Quatrième de couverture : "Assez tôt, j'ai compris que je n'allais pas pouvoir faire grand-chose pour changer le monde. Je me suis alors promis de m'installer quelque temps, seul, dans une cabane. Dans les forêts de Sibérie. J'ai acquis une isba de bois, loin de tout, sur les bords du lac Baïkal. Là, pendant six mois, à cinq jours de marche du premier village, perdu dans une nature démesurée, j'ai tâché d'être heureux. Je crois y être parvenu. Deux chiens, un poêle à bois, une fenêtre ouverte sur un lac suffisent à la vie. Et si la liberté consistait à posséder le temps ? Et si le bonheur revenait à disposer de solitude, d'espace et de silence - toutes choses dont manqueront les générations futures ? Tant qu'il y aura des cabanes au fond des bois, rien ne sera tout à fait perdu." (Prix médicis essai 2011)

Quatrième de couverture
 : "Pendant huit mois, Sylvain Tesson a refait le long voyage de la Sibérie au golfe du Bengale qu'effectuaient naguère les évadés du goulag. Pour rendre hommage à ceux dont la soif de liberté a triomphé des obstacles les plus grands, seul, il a franchi les taïgas, la steppe mongole, le désert de Gobi, les Hauts Plateaux tibétains, la chaîne himalayenne, la forêt humide jusqu'à la montagne de Darjeeling. À pied, à cheval, en vélo, sur six mille kilomètres, il a connu ce qu'il a cherché de plein gré : le froid, la faim, la solitude extrême. La splendeur de la haute Asie l'a récompensé, comme les mots d'une très ancienne déportée heureuse de se confier à lui : On a le droit de se souvenir."


 

Sylvain Tesson
Dans les forêts de Sibérie

Nous avons lu ce livre en novembre 2014.
Le groupe de Pontivy l'a lu aussi.
Le groupe de Tenerife le lira 10 ans plus tard, en juin 2024.


Françoise D (qui a proposé cet auteur et qui n’est pas présente pour en parler !...)
Tout d'abord j'aime son projet, comme tous ses projets d'ailleurs, et en particulier celui de L’axe du loup. Je suis très admirative de la performance physique – il ne se ménage pas – et je me projette bien sûr, mais pas seulement. J'aime aussi beaucoup son écriture. Ses livres sont plus que de simples documentaires, ce sont de vrais objets littéraires, comme le sont ses références qu'il nous fait partager sans pédanterie je trouve.
Je le place largement au dessus de Nicolas Bouvier. J'espère que d'autres partageront mon avis...
Mireille
J'ai beaucoup aimé. Je voulais justement le lire. J'ai lu L'axe du loup, que j'ai beaucoup aimé, puis Dans les forêts de Sibérie. J'aime ce genre de voyage, je suis transportée. J'admire ces gens qui ont des expériences physiques, avec ce retour à la nature, la performance. Le journal en Sibérie est plus répétitif que L'axe du loup. Ce que j'ai aimé, c'est la description de la nature qui, elle, ne se répète pas. Il fréquente les médias, il en vit ; le projet est sponsorisé, il est clair à ce sujet comme le montrent les remerciements. Je suis intéressée par ce qu'il dit de la solitude dans le voyage. Il écrit bien. Il vit dans l'instant présent, il est au clair avec lui-même. J'ai de la sympathie pour lui.
Annick A
Je ne savais rien de l'auteur. J'ai beaucoup aimé ce livre. Sa dimension paisible, ses réflexions sur la vie, l'aspect poétique, philosophique. Il amène à se poser des questions sur ce qui fait sens dans la vie. Il n'analyse pas sa vie intérieure, dont finalement il parle très peu ; il parle de lui-même à travers les livres qu'il lit. Je ne fais de mal à personne et je me suffis à moi-même... La dimension poétique domine par rapport à la dimension psychologique. Il donne à réfléchir. Je ne m'intéresse pas à l'auteur mais au livre qui est très attachant, qui fait penser. Plus le livre avance, plus il fait de la poésie. C'est un livre qui apaise. Qui donne envie d'être seul. D'avoir plus de temps pour la vie intérieure.
Monique L
J'ai apprécié ce livre que j'ai trouvé attachant. Il y a une délicatesse malgré ce qui l'entoure. On ressent son plaisir d'écrire, sa culture, son rapport au temps et au présent, qui me concerne car je suis en début de retraite ; ce qui me touche le plus, c'est le fait de vivre le moment présent : il fume le cigare et cela en fait partie (mon mari en fait autant...). Le style est intéressant, avec une certaine élégance ; il était géographe, ce que l'utilisation de certains mots montre. Je ne suis pas lassée, alors que l'on pourrait l'être, il y a des répétitions et c'est un journal. Il y a un contraste entre une certaine douceur et la dureté du contexte.
Monique S
Ce livre avait tout pour me plaire, car j'adore les histoires des ermites. Je suis beaucoup avec les poètes ermites chinois par exemple. J'ai été déçue : les poètes que je lis ont fait un choix de vie totale, il y avait une philosophie dans leur projet. Mais il y a des choses que j'ai beaucoup aimées : ce qu'il dit sur les bruits de la glace, la description du printemps à la fonte des neiges... Quand il part dans les montagnes, je ne sens pas la hauteur, je ne vois pas le paysage. Il a une quête, mais ce qui m'a déçue, c'est la préparation du voyage. Il contribue aussi à la destruction de l'environnement en brûlant le bois.

Denis
Ça repousse.

Monique
Sa bibliothèque est passionnante, mais ce qu'il écrit des livres est décevant aussi par rapport à l'intérêt des lectures. J'aurais aimé plus de réflexion philosophique. Il y a plus de profondeur dans les images du film. Il peut être puant car il juge les hommes, il se situe au-dessus des autres. Il n'est pas "sage", il n'est pas à la hauteur du projet qu'il se donne : généralement, plus on s'isole, plus on se rapproche des êtres humains, des autres, ce n'est pas son cas.
Monique D
Sur le livre je suis partagée :
- j'aime l'exploit, l'énergie dépensée pour réaliser un projet de 7 ans, la ténacité, le travail nécessaire pour vivre dans de telles conditions, les descriptions précises de la géographie, de la nature, des lieux, le passage des saisons, le fait de tenir un tel journal, l'analyse des Russes et leur conception de la vie, du moins les voisins de l'auteur, les critiques faites à notre société qui détruit la nature, les villes, les relations entre les gens superficielles ;
- ce qui me pose question et me fait réfléchir sans avoir de réponses : l'admiration de l'auteur pour la vie des ermites, le fait de se retirer pour soi, pour une vie contemplative, être immobile, faire ce qu'on veut, avoir du temps et sa liberté personnelle à soi, comment concilier cela avec une vie en société ? De même pour l'écologie et l'évolution, éternel problème. Il dit que rien ne lui manque, qu'il aime la solitude sauf à regretter souvent de ne pas profiter de ce qu'il apprécie avec autrui et la rupture et sa tristesse qui suit. Je relève deux phrases qui m'interrogent : "Aimer c'est reconnaître la valeur de ce qu'on ne pourra jamais connaître" et à la fin : "Il est bon de savoir que dans une forêt du monde, il existe une cabane où quelque chose est possible, situé pas trop loin du bonheur".
Marion
J'ai eu envie avec ce livre de me retirer hors du monde. Ca m'a transportée. Cet isolement, c'est bien fait, on se retrouve comme lui dans sa cabane. J'ai trouvé le livre très poétique et avec des passages très drôles, par exemple, quand il remarque que "nommer les bêtes et les plantes d'après les guides naturalistes, c'est comme reconnaître les stars dans la rue grâce aux journaux people. Au lieu de "Oh ! Mais c'est Madonna !", on s'exclame "Ciel, une grue cendrée !".

(Rigolade partagée en effet.)

Marion
L'écriture est très belle, ce n'est pas répétitif. Il a beaucoup de recul sur la situation. Cela m'a apaisée. J'ai aimé sa réflexion, sur l'anarchie par exemple. Il ne se donne pas en exemple. Il est honnête. J'ai une seule réserve : il donne les chiens !
Bénédicte
Au départ, j'étais ravie, mais à la moitié j'ai fermé le livre. Le personnage est inauthentique ! Il écrit mal ! Il ne procure aucune émotion ! J'ai trouvé ça artificiel ! Il n'y a aucune intériorité ! Je ne sais pas qui il est, il ne revient pas sur son passé, sur son enfance...

Claire
Mais c'est pas vrai ! Monique et toi vous lui reprochez de ne pas avoir écrit le livre que vous estimez qu'il aurait dû écrire : l'un un livre de sage se retirant du monde et l'autre un livre qui parle de son enfance, c'est incroyable !

Rozenn
On ne coupe pas, on laisse parler Bénédicte !

Séverine
Si tu te mets Claire à ne pas respecter les règles, ça ne va plus !

Bénédicte
Je n'ai rien tiré de ce livre, que je trouve fabriqué !

Jacqueline
Je l'ai emmené en vacances dans un lieu isolé, très propice à la lecture de ce livre. Les visites que j'avais étaient aussi locales. J'étais très contente de me retrouver au bord du lac Baïkal, avec les belles descriptions. Il est centré sur les petites taches quotidiennes, c'est comme une femme traditionnelle...

Claire
Il aime "tenir en ordre son intérieur".

Jacqueline
Pour les balades, je suis restée sur ma faim, je ne sentais pas l'effort avec lui. J'ai bien aimé sans plus. Je ne trouve pas que c'est un auteur. J'ai découvert qu'il a écrit des fictions, j'ai donc lu des nouvelles. Mais je déconseille…
J'ai bien aimé sans plus Dans les forêts de Sibérie
J'ai préféré L'axe du loup où il suit la route que décrit Slawomir Rawicz dans À marche forcée 
Lisa
Le livre m'a intéressée car je lis des récits de voyage. J'ai bien aimé, l'écriture est intéressante, mais pas les aphorismes, un peu lourds, une philosophie de comptoir... Je préfère la description de la nature. J'aime beaucoup le thème de la solitude ; je pars aussi seule, donc ça me parle. La forme du journal ne m'a pas ennuyée. Pour moi, le narrateur, c'est l'auteur : méprisant ; on devrait faire comme lui, mais on ne peut pas tous le faire : je suis énervée par la leçon de morale. Mais cela donne envie d'y aller. J'ai juste commencé L'axe du Loup, mais j'ai envie de le finir. J'ai vu l'adaptation d'À marche forcée au cinéma, Les chemins de la liberté.
Denis
J'ai beaucoup aimé cette expérience qui m'a transporté au bord du Baïkal, avec les belles descriptions de la nature (je fais de la montagne et je me suis retrouvé). Les aphorismes, oui, sont agaçants. Il y a certaines tournures heureuses, mais du point de vue littéraire, c'est pas terrible… Et les clichés sur les Russes ! Cet homme est un paradoxe. Il est pour moi hyper élitiste. Il parle de ses rencontres mais il n'aime pas les gens. De son expérience, il sort comme il est entré, il n'en retire rien. Il se vit comme quelqu'un qui ne peut pas rester en place – il escalade les cathédrales – et c'est un exploit pour lui de rester dans une cabane. Je conseillerais ce livre.
Claire
D’abord une remarque de "genre"… (qui a à voir avec le fait qu'on parle du livre ou pas dans nos réactions). Lors de la dernière séance, avec la collection "Raconter la vie", se posait la question de la différence entre récit de vie et littérature, et celle de la force de la littérature pour dire le monde aussi bien voire mieux parfois que le témoignage. À nouveau, m'est venue une double question : qu’est-ce qu’un livre littéraire ? Et ce livre est-il un livre pour le groupe lecture ?... Après vous avoir entendus, la réponse à la deuxième question est : oui c’est un livre pour le groupe lecture. Le fait que ce livre ait eu le prix Médicis "essai" donne une réponse à la première question : ce n’est peut-être pas un livre littéraire...
Pour ma part, je ne connaissais pas cet auteur : j’ai lu entièrement Dans les forêts de Sibérie et en lecture assez rapide L’axe du loup. Puis j’ai regardé le film Six mois de cabane au Baïkal d’abord en croyant que quelqu’un d’autre que lui avait filmé les images, puis en comprenant qu’il s’était filmé lui-même ; j'ai beaucoup apprécié de voir tout à coup ce qu'il a vécu que je ne me représentais justement pas en images ; enfin, j’ai écouté des interviews de lui, avec ou sans papa (Philippe Tesson). Je suis partagée : je trouve les performances remarquables (physiquement et psychologiquement), mais je parle là de l’homme et non des livres. Si je les considère comme témoignages, récits de vie, reportages, je dirais : intéressants mais assez monotones. Je serais amenée à donner mon avis sur l’homme (pour lequel je ne ressens pas une très grande sympathie), à m’interroger sur ce qui le meut, à me demander s’il s’intéresse vraiment aux rencontres que permettent ses voyages : il aime plus la nature que les gens (d’un "grand amour beatnik") ; je suis d’accord avec Denis concernant les clichés sur les gens (sur les Russes, sur les Chinois). Pour L’axe du loup je voudrais savoir ce qu’est devenue sa douleur au genou... comme on le voit des questions qui ne sont pas littéraires. J'ai la forte impression qu'il soigne la solitude à l'alcool en Sibérie : il est complètement alcoolo ! Décevant pour ce superman !
Comme pour Monique L., ses réflexions sur le temps et l’espace arrivent à point nommé pour qui comme moi vient de prendre sa retraite ; comme Lisa, j’aime voyager seule et nombre de réflexions renvoient à ces états et m'ont beaucoup intéressée. Dans Dans les forêts de Sibérie, les livres ont une place importante, c'est agréable, mais ce qui n’en fait pas pour autant un livre littéraire ; Sylvain Tesson n’est pas du tout prêt à participer à un groupe de lecture comme le montre sa façon de parler d’un avis différent du sien : "il faut avoir l’esprit tordu pour voir en l’Amant de Lady Chatterley un livre érotique"...
Pour ce qui est de l’écriture, je trouve qu’il s’essaie à "faire du style" et cela se sent : "ma cabane abrite les noces du progrès et de l’antique", le soleil "irradie son amour sur la surface blanche" ; c’est parfois réussi quand il fait mouche sans faire de la décoration ("laisser infuser les heures") ; c’est parfois très douteux : "ces types sont touchants. Ils ont des gueules à dépecer le Tchétchène", "des poissons carnassiers migrent vers la surface pour le festin nocturne et les holocaustes de crustacés" ; c'est choquant : quelles sont les valeurs de cet homme ?!

Denis
Il a travaillé pour Radio courtoisie…

Claire
Il "fait" le sage, mais c’est parfois un peu cucul : sous les futaies "on y renoue avec la vérité des clairs de lune" ou "nous sommes seuls responsables de la morosité de nos existences. Le monde est gris de nos fadeurs. La vie paraît pâle ? Changez de vie, gagnez les cabanes" : ben voyons... Parfois cela ne veut rien dire : "Nos rêves se réalisent mais ne sont que des bulles de savon explosant dans l’inéluctable". Le procédé du journal, avec un texte par jour pendant six mois est une contrainte qui ne joue pas en sa faveur. Ce qu’il dit du journal qui "féconde l’existence" est en revanche intéressant ; il est étonnant qu’il ne mentionne pas une fois son journal en images filmées qui me semble presque plus intéressant que le livre et qui a dû lui prendre un temps considérable.

Monique
C'est vrai c'est dommage qu'il n'en parle pas.

Claire
En fait, ne vit-il pas cette expérience avant tout pour la montrer au monde ? Il agit pour ensuite exhiber... Pour conclure, je suis contente de l’avoir découvert, mais plus comme représentant du livre des records que de la littérature.
Séverine
Mon premier sentiment est que j'ai aimé, mais c'était avant de vous entendre : en fait je partage l'avis de tout le monde, les positifs comme les critiques. Ai-je aimé le livre ou le personnage ?... Il y a de belles descriptions et l'expérience est intéressante. Je rejoins Jacqueline sur l'importance des petits gestes : pour ma grand-mère, pour mes parents même, les moindres choses du quotidien comptent, comme pour lui dans la cabane.
Ce qui m'a étonnée est que tout le monde soit intéressé par le thème : la solitude dans la nature.

Rozenn
Pas moi !

Séverine
La question que je me pose est : QU'EN AURAIT PENSÉ OBLOMOV ?...
Je suis donc d'accord avec tout le monde et vous avez installé un doute sur le personnage. C'est en tout cas un livre qui prête à débat. Si j'ai passé un bon moment, j'admets que littérairement ce n'est pas un chef d'œuvre. Ce qui me perturbe est que je ne sais pas vraiment pourquoi je l'ai aimé...

Denis
C'est la Sibérie que tu as aimée.

Séverine
Ça nous parle beaucoup, la solitude. Sylvain Tesson parle de Thoreau ; j'ai justement prévu de lire Walden ou La vie dans les bois.

Denis
Une référence de mouvements écologistes.

Monique
Ce livre est un peu ennuyeux.

Claire
Ah tu l'as lu ?

Monique
Non, mais…

Manon
Ça me rappelle Into the wild, où le héros part en Alaska..., surtout à ne pas voir ni lire !

Lisa
Je confirme.

Séverine
Cela me fait penser au film Les Combattants.

Denis
Délivrance, dans le genre, finissait très mal...
Rozenn
Je n'aime pas la nature ! Je n'aime pas les animaux ! Je n'aime pas la Russie ! Mais... cela me faisait plaisir de retrouver le livre. C'est la monotonie qui me plaisait finalement. C'est tout le temps la même chose, ça repose... Mais le livre n'est pas sincère, c'est truqué. J'ai été très contente quand il a été plaqué...

Marion
Désolée, il est toujours avec Priscilla Telmon, elle aussi grande voyageuse…

Rozenn
Il n'a pas de bienveillance, voire est méprisant.

Claire
Mais tu n'aimes plus la Russie ?! Tu voulais qu'on ne lise que des livres russes...

(Rozenn raconte ses voyages en Russie et Bénédicte parle de sa belle-fille russe...)

Claire (précision après la soirée)
À propos du genre du livre, j’ai trouvé une information intéressante dans un article du Nouvel Obs concernant le fait que le mot "roman" fait vendre : quand le livre Dans les forêts de Sibérie est sorti, les épreuves du livre avaient été envoyées pendant l'été aux journalistes et aux jurés des grands prix, flanquées de la mention "roman" : elle a été retirée à la parution. Heureusement, car il n’aurait pas eu le prix Médicis essai...

Les 12 AVIS DU GROUPE "VOIX AU CHAPITRE PONTIVY"

réuni le 12 novembre 2014
(Françoise, Nicole, Edith, Christophe, Nancy, Laurie, Claire, Laurence, Aram, Stéphanie, Sophie, Lil)

Cotes d'amour :
3 : 2 : 1 : 6 :


Ce que certains ont apprécié, voire adoré

- l'écriture magnifique, le lyrisme flamboyant, la richesse du vocabulaire, la poésie derrière la noirceur
- la beauté des images (une écriture très visuelle), les couleurs, les répétitions/incantations qui donnent le rythme et expriment, entre autre, l'obsession folle des personnages, les rites religieux et païens entremêlés
- la nature omniprésente, avec de superbes descriptions
- l'imagination débordante qui surprend, fascine, embarque le lecteur... : un souffle extraordinaire qui envoûte...
- la grande sensibilité dans la description des sentiments, des passions, de la violence (la folie : désir et mort confondus), une ode à la passion fatale
- un récit/conte qui n'est pas sans rappeler les veillées d'autrefois : rêve et réalité mêlés, paraboles et mythes
- l'éloge de l'explosion de la vie, envers et contre tout
- les contrastes : le mal, la mort, la folie contrebalancés par l'amour, la tendresse, la beauté
- l'étrangeté, l'insolite : les portraits (Reinette la grasse, Huguet Cornebugle, etc.), les noms, les événements...
- des scènes magnifiques : la faim de Reinette, la cuisson du pain, l'orchestre dans la forêt, la grande lessive annuelle, la neige de mai, etc.
- le décor (qui rappelle Pays perdu), fort bien posé
- les terribles destins (Léger, Claude et Marceau)
- le temps qui passe sur le hameau et sur les hommes
- le vieux Mauperthuis tenu debout par la colère et la vengeance, solitaire et dément
- la progression vers le drame très bien menée et la fin du livre.
Un talent qui nous rappelle celui de Carole Martinez !

Ce que certains n'ont pas aimé, voire détesté
- un récit long, lent, verbeux, parfois ridicule, une complaisance dans le verbiage : l'auteure abuse de son talent ce qui donne une écriture redondante, emphatique (c'et très agaçant)
- des personnages invraisemblables, des marionnettes peu crédibles
- un livre ennuyeux, artificiel, grandiloquent, prétentieux, qui sonne faux (d'où le survol de certains passages, voire chapitres)
- la multitude des symboles religieux
- la noirceur du personnage principal, la prégnance du mal
- des scènes beaucoup trop longues (les amours de Camille et Simon, par exemple)
- un livre qui suscite, à la fois, enchantement et déception.

Les réactions du groupe de Tenerife
réuni le 18 juin 2024

avec les avis de •Nieves José Luis


Nieves commente : revenus du "Baïkal", on s'est réunis pour parler du livre de Sylvain Tesson. La rencontre a été très animée et, dans l'ensemble, on a apprécié le côté philosophique de l'écrivain. Il me semble que mon avis est le plus "méchant"...

Nieves
J'avoue que je m'attendais à avoir plus d'émotions dans ce récit de voyage ; peut-être je ne suis pas juste, mais vers la moitié du livre, j'en avais assez de la cabane, des mésanges, de la neige, des ours, des cascades, de la vodka… Cependant, en revenant en arrière, je reconnais avoir trouvé quelques réflexions intéressantes autour de la vie en solitude, entourée de nature et d'animaux de la taïga. Il me semble, tout de même, des pensées d'un intellectuel provenant d'une des villes les plus intellectuelles au monde.
Je soulignerai quand même certaines considérations sur l'expérience de l'isolement et le caractère russe.
Quant à la vie d'ermite, il faut dire qu'il est allé en Sibérie pour résoudre un problème personnel : "J'avais à régler un vieux contentieux avec le temps (…) Il suffisait de demander à l'immobilité ce que le voyage ne m'apportait plus : LA PAIX". Il voudrait y arriver en arrêtant son activité habituelle ressemblant à celle de la majorité des citoyens des pays riches : vie culturelle, voyages en permanence… Pourra-il atteindre son objectif ? Au départ, il y a la sérénité, la beauté de la nature : "le luxe de l'ermite, c'est la beauté" et la liberté de tout faire "dans un monde où il n'y a rien à faire". Il se dit : "La vie de cabane est peut-être une régression. Mais s'il y avait progrès dans cette régression ?"
Il me semble qu'à l'arrivée tout est nouveau et éblouissant ; pourtant, au fil des jours, j'ai senti une perte de l'enthousiasme, car il commence à réaliser qu'il doit partir ; il sait bien que cela a été un jeu éphémère… "Comment appeler autrement un séjour de réclusion volontaire sur un rivage forestier avec une caisse de livres et des raquettes de neige ?" Pourtant, on dirait que son séjour a été réussi "Rien ne me manque de ma vie d'avant… Rien. Ni mes biens, ni les miens On dispose de tout ce qu'il faut lorsque l'on organise sa vie autour de l'idée de ne rien posséder".
Il fait même un appel à la vie des cabanes : "Nous sommes les seuls responsables de la morosité de nos existences. Le monde est gris de nos fadeurs. La vie paraît pâle ? Changez la vie, gagnez les cabanes. Au fond des bois, si le monde reste morne et l'entourage insupportable, c'est un verdict : vous ne vous supportez pas ! Prendre alors des dispositions". Paradoxalement. Il ne va pas y rester, car l'expérience qu'il nous raconte est un artifice, et je ne me suis pas dégagée de l'idée d'être en train de lire un carnet de voyage.
Ce qui est pittoresque, ce sont les quelques rencontres avec des personnages russes. Pourtant, ce qui me choque un peu, c'est qu'il parle des Russes globalement. Peut-être ce n'est pas pareil de parler des gens qui vivent en Sibérie que le faire de ceux qui vivent à Moscou ou à Saint-Pétersbourg, même dans d'autres points de la Sibérie. Il se peut qu'il y ait des différences…
Cela dit, il remarque quelques comportements qui décrivent les Russes comme buveurs permanents de vodka, travailleurs rudes et très doués pour organiser des festins : "Que le monde tangue et que l'ivresse emporte tout". Ils ont "le génie de créer dans l'instant les conditions d'un festin… Parfois un feu jaillit, des produits surgissent des sacs, on ouvre une bouteille de vodka, les rires fusent, les verres se remplissent…" ; "La Russie m'a appris à ne jamais escompter la moindre réparation après l'effort. Toujours se préparer à se détruire à coups de vodka après s'être esquinté à force de kilomètres"
D'autre part, les Russes ne se soucient pas beaucoup de protéger la nature et acceptent passivement quoi que ce soit qu'il arrive. Pour exprimer cela ils ont un mot particulier : POFIGISM. "POFIGISME : l'accueil résigné de toute chose"… Ils demandent simplement qu'on les laisse vider une bouteille aujourd'hui parce que demain sera pire qu'hier. Le pofigisme est un état de passivité intérieure corrigée par une force vitale. "Ils ne portent pas attention à la destruction de leurs forêts…Gonflés de l'illusion de peupler un pays inépuisable".
Pour finir, il souligne aussi qu'ils n'ont rien gardé des théories révolutionnaires et ont plutôt tendance à professer des théories ésotériques : "Depuis que l'URSS s'est écroulée, les théories new age connaissent le succès chez les Russes. Il fallait occuper la vacance mystique laissée par l'effondrement des dogmes socialistes. Les Russes… ne rechigneront jamais à prendre pour vérité une de ces théories que les professionnels de l'occulte n'osent même plus avancer en Europe de l'Ouest. Les Russes ne sont pas les fils de Raspoutine pour rien."
Voilà ce que je voulais commenter à propos de ce récit de voyage "intérieur" (?).

José Luis
Si j'ai gardé silence au sujet de En attendant la montée des eaux, de Maryse Condé, c'est que je n'avais rien à dire, et si je n'avais rien à dire c'est que je n'y avais rien compris, l'incompréhension étant sans doute de ma faute, point celle de l'autrice. Tout simplement je ne me suis senti concerné à aucun moment par ce roman : ni par son écriture ni par l'histoire qu'il raconte. J'ai eu, un instant, l'intention de le relire, pour voir si le problème était que je n'y avais pas prêté suffisamment attention, mais je ne m'y suis pas décidé. J'ai par contre pas mal de choses à dire concernant Dans les forêts de Sibérie, de l'écrivain voyageur Sylvain Tesson qui, j'ai l'impression, parle deux langues dans ce livre, dont une seule m'a intéressé.
D'un côté, il a la voix du paysagiste, du randonneur, de l'amoureux de la nature, une nature qu'il aime découvrir et qu'aux difficultés qu'elle pose, qu'elle lui pose, il aime s'affronter, de manière répétitive, cela exprimé avec un langage lui-même répétitif, au point que, pendant longtemps, on a l'impression qu'il ne fait que se copier lui-même. Évidemment, il est bien obligé de laisser trace sur son carnet des effets sur cette nature, sur ce paysage, des changements apportés par le passage des saisons. Mais sa langue n'en est pas ébranlée : elle reste aussi neutre, et je dirais, aussi banale, partout : qu'il soit seul, qu'il soit accompagné par deux chiens, qu'il reçoive des visites de rares habitants des alentours ou, plus exceptionnellement, de gens de passage, ou bien qu'il se déplace pour aller à la rencontre d'un des dits voisins, il raconte ces événements de la même écriture morne, monotone, absente de véritable émotion. C'est cette langue-ci et le monde qu'elle décrit - pas à cause de ce monde, mais à cause de l'écriture qu'il utilise pour le dépeindre - que le livre m'a énormément déçu.
Or, à côté de cette voix de paysagiste, qui se transmute parfois en naturaliste, une autre se fait entendre : celle de l'essayiste, sinon cela aurait injustifié le prix Médicis d'Essai qui a couronné le livre. Eh bien, c'est cette seconde voix qui m'a intéressé, beaucoup, souvent, même si, parfois, on voudrait bien aussi le voir voler un peu plus haut, et être aussi un peu moins contradictoire. Cette voix parle de la solitude, du silence, compare la vie dans la nature à celle dans les villes, parle au nom de l'écologie, etc., et ceci depuis les premières pages :

C'est fou ce que l'homme accapare l'attention de l'homme. La présence des autres affadit le monde. La solitude est cette conquête qui vous rend jouissance des choses.
Le temps a sur la peau le pouvoir de l'eau sur la terre. Il creuse en s'écoulant.
Le froid, le silence et la solitude sont des états qui se négocieront demain plus cher que l'or.
Le passionnant spectacle de ce qui se passe par la fenêtre. Comment peut-on conserver encore une télé chez-soi ?

Pourtant, un accord semble être possible et même nécessaire entre nature et culture :

L'avenir de l'humanité résiderait dans "l'union plénière du civilisé et du sauvage".

C'est pourquoi il est moins sûr de soi-même et de ses choix apparents qu'il ne le croit :

Quand je pense à ce qu'il me fallait déployer d'activité, de rencontres, de lectures et de visites pour venir au bout d'une journée parisienne. Et voilà que je reste gâteux devant l'oiseau. La vie de cabane est peut-être une régression. Mais s'il y avait de progrès dans cette régression ?

Question qui restera sans réponse le long du livre, malgré les moultes fois où le sujet revient sous des formes différentes et malgré les affirmations par trop percutantes qui semblent être avancées plus, me semble-t-il, pour y croire et s'en convaincre que parce que l'auteur en soit d'avance convaincu, et ce malgré la beauté de la formule utilisée :

S'installer dans le réduit d'une hutte sibérienne, c'est gagner la bataille contre l'ensevelissement sous le tombereau des objets. La vie dans le bois conduit à se dégraisser. On s'allège de ce qui encombre, on déleste l'aérostat de son existence.

La preuve de ce manque de confiance, n'est-ce pas la caisse de livres, soigneusement choisis qu'il se fait porter à sa cabane et le caractère même de ces livres :

Je vide la caisse. J'ai Michel Tournier pour les songeries, Michel Déon pour la mélancolie, Lawrence pour la sensualité, Mishima pour les froids d'acier. J'ai une petite collection de livres sur la vie dans les bois : Grey Owl pour la radicalité, Daniel Defoe pour le mythe, Aldo Leopold pour la morale, Thoreau pour la philosophie mais son prêchi-prêcha de parpaillot comptable me lasse un peu. Whitman, lui, m'enchante : ses Feuilles d'herbe exhalent la grâce. Jünger a inventé l'expression de "recours aux forêts", j'ai quatre ou cinq de ses livres. Un peu de poésie et des philosophes, aussi : Nietzsche, Schopenhauer, les stoïciens. Sade et Casanova pour me fouetter le sang. Des polars de la Série noire : il faut parfois souffler. Quelques guides naturalistes de la collection Delachaux et Niestlé sur les oiseaux, les plantes et les insectes. La moindre des choses quand on s'invite dans les bois est de connaître le nom de ses hôtes. L'affront serait l'indifférence. Si des gens débarquaient dans mon appartement pour s'y installer de force, j'aimerais au moins qu'ils m'appelassent par mon prénom. La tranche de mes volumes de la Pléiade brille à la lueur des bougies. Les livres sont des icônes. Pour la première fois de ma vie, je vais lire un roman d'une traite.

À lire cette liste, on serait en droit de penser que l'auteur a choisi de se retirer dans cette cabane perdue à côté du lac Baïkal pour mieux remplir son esprit de quelques-unes des meilleures pépites produites par l'esprit humain civilisé. Ce que je ne comprends pas, c'est pourquoi il a cherché à ce que Thoreau et son Walden lui tiennent compagnie, d'autant plus qu'il considère le disciple d'Emerson trop sérieux et son discours une sorte de "prêchi-prêcha de parpaillot comptable" lassant. C'est sans doute qu'il n'a pas compris que Thoreau, le grand précurseur des mouvements de désobéissance civile, cherchait dans sa retraite autre chose, bien différente de celle quêtée par lui, Sylvain Tesson.
Quand je parlais, plus haut, de contradictions, c'est qu'on ne sait pas toujours, ou, pour le dire de manière plus précise, Tesson ne semble pas très bien savoir ce qu'il recherche dans sa solitude choisie. Par exemple dans ce morceau qui ne laisse pas de (me) surprendre :

Nos semblables confirment la réalité du monde. Si l'on ferme les yeux en ville, quel soulagement que la réalité ne s'annule pas : autrui continue à la percevoir ! L'ermite est seul, face à la nature. Il demeure l'unique contemplateur du réel, porte le fardeau de la représentation du monde, de sa révélation au regard humain. L'ennui ne me fait aucune peur. Il y a morsure plus douloureuse : le chagrin de ne pas partager avec un être aimé la beauté des moments vécus. La solitude : ce que les autres perdent à n'être pas auprès de celui qui l'éprouve.

Je vois dans cette citation, où les contradictions fusent (un peu plus loin il aura encore cette réflexion : "Rien ne vaut la solitude. Pour être parfaitement heureux, il me manque quelqu'un à qui l'expliquer" !!!) , une pointe de méchanceté, de mauvaise volonté et d'hypocrisie, dont la source est, sans doute, la nouvelle fraîchement reçue de la décision de sa femme de se séparer de lui. Décision qui me semble parfaitement compréhensible, puisque, apparemment, Sylvain Tesson, vus les titres de ses œuvres, semble passer sa vie à être toujours ailleurs que chez lui. Mais alors, pourquoi se plaindre ? Surtout qu'il trouve dans la solitude - et je ne résigne pas, au contraire, à l'accompagner dans cette vision de la chose - des vertus bien supérieures à celles de la vie en société :

Qu'est-ce que la solitude ? Une compagne qui sert à tout. Elle est un baume appliqué sur les blessures. Elle fait caisse de résonance : les impressions sont décuplées quand on est seul à les faire surgir. Elle impose une responsabilité : je suis l'ambassadeur du genre humain dans la forêt vide d'hommes. Je dois jouir de ce spectacle pour ceux qui en sont privés. Elle génère des pensées puisque la seule conversation possible se tient avec soi-même. Elle lave de tous les bavardages, permet le coup de sonde en soi. Elle convoque à la mémoire le souvenir des gens aimés. Elle lie l'ermite d'amitié avec les plantes et les bêtes et parfois un petit dieu qui passerait par là.

Quelques pages après, il propose une comparaison réjouissante entre les ermites chrétiens, dont les comportements lui semblent inhumains, et son modèle à lui, qui excellerait dans sa dimension d'humanité :

Au IVe siècle, dans la haute Égypte, les ergs du Wadi an Natrun grouillaient de moines en haillons. Les anachorètes couraient au désert, dans les pas de saint Antoine et de saint Pacôme. Leurs regards maladivement lumineux éclairaient des visages recuits. Le réel les horrifiait. Pour eux, vivre avilissait. Spectres nourris de lézards, ils refusaient le monde, craignaient ses saveurs. Leurs sensations étaient leurs ennemis. S'ils rêvaient d'une cruche d'eau, ils pensaient que Satan les tentait. Ils voulaient mourir pour gagner l'autre royaume, celui que les Écritures garantissent éternel. L'ermite des taïgas se tient aux antipodes de ces renoncements. Les mystiques cherchaient à disparaître au monde. Le forestier veut se réconcilier avec lui. Ils attendaient un avènement qui n'était pas de cette vie, lui cherche le surgissement de brèves joies, ici et maintenant. Ils voulaient l'éternité, il traque l'exaucement. Ils espéraient mourir, il aspire à jouir. Ils haïssaient leur corps, il aiguise ses sens. En résumé, si l'on veut passer un bon moment autour d'une bouteille de vodka, il vaut mieux tomber sur un solitaire des forêts que sur un fou de Dieu perché sur sa colonne.

La conclusion de ce savoureux morceau est le signe que notre ermite n'en est pas un, puisque la liste de beuveries dont il rend compte dans son journal est interminable, et, donc, la liste de rencontres qui les justifient - même s'il boit aussi en solitaire - est aussi bien longue. Mais pourquoi boit-il ? Pour oublier la femme qui l'a quitté, et donc, paradoxalement, pour oublier la solitude qu'en est la conséquence ? Pour mieux se fondre dans les habitudes russes ? Pour ne pas froisser ceux qui lui rendent visite ou qu'il visite à son tour ? Ou tout simplement parce que notre bonhomme est un ivrogne qui ne veut pas se nommer et que participer par, disons, courtoisie, à ces rencontres bien arrosées de la vodka lui permettent de se faire bonne conscience ? Là je ne peux pas être de son côté, quelle qu'il en soit. Pourtant je le suis très souvent, et je ne peux, jaloux, qu'applaudir, quand il écrit des choses comme celles-ci :

Rien ne me manque de ma vie d'avant. Cette évidence me traverse alors que j'étale du miel sur les blinis. Rien. Ni mes biens, ni les miens. Cette idée n'est pas rassurante. Quitte-t-on si facilement les habits ajustés à ses trente-huit ans de vie ? On dispose de tout ce qu'il faut lorsque l'on organise sa vie autour de l'idée de ne rien posséder. […] La vie en cabane est un papier de verre. Elle décape l'âme, met l'être à nu, ensauvage l'esprit et embroussaille le corps, mais elle déploie au fond du cœur des papilles aussi sensibles que les spores, L'ermite gagne en douceur ce qu'il perd en civilité.

Moi, qui, dans ma jeunesse, et même encore dans les premières années de mon âge mûr, rêvais de vivre dans la plus absolue solitude, aux commandes, par exemple d'un phare, à la pointe d'un cap rocheux de mer, ou perché, au milieu d'une forêt, au sommet d'une tour de surveillance d'incendies, ou de partir sur les pas du père Charles de Foucault, dans le désert du Sahara pour me dédier à la vie contemplative, j'ai lu Dans les forêts de Sibérie - au moins cette deuxième voix de l'auteur, à laquelle j'ai dédié ces déjà trop longues lignes - dans le plus grand plaisir.


Nos cotes d'amour, de l'enthousiasme au rejet :
                                        
à la folie
grand ouvert
beaucoup
¾ ouvert
moyennement
à moitié
un peu
ouvert ¼
pas du tout
fermé !


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