Quatrième
de couverture :
Dans la Venise du XVIIIe siècle, l'histoire d'Alvise
Lanzi suscite bien des murmures et des interrogations. Après chacun
de ses mariages, et il y en aura quatre, ses épouses trouvent mystérieusement
la mort dans d'effroyables convulsions. On parle d'empoisonnement, les
soupçons se portent sur l'entourage d'Alvise et, bien sûr,
sur Alvise lui-même...
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Gabrielle Wittkop
Sérénissime assassinat
Nous avons lu ce livre en septembre 2008.
Françoise O
J'ai aimé dans ce brillant petit livre le mélange d'humour
et de cruauté ainsi que la flamboyance des descriptions. J'ai beaucoup
"travaillé" avec le Larousse et le Littré,
vu le nombre de mots qui m'étaient inconnus. Mais l'auteur aurait-elle
fait de même ?...
Rozenn
Je ne sais pas encore ce que jen pense, quand jai commencé,
je me suis dis que « ça me fait vraiment chier, je ne
comprends rien : « le libidineux lubin »...
Cest du « foutage de gueule »... Et puis,
jai fais un effort, jai continué et je nai pas
essayé de comprendre. Jai trouvé ça sympa,
comme une petite musique, des images, je me suis laissé embarquer.
Et je lai relu. Mais le « libidineux lubin »
ne passe toujours pas. Elle fait des fautes de français. Elle pourrait
en faire un petit peu moins. Cette langue baroque, est-ce un procédé ?
Annick
Jai lu Le
Sommeil et la raison
qui est un recueil de nouvelles. Cest original, je lai
lu à petites doses. Il faut le prendre pour lécriture
parce je ne comprends pas de quoi elle parle. Je ne peux pas dire que
jaime cette auteure. Cest même insupportable, cest
un système, cette langue. Elle utilise des tas de mots inconnus.
Ce qui est énervant aussi, cest son rapport au temps. Et
dans les nouvelles, on sait encore moins où on en est. Cest
une auteure qui dérange, elle touche à notre côté
archaïque, nos perversités, nos fantasmes. Cest courageux.
Elle a été souvent comparée à Sade, mais elle
ne va pas aussi loin, cest plus allusif.
Elle peut passer dun style précieux à un style trivial,
par exemple quand elle parle de ftus, de naissance. Dans les nouvelles,
elle décrit aussi le ventre maternel, cest une horreur, toute
une nouvelle sur un ventre maternel glauque. Je suis assez fascinée,
cest une écriture associative qui repose sur limagination.
Elle suit ses propres fantasmes, cest une littérature du
fantasme. Mais ça devient aussi un système de mélanger
les temps, on est constamment perdu sauf si on prend le temps de se retrouver.
Cest une auteure intéressante qui va là où
elle a envie daller.
Claire
Je lai lu cet été, cest-à-dire il y a
longtemps... Je ne me suis pas replongée dedans. Sachant que joublie
beaucoup, javais rédigé mon avis que je viens de redécouvrir
à propos de cette écriture étonnante, avec des phrases
incompréhensibles, du fait du vocabulaire rare. Comme dans un autre
genre, Lazarillo
de Tomès, je suis contente davoir découvert
ce livre et cet auteur, son écriture, ses mises en abyme mais je
ne suis pas enthousiaste. Je reconnais la performance, je salue loriginalité.
Lauteur mintrigue. La scène daccouchement relève
de lanthologie...
Françoise O, entre
et
Jai commencé par lavant-propos fort consistant et qui
ma fort irritée. Elle prend des précautions, elle
met en garde le lecteur et quand on fait ça, pour moi, cest
déjà un échec. Cest quelle na pas
confiance dans la lecture, elle nest pas sûre de son coup.
Et même, je la trouve très pédante. Pour ma part,
je lai pris comme un avant-propos, car elle dit le « je »
de lauteur pour proposer son explication. Elle nous annonce que
lon va lire des choses incroyables, elle nous mâche tout ce
quon aimerait découvrir nous même. Jai envie
de lui dire : « Laisse-nous ! » Et malgré
tous ses efforts, on ne comprend rien au livre... Bref, cette entrée
en matière ma fortement déplu. Ensuite, elle veut
nous présenter des choses comme des tableaux, quelle pense
être des choses complexes mais ce nest pas si complexe que
ça. Elle se fait mousser, notamment avec la langue quelle
choisit dune préciosité extrême. Ça a
son effet, ça sadapte à lépoque. Puis
après, il y a une série de mots italiens, ça déborde
et cest trop facile. Cest comme les marques, ça en
jette mais derrière, il ny a pas grand chose. Cest
une juxtaposition de tableaux, de scènes de rue, dintérieur.
Cest un tableau vivant - cest le seul intérêt -
mais ça reste plaqué et vide.
Là où jai le plus aimé, les côtés
les plus forts, les plus vrais cest quand elle décrit les
corps des femmes mourantes. Ce nest pas artificiel. Cela devient
même insupportable ces descriptions de corps de femmes qui pourrissent.
Cest la première fois que je lis des choses comme ça,
dune grande morbidité, ces odeurs dans la préciosité
des draps et des dentelles. Sinon, elle ma agacée !
Brigitte
Cest écrit en gros caractères, il ny a pas beaucoup
de pages, je lai lu très vite, mais ça ma agacée.
Jai eu souvent limpression que cétait toujours
pareil : le même décor, une femme dAlvise qui
meurt et il ne se passe rien. Son écriture est intéressante
et lappliquer à la Venise rococo, cest bien. Cette
Venise grouillante, où rien nest lisse, calme ou vide. On
sent bien cette ville sirupeuse, éruptive et grumeleuse. Cest
bien ce style-là pour cette époque-là. Ce nest
pas du tout un chef duvre. Les personnages sont simplement
des noms. On comprend très vite que cest Ottavie qui est
à lorigine des meurtres. Les personnages ne sont pas campés,
ils nont aucune personnalité, aucune épaisseur. Jai
cependant bien aimé la prostituée Pieds Réséda,
elle a une petite existence, une petite lueur. Ça ma amusé
les mots en italiens, cest une ambiance...
Jacqueline
Je lai lu très vite en passant sur les mots difficiles mais
avec quand même un certain plaisir. Lintroduction, je lai
lue sans rien comprendre mais en me disant « on verra bien... »
Après, jai été un petit peu gênée,
je ne comprenais rien mais ça métait égal.
Jaurais bien aimé comprendre et savoir qui écrit ces
lettres. Pourquoi ces lettres qui entrecoupent le récit du narrateur ?
Jai été assez sensible au foisonnement de la langue,
aux allitérations. On na pas besoin de tout comprendre. Elle
ma déroutée car elle casse le récit. Elle passe
dune histoire policière avec des tas de pistes possibles
(trafic, concussion jusquà la piste de la mère qui
savère être la seule possible). Mais même comme
intrigue policière ça ne tient pas. Ce qui men reste,
cest le foisonnement de la Venise de cette époque, vivante,
étrange et fidèle à limage que je me fais de
Venise à cette époque. Cest dailleurs un choc,
larrivée de Napoléon, on passe vraiment à une
autre époque. Il reste donc un truc pas complètement désagréable
mais assez vain. Ca ma fait penser à Rachilde. Comme elle,
elle prend des sujets glauques, mais à la différence de
Rachilde, il y a quelque chose qui marche.
Jean-Pierre (du groupe breton, dont d'autres avis
suivent)
39 pages sur 121, ça fait 1/3. Jai lu 39 pages de cette uvre
sérénissime. A vrai dire, je devais être bien disposé
ou peut être dans les nuages... Et subitement, jai fait mon
sale caractère et me suis réveillé. Je me suis demandé :
quelle faute ai-je donc commise, quel péché devrais-je donc
expié qui mobligeraient à avaler lintégralité
de ce brouet indigeste, qui cumule tout ce que jexècre :
- un exotisme de bazar omniprésent, dans les lieux et dans
le temps, scintillant de pacotilles et de verroteries dont le toc finit
par devenir un tic. Des exemples : bunraku, tabarro, bauta, zecchin,
giudecca, merletti, bissone, felze, forcola, realtina, cendal, datura... ;
- une érudition pédante, doublée dune
langue ésotérique, assommant de noms de lieux, de dillustres
personnages par moi complètement inconnus, de citations latines
ou autres sans doute distinguées mais parfaitement déstabilisantes
et incompréhensibles maintenant que les pages roses du Petit
Larousse ont disparu et que lon na pas eu la chance ou
lobligation de décliner le génitif, le datif et tout
le reste. Des exemples : infrangible, chtonien, appoggiatures, gimblettes,
nanthe, épurge... it fecit cui prodest, a giorno, subi rosa,
piano mobile... même si on peut deviner que peut être cette
dernière signifie « changer lentement »... ;
- le déroulement erratique dune histoire supérieurement
soporifique, aux figurants multiples et polluants.
Peut-être quavec plus de persévérance, jaurais
découvert quelque intérêt au roman, qui sait ?
Mais tant pis, cest bien fait pour moi : par paresse javais
choisi ce livre parce quil était court. Me voilà bien
récompensé ! Fermé bien sûr, à
double tour.
Lil
Jouvre ce livre à moitié, pour le travail décriture,
la culture de la dame et lhilarité quil a provoquée
chez moi. Jai adoré le côté totalement gore
du roman : « rire ou vomir », il faut choisir !
La ville suinte lhumidité fétide et la perversité,
et les corps, les humeurs nauséabondes. Le goût de lauteure
pour les chairs putréfiées, les viscères en voie
de décomposition, les excès en tous genres ajouté
à sa haine des femmes et des marmots : cest tout bonnement
TROP ! Par exemple : la description répugnante du ventre
de Catarina LANZI enceinte, p.27 (dune dizaine de lignes) qui se
termine par ces simples mots : « on aimerait que ce soit
un garçon » ma fait beaucoup, beaucoup rire. Evidemment,
jai laissé le dico sur létagère et oublié
tout le vocabulaire inconnu... Je nai pas vraiment envie de lire
un autre ouvrage du même cru, mais la Gabrielle valait le détour
et je ne regrette pas la rencontre.
Nicole
Je me suis amusée, ai consciencieusement utilisé le dictionnaire,
mais une fois le livre refermé, j'ai dit « bof ».
Ce seul mot traduit mon chemin...
Lou
« - Ne peut-on lire sans être dérangé
à tout bout de champ ?
Debout devant lui, la Rosetta tortille son tablier :
- C'est que Signor... votre femme est morte...
- Encore ?! »
L'histoire d'Alvise Lanzi nous entraîne dans la Venise du siècle
des Lumières, une ville de miroirs et de labyrinthes. Comme un
reflet dans un miroir d'eau, c'est une ambiance trouble qui règne
dans la maison Lanzi. Pour la quatrième fois en trente ans, Alvise
est catapulté dans l'état de veuvage...
« Cachez ces taches. Elle a terriblement souffert. »
Quatre épouses mortes dans de mystérieuses circonstances
et d'atroces convulsions.
« On ne peut décemment pas lui laisser le visage découvert. »
Cet enchaînement suscite bien des murmures et des interrogations.
« N'oublions jamais les leçons de l'Antiquité,
si bien versée dans la science des herbes. »
On soupçonne l'entourage d'Alvise, puis Alvise lui-même...
Gabrielle Wittkop définit Sérénissime assassinat
comme « roman-mystérieux », qui demeure inexplicable
jusqu'à sa fin rationnelle. Au delà de la recherche du coupable,
l'intérêt du récit se trouve dans l'excellente restitution
d'une ambiance fantasque et dangereuse, le style baroque et raffiné
de l'auteure aidant. Voilà pour la forme, pleine d'esthétisme,
mais d'une beauté vénéneuse.
Et c'est là qu'on aborde le fond... mais nous naviguons en eaux
troubles avec cette auteure ! Au cours de mes humbles recherches
sur cette dame, j'ai souvent croisé les termes de « divine
Wittkop ». Intriguant ! lorsqu'on a soi-même ressenti
tout au long d'une lecture, le souffle d'une extrême arrogance !
L'auteure se présente au début du récit sous le couvert
du « joueur de bunraku faisant agir ses marionnettes ».
Ce qui est compatible avec le mépris dont elle fait preuve envers
ses personnages ; le pire étant lorsque le personnage s'avère
être un enfant. Mais elle revient à plusieurs reprises sur
cet état de chose comme pour mieux avérer sa toute-puissance.
Toute personne se fait démiurge de l'imaginaire lorsqu'elle crée
un univers et ses personnages mais l'auteur a souvent la subtilité
de se faire le plus petit possible pour mieux laisser évoluer cette
création. Or dans ce livre, la présence de Gabrielle Wittkop
est trop lourde. D'ailleurs, puisque nous sommes entraînés
dans la ville des miroirs, ne peut-on remarquer comme son visage est partout
présent ? Je l'ai vu en Ottavia Lanzi, le personnage, soit-dit
en passant, le moins maltraité de l'histoire. Un passage fait écho
aux différentes informations piochées çà et
là sur l'auteure : « Elle [Ottavia Lanzi] dirige
sa pensée dans l'esprit des Lumières mais fort à
l'encontre de ce qu'il y a en elle de sombre, de chtonien, d'archaïque,
de toutes ses ivresses de vieille pythie. »
Sans surprise, l'écriture de Wittkop se fait perverse jusqu'au
bout des lettres. Plane une sombre délectation pour la souffrance
de l'autre considéré comme objet de jeux malsains. L'aversion
totale de l'auteure pour les enfants est clairement exprimée dans
certains passages. Alors, pendant que d'autres la considèrent comme
« divine », moi je me demande comment peut-on autant
détester les enfants lorsqu'on l'a été soi-même
(c'est inévitable). Mais elle se plaît à dire dans
une interview à propos de son enfance et des enfants de son âge :
« Ils étaient bêtes, inférieurs à
moi. Moi, j'étais déjà une adulte, comprenez-vous.
J'ai toujours été une adulte. » Un bel esprit
certes, érudit et inventif, mais un peu à côté
de la réalité.
J'introduis plusieurs éléments concernant l'auteure car
il est difficile de ne pas s'interroger et chercher à mieux comprendre
une écriture si pleine de perversité.
Pour conclure, Sérénissime assassinat reste une lecture
intéressante pour son « originalité »
de forme : l'ambiance sombre et pesante, l'écriture raffinée
et poétique. Mais une profondeur qui gravite autour d'un nombril :
noirceur de l'âme, perversité, extrême arrogance...
Narcisse dispose et se contemple dans les différents miroirs de
cette histoire et on s'en lasse. A ce niveau, rien de nouveau sous le
soleil.
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