" Nous ne vivons
plus sous la crainte d'un Dieu, d'une justice immanente, d'un Fatum comme
dans la Cinquième Symphonie ; non ! plus rien de tout cela ne nous
menace." Notre monde n'est plus hanté que par des pannes.
Pannes de voiture, par exemple, comme celle de la Studebaker d'Alfredo
Traps, un soir, au pied d'un petit coteau... La Panne, ce chef-d'oeuvre d'humour noir, a été porté à l'écran en 1972 par Ettore Scola, sous le titre La Plus Belle Soirée de ma vie. Traduit de l'allemand par Armel GUERNE
« Traps. Quel crime suis-je donc censé
avoir commis ?
Dans ce texte clé de luvre de Friedrich Dürrenmatt (1921-1990), la différence entre la culpabilité et linnocence, entre la justice et linjustice sestompe, pendant que la toute puissance des mots se déploie.
Nouvelle traduction de la version radiophonique de La Panne (1955). Traduit de l'allemand par H. Mauler et R. Zahnd Préface d'Hélène Mauler |
Friedrich
DÜRRENMATT
(1921-1990)
|
Chantal,
Édith, Rozenn, Manuel, Nathalie, Denis, Muriel, Séverine,
Monique S
Suzanne, Fanfan, Claire, Fanny, Françoise, Catherine, Marie-Odile, Lisa Jacqueline Monique L |
Lisa (à Paris)
J'ai beaucoup aimé ce livre. L'écriture est sympa, même
si je n'ai rien relevé de grandiose. Par contre, l'histoire, j'ai
été bluffée.
Au début de ma lecture, je n'étais pas convaincue, je trouvais
ça un peu facile. Plus j'avançais, plus j'appréciais
cette histoire.
La fin m'a particulièrement plu : enfin une chute réussie
! Je suis souvent déçue par les chutes des nouvelles, là
c'est une réussite.
J'aime ce que l'auteur nous raconte sur la culpabilité.
Je n'ai pas vu l'intérêt de la première partie. J'ouvre
aux ¾.
Monique L (à Paris)
Ce livre me laisse un goût amer. Un humour noir dans un monde de
personnels de justice alcoolo. Je trouve que ce ne sont pas des connaisseurs,
car mélanger tous ces grands crus en une seule soirée me
semble sacrilège. C'est le côté "chevalier du
Tastevin" de mon grand-père maternel et le côté
connaisseur de grands vins de mon frère qui se rebellent. C'est
sans doute anecdotique mais sérieux.
Revenons à la lecture. Ce qui pourrait être intéressant,
c'est le passage d'innocent à victime de notre "héros",
bien qu'ayant vu le glissement lent et continu de ce changement, je n'ai
pas été convaincue. Ce qui m'a le plus marquée c'est
le final, car Traps se sent plus considéré par le juge qui
le condamne à mort que par son défenseur qui lui cherche
des excuses et le rend ainsi plus quelconque et vulnérable. La
toute fin du suicide m'a surprise, mais quelle aurait pu être une
autre fin ?
Je n'ai pas été sensible à la dérision et
à cet humour. J'ouvre au quart.
Marie-Odile (dans les Pyrénées)
J'ouvre aux ¾ ce récit que je conseillerais à tous
ceux qui sont en panne de lecture, car il a vivement capté mon
attention (une fois passées les réflexions du premier chapitre
qui ont cependant le mérite de justifier le titre).
Si, au début, Traps parle parfois de "conte", l'atmosphère
m'a rappelé certains récits fantastiques : les personnages
sont de plus en plus grotesques, les rires diaboliques, les discours désarticulés.
L'action relève vite du cauchemar, comme un jeu de rôle qui
tourne mal. J'ai pensé aux Dix
petits nègres d'Agatha Christie. Dans les deux récits,
le lieu est clos, le temps resserré, le décor intérieur
et extérieur mentionné, le nombre des personnages limité,
et surtout, comme Traps, tous sont coupables de quelque chose qui échappe
à la Justice traditionnelle). Ce récit m'a cependant paru
original, car l'accusé est le premier à s'accuser, les valeurs
sont renversées, la condamnation valorisée... La mise en
scène d'une justice dont le but est de faire vivre ses protagonistes
entraîne Traps là où il n'avait pas prévu d'aller.
J'ai été impressionnée par la complexité du
récit qui mène de la panne de voiture à "la
panne de raison" Traps perd la honte, découvre "sa vérité",
l'accusé s'accuse et finit par exécuter lui-même la
sentence
J'ai bien aimé la progression implacable, le mélange
subtil de drôlerie et de gravité, de farce et de réflexion,
qui, pour moi, font la réussite de ce récit.
Monique S (dans la Sarthe)
Je ne connaissais pas le
film, j'ai donc découvert ce récit de but en blanc.
Quelle richesse et quelle drôlerie !
On est à certains moments dans le conte fantastique grotesque (les
trognes des vieillards, leur costumes, leur hilarité subite et
bruyante, leur débordements). On est aussi dans un univers un peu
suranné (j'ai pensé, parmi des livres que nous avions lus,
à Maîtres
anciens de Thomas Bernhard et à l'atmosphère anglaise
des Vestiges
du jour de Kazuo Ishiguro avec une panne aussi).
Dans ce milieu intellectuel du barreau, on sait manier le verbe, rationaliser
sa pensée ; on sait apprécier les meilleurs vins, les
meilleurs mets ; on suit un certain décorum bourgeois pour
ouvrir, déguster les meilleures bouteilles. Le tout sur un fond
philosophique : comment "réussir sa vie" ?
Doit-on rester dans une certaine inconscience et la médiocrité,
ou bien accéder à une certaine "hauteur" en étant
acteur de sa vie, quitte à employer de façon volontaire
tous les leviers, y compris le crime ? J'ai souvent pensé
à Edgar Poe (écriture implacable, conte, fantastique, raisonnement)
et aussi à l'univers de Polanski, en particulier au début
de son film de Le
Bal des vampires.
A la fin, comment interpréter le suicide du "représentant
de commerce" ? Pour moi, c'est qu'il n'était pas à
la hauteur du jeu. Il n'avait pas l'étoffe des autres convives ;
on n'échappe pas à sa classe, il s'est brûlé
les ailes à un jeu trop subtil pour lui. Il a été
le jouet totalement malléable des autres, ce qui vient confirmer
ses craintes du départ, quand il se dit p. 24 : "une
conversation où il risquait fort de se sentir ridicule..."
Ce que j'ai adoré tout le long du livre, c'est qu'à chaque
ligne, on est incapable de prévoir la suivante ; et on est
en effet à chaque page : surpris, amusé, scotché.
Excellent, à déguster à petites gorgées, avec
gourmandise, comme un grand millésime. Je l'ouvre en grand.
(Pour ceux des semaines lectures au Val
Richard, vous souvenez-vous des passages que nous interprétions
pour rire devant la maison durant nos lectures ensemble ? J'aurais
bien aimé jouer des passages de ce livre avec vous : les silences
soudains et suspendus au repas, puis les cris, les rires, et les tapages
sur la table, ou bien la dernière montée des escaliers vers
les chambres...)
Chantal (à Vars comme ceux qui suivent)
Quel plaisir ! Mais après le bla-bla de la péroraison.
Mais quand j'ai relu cette première partie, je l'ai appréciée.
J'ai aimé l'implacable progression, cela m'a fait penser à
Kafka, aux procès du XXe siècle. J'ai trouvé les
arguments brillants, peut-être moins pour le défenseur. J'ai
aimé le style de l'écriture avec parfois des petites phrases
hachées qui montre bien l'évolution de Traps. J'ai aimé
le suspense, j'avais imaginé une autre fin. J'ouvre en grand.
Jacqueline
Je n'ai pas beaucoup aimé. J'ai commencé gentiment par le
premier chapitre. Il m'a beaucoup agacée. Quelle prétention
extraordinaire ! Il défonce des portes ouvertes. L'histoire m'a
accrochée, il m'est arrivé de rire. Mais c'est très
compassé, vieillot. Je me rappelais vaguement
le
film qui m'avait bien accrochée. Ici c'est très
bien construit cette intrigue. Le style m'a fatiguée. J'ai été
agréablement surprise par la fin. J'ouvre à moitié
car c'est bien ficelé.
Édith
J'ai dégusté, lu et relu. Pourquoi j'y retourne ? J'ai relu
avec les commentaires (de ceux en train de lire) que j'ai écoutés.
Vérité, jeu, langage : Les
écrits sur le théâtre en parlent. De vieux
viveurs se jouent le jeu de la camaraderie, avec une deuxième forme
de vie. Je me suis délectée de cette malveillance. Est-ce
une histoire possible ? Question que pose ce livre. Je me suis délectée
de façon macabre et j'ouvre grand. J'aime le côté
ancien de l'écriture.
Suzanne
La première partie m'a posé question. Il s'agit d'universel
cosmique : vais-je retrouver cela, me suis-je dit, dans le texte qui suit
? Je me suis demandé de quelle époque était l'auteur.
C'est une farce macabre sur fond de dîner fin. J'ai pensé
au Dîner
de Babette. Le personnage a besoin de se sentir coupable. La plaidoirie
de l'avocat vaut la peine. Il y a une progression du jeu. J'ai retenu
l'élégance calamistrée. J'ouvre trois quarts.
Rozenn
Je n'ai pas lu le début. Je suis complètement emballée.
Pour certains mots, j'ai l'impression que c'est mal traduit. Qu'est-ce
qui m'a plu ?
- Les personnages, mais ils sont difficiles à distinguer, il y
a un petit problème.
- L'évolution de l'accusé : tout content d'être
au centre, d'être le héros, content de l'identité
qu'on lui donne.
- Une petite peur, la jubilation de la culpabilité, et puis...
même pas peur
- La fin m'a beaucoup plu.
La
pièce de théâtre que j'ai lue ne tient pas. J'ouvre
en grand.
Manuel
Ce fut un très grand plaisir de lecture. J'ai aimé les descriptions :
on les voit. J'ai aimé l'arrière-fond, le village, l'unité
de lieu. J'ai adoré la chute. Les dialogues sont croustillants.
Et le juge dans le piano !... Est-ce qu'on se prend au sérieux ?
Cela ne m'étonne pas qu'un Italien l'ait adapté, c'est une
parfaite comédie italienne. J'ouvre en grand. Ce n'est pas un chef-d'uvre,
mais c'est une vraie création. Et l'écriture datée
fait du bien.
Fanfan
P. 33, on voit la tactique, et que Traps est bien crétin.
Je ne voyais pas cette fin. Pourquoi est-il mort ? Tout ce que dit
le juge lui a cassé le moral.
J'ai aimé le style, le rythme : c'est relax, jovial, puis
PAM ! Quelque chose, là, est lié à la musique.
J'ai adoré comme ce type est fier d'avoir trouvé un sens
à la vie. J'ouvre trois quarts.
Nathalie
J'ai beaucoup ri, c'est clownesque, burlesque. J'ai douté longtemps
de leurs intentions. J'ai l'impression d'être dans L'Auberge
rouge. J'ai relu après le manifeste qu'est la partie 1,
qui marche par le refus, très bovaryen. Flaubert était d'ailleurs
passionné par les minutes de procès. J'ai tout aimé,
quoique parfois ce ne soit pas convaincant, car c'est trop intelligent
de la part de Traps. Les dialogues sont réussis. J'ai adoré.
J'ai eu beaucoup de plaisir (plats et vins compris...)
Denis
Je connais La panne depuis des années 60. Je l'ai étudié
en allemand. C'est un livre énigmatique. Une critique très
profonde de la justice. Dürrenmatt est un provocateur ; il titille
l'ordre suisse ; c'est une parodie de justice. J'ai été
déçu par le
film avec Michel Simon. La servante est devenue jolie et la
fin est différente.
Vos commentaires enrichissent ce livre enraciné en moi. Kafka,
je n'y aurais pas pensé. En allemand c'est plus clair. Je me suis
attaché à la première partie, l'ai lue quatre ou
cinq fois ; je ne comprends pas bien ; un écrivain peut parler
des pannes ; que fait cette première partie ?
Le thème est métaphysique, parallèle à l'univers
de Chirico.
Ce n'est pas un roman humain. Je n'ai pas compris pourquoi il se suicide.
J'ouvre en grand.
Claire
Le premier chapitre m'a sidérée, m'a plu : j'ai trouvé
cela alambiqué. Les énumérations, comme celle de
la première page, donnent un rythme au texte à certains
moments.
J'ai eu du mal à me situer : j'étais dans une recherche
de vraisemblance malvenue ; j'ai trouvé cela TROP,
au-delà du grotesque.
Je me suis questionné sur la traduction, par exemple des points
virgule ponctuent l'énumération de la première page
et dans le texte d'allemand que j'avais aussi sous les yeux, ils n'apparaissent
pas ; dans le début de la deuxième partie, la présentation
du personnage n'est pas faite dans le même ordre, c'est bizarre
(voir un tableau
édifiant réalisé par la suite).
J'ai lu la pièce et contrairement à toi Rozenn, je l'ai
préférée. La première partie qui pose problème
ne figure pas, mais on retrouve des passages qui renvoient de façon
plus claire aux thèmes de cette partie. Simone est pleinement un
personnage, annonçant théâtralement les plats et les
vins. Et la fin, différente, est drôlement intéressante.
Et puis j'ai aimé ce que j'ai découvert de l'auteur, quel
bonhomme ! J'ouvre la
pièce en grand et le
roman trois quarts.
Fanny
J'ai trouvé le style désuet. Psychologiquement, c'est très
fort. Le retournement est très fort. J'ai été surprise
par la fin. C'est très bien monté. Je n'avais jamais lu,
mais j'avais un sentiment de familiarité. J'ai pensé au
Dîner
de cons dont nous parlions avec Manuel. Et aussi au juge-pénitent
dans La Chute de Camus. Le début, je l'ai relu mais je ne
l'ai pas compris. Ça ne veut rien dire. C'est très hermétique.
J'ouvre aux trois quarts.
Muriel
J'ai trouvé la première partie barbante. Et la suite formidable
! Une originalité folle ! Et ce vieux qu'on croit gâteux.
Et ce jeu où ils sont là attendre le client. La plaidoirie
m'a fait penser à la chanson "Ping Pong Li" de Georges
Ulmer. C'est hénaurme, comme Ubu, monstrueux, dégénéré.
Le gars est minable, il se rend compte qu'il a peut-être contribué
à la mort de son collègue ; rentré dans sa chambre,
il se suicide. Les arguments de la défense, c'est très bien.
C'est extrêmement original. J'ouvre en grand.
Séverine
C'est le livre que j'attendais. Je l'ai lu trop rapidement. Je connaissais
La
visite de la vieille dame. Je suis fan d'Agatha Christie ;
or beaucoup de livres de Dürrenmatt se réfèrent au
policier. Il y a Le
Juge et son bourreau et La
Promesse. J'ouvre en grand. C'est un jeu de doute, le doute est
instillé. La panne m'a rappelé Les
vestiges du jour qu'on a lu : avec le prestige de la voiture,
le statut social que donne la voiture. Le sujet est la panne d'auteur ?
J'ai hâte de lire d'autres livres de lui, Grec
cherche grecque par exemple. J'ai été surprise par
la fin. C'est jubilatoire ce jeu macabre.
Catherine
J'ai eu du plaisir c'est sûr. C'est très bien fait. Les descriptions
des personnages, la graisse. C'est grotesque. Il y a un côté
un peu sordide. Et la société de textile Héphaïstos !
C'est assez féroce, cette satire. Les plaidoiries sont très
bien, dont celle de la défense. Un bémol : je n'ai
pas été convaincue, car il est trop médiocre pour
se suicider. Mais c'est super bien fait.
Françoise
Au début je n'ai rien compris. Le début est un repoussoir
de lecture. Mais j'ai continué et... c'est un régal de lecture.
La tension monte, c'est bien foutu. Et les descriptions physiques !
Le style désuet va bien. La fin est invraisemblable. J'ai pensé
à La
Boule noire de Simenon. Par ailleurs, il y a une clairvoyance
par rapport aux cerveaux artificiels. Et le sous-titre donne une clé :
"une histoire encore possible". J'ouvre aux trois quarts (à
cause de la première partie).
DOC SUR DÜRRENMATT ET SES UVRES
La Panne,
une uvre qui évolue
- 1955 : pièce radiophonique
- 1956 : récit
- 1979 : version scénique
- 1972 : entre-temps, Ettore Scola adapte le récit au cinéma
sous le titre La
Plus Belle Soirée de ma vie, avec Alberto Sordi, Michel
Simon, Charles Vanel ; ce fut le dernier film de Pierre Brasseur, qui
mourut au cours du tournage. Claude Dauphin a relaté ce tournage
dans son livre
Les Derniers Trombones.
La Panne :
ce qu'en dit Dürrenmatt
Les trois versions ?
"Ce fut d'abord (en 1956) une pièce radiophonique. Ensuite,
j'ai écrit le roman et, en 1979, la version définitive de
la pièce de théâtre. Ces quelques versions de La
Panne sont, pour moi, semblables aux transpositions de Bach. Il m'arrive
souvent de traiter le même sujet en théâtre, en roman
ou nouvelle, de le reprendre plusieurs fois."
Et le film ?
"Ce fut une entreprise malheureuse, pleine de problèmes. Ce
fut aussi le dernier film de Pierre Brasseur qui décéda
en cours de tournage. Il a donc fallu le remplacer, doubler sa voix.
Généralement, je n'ai pas un bon rapport avec le cinéma.
Je trouve que la plupart des cinéastes sont des rafistoleurs. Ils
font leur film aux ciseaux. Même Fellini. Je suis un écrivain
et, si j'ai joué dans Le Juge et son bourreau, ce n'était
que pour faire une blague. J'y jouais d'ailleurs si mal que si j'avais
été le metteur en scène, j'aurais coupé ma
scène."
Et la pièce ?
"Elle dit la même chose que mes autres pièces : dans
le monde d'aujourd'hui, la tragédie n'est plus possible, ni la
faute qu'elle implique, il n'y a plus que le dérisoire des petits
accidents. La Panne est la comédie de la justice, cette
idée contre laquelle je m'élève résolument,
une des plus cruelles que l'humanité ait inventées. Au nom
de la justice, on a fait plus de mal que de bien. S'il y a une justice,
elle devrait être au-dessus des hommes, elle devrait être
divine. La justice humaine est condamnée d'avance parce que les
juges ne sont jamais en dehors de la justice. Voilà pourquoi mon
personnage, traduit à la faveur d'une panne devant un tribunal
corrompu, est à la fois coupable et innocent. Il peut choisir son
verdict. Quand j'ai écrit la pièce, j'ai essayé de
me placer au-dessus du jugement. C'est une pièce aristophanesque."
Ces citations sont extraites de l'article suivant :
- "La
Panne, le 4 septembre au Carré Silvia Monfort. Friedrich Dürrenmatt
: Vive Aristophane !", Anca Visdel, Le Figaro,
21 août 1984 ; des photos de la représentation ICI
; un autre article sur cette mise en scène : "Procès
en chambre", Caroline de Baroncelli, Le Monde, 11 septembre
1984 ; et voici un article sur une autre représentation :
- "Trois
comédiens singuliers font fonctionner La Panne : Darry
Cowl, André Falcon et André Chaumeau jouent Dürrenmatt
à l'Atelier", Michel Cournot, Le Monde, 13 septembre 1986.
Et les récits ou les romans ?
"Un roman ne m'intéresse que s'il affronte à la
fois des problèmes formels et les questions qui se posent à
l'intelligence humaine face au cosmos. Pour le dernier, Der
Auftrag, je suis parti des principes de composition du Clavecin
bien tempéré de Bach et j'ai construit vingt-quatre phrases,
de plus en plus longues, qui forment les vingt-quatre chapitres du roman.
Et j'ai traité une question qui relève de la théorie
de la connaissance." (Le
Monde du 15 décembre 1990).
La Panne, préface et postface
- préface
à la pièce radiophonique de la traductrice Hélène
Mauler
- postface
au récit où il est précisé que le terme
désignant en allemand le tribunal (Gericht) signifie
aussi mets... par Wilfred
Schiltknecht, spécialiste de la littérature alémanique.
La panne : la traduction ?
La mise en relation suivante interroge sur la traduction
du récit que nous avons lue (une seule traduction de La
panne existe en français, celle parue chez Albin
Michel en 1958) : voir cette comparaison texte
original/traduction mot à mot/traduction d'Armel Guerne
La panne :
les dessins de Dürrenmatt
Dürrenmatt dessinait (1000 uvres conservées).
Voici quatre personnages représentés par Dürrenmatt
:
Wucht (force), Zorn (colère),
Kummer (chagrin), Pilet
Dessins de la collection
privée de Dürrenmatt
reproduits dans Le théâtre de Friedrich Dürrenmatt
: de la satire au grotesque
de Philippe Wellnitz, Presses universitaires de Strasbourg, 1999
Des repères sur l'auteur et ses
uvres majeures
- Friedrich Dürrenmatt naît en 1921 dans le canton de Berne.
Fils de pasteur, il est le petit-fils
d'Ulrich Dürrenmatt, célèbre satiriste, poète
et politicien bernois, dont il conserve l'esprit provocateur. De son grand-père,
il dira : "Mon grand-père a été envoyé
en prison pendant dix jours
à cause d'un poème qu'il avait écrit. Je n'ai pas
encore été ainsi honoré. Peut-être est-ce ma
faute, ou peut-être le monde a-t-il tellement périclité
qu'il ne se sent plus offensé lorsqu'il est sévèrement
critiqué." (voir son
autoportrait...)
- A partir de 1941, études de littérature allemande
et philosophie ; en parallèle, il dessine et peint ; il interrompt
ses études pour devenir écrivain.
- Il s'essaie à la dramaturgie en s'inspirant de Brecht, Kafka
et de Lessing
; à 24 ans, il écrit sa première pièce de
théâtre Les
Fous de Dieu, qui provoque un scandale en 1947.
- Il cherche à gagner sa vie comme écrivain et écrit
des nouvelles, des romans policiers (sous forme de feuilletons dans les
journaux), et des pièces radiophoniques pour subsister, mais sans
renoncer à écrire des pièces de théâtre.
- Son premier roman, Le
Juge et son bourreau (1951), utilise un schéma de récit
policier pour poser des questions existentielles. Viendront ensuite Le
soupçon (1951),
La Panne (1956), La
Promesse (en 1958) avec pour sous-titre "Requiem pour le
roman policier"...
- En 1952, il s'installe à Neuchâtel,
dans sa maison du Pertuis-du-Sault où il restera jusqu'à
la fin de sa vie. Il perce, en 1952, avec la comédie
Le Mariage de Monsieur Mississippi dans laquelle il commence à
trouver son propre style théâtral (la comédie sombre
pour exposer la nature grotesque de la condition humaine) et devient célèbre
en Allemagne.
- En 1956, il atteint pour la première fois un public international
avec La
Visite de la vieille dame. La pièce est montée,
entre autres, à New York (par Peter Brook), Milan (par Georgio
Strehler), Londres et Paris et reçoit de nombreux prix ; elle
donnera lieu également à de nombreuses adaptations cinématographiques.
- En 1962, en pleine guerre froide, il publie la pièce qui deviendra
un grand classique Les
Physiciens, où il
soulève la question de la responsabilité politique des scientifiques.
En 1966, il connaît également
le succès avec une autre pièce de théâtre,
Le
Météore.
- Dans les années 1970 et 1980, Dürrenmatt
donne de nombreuses conférences devant un public international.
Il visite les États-Unis, Israël, la Pologne et le camp de
concentration d'Auschwitz. Il écrit des essais : sur Israël
en 1975, sur Albert Einstein en 1979, un recueil de textes mêlant
philosophie, autobiographie et fiction en 1981.
- Les uvres de Dürrenmatt ont été traduites dans
plus de quarante langues.
Par ailleurs...
- En 1946, il se marie avec l'actrice
Lotti Geissler, avec qui il aura trois enfants. En 1983, sa femme meurt,
et l'année suivante, il épouse l'actrice, réalisatrice
et journaliste Charlotte Kerr. Il meurt en 1990 à Neuchâtel.
Mais Dürrenmatt avait souvent annoncé sa mort, ayant déjà
subi une série de crises cardiaques. Quand il créa une fondation
apparemment "prématurée", avec à sa tête
sa future veuve, Charlotte Kerr, il répondit de sa manière
goguenarde en ricanant, sur le pourquoi de cette fondation "prématurée" :
"Ah, vous savez, quand on a eu déjà quelques infarctus
comme moi, il faut bien se préparer gentiment à débarrasser
le plancher
"
- Et donc, ouvre en 2000 le Centre
Dürrenmatt Neuchâtel, consacré non seulement à
son uvre littéraire mais aussi à son uvre picturale,
moins connue du public (1000 uvres).
- En effet, dramaturge
mondialement reconnu, Dürrenmatt était également peintre.
A peine étudiant, Dürrenmatt écrit à son père
: "Il ne s'agit pas de décider si je vais devenir un artiste
ou non, car cela ne se décide pas, on le devient par nécessité (...)
Pour moi, le problème est ailleurs. Dois-je peindre ou écrire
? Je me sens appelé par les deux." Bien qu'il décide
alors de faire de l'écriture sa profession, Dürrenmatt continuera
à dessiner et à peindre durant toute sa vie : "Par
rapport à mes uvres littéraires, mes dessins ne sont
pas un travail annexe, mais des champs de bataille, faits de traits et
de couleurs, où se jouent mes combats, mes aventures, mes expériences
et mes défaites d'écrivain" écrit-il en
1978, en introduction au premier volume illustré de ses uvres.
La plupart du temps, les illustrations n'ont qu'un rapport ténu
avec ses textes. Elles représentent des thèmes mythologiques
et religieux comme le Labyrinthe et le Minotaure, la Tour de Babel ou
la Crucifixion. Il a été influencé par l'expressionnisme,
ainsi que Bosch, Brueghel, Piranèse, Goya ou le peintre suisse
Willy
Guggenheim dit Varlin, qui a fait plusieurs portraits de lui (par
exemple celui-ci
de 1962).
Quelques articles
- "En
guise de portrait" : un autoportrait extrait d'Écrits
sur le théâtre, de Friedrich Dürrenmatt, Gallimard,
1970.
- "Le labyrinthe
de Friedrich Dürrenmatt", Jacques Le Rider, Le Monde,
13 septembre 1982 : une savoureuse et éclairante interview.
- "La visite
à Friedrich Dürrenmatt", Michel Contat, Le Monde,
19 septembre 1986 ; dans cet article, Michel Contat, en visite donc chez
l'écrivain, évoque Apostrophes
du 18 janvier 1985 avec Robbe-Grillet, Philippe Sollers (qu'on peut
voir ICI,
7 min) :
Quant aux téléspectateurs, ils ont
vu, lors d'un mémorable Apostrophes, une sorte d'Orson Welles
alémanique observer d'un il narquois ou simplement incrédule
ces deux numéros que sont Philippe Sollers et Alain Robbe-Grillet,
et emporter le morceau par des silences bourrés de sens. Si vous
lui rappelez cette émission, il dit placidement : "Le premier,
comment l'appelez-vous, était ridicule avec ses vantardises à
propos des femmes. Robbe-Grillet est plus malin. Si français !
Mais qui donc voudrait perdre son temps à regarder une telle émission
?"
- "Dürrenmatt,
écrivain dehors, peintre dedans", Isabelle Eichenberger,
Swissinfo, 31 août 2015.
Friedrich Dürrenmatt avec son perroquet Lulu, 1979,
photo : Peterhofen/Stern
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