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Irène Némirovsky
Suite française
Nous avons lu ce livre en novembre 2006.
Nous avions lu de cette auteure Les chiens et les loups en 1996
et le nouveau groupe parisien lira Le
maître des âmes
en juin 2017.
Ève
Voici mon avis. Je me suis un peu lâchée, une fois n'est
pas coutume... Un jour, au cours d'une récente soirée-groupe,
l'une d'entre vous avait parlé de "choc" à propos
de lectures qui marquent. Eh bien là, j'ai vraiment eu ce choc.
Le premier livre que j'avais lu d'Irène Némirovsky était
David Golder. Pas désagréable, mais le plaisir était
loin d'atteindre ce que j'ai éprouvé avec Suite française.
Un réel bonheur. J'ai adoré ce livre. Quelle merveille d'écriture !
Quelle maîtrise, quelle lucidité, quelle finesse...
Et quelle galerie de personnages et de portraits ! Travaillés,
peaufinés, consistant. Une sorte de panoplie sociale... les grands
bourgeois ; les petits ; les bourgeois de province ; les
petits employés ; les nouveaux riches ; les noblesses
décadentes ; les domestiques ; les demi-mondaines ;
les affairistes ; les banquiers véreux ; les paysans ;
les ouvriers ; les commerçants avides ; les enfants ;
les femmes honnêtes ; la mère exemplaire ; la mère
abusive ; l'écrivain prétentieux ; des militaires
allemands pleins de candeur ; l'officier, sensible et cultivé...
J'en oublie ! Les purs ; les cyniques ; les sincères ;
les hypocrites ; les gens simples ; les romantiques ; les
ados exaltés ; les lâches ; les veules... Et même
les animaux ! Chat ; cheval ; âne ; canard...
On trouve par exemple cinq pages (170 à 174) sur la dernière
escapade nocturne du chaton des Péricand... Un petit bijou !
Descriptions sans jamais aucune lourdeur ni mièvrerie, dans un
langage tellement élégant, ciselé, fluide... Et quel
talent dans la narration. Comme l'amour interdit qu'éprouve Lucile
pour l'officier allemand - qui sous une plume moins somptueuse me
serait apparu affligeant de banalité ; la haine de sa belle-mère
qui ne vit, recluse, que dans l'attente du retour de son fils ; la
fête organisée par les Allemands ; l'ambivalence des
sentiments à l'égard de l'occupant... Je ne peux tout énumérer,
tout est remarquable.
Et aussi quel mordant ! Quel humour acerbe, par exemple lorsque Mme
Péricand, en pleine débâcle, oublie son beau-père
à l'auberge ; ou glaçant, dans le récit de la
mise à sac du château, suivie du lynchage de l'abbé...
Ces émois littéraires en ont réveillé d'autres,
plus personnels, oubliés depuis l'enfance : lorsque ma mère
nous racontait son propre vécu de l'exode, fuyant les persécutions
avec ma sur âgée de 5 ans et moi, bébé
de 4 mois
J'ai été vraiment remuée par le destin
d'Irène Némirovsky. Le peu que j'ai appris sur elle, dans
la préface, est resté en toile de fond tout au long de ma
lecture et m'a fait ressentir l'amertume dans laquelle elle a vécu
les dernières années de sa vie.
Katell
Après l'avis d'Ève, je n'ai pas grand chose à ajouter.
J'ai trouvé ce livre formidable et je suis heureuse de voir qu'il
est toujours en tête des ventes ! Comme quoi... Je crois que
j'ai préféré la deuxième partie à la
première, parce qu'elle s'étend plus longuement sur la vie
et le ressenti de la jeune femme. Parfois aussi, je craignais la caricature
des personnages et bien non ! Sa sensibilité lui fait éviter
bien des écueils et ce sont justes de magnifiques portraits d'hommes
et de femmes. Encore une grande écrivaine fauchée par la
guerre (l'autre, je pense que c'est Anne Franck).
Liliane
Je ne serai pas parmi vous ce soir, à mon grand regret. Je suis
en train de lire La Suite française mais je n'en suis qu'à
la moitié du livre, j'ai l'esprit peu disponible. Cependant Irène
Némirovsky est capable de retenir mon attention malgré mes
soucis, l'écriture est très efficace.
Françoise O
Jai abordé le livre avec beaucoup démotion.
Lécriture sur la nature est un peu répétitive.
Il y a un contraste entre ce jour de 40 entre le rayonnant du soleil et
le drame qui se passe.
Je suis daccord avec ce que dit Ève. Lexode est une
mauvaise page de lhistoire de France. Lauteure choisit des
personnages qui sont à la limite de la caricature, les banquiers,
les artistes, ok, mais elle est méprisante avec les petites gens,
les cathos bourgeois ; mais les a-t-elle fréquentés ?
Elle est condescendante. On sent quelle est restée une aristocrate
de lEst. Il y a contraste entre le mépris et la condescendance
quelle a pour le peuple français, et lindulgence quelle
a pour les Allemands (il est vrai quelle ne parle pas des SS ni
des nazis).
Je suis malheureuse de critiquer Irène Némirovsky qui a
été déportée comme juive.
Annick
Cest un livre remarquable. Ève en parle très bien.
Cest remarquablement écrit, dune écriture classique,
mais belle et fluide qui apporte du plaisir. Les deux parties sont écrites
et construites de manières très différentes ;
dans « Dolce », on sinstalle dans quelque
chose de lent, certains personnages sennuient, on quitte définitivement
la caricature. Mme Angellis maltraite sa belle-fille, plus tard on apprend
quelle passe des heures à essayer de faire revivre son fils,
alors elle devient beaucoup plus intéressante. Le personnage de
Lucile est intéressant aussi dans sa complexité. La description
de la bourgeoisie me semble juste. Il y a une magnifique description,
pleine de délicatesse, de la façon dont Madeleine et Jean-Marie
éprouvent un sentiment amoureux. Les récits de loccupation
et de lexode ne ressemblent à rien de ce que javais
déjà lu sur ces sujets. Sur loccupation cest
subtil, ça rappelle Le Silence de la mer, on shabitue
les uns les autres ; lauteure nest pas dans le conformisme,
elle montre comment se font les choses petit à petit, ce nest
pas caricatural, cest dune grande sensibilité et cest
ce quelle a vécu. Lécriture est très
belle ; je me suis rendu compte quelle navait pas fini,
mais cette fin ouverte est très bien. Si elle avait pu construire
sa symphonie jusquau bout caurait été exceptionnel.
Je louvre en très grand.
Sabine
J'ai lu ce livre à sa sortie, avec un préjugé plus
que favorable : nous avions lu déjà un de ses romans
il y a dix ans pour le groupe Les Chiens et les loups et j'ai,
de mon côté, lu tous ses autres romans. Il y a une grande
"simplicité" dans son écriture, qui pourrait paraître
comme un défaut (peut-être). Le lecteur entre très
vite dans les différents destins que le narrateur s'attache à
suivre. On sait que l'écriture du livre est concomitante aux faits
relatés : on est à la limite de l'autobiographique,
du récit journalistique. Connaissant la fin tragique de la romancière,
ce récit est d'autant plus poignant. Cela dit, ce n'est pas l'ouvrage
que j'ai préféré chez cette auteure. J'ai quelques
réticences quant à l'écriture, même si je n'ai
pas boudé mon plaisir.
Jacqueline
Cest un livre très intéressant. En tant quauteure
elle est sympathique, elle a une espèce de naïveté
quon voit dans les notes de fin qui lui ont servi à construire
le livre, mais le livre nest pas terminé, il manque 2 ou
3 parties ; cest un projet intéressant décrire
au jour le jour dont la suite dépend de lévolution
historique, cest un peu à lancienne lidée
de faire une peinture sociale très large ; ça ma
rappelé Les Thibaut (la guerre de 14). Le projet davoir
des gens simples pour héros est sympathique mais je nai pas
tellement accroché. Jai été interpellée
par le personnage de Lucile. Cest bien que les Allemands ne soient
pas caricaturaux. Dommage quelle nait pas pu terminer.
Claude
Cest bien écrit, très intéressant, je ne connaissais
rien à lexode, jai appris beaucoup.
On ressent bien le danger qui grandit, les gens qui ont peur, leurs réactions.
On ressent un mépris du peuple, un dégoût de la promiscuité.
Les Michaud sont très humains, jai beaucoup aimé le
passage où elle rassemble les enfants après le bombardement.
Mme Péricand est curieuse, elle distribue ses richesses puis change
davis quand elle saperçoit quelle na plus
de quoi acheter des biscuits à ses enfants.
Brigitte
Cest très bien écrit, cest sûr. Il y a
¼ de drame et ¾ de descriptions magnifiques pour faire passer.
Je voudrais souligner 3 aspects particuliers :
1. Corte volant lessence à ce jeune couple, puis arrivant
à Vichy, cest lénormité, il a gommé
ce quil a fait. Cette omission est très bien décrite.
2. Madeleine et son mari jaloux : il lui mène une vie
impossible mais elle trouve normal dessayer de le sauver, et lui
aussi trouve ça normal.
3. Lucile, quest-ce quon pourrait en dire ? Elle
est tombée amoureuse dun Allemand, mais elle sauve Benoît,
donc cest une héroïne. Son attitude ambivalente est
bien décrite.
A cette époque on ne savait jamais vraiment qui était qui,
comment savoir, comment juger. Lucile est dépassée par ce
qui lui arrive.
Jaime beaucoup lécriture.
Geneviève
Je ne peux pas être objective sur ce livre. Jai découvert
lauteure à travers sa fille, Elizabeth Gilles, dont un des
livres a participé au Goncourt des lycéens. Elle a aussi
écrit une biographie imaginaire de sa mère, Le Mirador.
Lhistoire des filles de lauteure est un peu lhistoire
de ma mère, donc je ne peux pas ne pas laimer. Les articulations
sont parfois artificielles, les personnages sont souvent caricaturaux,
mais extrêmement forts. Que savait-on à lépoque ?
Que ne savait-on pas ? Lauteure était lucide, mais ces
camps de concentration étaient inimaginables pour eux, que pouvait-on
se représenter ? Lécriture est un peu désuète,
mais coule très bien.
Claire
Javais deux livres pour un voyage en train. Jai dabord
tourné autour du livre. La préface est palpitante. Dès
ladolescence, elle écrit. Le projet est décrit, avec
la Cinquième de Beethoven pour modèle. Puis jai grapillé
les notes de fin, avec des bons moments, comme lorsquelle énumère
les passages dignes de passer à la postérité. Enfin
jai parcouru les deux parties. Jai été gênée
par le style, très chargé en adjectifs. De plus, je navais
pas envie de partir en exode, car jallais à Trouville...
Donc jai laissé le livre au profit de King Kong théorie
de Virginie Despentes, que je vous recommande chaudement. Je nai
pas été vraiment convaincue par les propos tenus ici que
jai eu tort de me consacrer à lauteur de Baise-moi...
Sandrine (de Chantilly)
J'ai commencé à lire quelques chapitres de Suite française,
lors d'une nuit blanche passée en avion. Quand j'ai réalisé
que c'était précisément le profil de livre que je
n'avais pas envie pas envie de lire à ce moment-là. Je ne
mets aucunement en cause ni la valeur littéraire, ni l'intérêt
historique de cette uvre. Je fais un simple constat : j'ai
ouvert ce livre à un moment ou je n'avais pas envie de lire une
satire des tribulations de la bourgeoisie française lors de l'évacuation,
je n'avais ni envie de partager les aventures des Le Quesnois, ni voire
apparaître les Groseille au détour d'un chemin et ainsi mettre
en lumière les aberrations de leur vie. Je n'avais pas envie de
voir tel personnage se prendre les pieds dans le tapis de la bienséance
ou des idées toutes faites ou subir une analyse à la loupe
des mesquineries ou autres inévitables crocs en jambe. Suite française
est certainement un livre très intéressant et il est assurément
d'une écriture très agréable... mais il arrive pour
moi comme une satire supplémentaire de la société
bourgeoise française et ma crainte de retrouver des lieux communs
est plus forte que ma curiosité à découvrir cette
uvre. Peut-être qu'un jour je déciderai de la lire
en entier.
En attendant cela me rappelle et me donner envie de me plonger dans le
journal qu'une cousine adolescente à cette époque a tenu.
Elle nous a malheureusement quittés avant d'avoir pu nous en faire
la lecture comme elle le souhaitait tant. Car je suis curieuse de cette
époque, des personnes de ma propre famille l'ayant vécue,
des événements familiaux que je n'ai moi-même pu connaître.
C'est une page de l'histoire de France que j'ai envie de découvrir
par le biais d'un récit réel, pas au travers du prisme d'une
analyse des classes sociales, une satire des murs et des us et coutumes
d'une société à une époque donnée.
Mone (du groupe breton dont les avis suivent)
Livre très intéressant, lu rapidement. Je lui reproche cependant
d'avoir trop enfermé les personnages dans des caricatures :
les braves gens sont des braves gens, les bourgeois sont avares, catholiques,
égoïstes, exploiteurs, etc. J'ai beaucoup aimé la seconde
partie et également la correspondance de 36 à 45, dans les
annexes.
Marie-Thé
Je n'ai pas lu entièrement (manque de temps uniquement). J'ai aimé
la force de la préface et ai regretté de ne pas la retrouver
sous la plume d'Irène Némirovsky. Sa vie n'a été
ni longue ni banale, parcourue surtout de tourments. Elle a vécu
tout cela intensément. J'ai du mal à comprendre les derniers
mois de sa vie : ce laisser-faire, " elle n'essaie pas
d'échapper à son destin. "
En lisant Suite française (mais je n'en ai lu que le tiers)
j'ai vu une suite de descriptions qui m'ont beaucoup intéressée ;
et puis l'exode, l'errance de ces gens tellement différents, cela
m'a interpellée ; personne n'est à sa place sur ces
routes, chacun semble chercher son propre chemin... Et je me suis demandée :
où est Irène Némirovsky dans ces moments ? Où
est sa place à elle ? Elle écrit d'Hubert (p105), " il
s'avançait au devant de son destin comme un jeune dieu chargé
de présents. " Plus tard, ne s'est-elle pas elle aussi
avancée au devant de son propre destin " chargée "
de son uvre ?
Ce livre me fait penser à un autre exode, mais en Allemagne, décrit
par Christa Wolf dans Changement d'optique (nous avions échangé
sur ce livre l'an dernier). J'y avais vu que personne non plus n'était
à sa place dans ces files de gens qui fuyaient ; parmi eux
la narratrice errait elle aussi ; l'exode était autour mais
aussi à l'intérieur d'elle-même...
Marilyne
J'ai bien aimé ce roman. J'ai trouvé que c'était
une bonne idée d'alterner les personnages. Au début du roman,
on passe d'un groupe de personnes à un autre en changeant de chapitres.
C'est un roman qui nous apprend beaucoup sur la période de l'occupation,
cela ressemble à un reportage.
J'ai beaucoup aimé aussi les notes de l'auteure à la fin.
On observe le roman en construction, on s'interroge sur le rythme de son
roman au sens cinématographique. Il y a une diversité des
personnages. Petite limite : elle s'interroge sur la façon
dont les lecteurs percevront son roman y compris dans un futur lointain.
J'ai bien aimé lire la correspondance également.
Lil
"L 'être humain
est complexe, multiple, divisé, à surprises, mais il faut
un temps de guerre ou de grands bouleversements pour le voir : le
plus terrible et le plus passionnant des spectacles..."
(p.511)
Tout le livre me semble résumé dans cette phrase. Je me
suis laissée embarquer dans cette galerie de portraits décapants,
parfois hilarants, parfois sinistres (ou les deux à la fois !!!
ex. lorsque la bourgeoise oublie le grand-père !!!). On peut
reprocher à Némirovsky d'avoir forcé le trait :
je les ai trouvés, ces personnages, souvent caricaturaux (ex. la
vicomtesse de Montmort est particulièrement gratinée !!),
ce qui justifie que je n'aie pas ouvert le livre en entier.
J'ai davantage vibré à la lecture de la seconde partie.
Le personnage de Lucile est très finement campé. Son amour
impossible avec l'officier allemand (qui n'est pas sans rappeler le livre
de Vercors) m'a émue. J'ai aussi beaucoup apprécié
la façon dont Némirovsky utilise en toile de fond, tout
au long du livre, la beauté de la nature, comme si elle se posait
en contrepoint à la folie des hommes.
Mais ce qui m'a le plus passionnée, c'est la biographie de l'auteure !
Lors du débat, nous avons d'ailleurs sans cesse navigué
de sa propre histoire à celles qu'elle nous raconte, en mêlant
fiction et réalité, sans toujours en avoir conscience !!!
Un livre qui donne envie d'aller voir de plus près l'uvre
de l'auteure...
Nicole
J'avais décidé de ne l'ouvrir qu'aux trois-quarts, parce
que je trouvais les personnages un peu trop caricaturaux et que l'alternance
de guerre-nature revenait trop systématiquement.
Mais à vous écouter, j'ai oublié mes petits griefs
et je n'ai pensé qu'à la vie des personnages et tout compte
fait, je me suis ralliée aux inconditionnels du livre. J'ai été
très bon public durant la lecture de Dolce, puisque j'ai même
eu une petite larme à la fin ! Il faut dire que j'ai particulièrement
aimé le personnage de Lucile, qui m'a semblé être
le plus profond. J'ai été la seule, en Bretagne, à
remarquer la très fréquente présence de la couleur
" rose ". Et vous ? J'ai été très
intéressée par la préface et les annexes, bien qu'un
peu interloquée par la façon dont l'époux d'Irène
N. essayait de faire libérer son épouse. Je ne suis pas
sûre qu'elle aurait apprécié.
Lona
C'est l'histoire de l'exode de 1940-41. Une narration simple avec des
mots de tous les jours, retraçant des histoires de familles, de
couples, d'individus, avec leur générosité, leurs
sentiments, leur vanité, leur égoïsme, leurs envies,
leurs ennuis, leurs coquetteries, leurs magouilles, leurs frivolités,
leurs vérités, leurs quotidiens, à la veille de la
guerre. Leurs arrangements, leurs collaborations, leurs servitudes, leurs
pactes avec l'ennemi, leurs silences aussi... Planque pour les uns, difficultés
et mort pour les autres. On ne se pose pas les vraies questions :
c'est chacun pour soi. Cela me fait penser à la chanson de J. Brel :
" chez ces gens là, on ne cause pas... ". L'ennemi
est présenté sous un jour plutôt humain, parfois sympathique :
ces soldats allemands n'étaient pas forcément tous mauvais ;
l'auteur leur reconnaît des sentiments. Leur jeunesse était
une excuse.
J'ai lu facilement ce livre ; pourtant j'y suis allée à
reculons en me disant que c'était encore un récit de la
dernière guerre, des biographies de shoahs, avec des mea culpa
à la clé. Cette écriture est sans haine, les descriptions
sont des récits de vie au quotidien, dans lesquels on en oubliait
presque la guerre : les dînettes et les tasses de thé,
les visites de courtoisies, les chapeaux, les froufrous et les amours
illicites, les porcelaines et les manuscrits, les titres bancaires, les
fermages, les influences cléricales... La vie de tous les jours.
Ce roman, bien écrit, m'a beaucoup plu.
Jean-Pierre
Encore un long ouvrage, mais enfin un excellent roman. Un livre qui raconte
une histoire, avec des personnages de chair et dos, écrit
sans chichi, contrairement à ces auteurs qui tournent autour de
leur nombril sans jamais tomber dedans. Tout fait vrai. Bien sûr,
on le contexte est historique, on le connaît, mais les protagonistes
sont criants dauthenticité, la plupart englués dans
leurs bassesses.
Avec le recul, on mesure la mesquinerie et la vanité des idées
de la bourgeoisie et de la paysannerie, mais cette dernière, avec
ses horizons bornés par une vie rude et des traditions religieuses
toutes-puissantes, bénéficie dune foultitude de circonstances
atténuantes. Les seuls qui gardent une dignité qui rassérène
sont les Michaud, des petits employés, des humbles, de ces catégories
qui, nayant rien, nont rien à perdre, hors la vie et
leur enfant, ce qui est finalement lessentiel. La tragédie
de la débâcle et de loccupation met les curs
et les âmes à nu. La stupidité des guerres est illustrée
dans la deuxième partie : "Dolce". La vie continue
malgré tout. Les amours, les fêtes, la vie quotidienne se
moquent bien des soubresauts de lHistoire. Et on aime ces gens qui
aiment, même les ennemis, car les ennemis sont des semblables déguisés
en monstres par les puissants qui veulent nous mener par le bout du nez.
Le style est clair, la poésie des saisons et de la nature omniprésente.
Jai vraiment beaucoup aimé. On voudrait la suite, on en redemande.
Si je pouvais, jouvrirais ce livre à 360°.
Qui ?
Livre grand ouvert et pourtant, il me reste encore 200 pages à
lire. Mais je l'ouvre en grand, car je sais, je sens que je ne serai pas
déçue par la fin. J'ai eu l'impression d'avoir 2 livres
en main et pourtant, la continuité entre les 2 parties est réelle.
La 1ère m'a beaucoup plu pour sa simplicité de narration,
l'enchaînement fluide des évènements qui fait qu'on
se sent soi même porté par la route et l'absence d'horreurs
extrêmes (même la mort de l'abbé finalement se fait
presque en douceur, même les morts sur les routes sont partiellement
évoqués, pas de corps déchiquettés comme dans
Expiation par ex.). Chaque personnage est tout simplement humain :
chacun protège quelque chose ou quelqu'un dans sa fuite. L'horreur
de la situation exacerbe leur personnalité, qu'on découvre
au fil des pages en même temps qu'eux finalement. Et je me suis
demandée : comment aurai-je réagi, moi, dans cette
même situation ? Et en entamant la 2ème partie, j'ai
là une impression d'immobilisme et de fatalité qu'il n'y
avait pas au début. Et je suis comme ces personnages, je suis là,
et j'attends les allemands, j'entends leurs bottes. On sent que la vie
doit reprendre, malgré tout et que l'amour, très présent
dans la 1ère partie, sera prédominant dans la 2ème.
Peut-être cette partie sera-t-elle plus conventionnelle, moins originale
car un peu plus proche de ce que je connais... je sens apparaître
des histoires d'amour qui, peut-être, resteront banales ? Je
ne sais pas, mais qu'importe, je suis ravie de ne pas avoir encore terminé
ce livre que je savoure...
Une revue de presse à travers le monde :
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