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Ont été
très très critiques vis-à-vis du livre :
Joëlle, Muriel, Sophie
Dans le meilleur des cas, seules la première nouvelle
sur les cousines et la postface sont à sauver chez les critiques,
qui disent... :
- J'ai trouvé peu d'intérêt.
- La rencontre par Internet, c'est du déjà vu.
- Je me suis ennuyée.
- Ce langage oral, est-ce de la littérature ?
- J'ai fini le plus vite possible sans apprécier...
Ont apprécié un peu, certaines
beaucoup et quelques-unes sont vraiment ravies de la découverte
: Agnès,
Aurore, Brigitte, Claire, Ingrid, Laetitia, Nelly, Patricia,
Sandra
- J'ai aimé ces histoires ; j'apprécie ces morceaux de vie
; j'ai aimé ce kaléidoscope ; je n'oublierai pas des scènes
formidables
- C'est très physique : j'ai bien aimé les cousines qui
se frottent...
- La postface est très utile et met en lumière l'intérêt
de ces nouvelles.
- C'est pile ce que je cherche dans les nouvelles où tout est dans
le non-dit ; il faut aller au-delà de ce qu'on lit ; et ça
ne me dérange pas que ça s'arrête de façon
abrupte.
- Rien que les titres des nouvelles, ça vaut
la peine ; et le titre du livre, très gonflé, hyper fort
; "bâtarde" rappelle Violette
Leduc.
- Des nouvelles sont touchantes, émouvantes. L'auteure est engagée
à travers ses narratrices. Chaque nouvelle est racontée
par une narratrice différente, mais c'est un peu la même,
c'est aussi ce qui en fait l'originalité et qui explique que certaines
lectrices n'aient pas tout de suite vu qu'il s'agit de nouvelles (et l'éditeur
s'est bien gardé de le spécifier puisque les nouvelles,
ce n'est pas commercial...) ; c'est comme si la narratrice démultipliée
épousait toutes ces vies qui ont des points communs : dureté
et sensibilité, différences sociales marquées voire
racisme, amours difficiles, amitiés fortes mais déçues,
université ("elles faisaient des études pour ne
pas reproduire l'histoire de leur mère"), liberté
(du parcours, de la sexualité), crudité et moments drôles.
- Il y a une dimension cinématographique,
beaucoup de lieux, j'ai pensé à Bandes
de filles de Sciamma, dit l'une. J'ai pensé à Mon
nom est Tsotsi, un film qui se passe en Afrique du Sud où
le personnage, gangster, vole dans une voiture un bébé blanc
et s'en occupe, dit l'autre.
- La dimension sociale est forte. On retrouve l'importance de l'éducation,
salvatrice, et les différences sociales : on pense à nouveau
à Annie Ernaux, à Fatima Daas et à Émilie
Carles.
- Garcia Marquez a aussi été cité, ainsi que Fictions
de Borges ; Anne
Franck est évoquée dans l'une des nouvelles et pas du
tout par le biais habituel.
- Il y a du style, l'écriture est agréable, très
actuelle ; c'est une fausse simplicité.
- L'impression d'une belle découverte.
-
À noter : parmi celles qui auront lu les 4 livres, c'est celui
qui sera en tête du palmarès d'Ingrid.
Avis rédigés par les lointaines
Muriel
J'ai été très déçue par ce recueil
de nouvelles, que d'ailleurs je n'ai pas lu en entier.
J'oubliais jusqu'à l'histoire racontée dans une nouvelle
quand je finissais l'autre.
Je les trouve sans intérêt et je pense que je pourrais très
facilement en écrire 10 comme ça par jour...
La première, "Ville inconnue", ne présente à
mes yeux aucun intérêt.
La deuxième, " les bêtes", pareil, et Dieu sait
si j'aime les animaux...
Italia, bof...
Et "Bienvenue à San Bernardo", itou...
Si vous avez aimé, expliquez-moi bien pourquoi !!
Ingrid
J'ai fini Les bâtardes cette nuit et j'ai été
conquise.
J'avais peur en lisant les premières nouvelles de tourner en rond
dans la mesure où la thématique des relations amoureuses
sur internet et leur déception revenait. Les deux dernières
nouvelles m'ont fait changer d'avis.
Ce n'est qu'à la fin de ce recueil que je suis parvenue à
trouver une cohérence et un sens à ces histoires. Les vies
de ces femmes dont on parle si peu m'ont beaucoup touchée.
Je vous remercie pour cette découverte :)
Aurore
J'ai bien apprécié ces nouvelles chiliennes.
La première m'a beaucoup fait penser à un film argentin
d'Albertina Carri, Geminis,
qui raconte l'attraction sexuelle entre un frère et une sur.
J'ai beaucoup pensé à ce film en lisant la nouvelle, bien
qu'il s'agisse ici de cousines (l'attraction était perceptible
avant même le dénouement). Cette première nouvelle
m'a dépaysée autant que les personnages ; j'ai beaucoup
apprécié de lire qu'elles partaient en Bolivie dans un pays
voisin et qu'elles perdaient tous leurs repères, alors qu'il s'agit
d'un pays qui parle la même langue. On aurait pu croire que la culture
serait similaire... Mais bon !
J'ai également été touchée par la nouvelle
"Italia" où un amour ne se concrétise finalement
pas en raison de la honte et de la différence sociale... (Portrait
de la jeune fille en feu ?)
Je me suis également beaucoup interrogée sur le titre, "Les
Bâtardes". Les personnages ont vécu des événements
qui ont changé leur vie et, comme la petite chienne de la deuxième
nouvelle, elles ont pu rebondir. Un nouveau rebond qui leur a permis de
passer dans l'âge adulte, loin de l'adolescence... Des êtres
"dans les marges" qui ont été notre centre d'attention
pendant la lecture.
Au final, j'ai beaucoup aimé découvrir ses nouvelles qui
m'ont rappelé les films hispano-américains contemporains.
Premières expériences, premières découvertes
dans un pays qui peine à se relever de la dictature de Pinochet.
L'écriture était agréable, sans fioriture, les histoires
touchantes. Féminines et féministes. Une belle découverte
:)
Merci d'avoir proposé la lecture de ces nouvelles chiliennes !
Sandra
Je n'avais pas du tout entendu parler de cet ouvrage. Au départ,
en lisant la quatrième de couverture et voyant l'origine de l'auteure,
j'ai d'emblée été enthousiasmée. Appréciant
la littérature latino-américaine, je me suis dit que ce
serait une découverte. Quant à l'accroche du livre (titre
+ paragraphes à la suite), elle pouvait laisser présager
quelque chose d'intéressant.
Mais ce fut la surprise. Alors que je m'attendais à un roman qui
relaterait donc l'histoire des deux cousines, j'ai compris que c'étaient
des nouvelles. Ce style ne me dérange pas, mais plus je lisais,
plus j'étais déçue.
Ayant fortement apprécié les trois premiers récits
(l'histoire des deux cousines s'aimant mais séparées par
la famille, puis rassemblées de nouveau par la vie, celle de la
fille avec le chien, et celle de deux filles s'aimant mais de classes
sociales différentes), je fus déçue qu'ils ne soient
pas davantage détaillés. "Il y avait matière
a", comme on dit familièrement.
L'auteure ne creuse pas assez. En multipliant ainsi les histoires, on
ne va pas assez dans la profondeur du ressenti, des clivages familiaux
et sociaux, de la complexité des rapports humains, et de la tristesse
de ces jeunes filles. J'aurais préféré moins d'histoires
mais plus de détails.
Ainsi, je n'ai pas apprécié le reste de la lecture. Je ne
remets pas en cause le fond du propos, la volonté de l'auteure
de dénoncer ce que subissent ces "bâtardes", à
travers les codes sociaux, politiques et familiaux dictés par certains
et à ce qu'elles subissent moralement et physiquement. Ces jeunes
filles, seules, encaissent, se désillusionnent et devront se battre
pour sortir de "ces cases" Mais la forme ne m'a pas convenu.
Quant au style d'écriture, je n'adhère pas trop aux phrases
courtes ou toutes simples.
À l'inverse, la postface de Gabriela Weiner clôt bien l'ouvrage.
Avec précision, elle a su retranscrire le dessein de l'auteure,
et dans une prose que là j'ai apprécié.
Donc bilan mitigé.
Brigitte (qui a lu la version originale d'Arelis Uribe, Quiltras,
et a jeté un coup d'il sur la traduction qui possède
en plus une postface absente de la version chilienne)
Il
y avait longtemps qu'un livre ne m'avait autant interloquée et
d'emblée séduite que celui-ci. Par sa langue et par son
rythme, tout de suite. Avec tout de suite aussi, l'entrée dans
un monde de quiltras, ces chiennes bâtardes dont l'emblème
en leitmotiv arrive dès la deuxième page, avec la description
du gouffre séparant les familles des deux cousines de la première
nouvelle : dans le jardin de l'une, des paons, dans l'autre une chienne
bâtarde, une quiltra, donc, énorme, la terreur des
chats du quartier.
Et Arelis Uribe de continuer par une leçon de géopolitique
: le Chili comme pays progressiste et nouveau riche au milieu de losers
comme la Bolivie, comme la famille de la cousine et celle de la narratrice,
quiltra donc - au Pérou on dirait chola, mais c'est
la même sous-race de bâtardes innommables et misérables,
comme les bestias de la deuxième nouvelle.
Chilienne, donc Arelis Uribe, nul besoin d'une biographie, on a compris
tout de suite, comme on a saisi tout de suite, au style à l'emporte-pièce,
que c'est toujours l'enfer, au Chili comme ailleurs en Amérique
latine, pour celles qui ne sortent pas d'une famille bien née avec
un pedigree de chien de race. Toute l'âpreté des injustices
vécues au jour le jour transparaît dans ces histoires contées
sur un ton enlevé, très drôle, mais qui laissent finalement
un goût amer, et se terminent souvent par des larmes, quand le trop-plein
de sentiments réprimés finit par déborder.
On en sort le cur serré, de toutes ces histoires : l'amie
avec laquelle vous couchez une nuit mais qui vous envoie paître
quand vous avez fait tache dans le salon des parents, l'ami trouvé
sur internet qui s'avère plus laid que tous les quiltros
imaginables, le collège pour quiltras immonde comme il se
doit
C'est un monde palpitant de filles qui n'en finissent pas d'accuser
les coups en tentant de se faire une place, quand même, au soleil.
Un monde où " toute femme possède un souvenir sordide".
(La première édition date de 2016 ; l'univers dont il est
question est certes plus ancien, datant des balbutiements d'internet,
les choses ont certainement changé, mais peut-être pas aussi
fondamentalement qu'on pourrait le penser).
Arelis Uribe est un cas dans le milieu très fermé de la
littérature chilienne, blanche forcément, nourrie des poèmes
de Neruda, comme le souligne à la fin la chroniqueuse et poétesse
Gabriela Wiener qui taxe son apparition dans ce cercle de "martienne".
La traduction française est bien trop policée pour rendre
le tumulte rebelle de la langue d'origine, et tout simplement, peut-être,
parce que le français n'a ni le rythme ni la sonorité de
l'original ; mais la postface signée Wiener ajoutée à
l'édition française redonne toute sa verve au recueil, en
en faisant imaginer le dynamisme à bout de souffle.
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