Lirelles

Nous avons lu pour le 20 octobre 2024 :

Nos armes de Marion BRUNET

Albin Michel, 2024, 384 p.

Découvrez
NOS RÉACTIONS
sur ce livre

Marion Brunet : ses livres, son parcours

• Ses livres
pour la jeunesse sont publiés aux éditions Sarbacane et pour adultes chez Albin Michel. Certains passent format poche : en Pocket jeunesse ou Le Livre de poche.

Outre Wikipédia, voici trois présentations de son parcours : quelques dates choisies par Libération, en 6 lignes par son éditeur, un extrait d'une rencontre avec des lycéens.

1976 : Naissance à Carpentras (Vaucluse).
1986 : Écrit sa première histoire (qui tient la route).
1996 : Premier envoi d’un manuscrit.
2013 : Premier roman jeunesse, Frangine (Sarbacane).
2018 : Premier roman adulte, L’Été circulaire (Albin Michel).
1er février 2024 : Nos armes (Albin Michel).

Marion Brunet vit à Marseille. Après des études de lettres, elle a travaillé comme éducatrice spécialisée dans différents secteurs, notamment en psychiatrie. Elle est l’auteure de L’Été circulaire, Grand Prix de littérature policière 2018 et Prix des libraires du Livre de Poche 2019, et de Vanda, en 2020, publiés aux éditions Albin Michel. Elle est également une autrice reconnue et primée pour ses romans "young adults" (Sans foi ni loi, 2019, Pépite d’or au Salon du livre de Montreuil ; Plein gris, 2021).

Marion Brunet a toujours écrit, mais elle n’a pas toujours été écrivaine. Car quand on écrit juste pour se faire plaisir on n’est pas considérée comme écrivaine. Sa carrière a débuté avec Frangine un roman publié en 2013. Avant elle était éducatrice spécialisée, et elle a exercé ce métier pendant 15 ans. C’était un métier qui lui plaisait, mais l’écriture était plus une vocation et un rêve de gosse, elle a toujours dit qu’elle finirait écrivaine et elle a réussi. Avant d’être publiée elle a envoyé trois textes, un à 20 ans, un à 30 ans puis un recueil de nouvelles. Les refus peuvent être très, très mauvais et être destructeurs pour une personne. Un simple refus suffit, pas besoin de blesser la personne, ou d’insulter son travail. Cela peut être très mauvais pour un auteur. Avec Frangine elle a été super bien conseillée. Elle s’est d’ailleurs tournée vers la jeunesse sur laquelle elle avait beaucoup d’a priori. Mais elle y a trouvé des textes exceptionnels, qui lui ont parlé et elle s’est penchée dessus. Certains éditeurs lui ont renvoyé des avis favorables, ce qui l’a motivée. À partir de cet instant tout a été beaucoup plus simple. Cela met du temps avant de trouver une maison d’édition qui colle avec la vision qu’on a, cela peut prendre quelques années. L’écriture est un métier artistique, ce n’est donc pas trop considéré comme un métier, car c’est difficile de devenir connu ou d’avoir une longue carrière. Elle n’a pas d’état ou de période qui lui donne spécifiquement envie d’écrire un nouveau livre. À la fin d’un roman elle est à la fois contente d’avoir écrit, mais aussi stressée par le prochain et c’est cela qui lui donne envie d’écrire un nouveau roman. Souvent un personnage d’un des livres qu’elle vient d’écrire lui donne envie d’écrire une nouvelle histoire. Tous ses personnages sont intimement liés, elle "tisse entre ses livres comme un fil et imagine une nouvelle histoire".

Interviews et articles sur Nos armes

• Entretiens

- Entretien lors des rencontres Clameur(s) de Dijon, Diversions magazine, 8 juillet 2024. Extrait :

- Avez-vous rencontré des détenues ou des surveillantes pénitentiaires pour écrire ce livre ?
- J’ai rencontré des détenues, je n’ai pas eu le temps de faire des entretiens avec des gardiennes, en revanche j’ai fait un atelier d’écriture pendant plusieurs mois avec une camarade autrice de bande dessinée et à l’issue de ces ateliers où j’avais croisé plein de gardiennes et plein de détenues, j’ai demandé si certaines détenues de longue peine seraient d’accord pour s’entretenir avec moi autour de leur vécu, pas de leurs affaires, pour nourrir mon personnage d’Axelle et elles ont été super. J’ai eu trois longs entretiens avec des détenues, que je remercie d’ailleurs à la fin du livre, trois femmes très différentes, avec des vécus différents. J’ai vraiment pu avoir une lecture assez large de certains ressentis en prison.

- "Nos armes tragiques", entretien avec Julie Surugue, Zebuline, 22 février 2024. Extrait :

- Vos personnages ne font pas partie des classes sociales élevées de notre société. Pourquoi ?
- Il y a des bourgeois qui militent mais ce n’est pas le même moteur. Quand on est dans une situation précaire, il y a plus de colère et moins de choses à perdre. La colère est plus vive avec un sentiment d’injustice plus fort.

- Par conséquent la chute pourrait être moins élevée. Pourtant on a la sensation d’une chute vertigineuse dans Nos Armes.
- Oui, mais ce n’est pas une chute sociale comme chez Zola. Déjà les personnages essaient de transformer le monde. Ils ne veulent pas monter socialement. Je crois que si c’est vertigineux, c’est parce qu’ils chutent du haut de leurs espoirs.

- "Interview with Marion Brunet, writer", Le Magazine Athenaeum, 31 mai 2024. Extrait :

- Était-ce difficile pour deux femmes de tomber amoureuses dans les années 90 ?
- Non. Mais en fait, elles n’ont même pas eu le temps d’y penser. Leur histoire avait à peine commencé que la prison les séparait. Mais l’amour tient Axelle et Mano ensemble. C’est très important pour moi. Dans un monde de plus en plus capitaliste, secoué par des drames de guerre, ce sentiment continue de nous porter. Il prend le contre-pied du cynisme ambiant…

• Entretiens vidéos

- "Nos armes, de Marion Brunet : portrait de deux jeunes femmes engagées", SQOOL TV, 28 février 2024, 6 min.
- Interview par Christine Ferniot, Un Aller-Retour Dans Le Noir, 2024, 4 min 30.

• Portrait par Alexandra Schwartzbrod, Libération, 29 janvier 2024. Extrait :

Aujourd’hui, elle vit à Marseille avec son fils de 12 ans, qu’elle élève en garde partagée avec son ancienne compagne. Son appartement est lumineux et rempli de livres. Il y a d’un côté la bibliothèque de la femme qui partage sa vie, écrivaine et éditrice, et la sienne, où l’on trouve surtout des grands classiques.

• Radio

- "Nos armes, de Marion Brunet", par Michel Abescat, Le Polar sonne toujours 2 fois, France Inter, 1er février 2024, à lire ou écouter, 4 min.

Articles sur le roman

- Nos armes, de Marion Brunet : mais mon amour ne mourra pas, Le Monde, 4 février 2024.
- "Nos armes, de Marion Brunet : du roman d’amour au roman noir, un polar surprenant de bout en bout", Télérama, par Yoann Labroux Satabin, 13 mars 2024.

Dialogue sur le genre du polar

- Marion Brunet et Hannelore Cayre : "À mes côtés des héroïnes qui ont du souffle", propos recueillis par Yoann Labroux Satabin, Télérama, 3 avril 2024.


Et voici NOS RÉACTIONS sur le livre


Les lectrices

Ce 20 octobre 2024, nous étions 13 à réagir sur le livre :

en direct : Anne, Aurore, Claire Bo, Felina, Joëlle L, Laetitia, Patricia, Véronique
en visio : Agnès, Marie-Yasmine
par écrit : Nelly, Sandra
par audio : Stéphanie.
Étaient prises ailleurs : Claire Bi, Flora, Joëlle M, Muriel, Nathalie, Sophie.

Les tendances concernant le livre

À la sortie de ce roman, la presse élogieuse avait attiré notre attention sur cette auteure ayant reçu le Grand Prix de littérature policière en 2018 - genre que nous avons peu choisi - avec "de surcroît", dans ce roman tout récent, une histoire d'amour entre deux femmes.

Ont plutôt aimé ou bien aimé : Agnès, Anne, Aurore, Felina, Laetitia, Patricia, Véronique.

• Sont dans un entre-deux : Marie-Yasmine, Nelly, Sandra, Stéphanie.

Ont d'importantes réserves : Claire Bo, Joëlle L.

La succession des avis

Celles qui, comme Stéphanie, avaient donné pour le jour de la séance leur avis en cours de lecture, ont terminé celle-ci et complètent ainsi leur avis : "finalement"...

Stéphanie (avis transmis en audio)
Je suis sur un trajet de 10 minutes, toute seule, et c'est l'occasion de vous dire mon avis. Un avis est partiel parce que j'ai pas encore fini le livre. Pour résumer, je ne suis pas emballée. Pour détailler un petit peu, les premières 100 pages m'ont fatiguée, m'ont laissé dans une indifférence, j'avançais péniblement. Après j'ai vraiment beaucoup aimé page 101 la scène du fusil où Axelle est avec son grand-père : la description de ce moment-là, de ce lien-là, que cette jeune femme avait avec son grand-père, m'a touchée et à partir de ce moment-là j'ai trouvé quelque chose de plus intéressant, et un peu plus disons un peu plus approfondie que ce soit dans le récit ou dans l'action ou dans la manière où les choses étaient décrites.
Si le roman clairement ne m'emballe pas plus que ça, à partir de page 101 quelque chose m'a plus accrochée, que ce soit au niveau du récit ou des personnages ou de ce qui se passe. J'ai beaucoup apprécié, notamment, à partir de ce moment-là la description du milieu carcéral, les relations d'Axelle avec les personnes qu'elle rencontre en détention. L'épisode aussi avec Jicé en détention m'a beaucoup touchée.
Donc j'ai trouvé que dans cette deuxième partie - je n'ai pas lu les 100 dernières pages - il y a quelque chose qui tient la route, qui m'a donné envie de continuer à lire. Mais ce n'est pas une œuvre littéraire que je retiendrai forcément, que je conseillerai à d'autres.
J'ai vu que l'autrice écrit des romans pour adolescents. Justement je me suis dit peut-être qu'à 16  ans j'aurais plus apprécié ce livre, parce que je retrouve quelque chose d'assez simple dans l'écriture, dans le récit, quelque chose d'adolescent et qui ne va pas aussi loin que j'aurais aimé coté littéraire.
Mais bon, on apprend toujours des choses dans des livres et je vais continuer à lire pour voir où elle va en venir...

(Finalement) À partir de la deuxième moitié j'ai commencé à aimer de plus en plus. J'ai trouvé les personnages de plus épais et de plus en plus crédibles. Je trouvais que l'écriture aussi s'améliorait, écriture que je trouvais de plus en plus jolie et de moins au moins "adolescente" - peut-être aussi parce que les personnes grandissaient ? Est-ce que l'autrice voulait miroiter au début l'esprit de jeunesse de ses protagonistes, en écrivant moins soigneusement ?
J'ai aimé la chute quand on apprend que Charly avait balancé ses camarades aux flics, c'était inattendu.
Le chapitre de l'enterrement du père s'Axelle m'a aussi bien plu et émue.
Par contre j'ai été déçue par la fin, non tant parce que j'aurais aimé les voir se rencontrer (c'est vrai que ça aurait été bien) mais parce que j'ai trouvé cette fin "facile", du déjà vu en quelque sorte. Pour moi c'était presque une technique d'évitement pour ne pas affronter la difficulté qui aurait été de les faire se rencontrer après 20 ans. Une façon d'éviter la désillusion que cette rencontre aurait pu être et les difficultés qu'elle aurait pu produire.
J'ai donné trois étoiles sur Goodreads, mais j'ai hésité entre 2 et 3.

Sandra
Il est de ces livres où l'on ne sait en le refermant si on l'a aimé ou non. Et celui-ci en fait partie.
Sur l'écriture, elle est simple, sans difficulté de lecture, mais là où je l'ai apprécié davantage, ce fut lors des chapitres sur la vie et les ressentis d'Axelle : c'est la narration autour de ce personnage qui m'a le plus plu, et que j'ai trouvé plus finement écrit.
Des phrases d'une douce poésie lors de la description de ses sentiments envers Mano, et de mots chocs et bruts lors des épisodes en prison ou lors de l'enterrement de son père : là, j'ai trouvé que l'écriture et la narration de l'auteure étaient meilleures.
Sur l'histoire, je n'ai pas accroché à celle contant le combat, la révolte du groupe de jeunes. Oui, ils sont en révolte contre le monde, l'ordre social, etc. etc., je trouve que leurs idéaux n'étaient pas assez décrits pour vraiment les percevoir et entrer dans leur monde de contestation. Alors que l'auteure voulait peut-être en faire un fil important de son histoire, j'ai trouvé que ça venait en second plan, un second plan trop long au début, et qui gâchait pour moi l'essentiel du livre, l'histoire entre Mano et Axelle.
Et cette histoire d'amour n'est pas assez développée à cause du braquage qui vient mettre fin trop tôt à la beauté naissante de cet amour, et à l'intimité entre les deux jeunes filles.
Ensuite, comme je le disais, j'ai davantage accroché au parcours d'Axelle. Certes, nous comprenons la vie brisée de Mano, sa tristesse, sa survie, mais j'ai trouvé que c'était moins percutant.
Et le final, oui une fois de plus, il ne finit pas bien pour deux femmes qui s'aiment, mais je n'en veux pas à l'auteure, il était compréhensible.
Non, ce que je n'ai pas vraiment compris, c'est comment la mère d'Axelle a pu retrouver Mano ? J'ai peut-être raté quelque chose dans la fin de l'ouvrage, mais le personnage de Ben qui permet parfois de renseigner l'une et l'autre n'apparaît plus à la fin, donc comment la mère a su trouver le village ?
Donc intérêt mitigé, mais je ne nie pas que l'auteure a su décrire une jeunesse en colère, un peu perdue (rien de nouveau), mais surtout une histoire d'amour tragique et passionnée entre deux êtres écorchés.

Nelly
Le temps me manque pour développer mon commentaire alors je crois que je vais me contenter de quelques adjectifs et de considérations résumées.
J'ai lu ce livre sans difficulté et sans déplaisir, mais également sans conviction.
Violent, dur, et profondément triste, sont les termes qui me viennent à l'esprit.
Captivant et peut-être cinématographique, mais sûrement pas dans la catégorie romantique.
La construction est intéressante, le parallèle entre les deux vies d'Axelle et Mano est adroit.
Le discours politique est peu convaincant.
Les héroïnes ne sont pas très attachantes.
Certains personnages surgissent curieusement, la sœur de Mano par exemple, je les trouve inutiles pour comprendre l'évolution psychologique de Mano.
L'écriture est inégale, certains passages sont assez beaux et à d'autres moments c'est du langage direct. Probablement justifié par le contexte mais cela m'a dérangée.
Merci pour ce choix moderne, ça bouscule mais cela ne m'a pas profondément touchée.

Anne
J'ai beaucoup aimé ce livre que j'ai lu juste après Le Jardin arc-en-ciel il y a 8 mois - j'ai retrouvé mes notes d'alors.
J'avais trouvé le livre très facile à lire, d'une construction intéressante. J'ai trouvé le point de vue d'Axelle bien amené, les passages du présent au passé.
J'étais a priori intéressée par ces jeunes rebelles écolo - mais hélas ce n'est pas développé...
Ce que j'ai trouvé le plus intéressant, le plus original, c'est le long parcours en prison, les rencontres : ce sujet-là m'a vraiment intéressée.
J'aime bien l'aspect romantique : alors qu'elles sont séparées, elles continuent de s'aimer, même si elles se laissent libres de vivre d'autres histoires dans leurs vies. L'amour est plus fort que la distance.
J'ai apprécié aussi des personnages secondaires, comme le grand-père qui revient la voir en prison, c'est touchant.
La fin tragique ne m'a pas frustrée. C'est réaliste, et non pas un conte de fées. Alors que dans Le Jardin arc-en-ciel, la fin était un peu trop intense pour moi, là, j'ai juste été terriblement attristée.

Felina
Je n'ai pas terminé encore, mais il faut dire que j'ai largement lu le livre que Joëlle et Agnès ont très bien vendu..., Incandescentes de Hannah Ken.
Je rejoins un peu Stéphanie avec les 100 premières pages que j'ai lu sans trop d'enthousiasme. Puis ça devient plus intéressant, plus intime, par exemple avec Axelle et son grand-père dans l'enfance.
Avec ce que vous sous-entendez sur la fin, j'ai envie de le terminer... n'en dites pas plus !
J'ai bien aimé la structure, avec différents narrateurs, des pauses, des retours en arrière.
Ce que j'ai préféré est la vie carcérale. Il est à noter que l'autrice était éducatrice spécialisée et avait donc une expérience des foyers d'accueil par exemple. Elle remercie à la fin du livre pour des témoignages.
J'ai bien aimé l'écriture simple, puissante, sensible.
Je vais continuer à lire...

(Finalement) j'ai plutôt bien aimé.

Véronique
J'avais découvert Marion Brunet il y a plusieurs années dans une rencontre à Bagnolet
avec Nicolas Mathieu, l'auteur de Leurs enfants après eux et j'avais lu ce livre avant qu'on le programme.
Je m'attendais à un polar. Non, c'est plutôt un roman sociologique sur un groupe de jeunes, avec leurs relations, le déroulement de leur vie. C'est ça qui m'a plu.
Les deux femmes sont séparées, mais encore liées. Toutes deux dans une forme de solitude, l'une en prison, l'autre avec un homme mais qu'elle n'aime pas.
La construction ne m'a pas déplu.
J'ai trouvé de petites longueurs, en Inde par exemple.
J'ai bien aimé l'univers carcéral avant que les détenues soient jugées, les relations à l'intérieur de la prison.
La relation avec le grand-père est une belle histoire. Celle avec la mère est cocasse, cette mère est bête, sous le joug d'un homme - c'est une façon de déconstruire les choses : ici les hommes sont perdants, sauf le grand-père, et à la fin la mère.
Bref, je n'ai pas détesté ce livre. Ce qui m'a le plus plu, c'est l'histoire des deux femmes sur le long terme, sans qu'elles s'oublient, et avec un soupçon d'espoir.

Patricia
Je ne connaissais pas Marion Brunet. Au départ j'avais un a priori négatif sur ce livre à cause du sujet qui ne m'emballait pas, mais en fin de compte, une fois le livre refermé, je me suis dit que je ne l'ai pas trouvé si mal, et même plutôt bien.
Pourtant en commençant la lecture, j'ai eu peur de ne pas pouvoir la finir à cause de l'écriture que j'ai trouvée pénible au début. Je me disais que ça n'allait pas le faire...
J'ai poursuivi quand même, et en persévérant, j'ai été emportée par l'histoire, sans plus être gênée par le style. Et malgré les flashbacks qui ont rendu la lecture compliquée et agaçante, car il fallait se remettre dans le contexte (qui, quand, où).
Tout au long du livre, j'ai été traversée par toutes sortes d'émotions fortes différentes.
D'abord, il y avait le fil conducteur en forme de suspens, qui était l'histoire d'amour entre Axelle et Mano, qui a permis de ne pas lâcher le livre.
Ensuite, j'ai éprouvé un gros malaise dans l'épisode du groupe et ses violences, j'étais dans l'incompréhension : qu'est-ce qui les a poussés à se mettre dans cette galère ? Il m'a semblé que l'ensemble du groupe n'était pas convaincu par la cause et par l'idée, et qu'il s'agissait juste d'un caprice d'Axelle et que personne n'a voulu la contredire, pour ne pas passer pour un lâche (à part les deux qui ont refusé). C'est triste pour ceux qui sont morts.
Les passages en prison m'ont beaucoup angoissée, je n'avais pas envie de me replonger dans la description du milieu carcéral, J'avais adoré le journal de prison de Grisélidis Réal (Suis-je encore vivante ?) et je n'avais pas envie de revivre ça : j'ai donc sauté les passages en prison qui n'apportaient rien à l'histoire, et je me disais qu'elle n'avait que ce qu'elle méritait. (Je préférais la nature calme de Mano.)
J'ai ressenti du dégoût quand on y apprend que quelqu'un les a dénoncés. En même temps, ça m'avait traversé l'esprit.
Malgré mon aversion pour Axelle, j'ai eu de l'empathie pour elle, quand ont été abordées les relations avec sa famille, son père et sa mère. Ça m'a attristée.
J'ai aimé pour ma part le voyage en Inde, qui a permis de souffler un peu et aussi de comprendre pourquoi Mano a été ressourcée par ce voyage.
En revanche, j'ai été déçue par la fin, vraiment désespérante, j'ai même versé une petite larme.
En conclusion, c'est plutôt un bon livre, assez bien mené, très pessimiste, mais on se laisse emporter. Je trouve que ce livre pourrait faire un bon scénario de film car tout y est.

Agnès
J’ai beaucoup aimé ce roman, sauf la fin. J’en ai lu plus des trois quarts d’une traite jusqu'à 2h du matin et le reste un jour suivant. Selon mon système de notation, je mettrais un B+ à 80 % du roman et un C aux 20 derniers %.
L’histoire de ce groupe d’ami·es engagé·es, et cabossé·es par la vie malgré leur jeunesse, m’a tenue en haleine, j’ai aimé le déroulé jusqu’au braquage et les conséquences sur leurs existences respectives, c’est un roman social et un roman noir en même temps, la révélation de la trahison d’un des protagonistes m’a prise par surprise. J’avoue en revanche que je n’éprouve pas de sympathie pour le choix de la lutte armée dans leur cas (quand on s’appelle Madeleine Riffaud, je peux comprendre). Ils ont des idéaux louables, mais leur engagement politique les mène à une impasse assez terrifiante. De plus, braquer le Crédit Municipal, qui est la dernière ressource des gens les plus dans le besoin, me semble assez contradictoire avec leur militantisme.
L’univers carcéral est bien décrit, il semble documenté (l’autrice a fait des ateliers mixtes aux
Baumettes avec une illustratrice), mais il est assez éloigné de ce qu’une amie, éducatrice en prison de femmes, m’en a dit (il est vrai qu’elle était « de l’autre côté »).
J’ai particulièrement aimé l’histoire d’amour entre Mano et Axelle, et le va et vient entre leurs deux voix. C’est pourquoi je n’ai pas du tout apprécié la fin du roman. Pourquoi ajouter de la noirceur à tant de noirceurs ? Dans ma conception de la littérature, et du roman en particulier, j’estime que la vie étant ce qu’elle est, ce n’est pas la peine d’en rajouter en fiction. Les romanciers et romancières ont le devoir ou la responsabilité de ne pas nous désespérer. Ici, il y a une grande tension, maintenue jusqu’aux dernières pages (vont-elles se retrouver?), qui est finalement déçue.

Joëlle L
Un début très difficile pour moi : j'ai été tentée d'abandonner assez vite. Je n'aimais pas le style et je ne trouvais pas le personnage de Mano crédible. J'ai trouvé le style heurté, saccadé. Ce manque de fluidité ne m'entraîne pas dans le récit, ne m'aide pas à entrer dans l'histoire.
J'ai été particulièrement découragée par la séquence de la bagarre de rue. Ça m'a rappelé la retransmission radio d'un match de foot, comme ça se faisait avant la télé : une description factuelle que je ne visualise pas, qui ne m'entraîne pas. En comparaison, je pensais à la scène de l'accident de la mine, dans Germinal : là, on est embarqué, Zola ne se borne pas à décrire, il nous fait vivre le moment.
Après cette séquence, j'ai abandonné le livre pendant un bon moment. Puis le sens du devoir l'a emporté et je m'y suis remise. Ça s'est un peu arrangé avec le personnage d'Axelle, que j'ai trouvé beaucoup plus incarné et intéressant que les autres protagonistes. Et notamment avec les moments en prison.
Cependant, je reste plus que réservée sur l'ensemble. L'histoire qu'on me raconte est présentée de manière compliquée, elle n'est pas toujours vraisemblable (quel âge peut bien avoir le grand-père d'Axelle à la fin de l'histoire ?).
Il y a beaucoup d'exagération, de grandiloquence, des effets appuyés, qui deviennent inefficaces. C'est souvent caricatural, jusqu'au ridicule. Exemple : Axelle a un problème avec sa prof d'anglais et elle passe en conseil de discipline. (La prof) "crachait sa haine avec les yeux. Ses mains agrippaient son cahier ouvert comme les serres d'une fauvette engluée."
C'est aussi beaucoup trop expliqué. On ne laisse rien dans l'ombre. Il n'y pas de jeu avec le lecteur, on lui assène un récit tout verrouillé. L'émotion ne passe pas. Je ne participe pas, au mieux je consomme un récit. Exemple : la trahison de Charly. On l'expose trois fois : l'annonce à Axelle, l'aveu à Mano, l'histoire de Charly prise en charge par la narration. C'est lourd, il n'y a aucune ambiguïté, on est obligé d'avoir tout compris.
L'autrice ne fait absolument pas confiance à ses lecteurs. C'est peut-être une habitude prise dans la littérature jeunesse, puisque j'apprends grâce au dossier mis en ligne par Lirelles que c'est son activité principale.
Peut-être que Marion Brunet ne se fait pas confiance non plus ? Donc elle en rajoute, elle surcharge et elle verrouille pour être sûre. Et voilà pourquoi je n'ai pas aimé ce livre.

Claire Bo
J'ai apprécié le rythme donné par ces courts chapitres formant unité et par l'écriture, un peu saccadée, comme dans les premières lignes (lues en scandant) :

"Une femme la cherche au village. C’est son ami John qui la prévient, avec son accent impossible, derrière sa barbe buissonnière. Ses yeux bleu pâle font semblant de ne pas observer, de ne pas insister, mais Mano sait très bien qu’il aimerait en savoir plus. Qu’elle lui explique, lui raconte. Elle ne dit rien, met de l’eau à chauffer sans trembler. "

J'ai remarqué une habileté narrative, un savoir-faire avec les va-et-vient dans des temps différents, des lieux différents, des narrateurs différents.
J'ai trouvé les chapitres en prison les plus réussis, avec leur aspect documentaire bien rendu et des temps de réelle émotion.
Mais, mais, j'ai eu
assez des flashbacks sur le groupe avec des personnages sans réalité, indéterminés, avec une idéologie qui m'a semblé grossière, puérile, et ne suscitant pas de sympathie, avec des idéaux flous, un anarchisme creux - je m'énerve ! -, ne valorisant guère ce groupe quand même central.

Véronique
Mais ce groupe, c'est réaliste, il y a vraiment des jeunes comme ça, et elle en rend compte.

Claire
Oui, tu as raison. Mais après notre tour, je ferai part d'une information qui ajoute au malaise qu'on peut ressentir.
Les 10 ans en Inde ne m'ont pas emballée. Le personnage de Charly, amoureux et traître, m'a paru un peu artificiel, la mère, vraiment caricaturale en prison, le grand-père aimant en bien grosse opposition.

Le suspense est quand même gros gros gros, car après le premier chapitre intitulé "C'est elle" page 14, il faut attendre la page 366 pour voir ce "elle" apparaître : c'est le pari du livre de nous tenir 352 pages puisqu'on sait qu'on va savoir. Et il faut reconnaître que le retournement final est inattendu, d'ailleurs pas rigolo du tout...
Je suis contente, comme toujours, d'avoir découvert un livre et une autrice. Je retiendrai le passage en prison, très réussi.

Laetitia
Je ne connaissais pas du tout l'autrice, Marion Brunet.
Un roman noir, triste ; une découverte intéressante que j'ai appréciée et que je ne regrette pas d'avoir lue ; avec quelques réserves cependant.
J'ai été au début un peu gênée par l'écriture hybride - à la fois très accessible mais qui recourt quelquefois à des termes soutenus et qui privilégie les rythmes ternaires. Puis je suis entrée peu à peu dans le livre. J'avoue que je suis assez vite allée voir la fin qui m'a déçue... J'ai essayé de ne pas me démobiliser pour autant !
Si l'on pense au titre, de quelles "armes" s'agit-il ?
Pour ma part, j'ai été choquée par le grand-père d'Axelle qui enseigne l'usage d'un fusil à sa petite fille : c'est hyper violent dès le départ. Le schéma narratif de ce roman est plutôt classique avec un élément déclencheur : l'arme utilisée qui entraîne le destin du groupe et en particulier des deux jeunes femmes : Axelle et Mano. La construction est minutieuse et précise avec 54 mini chapitres qui se tiennent et des titres de chapitres qui constituent des unités de lecture. Sinon, nous avons aussi des flashbacks - avec un éclatement des époques, des lieux (village/prison/Inde) - un horizon d'attente et une fin... plombante (j'ai ceci dit assez aimé le titre du dernier chapitre : non pas "Dénouement", mais "Dénuement"...). Je me suis demandé dans quelle lieu/ville se déroulait l'action principalement : "ville vieille et bourgeoise" (p. 119), "ville étudiante", "ville du sud". Oui, il s'agit sûrement d'Aix-en-Provence, dixit Marie--Yasmine !
J'ai apprécié les références aux années 90 (Thelma et Louise), au féminisme (citation de Monique Wittig, Les Guérillères, en préambule).
J'ai trouvé les pages sur la description de l'univers carcéral - effet de réel - assez justes et intéressantes, sans manquer les "remerciements" à trois détenues à la fin du livre.
Une réserve importante : le point de vue par rapport à la police qui manque fortement de nuances.
Plus largement, j'ai été intéressée par la mise en perspective de ce livre avec la réflexion menée sur la notion de "polar" - cf. article de Télérama du 3 avril 2024 - sur le renouvellement des codes du roman policier français ; "plus féminin, plus social, plus cosmopolite, plus violent, plus drôle".
D'avis global "positif mitigé", partante pour lire un autre roman de Marion Brunet, peut-être
L’Été circulaire. À suivre !

Aurore
Je ne l'ai pas fini et l'ai pourtant commencé il y a trois semaines.
J'aime bien. Je n'ai pas de mal à rentrer dedans.
Les flashbacks me gênent un peu. Et qu'en effet, le grand-père apprenne à une jeune fille à utiliser un fusil.
Pour ce qui est du groupe de jeunes "anarchistes", la CNT et Durruti sont mentionnés, mais leurs combats sont tout de mêmes bien éloignés.
J'aime bien l'écriture.
J'attendais plus de l'histoire de l'amour entre les deux femmes.

Marie-Yasmine
Je suis un peu désarçonnée par cette lecture, car je suis incapable de dire si je l'ai aimée ou non et si je la recommanderai.
Ce n'était pas désagréable, et cela m'a donné matière à réfléchir, mais il y a aussi beaucoup de choses auxquelles je n'ai pas adhéré.
Le style est très cinématographique, et on a parfois l'impression de plutôt lire un scénario que de la littérature. Je pense que cela serait un meilleur film.
J'ai eu du mal avec l'abus de virgules, les phrases sont hachées, longues. La voix qui lit dans mes pensées (sur le sujet si cela intéresse quelqu'un, France Culture : "Qu'entendez-vous quand vous lisez ? Les mystères de notre voix intérieure") en était à bout de souffle à force de chercher à relier la phrase dans son entier. En revanche le cadre provençal est très agréablement décrit (je parie sur Aix-en-Provence pour l'inspiration).
Au début il y a un enchaînement de temporalités et de narrateurs qui m'a également laissée confuse, mais cela se clarifie au bout d'un moment.
Concernant le point de vue, il y a un manque de recul très déroutant. Les actes de ces jeunes qui prennent des armes et choisissent de tuer, en étant convaincus de faire un acte de résistance, sont très peu remis en perspective et presque légitimés par les difficultés qu'ils ont rencontrées dans leur vie. L'incarcération pour 25 ans d'Axelle est même une opportunité ratée d'apporter ce recul sur cet acte, elle évolue bien un peu mais cela reste très superficiel, et surtout elle rejette toute proposition de justice restaurative, toute rencontre avec la fille de l'homme qu'elle a tué, toute tentative de sortir de son intransigeance et de sa radicalité et de poser un regard nuancé sur la police, le système, ou tout simplement ses idées. Le passage sur les jeunes islamistes qui se retrouvent en prison avec elle est également ratée et ne lui apporte aucune piste de réflexion. Cela aurait pu lui permettre de constater que des jeunes tuent des gens au nom d'une résistance prétendue et de faire le parallèle avec son groupe, mais cela n'arrive pas.
Ensuite le rebondissement de la trahison est grossier, même si je l'avais vu venir, et j'ai été estomaquée du toupet de cette personne.
La fin est d'une immense tristesse, comme souvent quand une histoire d'amour concerne des femmes...
Le livre a beaucoup de potentiel par son histoire, mais il n'est pas exploité. Dommage !

Claire
Je voulais revenir sur le groupe de jeunes. J'ai lu l'avis d'une internaute, assez élogieuse sur le livre, son écriture, le voyage en Inde, mais avec la réserve et l'information suivantes :

Marion Brunet passe un message extrêmement négatif sur la police en France, le peu de mentions qui en sont faites sont des clichés négatifs avec lequel on fait des généralités. Aucune nuance sur ces propos, le système carcéral étant décrit comme trop difficile avec un suivi médical trop laxiste auprès des détenues. Et honnêtement sans rentrer dans un débat politique je ne suis pas du tout d'accord avec tout ça. Les flics sont décrits comme des "casseurs de gilets jaunes" pour ne citer qu'un exemple qui m'a vraiment dérangée.
J'ai eu l'occasion de rencontrer l'autrice avec qui j'ai pu échanger sur ce point afin de savoir si j'avais bien interprété le roman, si j'avais pu manquer un sous message. Elle m'a confirmé qu'elle n'aimait pas la police, n'avait rien de positif à dire sur eux et préférait les tuer dans ses romans…


Accueil Présentation du groupe – Livres lus Programme actuel
Programmation des années précédentes – Liens
Nous contacter