L'avis de Françoise Delphy sur : La cloche de détresse de Sylvia Plath |
||
[Françoise avait lu - relu - ce livre dans le cadre d'un autre groupe de lecture avec Claire en mars 1997 et avait rédigé son avis que Claire a retrouvé dans son livre... Le voici avec son accord.] | ||
J'ai lu La cloche de détresse il y a 30
ans [le livre est sorti en 1963] et l'ai
relu récemment [en 1997]. Après
7 ans de dépression, le texte a encore plus de sens de profondeur.
La métaphore de la cloche à fromage qui vous isole totalement
du monde et vous asphyxie st une trouvaille : on ne sait pourquoi elle
s'abaisse sur votre tête et pas davantage pourquoi un jour elle
se soulève et vous laisse respirer. |
||
|
Méchanceté
dans la cuisine Les pommes de terre sifflent |
|
et plus loin : | ||
|
Je suis
maintenant silencieuse Dans la haine jusqu'au coup Épaisse, épaisse. |
|
Elle n'est pas vraiment drôle et pourtant follement
amusante. Elle voit les êtres humains comme des pantins qui jouent
la pantomime : maquillage, habillage, babillage
entre deux suicides.
Sa description du sexe masculin est irrésistible :
On a un résumé de la fragilité humain dans ce zeugme :
J'ai apprécié aussi plus qu'à 20 ans son féminisme discret mais bien affirmé. Elle ne veut pas être secrétaire car elle veut non copier des lettres fascinantes mais les écrire elle-même, et le double standard moral pour les hommes et les femmes la scandalise :
Enfin, ce que j'admire surtout, c'est son courage d'affirmer que la mort peut avoir pour certains plus de séduction que la vie. Pour beaucoup, dire que la vie ne vaut pas la peine d'être vécue est un scandale. Non seulement elle le dit, mais elle présente le suicide comme quelque chose de naturel et de beau :
Les traductions sont de moi (j'ai bien sûr relu
le texte en anglais) donc faites à la va-vite. [Les citations ci-dessus sont traduites par Françoise, tandis que voici ci-dessous la traduction, parue depuis que Françoise avait rédigé son commentaire, par Valérie Rouzeau, de "Dame Lazare" (extrait de Ariel, éd. Gallimard, 2011), traduction que Françoise trouve parfois bonne, parfois non...] |
||
LADY LAZARUS
I have done it again. A sort of walking miracle, my skin A paperweight, Peel off the napkin The nose, the eye pits, the full set of teeth? Soon, soon the flesh And I a smiling woman. This is Number Three. What a million filaments. Them unwrap me hand in foot ------ These are my hands Nevertheless, I am the same, identical woman. The second time I meant As a seashell. Dying I do it so it feels like hell. It's easy enough to do it in a cell. Comeback in broad day 'A miracle!' For the eyeing my scars, there is a charge And there is a charge, a very large charge Or a piece of my hair on my clothes. I am your valuable, The pure gold babyThat melts to a shriek. I turn and burn. Do not think I underestimate your great concern. AAAA Ash, ash--- A cake of soap, Herr God, Herr Lucifer I rise with my red hair And I eat men like air. AAA |
DAME LAZARE
Ça y est, je lai encore fait.Tous les dix ans, cest réglé, Je réussis Comme un miracle ambulant, ma peau devient Un presse papier, Ôtez-moi ce linge blanc, Nest-ce pas parfaitement effroyable ? Et très vite la chair Sur moi, femme souriante. Ceci est ma mort Numéro Trois. Quelle multitude de filaments. Enlever un à un - Voici mes mains, Je nen suis pas moins véritable, la même
femme. La deuxième fois jétais bien résolue Comme un coquillage. Mourir On dirait lenfer tellement. Cest assez facile à réaliser dans
une cave. Théâtral en plein jour « Miracle ! » Pour regarder mes cicatrices, il faut payer Et il faut payer et payer très cher Une mèche de mes cheveux, un bout de mes vêtements. Je suis votre chef-duvre, Cendre, cendre Un pain de savon, Herr Dieu, Herr Lucifer Avec mes cheveux rouges Et je dévore les hommes Dévore les hommes comme lair. |
|
Lirelles a programmé La cloche de détresse le 30 mai 2021 : http://www.lirelles/plath.htm |