Hans Fallada
Seul dans Berlin
Nous avons lu ce livre en septembre 2005.
Sabine de Nîmes
Mon avis sur Seul dans Berlin sera bref car j'ai encartonné
le livre à la cave (à défaut de bibliothèque),
donc... J'ai lu ce livre il y a un an environ, je l'ai beaucoup aimé
pour plusieurs raisons :
- on parle peu des mouvements de résistance en Allemagne (le
film sur Hitler est d'ailleurs assez révélateur du "rejet"
français concernant la vie quotidienne des Allemands durant cette
période) ;
- lhistoire, bien que parfois peu réaliste, est prenante ;
on suit le parcours des lettres avec angoisse ;
- on sent une tension permanente, un sentiment de terreur dans la
vie (ambiance sûrement plus proche de l'univers de Kafka que de
la réalité historique) ;
- ma mère était à Berlin, sous les bombardements
jusqu'en 45, et tout ce qui touche à cette période m'intéresse ;
- je signale d'ailleurs qu'un petit livre de Stig Dagerman (auteur lu
au groupe, non ?) sur Berlin après 45 (Automne
allemand)est paru chez Babel Actes Sud, et c'est très intéressant.
Katell
Dimanche dernier, j'ai lâché à regret le flamboyant
Blonde, de Joyce Carol Oates pour Hans Fallada et j'ai été
très déroutée. C'était assez laborieux de
passer sans transition d'une écriture baroque et poétique
à cette facture archi-classique, avec un exposé un peu primaire
des personnages. J'ai trouvé les premiers chapitres assez caricaturaux.
Cela m'a fait penser à Paasilina
et sa galerie de petits malfrats, Hette Häberlé (la marchande
d'animaux) en douce empoisonneuse, etc. Je m'attendais à lire un
roman engagé et violent sur la résistance allemande et malgré
l'arrière-plan politique, je suis en train de lire... un roman
policier. Par exemple, je ne trouve pas très convaincants les idéaux
et la résistance de Quangel. Si je vous dis aussi j'ai relativement
de sympathie pour le commissaire de la Gestapo Escherich... Je ne l'ai
pas encore terminé (Kluge vient d'être assassiné...)
et on annonce que "les choses se gâtent pour les Quangel"...
J'ai envie de savoir la fin et pour l'instant je l'ouvre à moitié,
mais j'ai hâte de retrouve ma Blonde, qui a quand même une
autre dimension !
Muriel
J'ai beaucoup aimé. C'est un sujet dont on parle rarement :
la résistance en Allemagne. Le livre est très intéressant
avec la description de ce climat de crainte et de délation, ce
noyautage des esprits. Même si les titres de chapitres annoncent
ce qui se passe, il y a du suspense. Ce roman historique qui m'a apporté
plaisir du roman et plaisir d'apprendre quelque chose.
Annick
Je suis heureuse d'avoir découvert ce livre : il est passionnant.
Le choix du sujet n'est pas original, c'est le fascisme ordinaire. J'ai
aimé les raisons données au nom desquelles certains résistent,
ce sont des raisons personnelles. Ce n'est pas intellectualisé.
Le personnage de Quangel est très beau. La diversité des
personnages est très intéressante. Le personnage d'Echerich
est lui aussi intéressant. Le musicien résiste parce qu'il
est en marge de la société. Chacun a sa façon de
dire non. L'écriture factuelle et classique convient au sujet.
Je vais essayer de le lire en allemand. C'est un grand livre.
Claire
Cet auteur a écrit d'autres livres dont les titres sont très
intéressants. Je me suis dit, 550 pages c'est trop mais j'ai été
emballée et captivée. C'est un livre formidable et magistral,
très bien mené, symphonique, avec ses histoires individuelles
illustrant la grande histoire. Les personnages ne sont pas des pantins
mais sont appronfondis. Il y a Quangel, un héros, mais une foule
d'autres personnages qu'on suit, qu'on accompagne dans les rebondissements
multiples. La structure du livre, invisible, favorise l'aspect haletant
du livre. On se demande quand il a écrit : juste après
la guerre, dans les années 60, tout récemment ?
Annick
C'est un livre d'une grande modernité.
Claire
C'est vraiment un grand livre !
Geneviève
Je suis très contente d'avoir découvert ce livre de cet
auteur que je ne connaissais pas. Le récit me touche beaucoup personnellement.
Il y a peu de documents sur la résistance allemande. C'est une
période fascinante. Je me pose la question : comment cela
a-t-il été possible ? Ce qui est intéressant,
c'est le raisonnement de ces gens ordinaires : ce qui se passe n'est
pas bien, donc j'irai jusqu'à risquer ma vie. Le déclencheur,
c'est la mort de ce fils qui provoque une réaction chez la mère
puis le père
Le galerie de personnages est riche : petits
malfrats, petits nazillons, le commissaire
Est-ce vraisemblable,
on ne sait pas car c'est un sujet pour lequel on a très peu d'informations.
Brigitte N
J'ai lu le livre il y a trois ans et je l'avais trouvé très
intense, très angoissant car on sait qu'ils vont tous mourir à
la fin. Je suis venue ce soir pour vous écouter car personne autour
de moi ne l'a lu.
Eva
J'ai été très prise par le livre : je ne pouvais
rien lire d'autre ! Ce livre répond a une question que je
me posais enfant : les Allemands étaient-ils tous mauvais ?
Ce livre est très subtil. Le héros se livre à une
entreprise dérisoire qui lui permet de rester humain et fort dans
un monde déshumanisé. Je me souviens de chaque personnage.
Il y a une structure invisible comme disait Claire très forte dans
sa construction. Pour moi c'est du niveau de Dostoïevski. Je me suis
fait la réflexion suivante concernant ce qu'est un bon livre :
c'est un livre qui vous fait changer d'horizon. C'est le cas de ce livre.
Le personnage du commissaire est fabuleux. Je ne me suis pas sentie mal,
voyeuse, en lisant le livre, car les scènes atroces sont sans complaisance
malgré leur dureté.
Monique
Je suis en retard dans mes lectures et je n'ai pas fini le livre, mais
mes premières impressions sont très positives. Les cinquante
premières pages m'ont emballée ! On entre dans la vie
de ces gens sans commentaires explicatifs. Où sont les limites ?
Les paliers de l'immeuble ? Les limites sont-elles à l'intérieur
des appartements ? Les limites sont-elles entre les gens ? Ou
à l'intérieur d'eux-mêmes ? C'est extraordinaire
d'humanité. On est pris par les personnages et leur humanité.
J'ai pensé à Robert Anthelme et à L'Espèce
humaine : quand le détenu travaille et qu'un garde
allemand lui dit de ralentir.
Brigitte
Je l'ai lu il y a six mois. J'ai trouvé cette histoire de cartes
postales magnifique. Quangel trouve un moyen de protester qui est étranger
à ce qu'il est. On entre dans cet immeuble archi banal où
se vivent des choses extraordinaires. L'auteur va directement toucher
quelque chose de profond en nous. Les personnages sont souvent aux les
limites de l'extrême, ce qui produit une grande tension, de grandes
émotions chez le lecteur. Les personnes ont plusieurs facettes
insoupçonnables. J'ai pensé à cet autre livre de
Hans Haffner L'Histoire
d'un allemand. J'ai compris pourquoi l'Allemagne en était
arrivée là, à cause de la nostalgie de la fusion
pendant la guerre de 14-18.
Françoise O
Je suis consternée à vous écouter. C'est un livre
que je n'arrive pas à lire, enfin pas de la façon dont vous
en parlez car je n'arrive pas à avoir votre distance. Je me suis
sentie complètement impliquée dans cette histoire qui est
un désastre annoncé ! Ce livre me détruit, ça
m'est totalement insupportable. J'ai donc décidé de le lire
par morceaux, un peu comme un essai sur l'homme honnête, l'homme
pourri, le juste et tous ceux qui sont entre les deux. Ce livre montre
que Berlin n'était pas une ville nazie, d'ailleurs Hitler avait
voulu reconstruire la capitale de l'Allemagne et la baptiser Germania.
Ce livre peut être transposé dans n'importe quel pays, à
n'importe quelle époque, car il montre le fonctionnement d'un régime
totalitariste. C'est un bon livre mais il me rend malade !
Christine
Je suis comme Françoise, je n'ai pas pu lire jusqu'au bout. Dès
les premières pages, j'ai été submergée d'angoisse.
J'ai arrêté au moment du suicide de Madame Rosenthal. Puis
j'ai essayé de reprendre pour pouvoir vous en parler ce soir mais
je ne peux pas aller plus loin. Pour cette raison, je pense que le livre
est sûrement une réussite...
Marie-Jo
Ce livre est bouleversant. C'est une belle idée de prendre une
unité de lieu avec ces voisins qui auraient pu être avoir
des relations banales. L'Histoire passe au travers et petitesses et bassesses
de chacun apparaissent. La fiction me fait pénétrer dans
la vie de ces êtres. Je me souviendrai toujours de ce personnage
formidable qu'est Quangel qui découvre la musique en prison. L'écriture
est fluide, classique. L'auteur est attentif à son lecteur en faisant
des rappels sur les personnages quand il en parle à nouveau. J'aime
beaucoup ces attentions. Je me suis posé la question de ce que
je ferais dans cette situation exceptionnelle et tragique. Ce livre m'a
touchée et marquée.
Liliane
Lorsque ce livre a été proposé, je n'avais pas envie
de le lire : encore un livre sur le nazisme ! Et je connaissais
cet aspect de la résistance en Allemagne. Malgré cela, je
l'ai quand même lu et j'ai été agréablement
surprise et frappée par la manière dont le récit
est mené. Le narrateur entre profondément dans la psychologie
des personnages mais en passant par le dialogue ; l'auteur manipule
le lecteur et les personnages se manipulent entre eux. On entre dans la
psychologie de chacun des personnages. Mais j'ai trouvé le livre
un peu long et je ne l'ai pas encore fini. Il y a une apparente légèreté
de l'écriture, avec des passages un peu trop démonstratifs,
notamment le dialogue de la dernière confrontation de Quangel et
du commissaire Escherisch.
Jacqueline
Je suis très partagée mais contente d'avoir écouté
vos avis. Je ne suis pas entrée facilement dans le livre et j'ai
eu du mal à le lire à cause de l'écriture naturaliste
et puis finalement j'ai accroché. Mais peut-on écrire un
roman sur cette période ? Que ferais-je dans une telle situation ?
Primo Levi avait aimé ce livre, le récit de ce contremaître
et de ces gens ordinaires. Quangel s'engage dans une action absolument
dérisoire. J'aime beaucoup le titre en français car la traduction
allemande est Chacun meurt seul. J'ai été surprise
par le nombre de références aux camps de concentration.
Ils étaient donc connus ?
Geneviève
Des camps existaient déjà où on emprisonnait des
opposants allemands au régime.
Jacqueline
J'ai quand même été gênée par l'aspect
manichéen : tous les nazis sont des porcs, des pauvres type,
des alcoolos. J'ai pas mal de réticences et reste perplexe.
Anne
J'ai eu beaucoup de mal à lire ce livre car j'étais très
impliquée dans l'histoire et j'ai dû faire des pauses. J'ai
ressenti la même chose qu'avec La Liste de Schindler. Je
m'en voulais car j'étais impuissante face à ce qui se passait.
Ayant fait de nombreuses années d'études en allemand, je
me sentais allemande. Tous les défauts humains sont concentrés
dans ce livre. Je pense que ce livre n'est pas assez lu en France :
les Allemands ne sont pas tous "méchants". Quand on lit
ce livre, on est presque complice des bons et des méchants. Le
style est très factuel, journalistique, mais ensuite on se laisse
prendre et on vit avec les personnages. Le lecteur est pris au piège
et doit se forger son avis. C'est un livre bouleversant qui demande beaucoup
de réflexion. C'est un livre qui me marquera. Les femmes ont le
beau rôle dans ce livre, notamment Eva Kluge.
Manu
J'ai fini le livre ce matin. Ça a été un électrochoc
et il m'a bouleversé. Quangel fait quelque chose de dérisoire.
Je n'y ai rien trouvé de manichéen car tous les personnages
ont des failles ; Quangel a suivi un moment donné Hitler et
la mort de son fils et les reproches de sa femme sont des catalyseurs.
Le style est très simple, presque naïf (les têtes de
rat, le nez d'aigle) mais diablement efficace et sans fioritures (les
scènes de torture sont insoutenables). La galerie de personnages
offre une mosaïque humaine presque hallucinante : comme par
exemple les compagnons de cellule de Quangel. L'ambiance de la ville,
la peur qui sourd, les moments de tensions sont remarquables. J'ai pensé
à Uranus
de Marcel Aymé et cette ambiance d'après-guerre où
l'on découvre que tout le monde à collaboré. Ce qui
ramène toujours à la même question : qu'aurions-nous
fait ? Un livre passionnant et brillant.
Françoise D
Je suis contente après vous avoir écoutés car c'est
moi qui ai proposé ce livre. Je l'avais lu avec mon autre groupe
de lecture et les avis étaient très positifs. Pour ma part,
j'ai beaucoup aimé ce livre. Cette aventure policière m'a
tenue en haleine. Il y a beaucoup de subtilité dans les rapports
entre les époux, entre le procureur et Madame Rosenthal. Il reste
cependant des zones d'ombre ; mais la machine broie tout le monde.
Ce livre nous met face à nous-mêmes. Quand on voit comment
on se comporte en entreprise, ça fait réfléchir.
Ce livre m'a changée. Il y a quand même une fin heureuse
pour le petit Allemand et j'admire la postière Eva qui arrive à
s'en sortir. Le récit n'est pas complètement noir.
Florence
Je n'ai pas lu le livre. C'est très intéressant d'écouter
vos avis mais ils ne m'ont pas donné envie de lire le livre. Ce
n'est pas le moment pour moi, j'ai peur de cette lecture.
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