Folio 740 p.

Istanbul, en cet hiver 1591, est sous la neige. Mais un cadavre, le crâne fracassé, nous parle depuis le puits où il a été jeté. Il connaît son assassin, de même que les raisons du meurtre dont il a été victime : un complot contre l'Empire ottoman, sa culture, ses traditions, et sa peinture. Car les miniaturistes de l'atelier du Sultan, dont il faisait partie, sont chargés d'illustrer un livre à la manière italienne...
Mon nom est Rouge, roman polyphonique et foisonnant, nous plonge dans l'univers fascinant de l'Empire ottoman de la fin du XVIe siècle, et nous tient en haleine jusqu'à la dernière page par un extraordinaire suspense. Une subtile réflexion sur la confrontation entre Occident et Orient sous-tend cette trame policière, elle-même doublée d'une intrigue amoureuse, dans un récit parfaitement maîtrisé. Un roman d'une force et d'une qualité rares.

Orhan Pamuk
Mon nom est Rouge

Nous avons lu ce livre en mai 2006.

 

Jean-Pierre
30, 40 puis 47 pages : fin du chapitre 4. Pas plus loin, stop.
Exotisme géographique et historique, foisonnement des noms de lieux et de personnes inconnus, plongées dans des situations miniatures et des univers énigmatiques, stop.
Dommage, car traduction savoureuse, populaire, mais tant pis. Pas le temps ni le courage d'avaler 736 pages, stop.
Pour cette raison, pas d'avis, stop.
Suis toute ouïe pour écouter les commentaires du groupe dans l'espoir qu'ils me motiveront pour une lecture ultérieure, stop.
Brigitte entre et
Je suis contente de l'avoir lu, ce que je n'aurais sans doute pas fait si le groupe ne l'avait pas proposé. A la façon d'une miniature persane (ou turque) ce livre comporte une infinité de détails, à la limite de la répétition. Il nous emporte dans le monde des peintres miniaturistes du XVIe siècle, de son mode de vie, de sa culture, de ses angoisses. Il insiste sur l'importance des mythes complètement mêlés à l'histoire du Moyen-Orient pendant notre Moyen-Âge et la Renaissance ; sur l'évolution complètement différente de la peinture en Occident qui vient de découvrir la perspective et qui s'adonne à l'art du portrait, et les doutes qu'elle génère dans la pratique de la miniature. Il n'y a cependant aucune allusion aux croisades. J'ai bien aimé les chapitres où l'auteur donne la parole aux images elles-mêmes : le chien, la pièce d'or, l'arbre, les mendiants errants, sans oublier le cheval et ses naseaux ouverts ou non.
Nous découvrons les ruelles d'Istanbul, le statut des femmes, leurs moyens d'actions, les rites funéraires, l'importance du sultan (la terreur-admiration liée à sa personne) à travers une histoire d'amour et une sorte d'enquête policière. Malgré quelques longueurs, j'ai bien aimé ce livre, pour l'ouverture qu'il apporte sur une époque et une culture que je connais extrêmement mal. Plusieurs personnages sont attachants, Esther, Sheikuré, L'Oncle, Le Noir...
Françoise D (avis transmis)
Désolée de ne pas "Pamuker" avec vous. J'ai bien peur de ne pas pouvoir dépasser la page 50, et encore. Trop chiant, malgré une ironie de ton parfois, mais ce n'est pas suffisant. Ce que j'ai trouvé le plus intéressant, ce sont les petites histoires dans l'histoire comme par exemple à propos de la signature ou des peintres qui deviennent aveugles. Dommage.
Claire
Cet insupportable gros pavé m'est tombé des mains. Je l'ai vendu à Christine. J'ai des difficultés de compréhension et j'ai essayé de sauter des passages. Le volume du livre est un obstacle physiologique.

Monique
J'en ai lu 10 pages. Il faut du temps pour rentrer dans la construction de ce livre. On passe d'un personnage à l'autre et je n'y étais pas du tout. Ce n'est pas un livre qui s'ouvre le soir, un livre de détente de fin de journée. Je le lirai pendant les vacances. On a fait une erreur en le programmant pendant l'année.

Manu
J'en suis presque à la page 100. Il faut en effet avoir du temps pour rentrer dans la structure. Il suffit juste d'adhérer au principe du "roman polyphonique" (dixit la 4ème de couverture !). Je le lirai également pendant les vacances et là, j'aurai un avis.
Christine
Je m'étais dit que ça allait être une lecture difficile. J'avais déjà lu Le Livre noir, qui était assez difficile. Je l'ai terminé hier, j'en ai dévoré 500 pages en une journée. Le début est en effet rébarbatif. Mais finalement, il y a assez peu de personnages : les trois peintres, le maître d'atelier, l'Oncle, Le Noir, Esther la juive. Les descriptions des rues d'Istanbul, l'art et les miniatures persanes sont fascinants. Toute l'histoire repose sur le fait que le sultan veut faire une œuvre qui rivalise avec l'art des Vénitiens. En Perse, on ne recherche pas à représenter la réalité, car il n'y a que Dieu qui puisse façonner la réalité. La peinture est donc figée, les apprentis qui dessinent un cheval ne représentent pas des images de chevaux existants, mais la stylisation d'un cheval. Pareillement, il n'y a pas de perspective dans cette peinture. Dès que l'on a dépassé les 100-150 premières pages, on se passionne pour savoir qui a tué Monsieur Délicat, pour l'histoire sentimentale. On entre aussi dans les différentes façons de concevoir la peinture : perse, chinoise, vénitienne et c'est fabuleux. C'est le meilleur Pamuk que j'ai lu, parce qu'il y a une vraie histoire et une vraie chronologie. On entre dans les ateliers, avec les apprentis qui sont battus et qui sont les mignons du maître. Sur la cécité aussi : presque tous les peintres deviennent aveugles car c'est un honneur de devenir aveugle et certains même font semblant de devenir aveugles. On comprend mieux les miniatures persanes. Je pense que c'est un auteur nobélisable.
Jacqueline entre et
J'ai eu du mal à rentrer dedans. Rétrospectivement, je pense également que c'est un livre pour l'été. Au début, j'ai été ennuyée par le procédé de faire parler les personnages, tous les personnages, y compris le cadavre et le chien. Par exemple, les trois peintres, je les confondais. Je trouvais le procédé systématique. Ensuite, une fois dedans, ça se lit facilement. Et ça évoque pleins de choses passionnantes sur la civilisation de cette époque : les miniatures, la représentation du monde, le cheval qui représente tous les chevaux, les références à des histoires que l'on ne connaît pas, les amours du sultan, la culture du conte que je découvre et qui est extrêmement intéressante. L'intrigue policière est également très présente, les personnages sont attachants et je l'ai lu facilement jusqu'à la fin. J'ai découvert plein de choses sur les peintres, les relations dans les ateliers, les luttes et les rivalités des deux écoles, l'Oncle qui adopte des procédés occidentaux (des Vénitiens). L'histoire du chien qui parle n'est pas gratuite, on le découvre à la fin. En fait, c'est une caricature qui est affichée dans le café que fréquentent les peintres. Et c'est le conteur du café qui fait parler les images affichées... Ça m'a également fait penser à Umberto Eco mais avec des références à des choses que je ne connais pas.

Katell
J'étais contre le projet de le mettre au programme parce que j'avais tenté de le lire à sa sortie (il y a trois ou quatre ans) et je me souvenais d'un pavé assez obscur qui finalement m'était tombé des mains au bout d'une centaine de pages. Mais bon, Orhan Pamuk, ça pose dans une bibliothèque…
A vous écouter, je retrouve mes sensations de lecture mais je suis contente que Christine et Jacqueline l'aient lu pour moi ! Merci les filles. C'était passionnant de vous écouter.

Rozenn (qui avait proposé le livre)
C'est un de mes étudiants turcs qui m'avait recommandé Orhan Pamuk comme l'écrivain turc incontournable. Je ne me souviens pas de l'intrigue policière ni de l'histoire sentimentale, mais des réflexions sur l'art, d'un débat passionnant sur la conception de l'art, sur la signature. C'est une ouverture sur une culture que je ne connais pas. J'ai été aussi très intéressée par la place de cette femme juive, Esther, dans la ville, cette messagère…

Lil (de Bretagne, suivie d'autres avis du groupe breton)
Je regrette de n'avoir eu ni la patience, ni l'humeur, ni la disponibilité d'esprit pour accepter de me laisser emberlificoter pendant plus de 100 pages sans entrevoir le dessein de l'auteur...
Il paraît que ça valait le coup de persévérer... Je compte donc sur vous pour me donner envie de reprendre cette lecture interrompue prématurément en me laissant "enluminer" sans résistance !
Maryvonne
J'ai été déroutée par le côté fantastique du récit - mort vivant, chien qui parle - qui m'a fait abandonner le livre après 40 pages de lecture.

Mon
J'ai eu beaucoup de mal à "entrer" dans ce livre. Déroutée pendant les 50 premières pages par cet univers dont le lieu, l'époque, les mœurs me sont étrangères.
Déroutée par la structure aussi. Tous ces monologues qui transportent d'un acteur à un autre. Et quelquefois ces "acteurs" sont un chien, la mort, la couleur rouge...
Et cette référence constante au monde de la peinture (miniature ? enluminure ?) pour lequel je n'ai pratiquement pas de références.
Puis, peu à peu, on se laisse en quelque sorte "envoûter". Les personnages prennent vie, l'intrigue amoureuse, au début un peu languissante, prend forme et vigueur. L'intrigue "policière" sur le meurtre de Délicat commence à intéresser quand l'Assassin prend la parole.
Et tout un monde se bâtit peu à peu.
Même l'intrigue en quelque sorte sous-jacente de la lutte entre la conception de l'art à l'occidentale et de l'art traditionnel devient importante puisqu'elle laisse planer le mystère de la "dernière miniature".
Finalement, j'ai bien envie de finir la lecture de ce livre (j'en suis à environ la moitié) parce que ces personnages ont pris vie pour moi et parce que je voudrais tout de même savoir qui est l'assassin.
Nicole
Dès la première page, j'ai adhéré au récit : un mort qui parle au fond du puits dans lequel on l'a jeté ! Mais je ne m'attendais pas à un tel luxe de détails sur les miniatures. Eh bien, à part l'épisode des caves du Trésor du Sultan, qui m'a semblé très long, je me suis laissé emporter par l'histoire et toutes les informations qu'elle transmettait.
Je n'ai pu m'empêcher de faire un parallèle entre la confrontation Orient-Occident actuel, ai retrouvé le fanatisme religieux, l'antisémitisme et la condition mineure des femmes. Orhan Pamuk a beau dire dans une interview que ce livre n'est pas politique, je pense tout le contraire et salue son talent de pouvoir à la fois faire la critique d'une société, nous enseigner l'histoire de l'art de la miniature, et nous captiver par une histoire policière.
Lona
Les chapitres sont courts ; le style est facile. Mais malgré ces facilités, j'ai trouvé ces récits trop répétitifs, déroutants aussi (quand l'auteur fait parler l'Arbre, le Chien, etc.), trop détaillés pour ce qui est peintures, miniatures. Je pense que l'essentiel aurait pu être concentré dans 150 ou 200 pages... C'est à la 150ème page environ que je me suis interrogée : est-ce que les récits seraient autonomes ? Pourrait-on les lire, par exemple personnage par personnage, et court-circuiter certains chapitres ? Est-ce que j'ai envie de continuer à lire ? Mais ma curiosité l'a emporté pour connaître à la fois l'assassin (un peu du Agatha Christie ?) et connaître la suite de l'histoire sentimentale (un peu du Delly de mes 14 ans ?). Un milieu d'artistes, de peintres, de graveurs, de miniaturistes, de gens cultivés, érudits, nous fait pénétrer dans la Cour des Grands de l'Empire Ottoman, certes tous des gens très intéressants, mais un monde inconnu (de moi) où se mélangent cultures perse, indienne, chinoise et surtout, l'intrus, la culture occidentale !
Bien sûr on y aborde le statut de la femme, la domination de l'homme (père ou mari ou la famille de celui-ci), les trafics de tous genres et la corruption, la drogue, le vagabondage, l'hérésie, le sacrilège, les rivalités professionnelles, la stigmatisation du juif, l'homosexualité et la pédérastie, l'érotisme, etc. Tout cela dans un climat d'interdits, de violence extrême, de coups, de meurtres, d'assassinats, de sang versé, de sacrifices... Tout est riche de couleurs !
Je me demandais un moment donné s'il y avait des personnages que je pouvais préférer à d'autres ? J'aurais dit, un moment donné : Esther, victime mais aussi manipulatrice ; ou l'Oncle, au moins jusqu'à son décès, car ce qu'on apprend de lui après est moins engageant ; ou Le Noir dans sa naïveté ; Shekuré était une sacrée manipulatrice ; peut-être que le Diable était le plus sympa dans son analyse de la société... Faudra que je relise le chapitre le concernant...
Cette culture orientale faite d'"épidermique", de touchers, d'embrassades, de corps à corps, de caresses, de tendresses excessives, de sanglots, de pleurs, de gémissements, de larmes m'a souvent lassée... J'ai retenu : la méfiance de cette civilisation de tout ce qui était "extérieur" à eux, de tout ce qui était "l'Autre", la cécité pour le nouveau ; le rejet, le combat pour se protéger de ce qui vient de l'Occident, le refus de la créativité ; mais aussi la méfiance réciproque de deux cultures qui s'ignorent et se fuient : sujet toujours d'actualité !



 

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