Le bruit et la fureur, traduction et préface de Maurice-Edgar Coindreau, révisée en 1972, Folio

Quatrième de couverture :

"oui je le hais je mourrais pour lui je suis déjà morte pour lui je meurs pour lui encore et encore chaque fois que cela se produit...
pauvre Quentin
elle se renversa en arrière appuyée sur ses bras
les mains nouées autour des genoux
tu n'as jamais fait cela n'est-ce pas
fait quoi
ce que j'ai fait
si si bien des fois avec bien des femmes
puis je me suis mis à pleurer sa main me toucha de nouveau et je pleurais contre sa blouse humide elle était étendue sur le dos et par-delà ma tête elle regardait le ciel je pouvais voir un cercle blanc sous ses prunelles et j'ouvris mon couteau."

William Faulkner (1897-1962)
Le bruit et la fureur (1929)

Nous avons lu ce livre en novembre 1999. Nous avions lu 10 ans avant Tandis que j’agonise (en juin 1989) et lirons 10 ans après Si je t'oublie, Jérusalem (en mars 2009). Le nouveau groupe parisien lira à son tour Le bruit et la fureur en avril 2021.

Monique S
Je suis gênée pour en parler. J'avais commencé à le lire il y a… 7 ans. J'avais cru qu'il s'agissait d'un enfant de 18 mois. J'avais laissé tomber.
J'ai lu la préface, la première partie en peinant, j'ai voulu arrêter, je ne m'intéressais pas trop. Je me suis efforcée de commencer la deuxième partie, ffffttt.
C'est l'univers qui m'a fait quitter, avec un contentement de l'ordre de la violence : cette décision m'a fait du bien
Le papillonnement de la conscience, bon…

Liliane
Mais tu n'aimes pas l'univers américain.

Jacqueline
J'aime beaucoup. J'étais très contente qu'on le lise. Est-ce que je l'aime parce qu'on m'en a parlé adolescente ? Je l'ai lu quatre fois dans ma vie. Est-ce que je me laisse impressionner par le fait que c'est bien d'avoir lu Faulkner, plus le plaisir de l'énigme.
J'ai lu un appendice avec le quid des personnages où il donne une biographie des personnages, avec des éléments qu'on ne trouve pas dans le roman.
L'idée qu'il faut reconstituer difficilement m'allèche, me soutient. Les personnages sont émouvants, j'en ai presque pleuré.
Jason était dépeint comme affreux, mais j'ai une sorte de sympathie, peut-être parce que le récit devient clair.
J'ai peur d'être comme la mère, atroce.
À chaque lecture, je trouve un plaisir nouveau.

Brigitte
Je l'ai lu quand j'étais malade, il y a un an. Je me retrouve dans ce qu'a dit Jacqueline.
Si on le lit une première fois, on ne peut pas comprendre. Ce n'est qu'après coup qu'on peut savoir ce qui s'est passé.
L'approche de Benjy est très intéressante, très réceptif.
Ce qui m'a beaucoup frappée, c'est le mot caddy qui lui fait piquer cette crise ; c'est magnifique de rendre ce bruit et cette fureur. Dilsey est magnifique. Le personnage de la mère est intéressant. Ce livre mériterait plus d'une soirée. Certains passages sont magnifiques (comme la description du pasteur). Le non-dit est exprimé. J'avais lu d'abord la préface, et j'y suis ensuite retournée.

Liliane
Faulkner n'a pas écrit son livre avec un mode d'emploi, je me suis refusée à la perdition et j'ai lu la préface.

Rozenn
Je suis furieuse d'avoir lu la préface car je ne savais pas qu'il fallait un mode d'emploi. Je ne sais pas si j'aurais compris. J'ai eu un plaisir grandissant à le lire. Je pense que je le relirai un jour. Je me suis fait un arbre généalogique. J'estime que j'ai eu un plaisir frelaté, car j'avais des clés. Je regrette mon plaisir naïf, de naïveté. On m'a volé ma première lecture. Je garde un souvenir d'autres livres de Faulkner.

Liliane
J'ai beaucoup regretté de ne pas avoir abordé en terrain vierge. Je conseillerai à un nouveau lecteur de ne pas lire la préface. Je ferai un parallèle avec Pedro Páramo que nous avons lu l'année dernière : ce sont des livres pour être perdus. C'est ce qui est magique. Avec une deuxième lecture, on relie. Je n'ai pas eu le plaisir du Bruit et de la fureur comme je l'ai eu pour Pedro Páramo.
La vie inconsciente un peu brute, comment elle explose à la surface, c'est ce que montre Faulkner. Il ne faut donc pas être averti.
J'ai lu Tandis que j'agonise que j'avais trouvé magnifique dans le lyrisme. Celui-ci, je l'ai trouvé plus technique.
Pour nous perdre, Faulkner fait de la surenchère : donner les mêmes prénoms, promener dans le temps, commencer par le point de vue d'un fou : qu'est-ce qu'il cherche à faire ? J'ai des questions sans réponse.
C'est la troisième partie (Jason) que j'ai aimé.
La deuxième est très longue, pesante. Jason, je l'ai trouvé d'une justesse psychologique. Dans la quatrième partie, l'émergence de la violence est bien montrée.

Brigitte
Ils ne communiquent pas beaucoup.

Liliane
Même si je ne comprends pas tout - car je ne comprends pas le parti pris de la composition de Faulkner - j'apprécie qu'on essaie de dire le non-dit.

Claire
Je n'ai pas lu la préface, mais je savais que Benjy était demeuré. Comment restituer les paroles d'un demeuré ? Je ne comprenais pas le sexe, la race des personnages, les italiques. J'ai commencé à être perdue et à me barber. Page 45, il y a quinze fois le verbe "dit" (dit Caddy, dit Dilsey, dit Quentin...) : j'ai commencé à être énervée. Je ne comprends pas qui est T.P. Le dialogue me lasse, je commence à sauter des pages.
Je regarde la table des matières, je vois les dates.
La deuxième partie ? Je ne comprends rien.
Je lis la préface : éblouissante. Bon dieu, mais c'est bien sûr. Il faut goûter l'obscurité car si on est très malin on ne sera pas envoûté, car il faut être en perdition. Je ne suis pas d'accord : c'est un roman élitiste pour les gens avertis qui ont les clefs. Quelle exigence extraordinaire a Faulkner à l'égard du lecteur. Comment l'envoûtement joue-t-il ? C'est écrit pour les happy few, non ?...

Françoise Delphy (avis transmis)
J'ai relu pour la troisième fois Le bruit et la fureur. Je le comprends de mieux en mieux, mais il y a des passages qui restent encore fort obscurs. Le monologue de Quentin en particulier. Vous savez que Faulkner a pris son titre à Macbeth la fameuse tirade :

Out, out, brief candle!
Life's but a walking shadow, a poor player,
That struts and frets his hour upon the stage,
And then is heard no more. It is a tale
Told by an idiot, full of sound and fury,
Signifying nothing.

Éteins-toi, éteins-toi, brève chandelle !
La vie n'est qu'une ombre errante, un pauvre acteur
Qui se pavane et s'agite une heure sur la scène
Et qu'ensuite on n'entend plus. C'est une histoire
Racontée par un idiot, pleine de bruit et de fureur
Et qui ne signifie rien.

L'histoire racontée par un idiot a évidement inspiré Faulkner pour le passage raconté par Benjy, l'idiot de la famille Compson. Ce n'est pas finalement le plus difficile, car Benjy, hormis ses impressions purement sensuelles (odeurs, couleurs), transcrit ce qu'il entend tel quel. L'amour pour la sœur est au cœur de l'histoire : "she smelled like trees in the rain". La seule difficulté vient du bond dans le temps perpétuel auquel on ne nous prépare pas. Benjy a bientôt 33 ans, tantôt est un petit garçon, Caddy sa sœur ayant 7 ans. Mais tout est déjà en gestation chez les enfants : "Ça m'est égal" dit Caddy, "Je m'enfuirai", "Tu le feras" dit Quentin.
La mesquinerie de Jason est déjà évidente, il "rapporte" : "Caddy et Quentin se sont lancé de l'eau" dit Jason. Benjy est fasciné par son ombre, comme le sera Quentin aussi ; là encore on retrouvera le thème shakespearien : "La vie n'est qu'une ombre qui marche", "we went down the steps, where our shadows were".
Berjy ne sait pas ce que fait sa sœur avec les garçons, nous lecteurs le savons, nous le devinons d'après les descriptions qu'il donne : "Ils respiraient très vite tous les deux", "J'entendais sa respiration et sentais sa poitrine", "Caddy prit le savon de la cuisine et se lava la bouche à l'évier, avec énergie". La confirmation vient d'une phrase de Luster, rapportée par Benjy : "Ils viennent chaque nuit, elle descend de cet arbre."
Dans le dernier chapitre, on saura que Quentin, la fille de Caddy, utilise le même arbre pour quitter sa chambre et retrouver des garçons la nuit, comme sa mère. L'arbre comme instrument de la séduction ("she smelled like trees").
Luster, le petit Noir, fils de Dilsey qui a la tache ingrate de s'occuper de l'idiot, se venge avec un sadisme innocent. Luster prononce le nom de la sœur aimée et disparue, ferme le poêle de façon à ce que Berjy ne voie plus le feu qu'il aime, casse la fleur qu'il lui a donnée.
Il y a des passages qui juxtaposent les deux Quentin, le frère de Candace et sa fille.
(Françoise continue son analyse pendant plusieurs pages, sautées ici, nous attendons le dernier mot...)
Le livre finit sur l'image de Benjy, l'idiot qui retrouve sa sévérité quand Luster tourne de gauche à droite : "ses yeux étaient vides et bleus et sereins."
Berjy n'est pas capable de penser mais il capable de souffrir.
J'espère que le groupe aura apprécié ce livre splendide.


AVIS DU NOUVEAU GROUPE PARISIEN
réuni le 11 avril 2021

Audrey
- D'entrée de jeu, j'aimerais évoquer ici : Céline (Voyage au bout de la nuit), Toni Morrison (Beloved), Sarraute (Enfance), Duras (Dix heures et demie du soir en été) parmi les œuvres que nous avons lues récemment - mais aussi Joyce (Ulysse). Parce que ces œuvres comme Le Bruit et la Fureur, à mon sens, nous ramènent à leur auteur.
Chez ces auteurs, il y a quelque chose d'expérimental. Face à cette œuvre de Faulkner, nous nous retrouvons devant une expérimentation littéraire, une innovation absolument éblouissantes.
Il y a aussi chez ces auteurs une exigence à la fois de leur part à eux, dans leur manière de créer du neuf, d'inventer de la nouvelle littérature, dans leur façon d'explorer l'écriture comme une matière à façonner ; et aussi une forte exigence de la part du lecteur, auquel finalement ils font une grande confiance pour saisir les nouveautés qu'ils proposent. Aussi complexes soient-elle comme dans Le bruit et la fureur ! !
- Ici le lecteur pressent dans un premier temps, puis découvre ensuite, une structure, une composition littéraire extrêmement ciselée, finement agencée et découpée, enchevêtrée.
Cela passe par des moments de grande beauté d'écriture et de poésie magnifique, par un découpage temporel morcelé, non linéaire, très difficile à suivre où l'on perd parfois la ponctuation, où des phrases se coupent, s'interrompent, où les espaces et les temps s'entremêlent.
Cette écriture de Faulkner cherche à rendre le flux de la pensée, à rentrer à l'intérieur de la pensée humaine, à saisir l'intériorité de ses protagonistes. Il procède pour cela au découpage incessant de la temporalité, à l'enchevêtrement des temporalités, à des associations subjectives permanentes à des remémorations foisonnantes. Et l'impression qui en ressort est quelque chose de très déroutant, qui donne une impression de cacophonie, de tumulte, de confusion, d'agitation. Finalement de bruit et de fureur.
- Étonnamment ce qui compte, malgré la maîtrise absolue qui se dégage de cette composition littéraire, c'est une impression générale. Cela me fait penser à la peinture impressionniste : la composition d'ensemble est essentielle, mais peu importe le détail de la fleur ou du pétale au milieu du paysage ; ce qui importe, c'est l'intention générale et le ressenti face à l'œuvre. Ce sont les touches qui dessinent l'ensemble.
Par ailleurs, ce qui me semble compter aussi énormément dans cette façon d'écrire, c'est tout ce qui n'est pas dit, c'est le travail du lecteur qui peut à sa guise combler des vides, des absences, des creux, des non-dits, des silences. C'est une absence de liens entre deux pensées par exemple, que traduit très bien je trouve la forme explorée par Faulkner (et qui me fait beaucoup penser à Ulysse de Joyce - que je n'ai pas eu en revanche la persévérance de lire jusqu'au bout !). Faulkner parvient ainsi à traduire la pensée presque obsessionnelle, affolée, de Quentin ou encore cette intériorité plus sensorielle de Benjamin.
- Le fait d'entrer dans le récit par la vision et l'intériorité de Benjamin justement, cet "idiot", ce déficient mental, me semble essentiel car cela permet une entrée par un biais très poétique d'une part, et permet d'autre part d'installer un processus : celui qui va consister pour Faulkner à pénétrer dans les pensées de ses protagonistes. Il nous confronte d'emblée à la difficulté d'accès de la pensée de ces personnages, il nous force à un décentrage, très brusque, avec cet homme dont le rapport à la réalité diffère radicalement du nôtre.
Il introduit dès lors, dès l'ouverture, l'idée de l'insaisissable pensée dont il va chercher à témoigner par son écriture, tentant malgré tout de trouver une forme qui puisse tâcher de la retranscrire au plus près.

  • Chez Benjy il y a une dimension très physique : le corps est très présent et ses cris qui traversent le roman de part en part ! Du début jusqu'à la toute fin.
    J'aimerais évoquer ici la beauté des trouvailles littéraires et poétiques telles l'odeur du chèvrefeuille, les sensations de lumière et de mouvement. Une belle citation page 60 : "il s'est mis à rire et la porte de la cave et le clair de lune se sont enfuis d'un bond et quelque chose m'a frappé (...) les marches de la cave ont grimpé la colline dans le clair de lune et T.P est tombé en haut de la colline dans le clair de lune et j'ai couru le long de la barrière". Et ce passage tellement émouvant à la fin du livre où l'on comprend ce que vient chercher Benjy, accroché aux grilles à regarder les golfeurs : il vient entendre le nom de sa sœur aimée, rechercher par là un paradis perdu, celui de ce temps passé auprès de cette sœur tant aimée, à l'odeur de chèvrefeuille dont le prénom est désormais interdit dans la maison familiale.
  • Avec Quentin on entre dans une partie qui révèle ou lève le voile encore davantage sur le dysfonctionnement d'une famille et sa tragédie (déjà annoncée par la fragilité de la mère au début du roman). Quentin nous plonge par son monologue dans un ressassement, une forme de pensée obsessionnelle, un tumulte intérieur qui semblent absolument indépassables... et qu'il ne parviendra pas lui-même à dépasser.
    C'est une partie extrêmement émouvante aussi où se disent et se "non-disent", le poids d'une culpabilité, un amour interdit et une difficulté à mettre à distance, à dire et exprimer les choses vécues et ressenties... jusqu'à n'en plus pouvoir. Nous sommes, dans cette partie, avec un homme dont on suit les derniers tourments, détresses et tumultes intérieurs, avant sa propre mise à mort.
  • Avec Jason s'ouvre la troisième partie, en totale rupture dans la forme.
    Le récit devient plus linéaire, plus traditionnel et d'ailleurs, il le semble que l'on dépasse dans cette partie l'individu lui-même pour une peinture plus générale, une plongée dans les tréfonds de la tragédie familiale, au sein de cette Amérique sudiste ségrégationniste ; une famille en pleine déchéance s'effondre, perd sa puissance, sa domination, sa noblesse, sa chasteté, sa morale, sa richesse : suicide d'un fils / débilité d'un autre frère fille reniée / au prénom tu / enfant arraché à sa mère / violence et bassesse du dernier frère / alcoolisme du père / ruine et déchéance financière de la famille / dépression de la mère. Les protagonistes évoquent eux-mêmes une maladie génétique une sorte d'hérédité fatale.
    Jason fait de lui-même un portrait de l'Américain médiocre, pathétique, violent, raciste, voleur, mauvais (que l'on pense à la scène du billet de spectacle tant convoité par Luster et que Jason brûle sadiquement devant lui), humiliant, agressif, sans recul sur lui-même, frôlant le ridicule par ses contradictions non conscientes et parfois proche du délire.
    Et toute cette descente, cette déchéance, ce désastre se déroulent sous le regard des Noirs qui ne peuvent que renvoyer aux Blancs, en miroir, leur douleur et leur médiocrité. Soumis eux aussi à la violence de leur destin. À l'opposé peut-être des Blancs, les Noirs du roman se posent comme un contrepoint. Peut-être qu'ils sont l'inverse du bruit et de la fureur ? Il me semble présenté comme les protagonistes les plus ancrés dans le réel, les plus sains d'esprit, les plus empathiques, les plus fins, les plus justes. Cette citation page 207 : "c'est ainsi qu'ils pénètrent dans la vie des Blancs, en infiltration noires, soudaines et aiguës qui isolent un instant, comme sous le microscope, le fait des existences blanches et en dégagent les vérités indiscutables ; le reste du temps, des voix seulement, qui rient là où nous ne voyons rien de risible, des larmes sans raison de pleurer". Ce sont souvent des personnages qui paraissent soumis, plein d'abnégation, de résignation, de souffrance. Ils marquent à mon sens beaucoup la temporalité et du récit et de la période d'écriture de ce roman. Ces Noirs étaient pour moi, dans la lecture, à la fois des repères et les personnages les plus rassurants de cette œuvre noire, sombre.
  • DILSEY, est, à mon sens, le plus beau personnage du roman ! Elle tient tout et tous à bout de bras elle est le pilier du roman, le pilier de la maison, celle qui prend soin de tous. Elle endure : humiliation, conditions de vie misérable, fatigue. Et La chute de cette famille !
    Femme courage, qui sait exprimer son opposition mais surtout beaucoup le taire ! Par la force des choses. Femme capable d'écoute, de compréhension, de soutien : c'est elle qui qui maintient la relation la plus respectueuse avec Benjy.
    Une très belle scène des Noirs entre eux, se rendant à la messe de pâques page 368. Et une scène magnifique qui est en même temps un portrait physique de Dilsey lors de cette messe, lorsque épuisée, émue, dans un relâchement, elle se mettre à pleurer, à libérer ses larmes. Page 351, "deux larmes roulèrent le long de ses joues affaissées et parmi les milliers de rides que les sacrifices, l'abnégation, le temps y avaient creusées."

Tout semble diriger cette famille vers un drame final qui n'aura pas lieu. Mais c'est un drame éternel. Est-il pire drame final que ce statu quo, que cette perpétuelle déchéance jusqu'à une extinction annoncée ?
Perpétuation des cris de Benjy, de la hargne de Jason de la douce et persévérante attention de Dilsey, de la juvénile inconséquence de Luster, de la dépression de la mère..
Pour conclure, c'est la première fois que j'approche de si près un tel degré de perfectionnement et de ciselure d'un texte ! J'ai trouvé cette écriture lumineuse, éblouissante. Sa lecture jouissive.
C'est un livre qui ne se termine pas à la fin de la quatrième partie mais qui nous lance comme une boucle dans la relecture du début de l'œuvre pour pouvoir la saisir. J'aurais envie de passer mon temps à explorer davantage cette œuvre grandiose et complexe.
J'ouvre en immense.
C'est moi qui ai bataillé pour imposer cette œuvre au groupe et j'en suis extrêmement satisfaite.
Christine
J'ai eu beaucoup de mal à rentrer dedans, ce livre est hermétique au départ. J'ai lu plusieurs livres de Faulkner et c'est à mon sens le plus difficile. C'est un livre très particulier, on ne trouve pas de sens à tout ce qui est écrit (surtout la première partie avec Benjy). La partie de Quentin comporte quelques belles phrases, mais l'ensemble demeure très fouillis.
Or, tout s'éclaire avec les parties suivantes : le retard mental de Benjy, la fuite de Caddy... Il faut avancer dans la lecture pour comprendre. Faulkner a écrit sur la généalogie de ses personnages, ce qui aide à la lecture du livre.
Faulkner considère ce livre comme un tournant dans son écriture ; il a écrit d'un jet la première partie et a approfondi dans les parties subséquentes. On sent l'influence de James Joyce dans son écriture. J'ouvre aux trois quarts.
Ana-Cristina
Il est impossible de lire ce livre de façon distraite. Je crois que le plaisir à sa lecture ne peut naître que si on s'abandonne à l'écriture, si on fait confiance à l'auteur. Ne pas vouloir de l'auteur qu'il dévoile tout tout de suite, accepter d'être perdue. C'est une vraie expérience de lecture. Je n'ai pas regretté l'aventure. Je peux reprendre à mon compte ces mots de Pascal Quignard : "J'aime les livres. J'aime leur monde. J'aime être dans la nuée que chacun d'eux forme, qui s'élève, qui s'étire. "
J'ouvre en grand.
Monique M
Ce livre est fabuleux. On sent tout de suite qu'on entre dans une œuvre majeure. J'ai été happée par le texte dès la première page, même si c'était difficile de discerner les personnages, la confusion se mettait à l'unisson de celle de l'esprit de Benjy. C'est magnifiquement écrit, c'est un mélange permanent de situations concrètes, visuelles, prosaïques et d'envolées poétiques, de fulgurances de l'esprit où se font et se défont toutes sortes de rapprochements, de pensées, de souvenirs, d'idées folles qui font décoller le récit, lui donnent une dimension inattendue, une perception aigue de la personnalité des personnages, de leur vie intérieure la plus secrète, la plus subtile, la plus intime.
La construction brillante du livre qui donne successivement la parole à Benjy, Quentin, Jason, Dilsey permet un regard croisé, enrichi de ces approches multiples sur la société de l'époque et sur la façon dont elle perçoit les malades mentaux, les noirs et les femmes. Une société machiste, dominatrice où les faibles, dont Faulkner exprime parfaitement le ressenti, subsistent à grand peine. L'invention géniale de Faulkner de faire alterner passages en caractères romains puis en italiques, où on saute d'époque, de lieu, d'atmosphère donnant lieu à toutes sortes de fulgurances à l'image des incohérences de l'esprit de Benjy, de sa folie, ses frayeurs, son attachement maladif à Caddy, donne une grande puissance au récit.
La condition d'infériorité dans laquelle sont les noirs, le malade mental qu'est Benjy, et même les enfants soumis à toutes sortes d'interdits, leur confère une sensibilité extrême, une exaspération des sens que capte et restitue parfaitement l'écriture de Faulkner. C'est une plongée dans le tumulte d'une famille marquée par le destin, où les conflits, les tragédies, sont analysés, disséqués, mis en exergue par cette écriture vivante, inventive, vibratoire, pleine de transgressions qui leur ressemble. C'est un surgissement de tous les instants, on sent la vie et l'impuissance face au malheur, la maladie de la mère, la mort de la grand-mère, le père alcoolique, l'enfant anormal, la fille victime de sa sensualité, le suicide du frère, la violence de l'autre… Cette barrière qui clôt le domaine, qui en marque la limite, est le symbole de ce qui sera franchi, de cette transgression permanente qu'exercent les différents acteurs et du malheur à venir, que les noirs ont pressenti : "La malchance est sur cette maison, j'ai vu le signe" dit Roskus.
J'ai beaucoup aimé cette grande puissance d'analyse, ce regard quasi psychanalytique sur les personnages, sur leur monde intérieur et ce qui les fait agir, ce verbe puissant dont on sent la chair, qui accroche l'imaginaire par la poésie, la force, la justesse des mots, des situations, la nature splendide, la vitalité des enfants, la grande bienveillance de Dilsey, pilier de la maison, gardienne des valeurs, l'immense poésie et étrangeté de nombreux passages où Benjy voit "des choses lumineuses, rapides et douces passant sur le dos de Queenie" ; où, lorsque Dan sort de dessous les marches "La cuisine était noire. Les arbres étaient noirs sur le ciel. J'ai contourné la cuisine où se trouvait la lune. Dan est entré tranquillement dans la lune… L'arbre à fleurs près de la fenêtre du salon n'était pas noir, mais les arbres épais l'étaient. L'herbe bourdonnait dans le clair de lune où mon ombre marchait sur l'herbe".
J'ai adoré ce livre et l'ouvre en grand.
Anne
J'ai beaucoup de mal à penser ce livre. Il faut lâcher prise, ce que je n'ai pas fait au début. Ce livre m'a fait souffrir et je n'aime pas souffrir ! Je me suis sentie un peu esclave de Faulkner ; la confusion des noms était très perturbante et le tout manquait de sens. J'en ai un peu voulu à l'auteur. Par contre, si on lit ce livre en fragments, en images, sans tout maîtriser, ça va.
La construction symphonique de l'œuvre a été difficile pour moi. Ce livre était riche en émotions, tendresse, violence, rage... J'ouvre aux trois quarts.
François
Ce n'est pas facile à lire, il faut s'accrocher pour entrer dans l'univers lugubre de cette saga, de cette malédiction familiale. On passe de l'obscurité à la lumière, et c'est le génie de l'auteur de pénétrer la moelle de cet univers tout en prenant de la distance. Univers qui tient de l'enfer et du paradis, de l'épopée dantesque et de la tragédie grecque.
Les Noirs sont le cœur actif de l'histoire, les protecteurs de Benjy. Benjy est inoubliable, très complexe et abouti comme personnage. Il ignore le temps et l'espace, répète toujours les mêmes gestes et erreurs, est passif et dépendant : c'est un grand travail d'écriture.
La deuxième partie, articulée autour de la sœur, le récit de Quentin, dérape parfois. Sa montre détraquée est le symbole du temps auquel il veut échapper. Il y a une incompréhension, une confusion voulue entre les personnages. On suggère l'indicible ; c'est tout l'intérêt du livre.
L'histoire n'est intéressante que par ses détails. C'est un roman magnifique et fascinant. J'ouvre en grand.
Françoise
Je n'ai rien compris au début : homme ou femme, jour ou nuit, blanc ou non, c'était confus ! C'est un pari audacieux de l'auteur, et qui nous amène à réaliser à quel point la vie, les gens, les conflits sont difficiles à comprendre. C'est une grande leçon de vie sur la façon d'appréhender le réel.
Les conditions de vie des Noirs sont pathétiques, toujours dans l'infériorité et la soumission, mais on sent que Faulkner n'a pas un regard manichéen. Il ne prend pas une position surplombante, son regard n'est pas réducteur.
La violence est omniprésente et très toxique. La famille est assise et soudée sur ces rapport de violence et de souffrance : elle exerce de la violence sur ses domestiques, laquelle lui revient en son sein.
Certaines choses restent très peu intelligibles, mais j'en ai retiré un très grand plaisir. J'ouvre en grand.
Nathalie    
J'ai beaucoup aimé ce roman. J'ai eu l'impression d'être enquêteur pour mettre bout à bout les informations données par les uns et les autres des personnages et tenter d'appréhender l'histoire de cette famille, dont la plupart des événements restent en clair-obscur, même si on croit les deviner. J'ai eu comme beaucoup du mal à comprendre au début ce que nous disait de son histoire Benjy, décrit par Faulkner comme un "idiot" pour qui "le temps n'était pas une durée, c'était un instant, il n'y avait ni hier ni demain, pour lui tout se réduit à ce moment, à maintenant". L'auteur prend en outre un malin plaisir à dérouter son lecteur qui doit finir par comprendre qui est qui, alors que différents personnages ont le même prénom, ce qui n'aide pas. Mais assez vite, je me suis laissé emporter par la lecture et les sensations qu'elle provoquait.
J'ai trouvé que les procédés d'écriture de Faulkner (aller-retour entre passé et présent, sans autre lien que les associations d'images, de sons ou de sensations de Benjy) nous permettait de mieux imaginer ce qu'il pouvait ressentir dans un monde où tout est brouillé et sans aucun sens pour lui. Benjy perçoit le monde par ses sens. J'ai vraiment trouvé admirable et même magique cette première partie où l'auteur par sa seule écriture parvient à nous faire toucher du doigt ce que peut vivre et ressentir ce personnage si loin de nous. Et en même temps finalement si proche. Car nous nous racontons une ou des histoires pour comprendre le monde dans lequel nous vivons, alors que finalement ce ne sont que des histoires qui nous permettent d'ordonner ce qui ne l'est pas. Le fait que l'auteur écrit à la première personne nous fait mieux accéder à l'identification avec Benjy, ce pauvre idiot.
La deuxième partie, exposée également à la première personne du singulier, raconte la dernière journée d'un des frères de Benjy, Quentin, qui a décidé de se suicider. Il ne supporte plus la perte de son paradis perdu, représenté par sa sœur Caddy, qui était également pour Benjy le bonheur suprême. Dans le premier paragraphe de cette deuxième partie, l'ombre déjà apparaît, celle notamment du temps qui passe avec cette montre offerte par son père qui la tenait de son grand-père, dont Quentin va casser les aiguilles. Pourtant, quoi qu'on puisse faire, le temps passe, inexorable, et fait disparaître le temps de l'enfance puis tous les autres temps si tant est qu'on y survive. Au cours de cette journée de 12 heures, rien ni les personnes qu'il croisera, n'empêchera Quentin d'aller jusqu'au bout de sa décision : se noyer. Retour à l'eau. Sans livrer bataille : "les batailles ne se gagnent jamais. On ne les livre même pas. Le champ de bataille ne fait que révéler à l'homme sa folie et son désespoir, et la victoire n'est jamais que l'illusion des philosophes et des sots.", lui a transmis son père. À quoi bon vivre alors ? La troisième partie est pour le troisième frère, Jason, qui est, en tout cas, se croit, le plus normal de la fratrie qui comprend également une sœur, que l'on ne percevra que par ses frères, Caddy, adorée par ses deux autres frères, et profondément détestée par Jason. Ce troisième frère est celui qui bataille constamment, sans se soucier des procédés pour mener cette guerre contre la fatalité qui semble poursuivre cette famille. Le mensonge, le vol, l'escroquerie, y compris de sa propre famille ne lui font pas peur. Mais il perdra continuellement. C'est un personnage détestable et pathétique et qui peut être drôle ; je n'ai pu m'empêcher d'avoir pitié de lui, qui porte le déclin de cette famille dont l'univers ne cesse de se rétrécir. La dernière partie fait la part belle à Dilsey, la nounou noire du Sud, qui s'est occupée de tous les enfants de la famille Compson, blanche, pour lesquels elle est la seule figure maternante, tout en élevant ses propres enfants qui font aussi partie de la maison, étant ici précisé que les faits se déroulent bien après l'abolition de l'esclavage. Son courage et son énergie qui l'ont tenue toute sa vie se sont "consumés par les jours, par les ans". Son corps est usé, fatigué, mais elle continue à servir la famille Compson représentant une "fin de race" dégénérée. Elle le fait avec loyauté et intégrité. Tout le roman est traversé par les relations Blancs/Noirs. Si Dilsey et sa fille sont le pendant énergique de la famille Compson, les hommes noirs ressemblent par leurs actes aux hommes blancs. Le mari de Dilsey se suicidera comme Quentin ou le père Compson, dont on peut penser que l'alcoolisme, après le départ de sa fille et le suicide de son fils, est une sorte de suicide à petit feu. Le fils ou le petit-fils de Disey ne seront pas meilleurs à l'égard de Benjy que ne l'est Jason. Les femmes de la famille noire sont en revanche solides, vaillantes et compatissantes. Elles semblent incarner les seules valeurs positives.
En lisant la dernière partie, notamment lors du départ pour l'église de Dilsey et sa famille qui emmnène avec eux Benjy, j'ai pensé à Beloved de Toni Morrison. J'ouvre en grand ce roman de Faulkner qui est un roman qui mérite plusieurs lectures pour mieux encore l'apprécier. Je l'ai relu dès que je l'ai terminé, pour appréhender ce que je n'avais pas pu percevoir à la première lecture. Et la deuxième lecture laisse une impression encore plus forte que la précédente.   
Katherine
Quel début de lecture laborieux ! La narration de Benjy nous perd dans les temps, les personnages, les épisodes, et m'a laissée bien perplexe à la fin de ce premier chapitre. La suite s'est néanmoins avérée plus facile à suivre : le chapitre narré par Quentin le frère avec cette petite fille perdue (l'italique aidant à distinguer l'action présente du passé ou des pensées), puis celui axé sur Jason le frère et maître de maison, où l'on développe une compréhension plus entière de cette famille et des liens entre ses différents membres, et la dernière partie mettant en lumière Dilsey, la matriarche de la famille de domestiques noirs rattachée à la famille Compson, dans laquelle l'auteur rend à merveille la sonorité de la parole orale des personnages noirs (dans la version anglaise).
Je ne trouve pas les mots exacts pour décrire l'effet que m'a fait cette famille : un mélange de tristesse et d'empathie, d'énervement et de colère. C'est l'histoire de la lente et inéluctable déchéance d'une famille. On retrouve un père, une mère, leurs quatre enfants, Jason, Quentin, Caddy et Benjy, et leurs domestiques, Dilsey et ses enfants, Luster, T.P. et Frony. Le père meurt, le fils Quentin se suicide, la fille Caddy est rejetée de sa famille après avoir été rejetée par son mari, lequel ayant appris que leur fille, Quentin, n'était pas de lui. La mère, malade, apathique et insupportablement plaintive, se repose alors sur son fils Jason, devenu maître de la maison, et se plie à toutes ses volontés, se confondant en excuses pour le fardeau qu'elle constitue. Jason, homme malhonnête, raciste, imbu de sa personne, assumera ce rôle avec hauteur et arrogance, tant envers les membres de sa propre famille que ceux à son service. Il volera sa nièce Quentin, mentira à sa sœur Caddy, se montrera cruel et plein de mépris envers Benjy du fait de son handicap mental et traitera avec un dédain éclatant Dilsey et tous les Noirs qu'il rencontre (ou nègres comme il les appelle).
Malgré la compassion très inégale que l'on peut leur témoigner, ces personnages ont tous été les victimes d'une vie qu'ils n'ont pas choisie. Personne n'y est heureux et pourtant cette absence de bonheur est vécue comme acquise, banale. Seul Benjy, "grâce" à sa simplicité d'esprit, semble par moments échapper à cette chape de plomb, trouvant la sérénité en fixant des flammes ou des moments de joie en entendant le nom de sa sœur disparue, crié par des golfeurs. Certains s'en sauvent, comme Quentin et Quention, et les autres endurent, comme Dilsey.
Cette lecture est une expérience, dans laquelle il faut lâcher prise et accepter de ne pas immédiatement tout comprendre. Certains éléments se clarifient au fil des pages, et d'autres demeurent nébuleux même à la fin. Cela fait partie de la richesse de cette œuvre et de son unicité.
J'ouvre aux trois quarts.
Valérie
C'est la première fois que je lis un roman de Faulkner. Par hasard, j'avais à ma disposition une vieille édition de poche. J'ai lu au préalable la préface du traducteur, Maurice Coindreau, et bien m'en a pris. Car sans cette préface éclairante de l'œuvre, je ne sais si j'aurais réellement dépassé les deux premières parties du livre.
L'écriture et le contenu du roman sont complexes, déstabilisants pour un lecteur non averti. Et j'aime assez ce qu'en dit le traducteur : "Je ne crains pas, du reste d'affirmer que la compréhension absolue de chaque phrase n'est nullement nécessaire pour goûter Le Bruit et la fureur. Je comparerai volontiers ce roman à ces paysages qui gagnent à être vus quand la brume les enveloppe." Une excellente approche qui définit assez bien je trouve l'atmosphère de ce roman.
Nous sommes dans le Sud, l'État du Mississippi, et ce roman nous parle d'une étrange famille : les Compson et leurs quatre enfants, Benjy, Quentin, Jason et Candace, plus Quentin, la fille de cette dernière. Au total, trois générations plus toute une génération de Noirs à leur service.
Le roman se découpe en quatre parties laissant les trois premiers à des monologues intérieurs portés par les enfants des Compson.
Le plus démuni et sans doute le plus attachant, c'est Benjy, l'idiot, le débile mental, c'est lui qui ouvre le livre et nous fait entrer dans son enfer. Il ne s'exprime pas, rien n'existe pour lui que les sensations animales.
Le second monologue est porté par Quentin, le fils étudiant à Harvard, à qui on a sacrifié les autres pour qu'il puisse étudier et rendre un honneur à cette famille déshéritée. Mais Quentin ne peut assumer cette tâche, mélancolique, dépressif, il se noiera.
Reste Jason, le dernier fils, violent jaloux de sa nièce : Quentin, qui vit dans la maison familiale, sa sœur Candace l'a abandonné à sa naissance.
Au total, Le bruit et la fureur est un véritable drame où les liens du sang ne permettent pas l'amour entre frères et sœurs, mais au contraire nourrissent le chagrin et la haine.
Lecture assez éprouvante, mais au final nécessaire dans la vie d'un grand lecteur.

 

Nos cotes d'amour, de l'enthousiasme au rejet :
                                        
à la folie
grand ouvert
beaucoup
¾ ouvert
moyennement
à moitié
un peu
ouvert ¼
pas du tout
fermé !


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