La Compagnie des loups et autres nouvelles, trad. Jacqueline Huet, préface de Christine Jordis, éd. Points, 2016, 224 p.
Quatrième de couverture : Ils sont tous là, si familiers… et portant étrangement pervertis. Barbe-Bleue, le petit Chaperon rouge, la Belle et la Bête, le Loup-garou, Blanche-Neige… chargés de violence et d’érotisme gothique, parés d’une morale différente et d’une beauté nouvelle. Attention, les loups sont parmi nous, mais aussi en nous, prêts à bondir…

Angela Carter (1940-1992), écrivain, journaliste et universitaire anglaise, est l’un des auteurs les plus populaires de la littérature fantastique moderne avec des romans comme Vénus noire et Le Magasin de jouets magique. Elle est également l’auteur du scénario La compagnie des loups, adapté au cinéma par Neil Jordan.

"Ses livres nous bousculent, ébranlent les monuments, démolissant les temples et défiant les gardiens de la morale." Salman Rushdie


Points, 1997, 208 p.
Quatrième de couverture : Dix contes célèbres pour enfants sont subvertis par la plume féminine d'Angela Carter. L'audace érotique du Cabinet sanglant (Barbe-bleue) ; le flirt avec la violence animale de M. Lyon fait sa cour, l'impudence du Chat botté, un peu escroc, un peu gigolo : tout cela est splendide et de sensations et d'esprit. Et, fatalement, plein de loups. La nouvelle qui donne son titre au recueil a inspiré à Angela Carter le scénario du film fantastique de Neil Jordan.


Seuil, coll. Cadre vert, 1985, 192 p. 

En anglais :
The Bloody Chamber and Other Stories, London, Victor Gollancz, 1979 (première édition)
En ligne en anglais ici


Penguin, Vintage Classics, 2016

Penguin, Vintage Classics, 2021

Angela Carter :


1972
, de retour du Japon


Télérama


National Gallery
, 1981

Angela CARTER (1940-1992)
La compagnie des loups (1979)

Nous avons lu (exprès) ces 10 nouvelles pour le 16 décembre 2021 (groupe breton) et le 17 (groupe parisien) - période de Noël donc...
    

DOCUMENTATION en bas de page : Publications d'Angela Carter
Son parcours
Traductions Radio, théâtre, opéra, cinéma Articles, études et interviews Sites

Nos 24 cotes d'amour parisiennes et bretonnes

Ambiance à feu et à sang ! On est très divisé.es !
Annick L Brigitte T
DenisFannyJacqueline
Laurence
Manuel
Marie-OdileMarie-Thé Yolaine
Entre et Annick A
Chantal •Cindy Etienne
CatherineClaire Françoise Laura Monique L
Danièle Édith Nathalie Rozenn Sylvie


Ambiance avec les couvertures !
         
L'ordre des nouvelles est différent en français et en anglais
Le cabinet sanglant
La compagnie des loups
Le loup-garou
Louve-Alice
M. Lyon fait sa cour
La jeune épouse du tigre
Le chat botté
Le Roi des Aulnes
L'enfant de la neige
La dame de la maison d'amour
The Bloody Chamber
The Courtship of Mr Lyon
The Tiger's Bride
Puss-in-Boots
The Erl-King
The Snow Child
The Lady of the House of Love
The Werewolf
The Company of Wolves
Wolf-Alice

Nous avons pu visionner le film La compagnie des loups de Neil Jordan, scénario de Neil Jordan et Angela Carter, adapté en 1984 de son propre livre : en vf ici en entier.
Voici les 15 cotes d'amour du groupe parisien
réuni le 17 décembre 2021 :

Annick L DenisFanny JacquelineManuel

Entre et Annick A

Etienne
Catherine •Claire      
Françoise
Laura
 •Monique L
Danièle Nathalie Rozenn

Toujours notre triple formule inaugurée en septembre 2021 : après avoir lu les réactions transmises, notre tour de table concerne les présents et les simultanément à l'écran.

Manuel(avis transmis)
J’étais enthousiaste à l’idée de lire ces contes bourrés de références que nous connaissons dans le groupe, avec nos lectures communes : Huysmans, Baudelaire, Carmilla… J’ai trouvé parfois une certaine classe à ces contes revisités, mais j’ai vite déchanté. Je n’ai pas marché à cet humour un peu lourd. J’ai calé p. 80 : "Bourrez d’ail un cadavre, bah il n’en salivera que mieux : dépouille à la provençale". Trop c’est trop. J’aurais aimé avoir un plaisir de lecture mais non. Je l’ouvre ¼ pour la revisite de "Barbe bleue", du "Petit Chaperon rouge" ou de la rencontre entre Dracula et le loup-garou.
Monique L(avis transmis)
Ce livre est original. Les dix nouvelles qui le composent revisitent principalement des contes classiques de notre enfance d'une manière très surprenante. Certains d'entre eux donnent lieu à plusieurs nouvelles comme autant de variations.
C'est bien écrit et conserve les codes littéraires des contes, leur lexique et certaines tournures de phrases. Comme dans les contes revisités, il est question d'amour, de sexe, de mort, de la découverte de soi et des pièges que peut tendre la vie, mais dans un registre beaucoup plus sombre, cruel et sensuel.
Ces nouvelles sont très diverses par leur ton et leur contenu. Certaines sont plus érotiques et grivoises, d'autres sont dans le registre de la comédie. La constante est dans le rôle donné aux femmes.
L'auteure leur redonne une consistance qu'elles n'avaient pas au départ. Des jeunes filles enlevées, mises aux mains des bourreaux, prennent le pouvoir à leur tour dans une tension érotique évidente. Elles ne sont plus des proies. Elles affirment leur féminité en assumant leur nature, en prenant conscience de leur charme, de leur séduction, leurs premières menstrues sont une révélation.
Personnellement j'ai préféré "Le cabinet sanglant". La jeune épouse comprend vite dans quel mariage elle s'engage. Elle n'est pas dupe. Si elle succombe à l'appel du fameux cabinet, c'est qu'elle veut comprendre qui est vraiment son conjoint. La délivrance par sa mère est un peu grand-guignolesque, mais bien amenée depuis le début par sa propre histoire et par sa relation à sa fille. J'ai également bien aimé dans l'ordre "Louve Alice" et "la compagnie des loups".
Tous ces textes sont riches avec plusieurs niveaux de lecture. C'est une belle découverte. C'est une version pour adulte de ces contes. J'ouvre le livre aux ¾.
Denis(avis transmis)
J'ai d'abord été très séduit par la première nouvelle, "Le cabinet sanglant". Sans avoir lu quoi que ce soit sur l'autrice, j'ai aimé l'originalité du point de vue de la jeune épousée. J'ai vite compris qu'il s'agissait de "Barbe-Bleue", présenté sous un jour charmeur et imposant. J'ai ensuite été surpris par la soumission de la victime, qui m'a fait penser à tous les phénomènes d'emprise dont on parle beaucoup actuellement. Cela m'a aussi rappelé des lectures anciennes où il est question de soumission volontaire (Sacher-Masoch ?).
J'ai donc bien aimé cette nouvelle mais je n'ai pas réussi à embrayer sur la suite. Peut-être qu'une seule m'a suffi ? En même temps, je n'ai pas aimé le style d'écriture : trop de mots, trop de bavardage. Une fois compris le procédé narratif d'inverser un conte bien connu, l'effet de surprise a disparu. J'ai évidemment pensé aux variations sur "Le Petit Chaperon rouge" dans les dessins de Reiser ou d'autres, qui s'en sont donnés à cœur joie (et de façon drôlement grivoise). Je me suis aussi rappelé un texte de Robert Walser sur Blanche-Neige, contrainte de cohabiter avec sa belle-mère, mais après la tentative d'empoisonnement. C'était autrement prenant que les présentes histoires. J'ouvre au ¼.
Nathalie(avis transmis)
Mais quelle émotion ! Quelle émotion !
Tout d'abord, révulsée par les deux premiers récits, j'ai tout de suite eu envie de lâcher le livre et j'ai pesté contre ce choix qui ne me semblait pas correspondre à une envie personnelle de douceur et de calme pour une dernière séance proche de Noël. Pourtant, comme je me connais relativement bien, je sais que souvent quand je sur-réagis, c'est que cela me touche quelque part au plus profond de moi. J'ai donc poursuivi en me répétant ce que j'avais dit lors de mon dernier passage : dans certains cas, comme celui-ci, il faut quand même aller au bout du texte pour pouvoir justifier fermement qu'on le ferme.
Mais pourtant très vite, j'ai complètement adhéré à cette idée de peur et de rejet, de fascination et de dégoût. Une excitation s'est emparée de moi et avide, j'ai dégusté le reste des récits.
Quelle joie de découvrir une autrice aussi talentueuse, et dans le fond, et dans la forme.
Quel plaisir à suivre les méandres de sa pensée, son humour discret, sa capacité à nous faire croire quelque chose pour nous déstabiliser un peu plus tard.
J'ai été absolument éblouie et fascinée par la réécriture de "La Belle et la Bête". Un conte sur les simulacres, les fausses apparences, l'intelligence, la conscience des choses et la notion d'humanité. Comme dit le laquais "rien d'humain ne vit ici" p. 117 (Je l'ai imprimé en six exemplaires ! et je l'ai posté à plusieurs lectrices, j'ai acheté aussi Vénus noire pour poursuivre mon plaisir de lecture).
Ce texte est magnifique et la chute en est magistrale. J'ai dû la relire deux fois pour être certaine d'avoir bien compris et c'était incroyable - génial, innovant et bien que cela puisse paraître un paradoxe, totalement humain. Ainsi parfois, la relation avec l'autre nous permet-elle de nous découvrir nous-mêmes et d'entrer dans une autre dimension. J'ai relu également plusieurs fois le récit en son intégralité et j'ai trouvé que cela fonctionnait à chaque fois : c'est tout le plaisir du conte efficace et au plaisir sans cesse renouvelé. L'écriture est très imagée, très travaillée, les ambiances qu'elle crée sont soignées, précises, très visuelles.
J'ai beaucoup de mal à imaginer que ces textes aient pu être transcrits - tout en conservant leur force et leur qualité - à l'écran et je n'ai pas du tout envie de voir l'adaptation. En effet, les récits me semblent enrichis par les réflexions rapportées en point de vue interne et/ou par l'insertion des commentaires du narrateur. Qu'en est-il dans le film ? Ce sont les pensées les plus intimes auxquelles nous avons accès et ce sont celles-ci, moi, qui me fascinent.
La langue est très précieuse avec des tournures, des expressions très particulières. C'est une écriture d'orfèvre et je n'ai jamais eu l'impression d'avoir sous les yeux une traduction !
Si les contes ont vocation à nous faire réfléchir tout en nous effrayant, celui-ci en particulier est vraiment réussi parce que plein de délicatesse, de tension et de mise à distance. Je me demande d'ailleurs qui prend en charge une phrase comme celle-ci p. 105 "J'assistais au spectacle avec le cynisme furibond qui caractérise les femmes que les circonstances contraignent à assister en silence à quelque folie".
Nous sommes loin de récits sirupeux et si le roman est aussi promu sous l'idée de récit "érotique gothique", il me semble qu'ils sont beaucoup plus que ça. Tout est taillé dans le vif.
J'ai également beaucoup souri à la lecture du "Chat Botté".
Et je pense que son talent m'a vraiment permis de dépasser mes a priori sur les contes plus "trash" comme les deux premiers et celui très dérangeant de "L'enfant de la Neige".
Pas question de morale ici, elle me paraît être détournée ou mise en sourdine, il me semble qu'on peut les apprécier si on les prend pour ce qu'ils sont : des contes et juste des contes.
Il me tarde de vous lire pour savoir comment vous avez réceptionné cette lecture. En tous les cas, merci à celle ou celui qui l'aura proposée. Je pense que je vais poursuivre et m'empresser de découvrir l'ensemble de son œuvre.
J'ouvre en grand.
Fanny
Je n'ai pas lu le même livre que Nathalie. J'étais enthousiaste comme Manuel et comme lui, j'ai déchanté.
Je n'ai pas aimé du tout le style, lourd : "Et nous roulâmes vers le déploiement de l'aube qui s'étalait maintenant sur une moitié du ciel en un bouquet hiémal ou l'incarnat des roses côtoyait l'organe des lis tigrés, comme si mon époux m'avait commandé un ciel chez le fleuriste." (p. 16). Je ne suis pas touchée et j'ai été vite énervée. J'ai trouvé cela lourd, ampoulé. Je suis donc passée complètement à côté.
"Le Chaperon rouge" ne m'a pas fait rire. Pour ce qui est du côté subversif, Tex Avery est plus rigolo.
Les "attributs masculins" sont nommés tels quels : or le conte traditionnel suggère, pour parler à l'inconscient, et là, tout est dit ; cela bloque la dimension imaginaire, les associations conscientes ou non. Page 95, "Demoiselle Agnelle, immaculée, sacrificielle"… : : la nuit de noces, on a compris.
C'est "Louve-Alice" que j'ai préféré, car je l'ai trouvé un peu plus suggestif et j'ai bien aimé cette image : "est assez jeune encore pour faire le bruit de la graisse qui frit dans une poêle" (p. 77).
Je viens de terminer "Le chat botté", j'ai bien aimé le rythme, avec ce côté décalé entre des phrases grandiloquentes et le vocabulaire courant, j'ai trouvé le style tressautant et cela m'a effectivement fait penser aux chats. En lisant les phrases, je voyais le mien tantôt ronronnant, tantôt sautant d'une pièce à l'autre. Mais l'histoire ne m'a pas intéressée.
J'ouvre ¼ et je vais essayer de finir. Je n'ai pas vu le film, peut-être que le côté visuel rend bien l'ambiance et qu'il n'y a pas ce côté du style que j'ai trouvé lourd à la lecture.
                    
Jacqueline (qui s'est surpassée avec un sapin de la forêt enchantée)

Je l'ai lu en entier, mais je n'ai pas réussi à être intéressée.
La langue précieuse m'a agacée dans les descriptions. Pourtant j'adore les contes.
J'ouvre ¼ pour l'avoir lu jusqu'au bout.

Françoise
Tu t'attribues ce ¼…
Jacqueline
Peut-être n'ai-je pas compris. Perrault peut s'interpréter de 100 façons, mais là, je n'ai pas compris.
J'ai essayé de lire Love, j'ai été jusqu'à la page 7... et j'ai laissé tomber.
Le film, c'est pire...
J'étais persuadée que la grand-mère finissait par être un loup.

Catherine
Tu vois, le film t'a apporté un éclairage...
Françoise(qui a lu en vo)
C'est une découverte. J'ai été enchantée par le détournement des contes. C'est subversif et drôle. La dimension sexuelle m'a plu. Oui, elle met les points sur les "i" et les pieds dans le plat. J'aime l'écriture descriptive et pas allusive, c'est très plaisant, voire carrément jouissif à certains moments.
J'ai lu "Barbe bleue", "Le Petit Chaperon rouge" et "Louve-Alice". "Barbe bleue" est mon préféré ; la jeune n'est pas si naïve, elle comprend vite et ne se laisse pas faire comme une pauvre victime... ; et j'aime quand ça finit bien ! J'ouvre aux ¾.
Rozenn
J'ai dévoré ce livre. Je l'ai dégusté. Je l'ai adoré.
J'ai toujours aimé les contes. J'ai aimé les lire, les relire encore plus, j'ai aimé les raconter à ma fille, et j'aime les raconter à ma petite-fille. Mais, j'hésite souvent, je me demande jusqu'où je peux aller dans le terrible. Parfois elle se bouche les oreilles... D'après Bettelheim, il serait bon qu'elle ait peur. Peut-être. Mais jusqu'à quel point ? On fait du théâtre-forum avec la trame du "Petit Chaperon rouge". Ce qui me gêne encore plus que la brutalité, c'est le machisme des contes : je n'ai pas envie de lui apprendre la passivité, de lui faire croire qu'elle est une princesse dont le seul avenir est de rencontrer un prince - charmant... bien sûr ! Pour vivre heureux longtemps et avoir beaucoup d'enfants. Mais elle ne m'a pas attendue pour ça : je n'y peux rien, elle le croit déjà. J'ai cherché des contes détournés ; mais un jour elle est arrivée avec une version différente de "La Belle au bois dormant" dans chaque main, en disant qu'elle préférait celle où la princesse se marie. Au moins nous lui apprenons, ses parents et moi, que le prince doit s'assurer que la belle est consentante avant de l'embrasser. Un peu difficile sur le plan logique...
Revenons au livre : il fait délicieusement frissonner. Il est à la limite de la crudité, du côté de l'érotisme. Ce qui sauve le conte de la banalité et de la mièvrerie. D'autant que le plus souvent il reste ambigu, elliptique, mais les filles y sont hardies et désirantes.
J'y trouve à la fois le plaisir de la répétition et de l'inattendu. Familier et surprenant. Quelques anachronismes apportent de l'humour.
L'écriture est magique, luxuriante. C'est encore plus évident après avoir vu le film.
Comparons les deux fins de La compagnie des loups : celle du film et celle de la nouvelle.

Claire
Quand on a regardé le film ensemble, on a lu dans une interview ce qu'Angela Carter, scénariste, dit à ce sujet : elle s'est très bien entendue avec Neil Jordan le réalisateur, mais... elle était en Australie quand il a tourné la fin. Il lui a dit qu'elle "différait quelque peu du scénario. Quand je suis allée à la projection, je me suis assise avec Neil, j'ai beaucoup apprécié le film et j'ai pensé qu'il l’avait bien tourné, comme je l'avais espéré. Jusqu'à la fin que je n'arrivais pas à croire – j'étais tellement bouleversée que j'ai dit : 'Tu l’as gâché.' Il s'est excusé"...

Rozenn
Et après le film j'ai relu avec délices la nouvelle. Le film n'a pas réussi à la gâcher. Même si quelques images intéressantes en restent. L'écriture est surchargée d'images, mais à la lecture on peut choisir celles qu'on retient alors que le film les impose.
J'ai lu la préface de Christine Jordis et je ne pourrais que redire moins bien qu'elle tout ce qu'elle écrit. J'ai longtemps gardé sous la main De petits enfers variés : plus qu'un super guide.
Annick L  
Je trouve cette idée de Laura très sympa, j'adore lire des contes et leurs adaptations.
J'ai trouvé le premier,"Barbe bleue", pas mal, le personnage féminin est intéressant.
Et j'ai tout lu, par bribes, mais j'ai vite senti un effet de saturation, entre autre avec ce thème redondant de l'animalité (chez les monstres et chez les humains).
Je n'ai pas aimé le style, alourdi par les descriptions trop précises (un peu d'implicite ne fait pas de mal !). Le côté fleuri, baroque, m'a insupportée. Sans compter les changements de narrateur : par exemple p. 158, où l'on passe d'un narrateur extérieur à un je très personnalisé. Au début j'ai apprécié ces effets de surprise, mais trop c'est trop.
Et surtout cet imaginaire-là ne me touche pas. Je n'y ai d'ailleurs pas trouvé la portée féministe annoncée.
J'ai cependant bien aimé le dernier conte, "La dame de la maison d'amour" : la fin est belle et romantique.
Globalement, je suis restée à côté. C'est une espèce de salade bizarre avec des épices tellement mélangés que je ne sais pas quoi en retenir.
J'ouvre ¼ pour la découverte de cette auteure pas banale, pour le "Barbe bleue" et le dernier conte.
Annick A entreet
Quand je commence un livre, je ne veux rien en savoir. Je n'avais même pas vu que c'étaient des nouvelles…
J'ai beaucoup aimé "Barbe bleue" et son érotisme, la finesse du récit. Je me suis laissée prendre, j'ai eu l'impression d'être une enfant, j'ai eu peur.
Je me suis arrêtée au "Chat botté" qui m'a ennuyée.
J'ai trouvé qu'il y a une dimension féministe, notamment dans "Barbe bleue" et avec de l'humour. Il y a une place laissée aux femmes qui trouvent du plaisir dans l'érotisme : ainsi, dans l'histoire du tigre, elle fait en sorte que le déshabillage soit partagé, c'est assez fin et habile.
J'ai lu "L'enfant de la neige" que j'ai détesté et trouvé extrêmement pervers.
L'écriture ne m'a pas emballée. J'ouvre entre ¼ et ½.
J'ai bien aimé le film, drôle et dans l'outrance, on y était un peu perdu entre rêve et réalité.
Catherine
J'ai beaucoup aimé, c'est très drôle.
J'ai aimé le rôle des femmes qui ne sont pas passives.
J'ai adoré "Barbe bleue", ça finit en apothéose.
J'ai aimé le style, fleuri, et assorti de chutes - justement ce que tu n'as pas aimé Fanny ("commander un ciel chez le fleuriste").
J'ai beaucoup aimé la femme tigre qui choisit de rester. J'ai aimé l'atmosphère. Le chat botté ressemble plus au figaro.
C'est cependant inégal avec un côté en effet répétitif sur le thème de l'animalité. Il me manque les deux derniers contes.
Mais c'est plein de talent, de subversion et d'humour, et j'ouvre aux ¾.
Etienne
Je suis dans l'équipe qui a trouvé ça un peu lourd.
J'étais intrigué et avec un a priori positif avec la quatrième de couverture.
J'en suis à la moitié, je vais finir. Mais je ne suis pas emballé.
Le style ne m'a pas dérangé. Mais il y a une profusion de symboles trop appuyés (par exemple la couleur rouge et la virginité p. 64 "le châle rouge qui brille aujourd'hui, non sans implications menaçantes, comme du sang sur la neige (...) ses joues sont d'un blanc taché d'écarlate héraldique et elle vient de saigner son premier sang de femme"). Je m'attendais à quelque chose de plus fin.
Je trouve sympa que les héroïnes soient mise en avant de manière positive. J'ouvre à ½.
Danièle (à l'écran)
Je dois tout d'abord préciser que je n'ai pu lire que les trois premiers contes du recueil, livré la veille au soir de notre rendez-vous lecture - la faute à mon libraire, ou plutôt sans doute aux délais de livraisons actuels. Mais, pour ces trois contes, quel plaisir de se plonger dans cette langue poétique et voluptueuse, dans cette ambiance orgiaque de l'écriture et macabre par le contenu, avec son sens hitchcockien de la narration basé sur le pressentiment, le symbolisme érotique dans un environnement gothique, fantastique et à la limite du sado-masochisme. Les descriptions sont pour moi de la poésie pure, sans pied ni rime. On a affaire aux contes de notre enfance mais totalement revisités, "Barbe bleue", "Le Petit Chaperon rouge", etc.
Je voudrais justement rebondir sur les propos de Fanny, qui, nostalgique des contes qui nous sont familiers, regrette ici un certain manque de suggestivité. Ce qui me plaît au contraire, c'est la profusion des images descriptives de la nature dans tout ce qu'elle recèle d'étrange et finalement de symbolique. Elle ne veut ni suggérer, ni théoriser - comme par exemple Bruno Bettelheim le fait, en psychanalyste -, elle veut visualiser, par des descriptions très précises et savoureuses. L'arrière-plan psychanalytique est mis ici en évidence ou plutôt mis en scène de façon très visuelle dans toute son étrangeté. Je n'ai pas vu le film, mais je m'imagine une avalanche d'images gothiques à la Nosferatu.
On ne peut aussi s'empêcher de penser aux affaires actuelles de violence sexuelle et de consentement problématique. L'héroïne de "Barbe bleue" n'a que 17 ans. Ici, clairement, la peur et l'envie s'entremêlent, pour finalement laisser la place à une action décidée et même futée, contre les violences sexuelles. Ouf, on peut agir contre ça !
L'intervention deus ex machina de la mère dans "Le cabinet sanglant" (Barbe bleue) ou la fin inattendue de "La dame de la maison d'amour" (Nosferatu) permettent à mon avis de respirer et restent typiques des contes.
Donc j'ouvrirai en grand, pour ce que j'ai lu. Peut-être ai-je évité la saturation que certains d'entre vous semblent avoir connue. J'ai simplement ressenti une certaine satiété à la fin du troisième conte, mais n'ai pas hésité après coup à lire le dernier, "Nosferatu", qui semblait avoir recueilli une bonne partie des suffrages. Ce que je n'ai pas regretté.
Claire
Je me situe dans la même équipe... J'ai aimé la découverte.
Et d'abord l'écriture. Le côté appuyé dénoncé par certains me plaît, car j'y vois une forme, non pas d'humour, non pas de second degré, mais des clins d'œil, une complicité avec le lecteur - enfin... certains. L'écriture est également raffinée, avec ces décalages qui ont été évoqués, ces mélanges, ces ruptures, cet inattendu en fin de phrase.
J'aime bien le mot orgiaque de Danièle ; j'ajouterai pour ma part le mot jubilation pour tout ce qui est cru, par exemple dans la même page 60, on a, d'abord mignons, de "petits fromages rances et couverts d'asticots", un peu moins soft "les ogres qui grillent des nourrissons sur des grils de fer" et surtout l'effet macaroni quant à l'effroi dû aux loups : "Il n'est pas une nuit d'hiver pendant laquelle l'habitant des chaumines ne craigne d'apercevoir un long museau famélique et gris glisser sous sa porte, et une femme fut ainsi mordue dans sa propre cuisine tandis que qu'elle égouttait des macaronis dans une passoire."
J'ai été frappée par l'aspect non conventionnel ; "L'enfant de la neige" qu'a détesté Annick A m'a semblé le sommet : en à peine deux pages, on a inceste, nécrophilie, une cruauté d'une pureté poétique... : magnifique !
J'ai cependant moi aussi éprouvé une forme de saturation, de lassitude. Peut-être est-ce comme pour un recueil de poèmes, il faut en lire un de temps en temps...
Pour certaines grandes scènes, j'ai eu le sentiment que l'auteure avait des visions qu'elle nous faisait partager. Et que le film ne rend pas, même si, pour d'autres raisons, je l'ai apprécié.
J'ai préféré les nouvelles à la première personne, car la voix de ces jeunes filles - l'énonciation - me semble vertigineuse.
Je suis allée me promener dans deux autres livres d'Angela Carter : Vénus noire dont j'ai trouvé la première nouvelle (en ligne ici) en référence à Baudelaire et sa Jeanne Duval vraiment brillante. J'ai feuilleté un roman, La Passion de l'Ève nouvelle, dont le héros, tel Orlando, change de sexe. J'ai regretté que l'essai La femme sadienne soit introuvable, car j'aurais bien voulu comprendre comment elle présentait en référence à Sade son goût SM qu'on sent bien dans les contes. Ses héroïnes dans le livre qu'on a lu sont des fortes personnalités, aussi séduisantes que le loup...
Laura, qui avait proposé le livre (à l'écran)
J'étais un peu stressée face aux réactions, mais je suis contente car je ne m'attendais pas à des avis aussi divisés.
Je l'ai lu en anglais et je ne sais pas, en entendant des citations, si l'écriture française m'aurait plu. La lecture en anglais, en comprenant un mot sur cinq, m'a aidée à être davantage dans la suggestion…
À la première lecture, j'ai trouvé ça extraordinaire, choquant. À la deuxième nouvelle relue, l'enthousiasme est retombé. J'ai aimé "Barbe bleue", sauf la fin.
J'ai découvert le livre dans un cours de littérature anglaise, et avec l'analyse, TOUT devient intéressant.
J'ai trouvé "Le loup-garou" poétique, rythmée, en anglais j'ai été transportée par l'écriture.
Les jeunes filles sont très jeunes, je me suis demandé s'il n'y avait pas une dimension autobiographique.

Françoise
C'est plutôt le contraire. L'auteure aimait les petits jeunes...

Laura
J'aime l'ambiance générale, baroque, gothique et dans les aspects les plus précis.
Dans "Barbe bleue", il y a l'opposition entre l'aspect aérien et l'entrée dans la cage, ainsi que le souterrain.
Comme je suis un peu déçue à la relecture, je n'ouvre qu'aux ¾.


Quelques autres livres cruels cités, pendant ou après notre soirée :

- Rozenn nous a signalé que Christine Jordis, la préfacière de notre livre, a écrit De petits enfers variés : romancières anglaises contemporaines (parmi leurs traits communs : la méchanceté...), Seuil, 1989.

- Elle nous recommande aussi Blanche-Neige, de Béatrice Alemagna, éd. La Partie, 2021, associée à une expo à l'Arts Factory (l'auteure renverse la trame du récit des frères Grimm pour donner la parole à une reine vengeresse, narcissique et malheureuse ; elle partage avec le lecteur, à la première personne, les tourments que lui cause la haine de son innocente belle-fille et son désir obsessionnel de la détruire...).

- Denis aussi nous signale une Blanche-Neige, de Robert Walser, José Corti, écrit plus d'un siècle avant, en 1902 (il reprend le conte là où Grimm l'avait laissé et imagine Blanche-Neige de retour dans sa famille, après sa vie et son sommeil au doux pays des nains. Elle ne peut oublier. Elle voudrait aimer mais son passé la taraude comme un cauchemar. Ce n'est plus une petite fille ; elle renvoie ses baisers au prince qu'elle juge trop "petit"...).

- Claire découvre dans la rubrique des disparitions Anne Rice, auteure d'Entretien avec un vampire (un vampire fait le récit de sa vie à un journaliste...), Pocket, 448 p. (Anne Rice, qui a renouvelé le genre dans les années 1970, vient de mourir à l'âge de 80 ans... le sang, ça conserve !)



Synthèse rédigée par Chantal des 9 avis du groupe breton réuni le 16 décembre suivie d'avis individuels

Brigitte T •Laurence
Marie-Odile •Marie-Thé
Yolaine

Chantal •Cindy
Édith •Sylvie


D'abord, le style, l'écriture : certaines n'ont pas aimé. Des descriptions très, trop, longues voire interminables. Au regret de l'absence de construction conforme aux contes, fouillis parfois, s'est ajouté une remise en cause de la traduction !
D'autres ont apprécié le style "rétro", 19e siècle, la profusion d'expressions originales, des passages poétiques parfois.
Le thème du féminisme a agacé les unes, enchanté les autres et suscité de sacrées discussions !
Certaines ont aimé ces contes revisités par l'auteure et d'autres se sont demandé le pourquoi de cette "revisite", son utilité... Des lectures anciennes de ces contes revisités ont été évoquées : Bettelheim bien sûr, Femmes qui courent avec les loups de Clarissa Pinkola Estés.
Plusieurs ont reproché à ces contes trop de cruauté, trop de sang, les ont trouvés trop gore, en ont été pour certaines jusqu'à en être angoissées...
Certaines sont entrées dans cette lecture avec recul, voire rejet, d'autres avec a priori positif, et même le plaisir des contes d'enfance...
Ces contes ont renvoyé chacune à son passé :
- religieux : la peur du diable toujours déguisé en beau jeune homme séducteur...
- militant : féministe des années 70
- enchanteur : les contes enchantés de l'enfance...
En fin de séance, d'âpres discussions ont concerné le féminisme (outrancier ?) actuel..., la place de l'homme actuellement... Et enfin, le thème difficile, mais de plus en plus présent chez les jeunes générations, du GENRE, et là les questions sont restées largement sans réponse...
Brigitte
Bien qu'avertie par une lecture attentive de la préface de Christine Jordis, je n'ai pas pris un plaisir constant à la lecture de ces dix contes d'Angela Carter.
L'originalité de l'œuvre tient à sa relecture de contes européens où je retrouve une alliance entre les contes de Perrault et de Mme de Beaumont de mon enfance savamment mêlés à une inspiration du mouvement gothique avec la Bête, le démon, le vampire et à une inspiration du romantisme avec la femme fatale, le sentimental dans un univers de châteaux, de maisons et d'endroits abandonnées. Les décors sont toujours soigneusement décrits et l'atmosphère nous imprègne pour nous emporter au cœur de l'histoire. Des références à des drames historiques s'y mêlent comme la découverte de l'enfant sauvage dans l'Aveyron en 1800 : "Louve-Alice".
Je retiendrai "Le chat botté". Récit d'un chat drôle, réaliste, complice de son maître au jeu et en amour. Mais aussi, "La jeune épouse du tigre" : belle description de la Bête, le miroir est magique, les cartes trahissent, les terreurs enfantines sont présentes avec la peur de la dévoration.
Mais pour moi, la peur et la violence sont exacerbées et dérangeantes comme dans "Le cabinet sanglant" et "La compagnie des loups". Je retrouve le loup-Garou habitant des forêts, lycanthrope mangeur d'hommes, être maléfique à la force colossale. La sexualité féminine et le sang sont largement présents… et le macabre sous-jacent dans les différents contes. Parfois trop pour me transporter et trouver ce que j'attends à la lecture d'un conte. Peu de princes charmants ! Où sont les rêves ? Où sont les fées ?
Chantal
J'ai lu le premier conte que j'ai adoré et relu une deuxième fois. J'ai survolé les autres, où ces transformations en loups, en bêtes, m'ont repoussée : pas envie de retrouver l'actualité !
Ce premier conte, je l'ai aimé. Le style rétro, 19e siècle, voulu par l'auteure, m'a enchantée, avec un vocabulaire fouillé, précieux, les termes chthonien, hiémal, arder... waouh.
Les références aux artistes peintres fin 19e - Gustave Moreau, Ensor, Gauguin, Fragonard - m'ont incitée à aller regarder leurs œuvres, avec plaisir. Et j'ai pensé aussi aux superbes arums de Georgia O'keeffe :
                     Son style, son écriture, sensuels, concernent tous les sens : la vue (la chambre aux miroirs, les arums, les paysages), l'odorat (cuir épicé du mari, les arums), le toucher (la chemise de soie qui glisse sur les seins, les cuisses), le goût (dîner mexicain , crevettes…), l'ouïe (respiration du mari, bruit des vagues, piano).
Et la subtilité de Carter consiste à installer, à dose homéopathique, dès le début, la crainte, la peur ; le lecteur peu à peu sent, puis sait, que le danger est là.
Toujours la subtilité pour décrire les sentiments ambigus de la jeune fille (petite fille pauvre enchantée par cette débauche de richesses, attirance et dégoût pour ce mari au visage d'arum), du mari (monstre sanguinaire, désespéré de ce qu'il "doit " commettre). Je pourrais continuer encore et encore... Enfin, c'est un conte, la jeune ingénue, le monstre séducteur, le danger mortel, la "sauveuse" la mère, le jeune innocent et la happy end (ils vécurent heureux...)
Les autres contes trop actuels. Non, tous les hommes ne sont pas loups, à tuer ou à mater. Je l'ouvre donc à ½.
Marie-Odile
Ma lecture fut très incomplète et très superficielle. La biographie d'Angela Carter m'avait de façon stupide donné un a priori négatif. J'ai donc abordé le texte avec réticence.
J'ai commencé par "La compagnie des loups". Après la longue introduction anti-loup, je me suis amusée de détails triviaux tendant vers la parodie. Puis le conte traditionnel se trouve revisité de façon un peu troublante : là où est le danger se trouve aussi la jouissance...
J'ai noté par ailleurs les descriptions extrêmement fouillées et parfois pesantes de la nature, les comparaisons et métaphores inattendues.
J'ai eu l'impression d'un texte improvisé au fil de la plume, avec une progression parfois étrange et je n'ai pas eu envie de m'immerger dans cet univers ni de regarder le film.
J'ouvre ¼.
Édith
Première lecture… premier avis : il y a quelques jours, j'ouvrais... ¼.
J'ai acheté le livre avec la conviction que j'aurai plaisir à découvrir cette "Angela" si excentrique et engagée… : c'est ce que j'avais retenu lors du choix du livre. Grande déception… Je me suis "acharnée" à lire ces nouvelles, malgré l'attrait d'autres livres qui me faisaient signe ; la "rencontre avec la compagnie des loups" n'a pas eu lieu. Dommage ! J'attends du groupe l'enthousiasme ?
Je lis alors dans le silence absolu car j'ai vite ressenti la nécessité de me concentrer. Peu convaincue par le sauvetage de la belle curieuse par sa mère ; je préfère l'horreur de l'original ! (Barbe Bleue/ Le cabinet sanglant).
Problème de traduction ? Phrases hachées, surabondance de mots, ponctuation brève, j'ai dû relire souvent pour saisir le récit. Je relis la préface : des clés pour le projet d'écriture d'Angela ?
Et puis, après cet agacement de plusieurs jours, d'obstination, comme dans un conte "merveilleux" je relis une ultime fois "La compagnie des loups" puis "Louve-Alice", puis "Le roi des Aulnes" puis la très courte nouvelle 'L'enfant et la neige", je retourne a la chambre sanglante avec la voix chuchotée et une grande concentration et… (voilà que j'ai raconté au groupe que je "rajeunis" de 40 ans !) et les thèmes abordés et transformés par Angela Carter me sont familiers. Familiers non pas de la connaissance des contes lus dans mon enfance, mais totalement inclus dans 40 ans de lecture "féministes" mais aussi lacanienne ("Louve-Alice" et l'usage du miroir humanisant), freudienne (sexe et filiation père et mère), de Georges Bataille (érotisme et mort) de Huysmans (le mal et sa séduction), de Baudelaire (l'horreur transcendée), les peintres et illustrateurs (Ensor, Moreau), les symbolistes (j'aime Edgard Poe et Villiers de L'Isle-Adam), bref les contes malgré leur noirceur, la dévoration, le sang, la forêt dangereuse et surtout les LOUPS sous toutes leur forme, me délivrent leurs messages, m'apportent un grand plaisir de texte, un contentement…, comme si les petits cailloux semés par Angela Carter me conduisaient vers un autre horizon… Pourquoi n'avais-je pas ressenti ce plaisir de texte dans les premières lectures ?
Une hypothèse : rebutée par ce que je dénonçais de la forme littéraire dans mon introduction, j'avais pris une position de fainéantise et de renoncement.
Un texte qui résiste, laissé de côté (rien ne m'oblige à persister), vaut parfois la peine de s'y accrocher. Pour autant que la présentation d'Angela Carter et de son féminisme années 70 (mes années) me concernait, la relecture de la préface et les références culturelles présentes, l'auteure et sa biographie, maïs aussi le désir d'échange à venir… tout cela, plus la magie du sommeil la nuit qui, parfois organise le jour, et ouvre alors à la sensibilité du texte ?
Finalement ce sera GRAND OUVERT !!! Me perdre dans la forêt sans avoir eu peur du loup sous ses formes multiples et surtout insister égalent, cette fois-ci, le frisson lié au texte ouvrant la clef… des songes ?
Yolaine(avis transmis)
Il me reste encore une vingtaine de pages pour terminer la lecture de ce roman d'Angela Carter, qui me fait un peu l'effet de la cuillerée d'huile de foie de morue qu'on administrait aux petits malades à une époque déjà lointaine. Loin de l'effet enchanteur des contes de fées qui m'apportaient tant de réconfort dans les tourments de ma prime jeunesse, et que j'ai éprouvé tant de plaisir à retrouver avec mes enfants, puis mes petits enfants.
J'adore les contes, ceux de Perrault mais aussi ceux de tous les pays, j'en ferais volontiers collection. Tous ces récits qui nous viennent plus ou moins du fond des âges parlent de la vraie vie, de ses vrais enjeux, la naissance, la traversée initiatique à travers tous les dangers, mais aussi toutes les merveilleuses rencontres qui jalonnent notre chemin, et la mort. Ils nous disent que la vie est un miracle, et que tout est possible, à condition de savoir rêver. L'existence limitée à sa réalité matérielle n'est qu'un cauchemar.
Alors l'idée de lire une version contemporaine de ces histoires m'enthousiasmait.
J'imaginais une expérience de lecture jouissive, un peu comme les romans d'Haruki Murakami, qui à mon sens réenchantent notre monde contemporain.
Déception intense, frustration, colère, incompréhension, voilà ce que je ressens devant cette entreprise inverse de désenchantement. On laisse les monstres, et on enlève les fées. Non !
Le féminisme simpliste qui enrobe ce texte délirant ne m'intéresse guère, mais peut-être n'ai-je rien compris. S'agit-il de se transformer en tigresse pour prendre sa revanche sur la sexualité violente du masculin ? Enfin c'est pas mon truc. J'admets que le sujet est central, parce que la sexualité est au cœur de la vie, et de sa magie, mais je n'ai pas vu de piste permettant de régler ce problème qui oppose les hommes et les femmes depuis des millénaires. J'ai trouvé le narcissisme, avec lequel sont traitées ces drôles d'histoires, étouffant et nauséabond. Je me demande quel traumatisme a inspiré à l'auteure ces visions cauchemardesques.
Le style est plutôt brillant ; les décors sont bizarres, on se déplace à la fois en train, en voiture et à cheval, dans des décors anachroniques de carton pâte. Je me suis beaucoup ennuyée.
Je l'ouvre au quart, pour la qualité des descriptions.


AUTOUR de
La Compagnie des loups

et Angela Carter
Publications
Parcours de l'auteure
Traductions

Radio-Théâtre-Opéra-Cinéma
Articles, études et interviews
Sites

PUBLICATIONS (en ordre chronologique de parution en anglais)

• Romans (9)
- 1966 : La Danse des ombres (Shadow Dance, aux USA Honeybuzzard), trad. Jean Guiloineau, Christian Bourgois, 1998
-1967 : Le magasin de jouets magique (The Magic Toyshop), trad. Isabelle Delord-Philippe, Bourgois, 1999 ; poche coll. Titres, 2018
- 1968 : Le Théâtre des perceptions (Several Perceptions), trad. Michel Doury, Bourgois, 1998 ; 10/18, 2003
- 1969 : Heroes and Villains, non traduit
- 1971 : Love (Love), Christian Bourgois, trad. Anouk Neuhoff, Bourgois, 1997 ; coll. Titres, 2018
-1972 : Les machines à désir infernales du Docteur Hoffman (The Infernal Desire Machines of Doctor Hoffman), trad. Maxime Berrée, éd. de l'Ogre, 2016 puis Inculte, 2016
- 1977 : La Passion de l'Ève nouvelle (The Passion of New Eve), trad. Philippe Mikriammos, Seuil, ill. Magritte, 1982
- 1984 : Des nuits au cirque (Nights at the Circus), trad. Jean Guiloineau, Seuil, 1988
- 1991 : Bien malin qui connaît son père (Wise Children), trad. Michel Doury, Christian Bourgois, 1997 ; coll. Titres, 2018

Recueils de nouvelles
- 1974 : Feux d’artifice (Fireworks: Nine Profane Pieces), nouvelles, trad. Françoise Cartano, Presses de la Renaissance, 1989 ; Bourgois, 1999
- 1979 : La Compagnie des loups (The Bloody Chamber), trad. Jacqueline Huet, Seuil, 1985 ; Points, 1997 ; rééd. 2016 - En ligne en anglais ici
- 1985 : Vénus noire (Black Venus, aux USA Saints and Strangers), nouvelles, trad. Isabelle Delord-Philippe, Bourgois, 2000 ; coll. Titres, 2018. La première nouvelle, très inspirée de Baudelaire lu lors de notre séance précédente est en ligne ici.

Non fiction
- 1979 : La femme sadienne (The Sadeian Woman: An Exercise in Cultural History), essai, trad. Françoise Cartano, éd. Henri Veyrier, 1979
- 1982 : Nothing Sacred, écrits autobiographiques, non traduit.

PARC0URS de l'auteure (quelle vie romanesque !)

Elle est écrivain (romans, nouvelles, essais, livres pour la jeunesse, poèmes, pièces pour la radio, scénarios), journaliste et traductrice. Et elle a enseigné l'écriture.

Une enfance originale, pas de tout repos...
- 1940 : onze ans après un premier enfant, Hughie, qui deviendra musicien, Angela naît en pleine guerre à Eastbourne sur la côte Sud de l'Angleterre. Le couple se réfugie avec le bébé chez la grand-mère maternelle d'Angela ; ils vivent jusqu'à la fin de la guerre dans sa maison de mineur avec elle.
- 1945-1959 : la mère est assez névrosée, en tout cas étroite d'esprit - elle éteint la télévision si un acteur divorcé apparaît à l'écran - son père Hugh est rédacteur de nuit de la London's Press Association : il lui ramène des rouleaux de papier blanc du bureau où elle écrit des histoires. Elle est gâtée de tant de friandises que lorsqu'elle quitte l'école primaire, elle est en surpoids (ce qui n'est pas facile à réaliser ces années où viande, sucre, chocolat, beurre, fromage, sont strictement rationnés...). Dorlotage et surprotection sont effarantes : sa mère place un mouchoir derrière sa tête quand elle s'assoit dans un lieu public, frotte si fréquemment de la pommade Zam-Buk sur sa poitrine qu'elle est en permanence tachée de vert ; à 10 ans, Angela n'a pas le droit d'aller seule aux toilettes ; elle est obligée de se laver avec la porte de la salle de bain ouverte jusqu'à son adolescence, sa mère craignant qu'une catastrophe ne lui arrive si elle la perdait de vue : glisser, se blesser ou se noyer dans la baignoire...

Tu me lâches maman !

- À 17 ans, devenue obèse, avec un léger bégaiement, elle prend les choses en main avec un régime rigoureux (elle perd 38 kilos en six mois) qui virera à l'anorexie, se met à jurer et à fumer, ce qui consterne ses parents, choisit des vêtements noirs moulants signe alors "de dépravation"...
- À l'issue de ses études secondaires, grâce à son père elle travaille (brièvement) au (londonien) Croydon Advertiser ; elle dira plus tard que ses progrès furent limités, en raison d'une "inexactitude démoniaque en ce qui concerne les faits" ; elle rédige entre autres des critiques musicales. Elle rencontre Paul Carter, chimiste industriel de profession, qui travaillait au noir en tant que producteur et vendeur de disques folk ; il jouait de plusieurs instruments, chantait ; grâce à lui, elle s'est impliquée dans le renouveau folk anglais (elle a écrit des notes de pochette sur plusieurs de ses disques, joué avec lui et même brièvement dirigé un club folk avec lui) et s'est par ailleurs engagée dans la campagne pour le désarmement nucléaire.
- 1960 : Paul Carter rencontré à 19 ans représente clairement une échappatoire de la maison parentale et elle l'épouse (le mariage vacillera rapidement ; elle divorcera 12 ans plus tard). Elle déménage à Bristol où elle s'inscrit à l'université et étudie la littérature anglaise. Elle a également beaucoup lu - Nabokov et Borges étaient ses deux auteurs contemporains préférés. Frustré par les travaux ménagers et la dépression de son mari, elle commence à écrire aussi voracement qu'elle lit. Elle a soif d'idées et les trouve chez Ludwig Wittgenstein, Theodor Adorno, Claude Lévi-Strauss. Elle découvre Freud, les surréalistes.

Comment abandonner son mari grâce à un prix littéraire
- 1966 : publication de son premier roman assez noir, La Danse des ombres, qui se déroule dans le quartier bohème de Clifton à Bristol.
- 1967 : Le magasin de jouets magiques, un roman gothique qui met en scène les desseins incestueux d'un marionnettiste.
- 1968 : Le Théâtre des perceptions, à l'ambiance psychédélique, s'appuie sur l'étude de RD Laing sur la schizophrénie ; ce livre remporte le prix Somerset Maugham, dont la règle établie par Maugham lui-même stipule que l'argent doit être dépensé pour des voyages à l'étranger.
- 1969 : "mon mari et moi avons traversé les États-Unis dans un bus Greyhound. Nous sommes allés de New York à San Francisco, en passant par la Nouvelle-Orléans parce que nous étions tous les deux passionnés par le jazz de là-bas. Nous sommes allés au sud jusqu'à El Paso, puis à travers le désert jusqu'en Californie. L'ensemble du voyage n'a duré que six jours mais c'était toute une expérience."
- 1970-1972 : elle part au Japon, sans son mari bien sûr (elle jettera son alliance dans un cendrier à l'aéroport de Tokyo) ; elle rencontre un Japonais qui espérait devenir romancier. Après avoir rompu avec Paul par lettre (elle dira de lui "Paul est un cochon égoïste, nul au lit et scandaleusement insensible"), elle vit avec Sozo Araki presque un an (celui-ci publiera les Souvenirs des jours passés avec Angela Carter...), puis rencontre un Coréen de 19 ans, Mansu Ko, qu'elle soulage de sa virginité : "il m'apporta une boîte d'ananas comme cadeau parce que je l'avais séduit" ; ils emménagent immédiatement, il fait la cuisine et le ménage, elle travaille pendant une période dans un bar à hôtesses. Les deux années qu'elle a passées au Japon ont été une période charnière, donnant naissance à Love (1971) Les machines à désir infernales du Docteur Hoffman (1972)
et Feux d’artifice : son nouveau sentiment d'indépendance personnelle inspirera une nouvelle liberté littéraire. Au Japon, elle sera frappée par la situation terrible des femmes. Elle découvrira l'œuvre du marquis de Sade dans une librairie d'occasion. Roland Barthes, qui relate son expérience dans L'Empire des signes (1970), s'est trouvé au Japon en même temps qu'elle. En 1971, elle prend le Transsibérien et traverse l'URSS, etc.

Une nouvelle vie
- 1972 : retour du Japon ; elle divorce ; elle a publié cinq romans et n'a que 32 ans. Elle vit à Londres (louant pendant un temps la chambre d'amis de la poétesse Fleur Adcock) et s'intéresse de plus en plus au mouvement naissant de libération des femmes. Elle a une série d'histoires d'amour désastreuses et au moins un avortement ; après une relation particulièrement tumultueuse, elle quitte Londres pour Bath où son père lui prête de l'argent pour s'acheter une petite maison.
- 1974 : Un de ses robinets éclate ; elle court chercher un ouvrier dans le chantier d'en face : Mark Pearce, 19 ans (elle en a 34) dont elle dira : "Il est entré et n'est jamais parti." Elle est à nouveau le soutien de famille et le laisse s'occuper des travaux domestiques. Elle a 44 ans quand leur fils naît. ("Avez-vous toujours voulu avoir un enfant ? Non, jamais. Ils ont dû me traîner, à coups de pied et de cris, dans la salle de travail. Je n'arrêtais pas d'insister sur le fait qu'il était trop tard, que j'étais trop vieille pour de telles choses"...). Mark s'occupe de leur fils Alex ; son implication dans la vie familiale a facilité le développement tardif d'une carrière d'enseignante à l'Université d'East Anglia : leur union semble avoir été très heureuse.

Activités de journaliste, écrivaine, enseignante

- Elle devient dès 1973 collaboratrice de Spare Rib, le magazine emblématique du féminisme radical britannique, et a rapidement été cooptée au comité éditorial de Virago, par sa fondatrice, Carmen Callil. Simultanément, elle écrivait pour les magazines de soft porn Men Only et Club International et a défendu le marquis de Sade en tant que "démystificateur de la chair" et "pornographe moral" ; elle publiera en 1979 La femme sadienne (The Sadeian Woman: An Exercise in Cultural History).
Elle a été une collaboratrice importante, et sur la durée, de New Society, l'hebdomadaire anglais d'actualité et de culture

- Elle accepte en 1976 une commande pour traduire les contes de Charles Perrault. Une fois la traduction publiée, elle se lance dans "La chambre sanglante" que nous lisons. Et poursuit la publication d'autres livres.

- Elle est écrivaine résidente dans diverses universités américaines (Austin au Texas, Iowa City, Albany à New York) et australiennes (Adélaïde), professeure invitée d'écriture créative à l'Université Brown, Rhode Island : l'écrivain Rick Moody, un de ses étudiants témoigne de son enseignement ICI, c'est pas triste.
Elle occupe un poste d'enseignante en écriture créative à l'Université d'East Anglia à Norwich, en Grande-Bretagne de 1978 à 1988 : le futur prix Nobel, Ishiguro, est son étudiant... "Ils sont passés d'une relation enseignant-élève à celle d'amis. Elle l'a incroyablement soutenu dès le début", a déclaré Gordon son biographe. Elle lui a enseigné la structure, "les écrous et les boulons", et comment gérer le suspense dans son premier roman. Angela Carter l'a encouragé à ne pas se soucier des tendances littéraires. "Ils ont certainement beaucoup parlé du Japon, de la littérature et du cinéma japonais. Ils étaient tous les deux de grands cinéphiles." Ishiguro la mentionnera dans son discours du Prix Nobel.

Sa maison  
Angela Carter a vécu à Londres 107 The Chase, de 1976 à 1992 : elle y a écrit plusieurs livres dont La compagnie des loups. Elle y donna des conseils à Kazuo Ishiguro, devenu depuis prix Nobel, et y reçut Salman Rushdie, Ian McEwan, etc.
C'était une maison bohème, avec de la vaisselle sale empilée dans l'évier, mais où on aimait recevoir. Salman Rushdie a dit à son biographe Gordon que, lorsqu'il se cachait, après que l'ayatollah Khomeini eut émis la fatwa contre lui, ses gardes du corps appréciaient toujours quand il allait rendre visite à Angela Carter, parce qu'elle avait invariablement un bon repas pour eux et qu'ils pouvaient regarder la télévision...

Et la France ?
Elle connaissait les écrits de Roland Barthes, aimait Colette (voir "Angela Carter lectrice de Colette, ou les affinités électives", Martine Hennard Dutheil de la Rochère, Études de lettres, n° 312, 2020).

Voici des auteurs français qu'on retrouve dans ses livres
- le marquis de Sade avec son essai La Femme sadienne (1975)
- Villiers de l'Isle-Adam dans La Passion de l'Ève nouvelle (1977)
- Charles Baudelaire dans la nouvelle Vénus noire (1985)
- les contes de Perrault avec La Compagnie des loups (1979).

Et politiquement ?
Elle votait travailliste et détestait Margaret Thatcher, mais lorsqu'elle a assisté à une réunion d'écrivains et d'intellectuels de gauche en 1988, elle s'est sentie mal à sa place et a à peine dit un mot.
Elle a refusé l'identification avec n'importe quel mouvement et a résisté aux tentatives d'absorber son travail dans n'importe quel genre (elle a toujours nié relever du réalisme magique, par exemple, arguant que l'expression n'avait aucun sens lorsqu'elle était utilisée en dehors du contexte spécifique de la littérature latino-américaine).

Tout a une fin
En 1992 : fumeuse invétérée, elle décède d'un cancer du poumon en à l'âge de 51 ans. Au moment de sa mort, elle avait commencé à travailler sur une suite de Jane Eyre (de Charlotte Brontë) basé sur la vie ultérieure de la belle-fille de Jane...

Margaret Atwood la décrit ainsi dans la notice nécrologique de l'Observer : " Elle était tout sauf sectaire. Rien, pour elle, n'avait de couleur tranchée : elle voulait savoir tout sur tout le monde, chaque endroit et chaque mot. Elle savourait la vie et le langage passionnément, et se délectait de la diversité. "

Salman Rushdie, qui était son ami, écrit peu après sa mort : "Après nous avoir montré comment écrire, après nous avoir aidés à voir comment vivre, elle nous a montré comment mourir" ("Angela Carter, 1940-92: A Very Good Wizard, a Very Dear Friend", The New York Times, 8 mars 1992)

Susannah Clapp, qui est exécuteur testamentaire d'Angela Carter, commente des cartes postales personnelles : "A Card From Angela Carter", The Guardian, 22 janv 2012.

Il n'existe pas de biographie d'Angela Carter en français. La référence est celle d'Edmund Gordon, maître de conférences en création littéraire au King's College de Londres : The Invention of Angela Carter : A Biography, Penguin, 2016.

En 2008, The Times la classa dixième des 50 meilleurs écrivains britanniques de l'après-guerre.

TRADUCTIONS

Traducteurs d'Angela Carter
On peut remarquer à quel point ils sont nombreux...
- Jacqueline Huet : La Compagnie des loups, 1979
- Françoise Cartano : La femme sadienne 1979, Feux d’artifice 1989
- Philippe Mikriammos : La Passion de l'Ève nouvelle 1982
- Jean Guiloineau : Des nuits au cirque 1988, La Danse des ombres, 1998
- Anouk Neuhoff : Love 1997 
- Michel Doury : Bien malin qui connaît son père 1997, Le Théâtre des perceptions 1998
- Isabelle Delord-Philippe : Le magasin de jouets magiques 1999, Vénus noire 2000
- Maxime Berrée, Les machines à désir infernales du Docteur Hoffman, 2016.

Même l'unique album pour la jeunesse traduit (parmi les trois parus en anglais) l'est par un nième traducteur : Drôles de chats (Comic and Curious Cats), ill. Martin Leman, trad. Claude Lauriot-Prévost, Centurion, 1979.

Angela Carter traductrice
En 1972-1973, au retour du Japon, elle a un contrat pour traduire le livre de sa contemporaine Xavière Gauthier, Surréalisme et sexualité, passe du temps sur ce projet, mais attendra une année pour apprendre que l'éditeur américain avait jugé sa traduction pas assez bonne ; le livre n'a toujours pas été traduit en anglais... (à propos de Breton qui a d'abord attiré Angela Carter, son machisme a fini par l'énerver : la façon dont il a dirigé le mouvement et expulsé des gens, par exemple, parce qu'ils étaient homosexuels, ou son attitude envers les femmes l'a rebutée ; elle était vraiment agacée par la façon dont il traitait Nadja, la femme au centre de son roman-à-clef du même nom que nous avons lu : il l'utilise comme muse, la parfaite muse irrationnelle, mais quand elle est devenue un peu trop irrationnelle, il l'a abandonnée dans un hôpital psychiatrique - Angela partage ainsi les réactions de plusieurs d'entre nous...)

Elle traduit en 1977 Les Contes de fées de Charles Perrault (The Fairy Tales of Charles Perrault) avec des illustrations de Martin Ware.
Martine Hennard Dutheil de la Rochère, professeure de littérature comparée à l'Université de Lausanne, analyse son rapport au texte original dans deux articles :
- "Actualiser les politiques de l'expérience : traduction par Angela Carter du 'Petit Chaperon rouge' de Charles Perrault", Palimpsestes, n° 22, 2009
- "
Le jeu du texte et de l'image des Contes de Charles Perrault d'Angela Carter (1977) à La compagnie des loups (1979)", Journal de la nouvelle en anglais, n° 56, printemps 2011

RADIO -THÉÂTRE - OPÉRA - CINÉMA

Rien à se mettre sous la dent à la radio française, rien à la télé ou en vidéo française : incroyable, non ?! France Culture, France Inter, l'INA... totalement muets.

En 1979, l'Opéra de Glyndebourne lui demande d'écrire un livret pour un opéra, jamais achevé, à partir du roman Orlando de Virginia Woolf que nous avons lu.

Carter a adapté "La compagnie des loups" et "Le chat botté" en pièces radiophoniques diffusées sur BBC Radio 3 en 1980 et 1982.

À la radio, à la télévision, au théâtre, ses textes ont été adaptés et notamment les histoires de The Bloody Chamber, mais jamais en France apparemment.

Neil Jordan a adapté La compagnie des loups au cinéma
en 1984, le scénario étant de Neil Jordan et Angela Carter. Dans une interview, Angela Carter évoque son plaisir de la collaboration, sauf pour la fin du film (entretien avec Rosemary Carroll, Bomb Magazine, automne 1986

ARTICLES, ÉTUDES ET INTERVIEWS

Quelques articles français sur 20 ans
- "Le père n'est jamais sûr", Claire Devarrieux, Libération, 29 mai 1997
- "Retrouver Angela Carter", Josyane Savigneau, Le Monde, 27 juin 1997
- "Une belle mécanique", Béatrice Pire, Les Inrocks, 20 août 1997
- "L'ogre et les pantins", Christine Jordis, Le Monde, 30 juillet 1999
- "Angela Carter, Sussex machine", François Angelier, Le Monde, 25 février 2016
- "Les bizarreries picaresques et surréalistes d’Angela Carter", Sophie Ehrsam, En attendant Nadeau, 4 mai 2016
- "Redécouvrir le féminisme gothique d’Angela Carter", Nelly Kaprièlian, Les Inrocks, 18 mai 2018
- "Love d'Angela Carter", Télérama (TTT), 20 juin 2018

Des études universitaires françaises
Des articles :
- "La métafiction et les nouvelles d'Angela Carter", Michelle Ryan-Sautour, Métatextualité et métafiction : théorie et analyses, Presses universitaires de Rennes, 2003
- "'La magie des voix dans la nuit' : 'transcréation' des contes de Perrault chez Angela Carter", Martine Hennard Dutheil de la Rochère, Études de lettres, n° 3, 2016
-
"Angela Carter lectrice de Colette, ou les affinités électives", Martine Hennard Dutheil de la Rochère, Études de lettres, n° 312, 2020.

Et des thèses, pas très récentes : Esthétiques du "roman-théâtre" chez Angela Carter (2006), Subversion sexuelle et textuelle dans les nouvelles d'Angela Carter (2006), La subversion des discours d'autorité dans l'œuvre d'Angela Carter (2005), Le sujet à l'œuvre : écriture et lecture chez Angela Carter (2001), L'allégorie dans l'œuvre de Margaret Atwood et d'Angela Carter" (1997), Double je et jeux du double dans les romans d'Angela Carter (1999),

Interviews en anglais
- Angela Carter talks to Lisa Appignanesi
, 1985, vidéo 7 min : elles discutent de Freud, du travail, de la politique, de La Compagnie des loups, de la maternité et de Sade, y compris le socialisme de Carter, qui, selon elle, fonctionne en tandem avec sa sensibilité fabuliste.
- Un très intéressant entretien avec le biographe Edmund Gordon, 5 janvier 2017, avec Caleb Sivyer, sur son site ici (il est l'auteur de The Invention of Angela Carter : A Biography).

SITES

Contribuant chacun à sa manière à la promotion de l'œuvre d'Angela Carter :
- angelacarter.co.uk : site officiel, dont est responsable Susannah Clapp, exécuteur testamentaire d'Angela Carter
- Angela Carter Online, site indépendant, créé par Caleb Sivyer en 2016, qui a fait sa thèse sur Virginia Woolf et Angela Carter
- Angela Carter Society, société savante d'universitaires, créée en 2017.


Pour le 75e anniversaire de sa naissance (1940),
une édition Penguin de luxe du livre le plus célèbre de son auteure

Nos cotes d'amour, de l'enthousiasme au rejet :
                                        
à la folie
grand ouvert
beaucoup
¾ ouvert
moyennement
à moitié
un peu
ouvert ¼
pas du tout
fermé !

 

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