L'étude
des différentes manières de ne pas lire un livre, des situations
délicates où l'on se retrouve quand il faut en parler et
des moyens à mettre en uvre pour se sortir d'affaire montre
que, contrairement aux idées reçues, il est tout à
fait possible d'avoir un échange passionnant à propos d'un
livre que l'on n'a pas lu, y compris, et peut-être surtout, avec
quelqu'un qui ne l'a pas lu non plus.
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Pierre Bayard
Comment parler des livres que l'on n'a pas lus ?
Nous avons lu ce livre en mai 2007.
Monique
J'ai lu l'article envoyé par Françoise ("où
l'on apprend que le compte rendu d'un livre est plus important que le
livre lui-même"...). Je n'ai pas lu beaucoup de lignes
dans chaque page mais à chaque fois que l'auteur parle des d'extraits
de livres c'est génial et cela m'a fait penser à A. Manguel
car il donne envie de lire les livres. Sinon l'auteur parle du lecteur
obligé de parler de livres qu'il n'a pas lus et je ne me sens pas
concernée par cette situation. Je me sens parfois obligée
de lire des livres pour le groupe lecture... D'après l'auteur,
un livre c'est le discours qu'on tient autour du livre : c'est vrai
pour le groupe. On n'a jamais une lecture totale d'un livre. On a tous
une lecture différente. Quand on sort du groupe de lecture, on
en sort avec sa propre idée du livre additionnée de tous
les avis qu'on a entendus dans la soirée. Ce que l'auteur dit sur
l'oubli du livre est vrai. L'idée des pages 109-110 que le livre
est égal à l'auteur est pour moi complètement fausse.
L'idée du livre intérieur qu'on chercherait toujours n'est
pas juste non plus. Les grands plaisirs de lecture sont les livres qui
nous surprennent vraiment. J'ai adoré les exemples tirés
d'Oscar Wilde et de toutes les uvres littéraires. L'idée
du lecteur co-créateur du livre par sa lecture est rabâchée...
mais c'est quand même un livre de quelqu'un qui adore la littérature
et qui donne envie de lire.
Liliane
Merci à Ève de m'avoir prêté le livre que je
ne voulais pas acheter et dont le survol confirme en effet qu'il n'était
pas nécessaire de le lire pour s'en faire une idée. Pour
suivre le programme, j'ai quand même commencé par lire attentivement
cet éloge si intelligent de l'imposture. Puis je l'ai parcouru,
tournant les pages de plus en plus vite, lassée par les artifices
démonstratifs avec exemples littéraires à l'appui.
Contrairement à ce que soutient l'auteur, lire n'est pas se conformer
à des diktats : on peut se moquer du consensus, et aussi réinventer
ce qu'on a lu, en somme lire et être encore plus libre ->Livre
"musilé"
Claire
Où as-tu vu les diktats auxquels l'auteur invite à se conformer ?
Liliane
J'ai rendu le livre à Ève, de mémoire je me souviens
que l'auteur recommandait de ne pas se laisser impressionner par ce qu'il
fallait lire à tout prix ni par ceux qui en imposaient par leurs
lectures.
Manu
Des concepts développés dans le livre me sont passés
au-dessus mais je trouve que l'auteur a bien recréé tous
les livres qu'il résume. Pour ma part, c'est du grand art que de
donner en si peu de pages l'envie de lire les livres cités avec
des extraits appropriés. J'ai pensé à Guy Scarpeta
et son Âge
d'or du roman
que nous avions lu. Je me souviendrai toujours de Fernando parlant
une demi-heure après nos avis des Particules élémentaires
dont il n'avait lu que quelques pages !... J'aime l'idée de
recréation du livre par la non-lecture.
Claude
J'ai trouvé ce livre passionnant mais agaçant. Je n'accepte
pas l'idée que les professeurs d'université parlent de livres
qu'ils n'ont pas lus... alors que c'est leur boulot ! C'est artificiel.
L'exemple de P. Valéry qui peut faire une critique argumentée
après n'avoir lu que quelques lignes est fascinant. L'auteur dit
que parfois les gens ont honte de ne pas avoir lu.
Christine
Je n'aime pas les essais. J'aime les romans, correspondances, etc. Je
m'attendais à quelque chose de très léger et j'ai
l'impression qu'il a voulu faire quelque chose de très sérieux.
J'ai été surprise. Ce qui ne m'intéresse pas du tout
c'est que je n'ai jamais été obligée de faire semblant,
de prétendre que j'ai lu un livre. Dans ce livre, il n'y a pas
de notion de plaisir, d'intérêt. Les extraits ne m'ont pas
intéressée non plus. Je suis arrivée jusqu'à
la fin mais je suis sûre que j'aurai tout oublié...
Françoise D
J'ai beaucoup de choses à dire... J'aime beaucoup cet auteur, dont
j'ai lu d'autres livres. Il est toujours dans la provocation, le paradoxe.
J'ai retrouvé le même plaisir de lire ce coup de pied dans
la fourmilière. P. Bayard est toujours très pertinent.
On a l'impression de connaître des livres sans les avoir complètement
lus. Ce livre nous ramène à notre groupe de lecture :
sa finalité. Parfois, après avoir écouté certains
avis, on a l'impression que l'on n'a pas parlé du livre. On peut
se permettre de parler d'un livre qu'on n'a pas lu lorsqu'on en a lu beaucoup
d'autres. Le plus important est ce dont on parle et non pas le livre dont
on parle. Il y a beaucoup de références à la psychanalyse :
c'est la porte à sa propre création. Le récit du
Nom de la Rose est brillant comme le récit d'Hamlet
lu à une tribu primitive. La qualité d'analyse et de synthèse
est remarquable. La démarche consiste à mettre à
distance un tabou tout en incitant à lire. Bayard ne dit pas qu'il
ne faut pas lire mais qu'il ne faut pas avoir honte de ne pas avoir lu
certains livres. L'idée, brillante, de la bibliothèque virtuelle
renvoie à une question qu'on se pose régulièrement :
tel livre est-il bien pour le groupe de lecture ? Ma conclusion :
il n'y a pas de livres qui ne seraient pas pour le groupe.
Jacqueline
J'ai parcouru un peu plus de la moitié du livre. J'ai ressenti
un léger ennui. Pourquoi ? Ses concepts sont intéressants
mais "bateau". Par exemple le livre intérieur, chacun
fait son livre... C'est intéressant l'idée de différence
entre le fait de lire et l'acte social de parler de ce qu'on a lu. J'ai
été intéressée de vous entendre parler de
ce livre. Mon livre intérieur ne correspond pas à ce que
l'auteur dit. J'ai été agacée par la façon
dont l'auteur utilise les extraits, par exemple le paradoxe d'Oscar Wilde.
Le titre est une accroche pour les lecteurs mais c'est un humour auquel
je ne suis pas sensible. C'est une source de réflexion sur la manière
dont on lit et sur ce que le groupe apporte ou n'apporte pas.
Françoise O
Premier point, et le plus positif, c'est ce que tout le monde a dit de
ce livre ce soir. Deuxième point c'est la première fois
que je viens au groupe sans avoir lu entièrement le livre. Je l'ai
lu jusqu'à la page 55 en m'embêtant. C'est à cette
page que ça s'est gâté : "dès
qu'on commence à lire un livre, on commence à l'oublier".
A partir de cette généralisation abusive, j'ai été
empêchée de lire la suite. Je trouve que c'est un livre très
artificiel avec des situations improbables. L'auteur utilise le paradoxe
et veut nous prouver qu'on peut dire n'importe quoi d'un livre sans l'avoir
lu. L'auteur s'amuse à faire un livre avec un titre accrocheur
et c'est malhonnête intellectuellement ou à considérer
comme un jeu intellectuel.
Claire
C'est moi qui ai proposé ce livre, que j'adore ! J'ai été
attirée par le titre et donc je l'ai acheté immédiatement.
C'est un livre qui m'a séduite entièrement, que j'ai lu
et relu. C'est un livre pour moi délicieux, élégant.
L'auteur a l'art de raconter, de rendre compte. Les exemples sont étonnants,
choisis formidablement. Comment l'auteur a-t-il fait cette cueillette ?
Au Masque et à la plume le livre a été critiqué,
moqué. Un des participants a même avoué qu'il lui
était arrivé de parler d'un livre qu'il n'avait pas lu pendant
cette émission (d'où un courrier des lecteurs incendiaire !).
L'auteur estime qu'on devrait apprendre aux étudiants à
parler de livres qu'ils n'ont pas lus ; ce n'est pas malhonnête :
c'est un savoir-faire. Ceux qui peuvent se reconnaître parmi la
Bibliothèque sont les mieux placés pour parler d'un livre
qu'ils n'ont pas lus (comme le bibliothécaire de Musil) :
moi-même qui n'ai pas lu des tonnes et donc qui n'ai pas lu Ulysse
de Joyce, je peux tout à fait en parler - j'ai feuilleté
le livre, je sais vaguement comment ce livre a compté dans la littérature,
j'ai lu le monologue de Molly Bloom et voilà. Quant à l'oubli,
je suis complètement concernée : j'oublie au fur et
à mesure que je lis quand la narration est assez touffue, ce qui
me pose des problèmes de compréhension (je ne sais plus
qui est qui, qui a fait quoi) ; j'oublie très vite tout et
donc c'est comme si je n'avais pas lu grand chose. J'adore le chapitre
sur Montaigne. J'aime aussi les demi-lectures ou les feuilletages :
par exemple, en librairie, en passant d'un livre à un autre, c'est
une forme de lecture. Ce livre permet de se dégager d'un certain
nombre d'interdits, et il donne une valeur à d'autres formes de
rapport aux livres, fondées principalement sur le discours sur
le livre. Par ailleurs, il parle tout le temps du groupe lecture :
combien de fois nombre d'entre nous n'ont pas lu entièrement le
livre dont néanmoins ils parlent : et ces avis sont pris en
compte, ont une valeur. Enfin, j'admire la façon dont il évoque
les livres qui constituent les exemples illustrant chaque facette de son
essai : quel art de nous y faire accéder. Je regrette vraiment
que ce livre n'ait pas plus de succès auprès de vous...
Geneviève(avis
transmis)
Et voilà, je me faisais un plaisir de parler de ce livre avec le
groupe et jai raté la date ! Moi qui ne suis pas une
bonne lectrice dessais, jai lu ce livre très vite,
bien que jaie eu un peu peur au début devant la liste de
sigles ! Lhumour, lélégance du style font
passer lérudition qui pourrait être lourde et même
pédante. Moi qui ai longtemps fait mon métier de la lecture
et pour qui le sens de mon travail était le "conseil de lecture",
je me suis sentie directement interpellée par cette idée
dun univers de livres dont finalement compte avant tout la proximité :
idée en fait très proche des "réseaux de lecture"
que nous avons tenté de promouvoir à lécole
partant du principe quon construit son propre itinéraire
de lecteur.
Jai éprouvé cela avec beaucoup de force lorsque je
me suis retrouvée dans une bibliothèque étrangère,
où, bien que parlant la langue, je me suis rendu compte que javais
perdu mes repères faute de connaître les titres et surtout
les auteurs autour de moi. Ce qui ma aidée à comprendre
ce que ressentaient mes élèves face à des livres
qui représentaient autant de menaces !
Autant dire que cette idée de limportance des liens que nous
tissons entre les livres métait chère. De même,
jai été très sensible à lidée
du livre virtuel que crée notre mémoire : jolie proposition
qui répond bien à la sorte de vertige qui me prend lorsque
je pense au nombre de livres que jai lus... et oubliés !
Sans compter ceux que je crois avoir lus, comme Le Zéro et linfini,
que jai en fait découvert, fascinée.
En revanche, je ne peux pas être daccord avec la conclusion
qui porte à penser que finalement avoir ou non lu les livres na
aucune importance. Cela me paraît relever du snobisme dérudit,
que ne peuvent se permettre que les privilégiés de la lecture.
Je louvre complètement : un de plus à mettre
au crédit des découvertes dont je remercie le groupe de
lecture.
Lona(du
groupe breton dont les avis suivent)
Ronflant, nombrilique et comme dit Jean-Pierre, de la masturbation intellectuelle,
et jai rajouté, jusquà lextase !
En conclusion :
LpP
livre peu parcouru
LpA
livre pas aimé
LhF
livre hermétiquement fermé et
je vais me
presser den faire un LO, rapidement oublié !
Et dire que je nai même pas trouvé la recette pour
pouvoir en parler ! Cest désespérant !
Mon'
C'est tout de même bien paradoxal de nous inciter à lire
un livre pour en discuter alors que l'auteur veut apparemment nous apprendre
à parler des livres que l'on n'a pas lus.
C'est paradoxal et, pour ma part, je classerai ce livre selon les normes
de l'auteur, dans la catégorie LP... Comment fait-il d'ailleurs
pour donner des - ou -- à des livres inconnus ??? (PI)
Ce livre m'a passablement ennuyée. Passer en revue des exemples
littéraires de non-lecture m'a semblé inintéressant
et fastidieux.
C'est un exercice intellectuel brillant parfois mais sans intérêt.
Lil
Ce qui est certain, c'est que Pierre Bayard a admiré, avec une
intense auto-satisfaction, le fonctionnement bien huilé de sa pensée.
On en convient, la démonstration est brillante, mais quelle déception
lorsqu'on en découvre l'objet !!!
Était-il bien nécessaire d'écrire un livre pour finalement
nous annoncer que :
- la lecture est indissociable de la perte, de l'oubli...
- chaque lecteur possède un filtre perso (le livre intérieur)
- toute culture est faite de vides et de pleins, comme le gruyère...
De la poudre aux yeux, sans aucun intérêt... sauf pour l'auteur !
LO
Jean-Pierre
Ouf, je l'ai fini ! Eh oui, je l'ai lu ! Mais je vais m'empresser
de l'oublier, ne serait-ce que pour pouvoir être classé dans
deux des catégories que l'auteur expose. Alors ?
Eh bien, je trouve que l'architecture du livre repose sur une ambiguïté
fondamentale, pour ne pas dire un péché originel :
alors que le propos de Pierre Bayard, chevalier sans peur et sans reproche
du sophisme érigé en système, et ainsi que le dit
expressément le titre de l'ouvrage est de nous apprendre "Comment
parler des livres que l'on n'a pas lus", toutes ses longues et tortueuses
démonstrations s'appuient sur des exemples et des situations puisés
dans des livres ou dans des films. C'est bien de nous résumer les
uvres qu'il cite, ça nous évitera de les lire et ça
nous permettra cependant d'en parler. Mais quand même, la question
se pose d'elle-même : utilisant les méthodes certifiées
qu'il nous conseille, et malgré ses notes de fin de pages qui sont
censées nous renseigner sur ses lectures ou ses non lectures, on
est en droit de se demander si telle ou telle uvre appelée
au secours de ses raisonnements a été ou non lue. Le doute
existe.
Il est à la fois amusant et agaçant de constater à
quel point certains intellectuels adorent se faire des nuds au cerveau
tout en prenant leur pied pour en compter les orteils. Bravo les contorsionnistes !
Tout cela a sans doute débuté par les discussions byzantines
sur le sexe des anges ? En tout cas, ça dure, et c'est dur !
Cela dit, il y a quelques remarques de bon sens, à commencer par
celle qui souligne qu'il est impossible de lire tous les livres. Une fois
cette porte ouverte enfoncée, la seule attitude convenable n'est-elle
pas d'avouer humblement que la culture livresque (et la culture tout court)
a des trous. Pour ce qui me concerne, c'est un vrai gruyère où
le vide "pèse" largement plus lourd que la pâte.
Et puis aussi l'opinion que la biographie des auteurs importe moins que
les livres qu'il écrivent.
L'auteur se réfère à plusieurs reprises à
la psychanalyse pour expliquer et même justifier l'outrecuidance
de ceux qui acceptent de parler les livres qu'ils n'ont pas lus. Mais
il y a assez de domaines intérieurs dont nous ne parlons pas et
où nous pouvons nous cacher des autres. A partir du moment où
nous acceptons la discussion et donc la confrontation sur un sujet, à
quoi bon mentir et dissimuler nos doutes, nos manques, nos faiblesses ?
La lecture peut être un de ces sujets ? Parfait ! Mais
parlons-en sans détour ni hypocrisie. Toutes les arguties développées
par l'auteur m'apparaissent comme des marques d'encre destinées
à remplir des pages. A vouloir faire la psychanalyse des lecteurs/non/lecteurs,
il nous entraîne dans un fouillis inextricable, dont il espère
que les entrelacs suffiront à donner de l'épaisseur et de
la cohérence à ses nébuleux propos.
Bibliothèque virtuelle, collective, livre fantôme, écran,
intérieur, où est donc le livre-livre ? Pour moi, la
preuve du livre, c'est qu'on le lit.
C'est un grand exploit d'avoir écrit ce bouquin. C'en est un plus
grand encore de l'avoir lu. Je suis fier de moi.
Nicole
La présentation du livre par son auteur lors d'un "Bateau
livre" ne m'avait pas vraiment enthousiasmée, la lecture du
livre non plus.
Alors pourquoi au quart, surtout pour les extraits des ouvrages qui ont
servi de charpente à son essai, peu pour sa démonstration
de style universitaire et pas du tout pour les évidences qu'il
avait l'intention de nous faire découvrir.
Livre déjà oublié.
Marie-Thé
Je ne sais pas comment ouvrir ce livre : je ne lai pas lu assez.
Sachant que Claire lavait aimé, jai eu envie de le
lire. Cest très dense, et je lai vite trouvé
"indigeste". Pourtant jaime le côté analytique.
Je pense que si javais persévéré, je laurais
trouvé très intéressant, riche. Dés le début
ce livre me parlait...
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