Rivages poche/Bibliothèque étrangère
Rosetta Loy
Madame Della Seta aussi est juive

Nous avons lu ce livre en avril 2002. Nous lions Cœurs brisés en décembre 2010.

Roman qui a inspiré Costa-Gavras pour le film Amen.

Jacqueline
J’ai trouvé intéressant le mélange documentaire/touches personnelles qui dépeint bien. Je ne peux rien dire d’autre. Cela m’a plu. C’est un bon livre. Mais au fond, j’ai une espèce de défense, je ne me sens pas très intéressée, peut-être parce que c’est vu de l’extérieur. C’est un point de vue intéressant, ce témoignage sur son enfance, sur cette époque, sur la façon d’emmener les juifs. C’est un bon livre comme livre de souvenirs, mais je ne suis pas touchée. J’ai vu Amen avec beaucoup d’intérêt. Mais à aucun moment, je ne me sens proche des personnages. A côté de Shoah, c’est rien. D’avoir vu les trains de Shoah m’empêche d’être émue par les trains d’Amen.

Liliane
Je ne connaissais pas Rosetta Loy et assez peu l’aspect documentaire. J’ignorais certains épisodes de l’action de Pie XII. J’ai été peu intéressée par le personnage de la narratrice et sa façon de traverser l’histoire sans la saisir. Dans Un chocolat chez Hanselmann, un livre un peu dilué, la narratrice a de même assisté à des événements sans les comprendre. Dans celui-ci, Rosetta Loy joue sur le souvenir, c’est aussi un peu inconsistant. Je ne trouve pas qu’elle ait un point de vue. Beaucoup de choses ont été publiées sur la non-intervention du pape bien plus fouillées ; quelque chose m’a laissée sur ma faim ; autant lire un bon documentaire : j’aurais aimé que ce soit plus fouillé. C’est un peu simpliste : c’est un livre d’initiation. Et Amen, un film de vulgarisation. Le film ne va pas très loin ; on voit à la fois les portes qui s’ouvrent pour sauver les juifs et le refus de Pie XII.

Christine
Je l’ai lu sans ennui, mais je me suis demandé de quoi nous allions parler, quels sujets de réflexion trouver après. Les faits historiques sont connus. Il y a des moments marquants. C’est un projet sympathique que de laisser un livre pour qu’ensuite les enfants n’oublient pas. Nous avons un avis sur cette période et si nous ne le partagions pas, nous ne pourrions pas être ensemble.

Brigitte
Ce livre m’a bien plu, j’ai aimé le point de vue de Rosetta Loy. J’ai été agréablement surprise, j’ai trouvé beaucoup d’intérêt. J’ai apprécié le point de vue qui n’est pas nettement tranché : rien de manichéen. Des souvenirs de la guerre me sont revenus : les descentes à la cave à cause des bombardements, les cantiques des voisins, les bonbons allemands qu’il ne fallait pas manger, la grand-mère qui avait traversé un pont pour aller nous voir ce qui paraissait un exploit. Je suis allée à Auschwitz et ce lieu m’a fait un effet terrible ; en sortant, plus personne ne peut dire un mot. J’ai connu beaucoup de gens aussi qui craignaient le communisme contre lequel Hitler semblait le seul rempart. Ce livre m’a beaucoup plu parce qu’il est non violent, avec des événements dont on connaît l’importance. Je me rappelle aussi un roman de Pavese où l’enfant ne comprend pas que ses parents ignorent l’oncle mal rasé parmi les partisans et qui le fait condamner par son sourire. J’ai été bouleversée par des gestes tragiques, par exemple, la femme qui met un enfant dans les bras d’un inconnu. Le film Amen m’a plu. Le personnage de Kart est véridique. Parmi les SS, on a l’impression qu’il y a des gens qui auraient voulu qu’il y ait des protestations.

Françoise
Le titre français est bien adapté, mais pas du tout traduit de l’italien, « La parole juive »… C’est un témoignage très intéressant sur le fascisme et l’antisémitisme italiens. On a peu d’ouvrages (traduits) sur le sujet et on a aussi tendance à penser que le fascisme à l’italienne était plus « soft ». Mais en réalité, la propagande antisémite est lancée dès 1937 et les lois antijuives sont votées très tôt. L’analyse de l’auteur est principalement axée sur l’attitude de l’Eglise et surtout des papes. On voit bien la différence de pensée et d’attitude entre Pie XI et Pie XII. Le résultat est accablant pour Pie XII. On peut supposer que si Pie XI avait vécu plus longtemps, l’attitude de l’Eglise en général à l’égard des juifs et des fascistes eût été différente et la tâche de ces derniers à tout le moins rendue plus difficile ; même si semble-t-il il y avait déjà une sorte de conspiration du silence déjà organisée autour de Pie XI (l’encyclique Humani Generis Unitas étouffée). Tout cela sur fond de vie quotidienne d’une petite fille de la haute bourgeoisie romaine. Rosetta Loy nous dépeint une famille ni fasciste, ni antisémite, mais très conservatrice. Les parents n’aiment pas l’uniforme, mais admirent l’Allemagne d’Hitler. Ils gardent leurs distances vis-à-vis du régime, mais on ne sent pas de réelle réprobation. Ils ne prennent pas position vis-à-vis de leurs voisins juifs. C’est sans doute une des raisons des interrogations de la petite fille devenue adulte. Elle règle ses comptes avec toute l’éducation religieuse qu’elle a reçue. Conditionnée comme tous les enfants, en devenant adulte elle se pose beaucoup de questions sur le pape et sa propre famille. J’ai trouvé que c’était un livre émouvant par tous ces détails, la vie quotidienne dans une famille qui n’est pas fasciste. Je n’avais rien lu de semblable. C’est un témoignage très riche, et très émouvant.

Claire
Comme d’habitude, je ne connaissais rien, et pas cet épisode du Vatican. A la différence de ce qui a été dit, je soulignerai que c’est un livre littéraire. Dans la forme, tant l’écriture que le montage, réside l’originalité, avec un art de la composition et de la distance. Elle ne juge pas et d’après ses interviews, c’est son projet de laisser le lecteur juger. La grande histoire est évoquée de façon acérée, documentée, jamais lourdingue, et elle alterne avec des faits, des touches significatives de la petite histoire : je trouve ça très fort. Plaisir, estime et intérêt ont été constants, même si la midinette ne vibre pas. J’ai beaucoup aimé Amen, que je ne serais pas allée voir étant donné les critiques si nous n’avions pas lu ce livre. Pas de manichéisme, mais comme Rosetta Loy, Costa-Gavras a su tracer des destins personnels pour évoquer l’Histoire.

Nos cotes d'amour, de l'enthousiasme au rejet :
                                        
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moyennement
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ouvert ¼
pas du tout
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Le bel appartement romain, les vacances à la montagne, les doux souvenirs d'une enfance innocente cotoient d'autres souvenir, plus inquiétants, qui affleurent peu à peu les visages et les silouhettes de ces personnes devenues du jour au lendemain "autres" par décret, et persécutées pour cela.