Quatrième
de couverture :
Dans les années sombres du nazisme, deux destins parallèles
et opposés s'accomplissent : celui d'un combattant républicain
espagnol et celui d'un penseur solitaire inapte à affronter la
vie, Walter Benjamin.
Ed. Liana Levi, coll. "Piccolo"
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Bruno Arpaia
Dernière frontière
En présence de Fanchita Gonzalez Batlle, la traductrice.
Que nous avons la chance de retrouver pour la cinquième fois :
elle était venue en 1991 pour Regardez-moi
d'Anita Brookner, en 1995 pour Servabo
de Luigi Pintor, en 1997 pour Les petits
miracles de Francine Prose,
en 1999 pour La mandoline du capitaine Correli
de Louis de Bernières.
Nous avons lu ce livre en mars 2006.
Annick
J'ai été passionnée par ce livre. J'ai aimé
le grand intellectuel allemand qui côtoie l'élite intellectuelle
européenne, personnage très vivant, très fort. Le
roman tient par le contraste entre Benjamin et le jeune républicain
espagnol. L'alternance des deux récits aide à supporter
le personnage désespérant de Benjamin, grâce à
la vitalité de l'Espagnol. Les camps de réfugiés
en France sont affligeants, on a honte pour la France, "terre d'asile".
C'est un roman très concret et géographique, avec un ancrage
dans la vie (la traversée des Pyrénées à pied).
L'Espagnol est très attachant, à peine nommé :
l'emploi de la première personne le rend plus universel. Ce roman
pose les questions sur le sens que chacun donne à sa vie.
Fanchita Gonzalez Batlle
Benjamin a une incapacité à vivre, et n'a de pitié
pour personne, il ne respecte pas la vie des autres outre qu'il méprise
la sienne, il est abominable avec sa sur.
Annick
Ce sont deux belles incarnations attachantes. Le passage sur le piège
de Marseille est très fort.
Françoise
Je suis d'accord avec ce que vient de dire Annick, si ce n'est que je
me sens plus proche de Laureano, l'Espagnol, nommé en effet seulement
vers la fin du livre, que de Benjamin.
L'idée de mêler une histoire vraie - celle du philosophe -
à une histoire fictive est intéressante, à condition
de le savoir, ce que je ne savais pas au début ; mais faire
se succéder les chapitres au même rythme d'un pour chacun
est un peu trop systématique pour mon goût. Par ailleurs,
le contraste entre les deux personnages - l'intellectuel/le pragmatique,
celui qui pense/celui qui agit - est un peu trop caricatural. A part
ces réserves, j'ai été intéressée par
ce livre, j'ai vraiment vécu la traversée des Pyrénées
avec eux, j'ai été agacée par l'immobilisme de Benjamin,
son mépris des autres ; s'il l'avait voulu il aurait pu se
sauver, s'y prendre plus tôt, partir à Londres avec son ex-femme
et son fils. Il a un certain détachement de la vie tout en étant
très égoïste. Les camps et le traitement des réfugiés
espagnols en France, l'histoire de Laureano m'ont fait penser à
un livre qu'on avait lu sur le même sujet Les
Soldats de Salamine de Javier Cercas que j'avais beaucoup aimé.
Fanchita
Le personnage de Laureano existait déjà pour l'auteur dans
un livre qui retrace son parcours avant la guerre d'Espagne, à
partir de la révolte des mineurs d'Asturies, intitulé Du
Temps perdu.
Claude
Je n'ai pas aimé l'Espagnol, le côté sexuel, etc.
J'ai préféré Benjamin, certes égoïste,
mais fascinant par son intelligence. Son exil est poignant, les foyers,
l'ascenseur... Seule la bibliothèque est un refuge. Les femmes
qui l'entourent ne le protègent pas tant que ça. La sur
n'est pas un personnage intéressant. Il y a quelques moments sympas :
restaurants, parties de poker, conversations intellectuelles. On reproche
à Benjamin de ne pas s'adapter, pourtant il fait des démarches,
il s'en sort mieux que d'autres, c'est incroyable qu'il ait pu franchir
les Pyrénées. C'est normal qu'il se soit suicidé
après tant d'épreuves...
Moi aussi j'ai eu honte pour la France.
Jacqueline
Je partage beaucoup des émotions que vous avez déjà
exprimées. Je suis admirative de ce je connais du personnage de
Benjamin, mais je suis tiraillée à la lecture du roman :
est-il fidèle à la réalité ? Le narrateur
semble tout connaître du personnage, mais à aucun moment
on ne ressent le personnage comme un philosophe. J'en veux à l'auteur
de ne pas avoir rendu Benjamin sympathique, même s'il apitoie par
sa maladresse. Je suis admirative concernant la documentation sur la guerre.
J'ai des réserves sur le côté artificiel de l'alternance,
on attend indéfiniment la rencontre. La fin m'a déçue,
l'absurdité des papiers détruits, je ne vois pas l'intérêt
du manuscrit brûlé.
Brigitte entre
et
J'ai entamé cette lecture sans savoir du tout de quoi il s'agissait.
Au début, j'ai trouvé le livre bien écrit, mais je
n'étais pas motivée pour m'intéresser à l'intelligentsia
allemande présente à Paris dans les années trente.
Il y a tellement d'autres choses qui m'intéressent beaucoup plus !
J'ai quand même continué. Quand on en est arrivé au
camp où Benjamin est envoyé en France, mon intérêt
a commencé à augmenter. C'est un sujet que je connaissais
très mal, dont j'avais très peu entendu parler. Ensuite
l'intérêt s'est soutenu jusqu'au bout. J'ai bien aimé
la description de Benjamin, de son inadaptation au monde réel...
Les pages sur la Bibliothèque nationale m'ont beaucoup plu. Maintenant
la BN est très différente, mais certains aspects sont toujours
là. J'ai aussi découvert Walter Benjamin que je connaissais
à peine et dont je vais essayer de lire quelques textes. La traduction
se fait oublier, j'en conclu donc qu'elle est très bonne. Mon attention
a été beaucoup moins retenue par les jeunes combattants
républicains espagnols, sur lesquels j'ai déjà lu
plusieurs livres et vu quelques films. Le thème de la frontière,
de la dernière frontière, frontière géographique,
frontière de civilisation et de culture, frontière contre
la barbarie... est seulement évoqué, j'aurais aimé
que le livre nous emmène plus loin dans cette réflexion.
Claire
Quand j'ai repéré qu'il y avait cette alternance, je me
suis dit qu'on n'allait pas me la faire... et j'ai lu un chapitre sur
deux : j'ai commencé par l'Espagnol ; arrivée
à la moitié, j'ai compris que les personnages allaient se
retrouver, et donc je suis revenue en arrière, et j'ai repris au
début avec l'histoire de Benjamin, passionnante, avec toute l'élite
intellectuelle de l'époque rassemblée en un microcosme.
Le genre est original, roman biographique, biographie en mouvement, on
se demande comment l'auteur s'y est pris. On ne sait rien de l'écriture
de Benjamin, on parle de ses textes "allusifs et hermétiques" :
ce n'est pas très aguichant...
L'alternance est risquée et peut faire lâcher le lecteur
par son artifice. L'arrière-plan historique et l'intrigue sont
passionnants.
Rozenn
C'est fascinant de vous entendre car je ne l'avais pas relu. (C'est
Rozenn qui l'avait proposé). Je suis d'accord avec toutes les
opinions. C'est un livre qui m'a secouée, il soulève la
question "qui et comment on pouvait résister ?"
En se battant ou en laissant quelque chose derrière soi. Quelle
est l'issue à la barbarie ? Le mépris de Benjamin pour
les autres me plaît beaucoup. L'autre est plus insupportable avec
son machisme. Ce sont deux caricatures extrêmes de résistance.
Ce n'est pas que de l'émotion, c'est visuel.
Fanchita
Ce livre n'était pas difficile à traduire.
Cependant les lettres étaient "lourdes" par rapport à
la simplicité de la narration. Grâce à l'auteur, j'ai
pu faire une recherche pour les traduire de leur langue d'origine et éviter
de faire une traduction de traduction.
Le titre de ce livre en italien est L'Ange de l'histoire, en référence
à un tableau de Klee.
J'ai rencontré l'auteur, il est fort sympathique.
Par ailleurs, traduire ce livre qui parle de la frontière franco-espagnole
n'était pas indifférent pour moi qui suis née en
1938 dans un bureau de change sur cette frontière...
Nos cotes d'amour, de l'enthousiasme
au rejet :
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à
la folie
grand ouvert
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beaucoup
¾ ouvert
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moyennement
à moitié
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un
peu
ouvert ¼
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pas
du tout
fermé !
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