Alain Robbe-Grillet
La reprise

Nous avons lu ce livre en décembre 2001.
Nous avions lu Les Gommes en 1998.

Françoise
Je trouve cette reprise laborieuse. L’auteur enfourche ses dadas labyrinthico-fantasmatico-identitaires favoris, mais laisse le lecteur (moi en tout cas) sur le bord du chemin, confondu par le formalisme, l’érotisme convenu et sans imagination. C’aurait pu être un bon érotico-polar, mais on se perd très vite dans l’irrationnel, le rêve -processus certes subtil- mais ce n’est pas suffisant ; c’est le contraire d’un polar et c’est raté : on s’ennuie. L’auteur est érudit, certes il sait écrire, mais il se prend très au sérieux et manque d’humour, ou alors je ne l’ai pas trouvé. On a l’impression qu’il a raté sa cible ( ?) malgré un talent certain. Je ne l’ai pas suivi dans ses dédales identitaires et de faux-semblants, il en rajoute tellement que ça devient grotesque…ou drôle ?… Ce récit est sans doute destiné à ceux qui ont lu ses livres précédents et ce n’est pas mon cas ; je peux donc admettre que beaucoup de choses m’ont échappé. J’ai été déçue, c’est sans doute pourquoi je suis si sévère.
Catherine
Je l'ai lu, pas en entier. L'idée du voyage et la rencontre avec "son double, son sosie, le voyageur" m'a bien plu ; le mystère autour de l'assassinat, de cet appartement irréel, etc. Je me suis donc laissé bercer par cette ambiance ouateuse, à la fois légère et douloureuse, entre le rêve et le cauchemar... jusqu'à la page 84 ! Mais trop, c'est trop. ARG nous conduit vers d'autres personnages fantasques, d'autres lieux revisités. A ce moment, j'ai eu besoin de repères, de marques à quoi me raccrocher. Les notes rajoutent du flou, le doute, bref : où sommes-nous, qui sommes-nous ? J’ai ressenti la même impression de flottement (pas toujours plaisante) qu’en voyant le film Eyes wide shut.

Sabine
Je n’ai pas fini le Robbe-grillet, auquel je n'ai pas tout compris. Après les histoires du soir pour mon rejeton de 4 ans, j'ai un peu de mal à en découdre avec les narrateurs et les histoires berlinoises emmêlées. J'attends de lire les commentaires éclairés des unz-et-dez-autres! De plus, je nage dans les bulletins et les conseils de classe…
Loana
J’ai été d’abord furieuse qu’on ait programmé un Robbe-Grillet, ensuite furieuse en raison du prix du livre. J’ai trouvé ça fabriqué (bien fabriqué ?). Ca sent le procédé. J’ai été intéressée par les notes en bas de page, en milieu de page, ou en haut de page, comme vous voulez. Mais j’ai trouvé le livre chiant ! J’ai acheté Le Voyageur, un recueil d’interviews ; j’aime bien quand il dit du mal des autres. Mais mon exemplaire a des pages qui manquent… Je ne supporte pas sa défense de la pédophilie, qu’il fait en jouant sur l’énonciateur.
Liliane
J’étais contre ce choix. Le seul livre de RG que j’ai aimé, c’est La jalousie, et il reste le seul… Il a un réel talent, et j’ai aimé certains passages, comme la description de la statue sur la place. J’ai bien aimé le début, puis le double. Mais quand le double se double d’un double…, je veux bien que ce soit humoristique, mais je n’ai pas vu l’humour. Les notes sont artificielles, ça n’évolue pas. Les scènes sexuelles sont soi-disant des clins d’œil, mais c’est pas très léger, toujours les mêmes histoires.
« Reprise » est un mot amusant, mais finalement c’est puéril. Je me demande même s’il n’y a pas du gâtisme : les mêmes thèmes… le même procédé, ça n’apporte pas grand chose. Je ne pourrai pas revendre ce livre, hélas car j’ai renversé du pot-au-feu dessus ; j’ai noté qu’il absorbait bien le pot-au-feu.
Monique
Je n’étais pas spécialement partante pour Robbe-Grillet, mais j’ai suivi le mouvement… On retrouve les mêmes thèmes que dans Les gommes : l’errance, le canal, un paysage flou… On voit les obsessions et les fantasmes de vieux gâteux, mais resté très vert sur le plan intellectuel. J’ai été amusée par les notes. On repère la mère et l’inceste, tuer le père, le double qui resurgit, ces grands thèmes psychanalytiques. On ne peut s’identifier à aucun personnage puisque tout se transforme. C’est passionnant dans Jacques le Fataliste, c’était encore nouveau dans les années 60, mais ce n’est plus drôle aujourd’hui.
Brigitte
Je suis partie courageusement, puis j’ai failli m’arrêter, quand la première scène érotique a relancé mon attention. J’aime les premiers souvenirs d’enfance. Je fais le pari que si c’était un premier roman, personne ne le publierait.
Manuel
J’ai été déçu à la fin parce que je n’ai pas toutes les clés. Mais j’ai picoré des passages réussis. J’ai aimé les références à Proust, le mélange de la tasse de thé et du baiser, l’humour des scènes érotiques. Je trouve que RG a un vrai talent de conteur. La description d’une photo aussi est passionnante. C’est purement formel, c’est vrai, mais ça m’a plu.
Claire
Peut-être est-ce un livre pour les garçons ? J’ai envie d’être plus sévère que tout le monde. Pourtant la campagne de presse dithyrambique m’avait donné envie de le lire. Au début, ça marche, dans le train, ce personnage étrange, et puis les déambulations topologiques sont démobilisatrices. Les notes arrivent, c’est amusant, mais assez vite, on découvre les procédés, les rappels, la construction intellectuelle certes de haute volée, mais chiante, car on sent l’artifice. Les personnages n’ayant aucune réalité, puisque le réalisme est déjoué, ne m’intéressent pas. Les thèmes (l’inceste, le double, l’aveuglement) devraient donner de l’ampleur : ça ne décolle pas. La Savigneau, que j’adore pourtant, dit dans Le Monde : « Si l’on ne connaît pas les livres de Robbe-Grillet, que peut-on comprendre à cette histoire d’agent secret ? » Bien que j’aie lu deux ou trois RG que j’ai oubliés, je suis reléguée parmi ceux qui ne comprennent rien. Quant aux scènes érotiques, dit la Josiane, « si on ne les lit pas comme clins d’œil à tout un univers de mots et d’images, elles sont affligeantes » : je les trouve affligeantes. Je passe sur la référence à Kierkegaard auquel renverrait un des personnages, car ça me dégoûte. Ce sur quoi je proteste par rapport à tous les avis admiratifs sur les descriptions, c’est le talent d’écriture, notamment dans les descriptions qui l’ont rendu célèbre : c’est plat et raplapa. Des clichés à mettre dans le dictionnaire de Bouvard et Pécuchet qui se moquait des adjectifs, tels la vue toujours…"imprenable". Ici, les armoires sont "grosses", les bâches "vastes", les matelas "épais", les barreaux "lourds" : les adjectifs sont parfois inversés, ça fait plus chic : une "traditionnelle bible", des "émouvantes lèvres" ; et on ne lésine pas sur l’adjectif improbable : un improbable éclat, un improbable bourgeois, d’une façon improbable… C’est mauvais, c’est très mauvais. Pourquoi personne ne dit que Robbe-Grillet est tartignolle ?

 

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Nous sommes à Berlin, en novembre 1949. HR, agent subalterne d'un service français de renseignement et d'interventions hors normes, arrive dans l'ancienne capitale en ruine, à laquelle il se croit lié par un souvenir confus, remontant par bouffées de sa très jeune enfance. Il y est aujourd'hui chargé d'une mission dont ses chefs n'ont pas cru bon de lui dévoiler la signification réelle, préférant n'en fournir que les éléments indispensables pour l'action qu'on attend de son aveugle fidélité. Mais les choses ne se passent pas comme prévu...