédigés par les lointaines

Ingrid
Je regrette infiniment de ne pas pouvoir être avec vous cette semaine. Suite à un imprévu professionnel, j'ai été obligée d'annuler.
Concernant notre premier livre, Une soupe aux herbes sauvages, j'ai rencontré quelques difficultés à m'atteler à la lecture. Le thème en lui-même ne m'intéressait pas énormément. Cependant, j'ai vite été prise dans l'histoire et je n'ai pas vu le temps passer. J'ai beaucoup apprécié le style d'écriture et comprends l'engouement autour de ce livre.
J'ai hâte de lire les suivants.

Muriel
Je l'ai trouvé extrêmement intéressant, bien qu'il s'agisse plutôt d'un essai que d'un roman.
La vie des paysans alpins du début du siècle fait froid dans le dos, tant elle est dure.
Émilie Carles (et la personne qui a écrit le livre avec elle) sait toujours parfaitement choisir les épisodes qui montrent les difficultés de cette époque.
Et quel courage de sa part : école à 7 km de chez elle, jalousie des sœurs, travail double pour se faire accepter dans la famille... On reste baba devant tout ça !
Et que de décès ! La mère foudroyée... La sœur avec l'accouchement, le frère mort de faim à la guerre en 18, sa petite fille tuée sur la route...
Par ailleurs, on ne peut qu'admirer son mari, le pacifiste, qui a compris avant tout le monde que les guerres étaient au service des grandes puissances économiques...
Elle ne ménage pas non plus les paysans et leurs roueries...
D'ailleurs il m'a semblé en allant à Val-des-Prés, qu'on ne l'aimait pas beaucoup dans le quartier... J'ai rencontré un gars qui l'avait connue et qui avait la larme à l'œil en parlant d'elle...
Ce livre est un témoignage exceptionnel sur la vie alpine au début du siècle et sur la vie d'E. Carles en particulier.
Sans être littéraire, il est passionnant par ce qu'il raconte.
J'ouvre en grand, comme on dirait à Voix au Chapitre...