Tanguy Viel
Extrait du blog Enfin livre !

Quatrième de couverture :

"Pour avoir jeté à la mer le promoteur immobilier Antoine Lazenec, Martial Kermeur vient d'être arrêté par la police. Au juge devant lequel il a été déféré, il retrace le cours des événements qui l'ont mené là : son divorce, la garde de son fils Erwan, son licenciement et puis surtout, les miroitants projets de Lazenec.
Il faut dire que la tentation est grande d'investir toute sa prime de licenciement dans un bel appartement avec vue sur la mer. Encore faut-il qu'il soit construit."

Tanguy Viel
Article 353 du code pénal (2017)

Nous avons lu ce livre en novembre 2018.
Le nouveau groupe le lira en juin 2019.

Quelques repères sur les publications de l'auteur, des interviews et le point sur... l'article 353 en bas de page. Voici nos 22 avis parisiens et bretons :

Annick-Christian-Denis-Édith-Françoise-Manuel-Marie-Claire-Monique
¾: Annie-Brigitte-Chantal-Cindy-Jacqueline-Séverine
½ : Etienne-Marithé-Richard-Suzanne
¼ : Claire-Fanny-JeanNathalie

Nathalie
Quand j'ai commencé à lire ce livre, surtout les premières pages, j'ai été emballée et je me suis dit que j'allais le lire dans la journée. Et puis, peu à peu, j'ai commencé à ralentir ma lecture et j'ai réalisé au fil des jours qui passaient que je commençais à m'ennuyer ferme et que j'avais bien envie de lire autre chose que cette chronique désespérante d'un homme qui se fait avoir par un escroc.
Au moment où je vous écris, j'en suis à la page 112 et mes pieds ne veulent plus avancer. Tout m'ennuie : l'écriture, la réflexion du personnage, son absence d'énergie, les descriptions du paysage, l'absence d'intrigue, son acte absurde qui ne semble pas correspondre à l'homme qu'il était, et plus que tout ce juge en contre-jour.
Ce ressort tragique qui se déroule sans que rien ne vienne s'interposer m'épuise et je trouve ça d'une tristesse crasse. Je n'aime pas la littérature sombre dont je ne comprends pas le projet. L'écriture à la première personne comme tentative de transcription de la pensée ne fonctionne pas pour moi. L'huis-clos est peu efficace. Je n'ai pas eu envie d'y entrer. On fait tous des erreurs que l'on paie parfois très cher. De là, à tuer un homme, je pense que le pas est franchi trop facilement dans l'imagination de l'auteur. Donc, je ferme complètement ce livre et j'attends les remarques enthousiastes avec circonspection !
Séverine
Je ne serai pas parmi vous ce soir. J’ai lu le livre il y a quelques mois déjà. J’en garde un très bon souvenir. J’ai beaucoup aimé cette histoire très ancrée dans la vraie vie. Cela pourrait arriver à tout le monde de vouloir se venger quand on a ainsi été berné. Le style oral est très vivant… on glisse dans le récit comme sur de l’eau. Il y a un petit côté Plein soleil dans le crime, chabrolien aussi sur le côté sociologique et le dérapage qui arrive si vite, et bien sûr simenonien (je sais, encore lui… mais le récit au juge, il l’a fait aussi). Ce roman pourrait facilement être adapté au cinéma. Et quel article de loi plein de justice ! Je l’ouvre aux ¾.
Jacqueline
Le livre m'a beaucoup plu. Le début est glaçant. J'ai aimé la voix de cet homme. Il lui arrive des choses terribles, c'est dans la vie actuelle, c'est notre monde (l'arsenal qui ferme). C'est une voix très populaire, celle d'un homme banal, et qui a un regard, des images, une pensée extraordinaire. Une voix populaire qui réfléchit, ça fait plaisir, qu'un écrivain montre cela. L'histoire m'a touchée, avec la déception des socialistes, c'est bien décrit. Je n'ai pas tout compris du rapport avec le juge.

Annick L
C'est visiblement le juge d'instruction ici, on n'est pas encore au tribunal. C'est d'ailleurs un article non pas du code pénal, mais du code de procédure pénale.

Jacqueline
D'accord.
Denis
J'ai beaucoup aimé. Mais à un certain point, trop c'est trop : j'ai alors quitté ce livre pour lire du Jane Austen, et je suis revenu ensuite vers le livre : c'est une prose fantastique, c'est du grand art. J'ai lu son interview dans Paris-Match. J'avais un préjugé contre Tanguy Viel. J'ai relu L'Absolue perfection du crime qui m'a à nouveau déçu. C'est un auteur super intelligent. Il écrit à la première personne, et il dit qu'ainsi, ça le fait changer de personnage. Ici le personnage est un peu artificiel par son langage d'ouvrier de l'arsenal peu plausible. De même pour le ticket de loto. J'ai été pris par cette prose. J'ai aimé le début. Chaque mot est à sa place, bien agencé. C'est du grand art. J'ouvre en grand. C'est du niveau pour moi du Voyage au bout de la nuit.
Claire
En janvier dernier, parce que le nom de cet auteur avait été cité avec intérêt dans le groupe, je me suis rendue à une rencontre avec l'auteur, intéressante, à la librairie Compagnie, j'ai discuté dans la queue des dédicaces avec une amie de classe de l'auteur fana de son œuvre, qui m'a dit qu'il vivait de son écriture (c'est rare !), je confirme qu'il est beau... En pensant au groupe qui préfère les poches et sur les conseils du libraire, j'ai acheté son roman précédent, La Disparition de Jim Sullivan, qui ne m'a pas beaucoup plu : le narrateur qui veut écrire un roman américain va aux USA pour ce faire… Je n'ai donc pas soutenu à grands cris le choix de l'auteur, mais j'étais contente de lire cet autre roman qui a apparemment eu du succès.
J'ai trouvé le premier chapitre formidable en termes d'action. Et le début du livre m'a tenue par son suspense. Mais… D'une part, j'ai très vite pensé à Echenoz (dont nous avons lu plusieurs livres), par le mélange d'oralité calculée et de maîtrise visible, comme "affichée": avec en plus le jeu avec le code du polar, "ça fait" éditions de Minuit, c'est l'impression que j'ai eue. D'autre part je me suis lassée, j'ai trouvé ça long (alors que le livre est court), j'ai même sauté des paragraphes car pas grand chose ne se passait et les relations père/fils ne me passionnaient pas.
Mais surtout surtout surtout, il s'est passé la même chose pour moi que pour le livre d'Enquist lu pour notre dernière séance ; pour un roman, il faut que "le pacte avec le lecteur" marche : pour Enquist, je n'ai pas suivi la romancière qui nous emmène dans des monologues intérieurs et dialogues de personnages qui ont vraiment existé, ce qui m'a gênée en permanence. Ici le monologue au juge constituant le livre de 170 pages – l'adresse au juge est régulièrement rappelée – m'a semblé invraisemblable et ce choix de narration m'a fait en permanence décrocher : j'y crois pas à ton discours ! S'il avait supprimé le destinataire, s'il n'avait pas parlé au juge, tout aurait changé pour moi. J'ouvre ¼.
Monique L
Le titre de ce livre ne m'attirait pas vraiment, ce qui fait que je ne m'y serais sans doute pas intéressée si cela n'avait pas été un choix du groupe. Cela aurait été une erreur et je remercie celles et ceux qui m'ont amenée à le lire. Je n'avais rien lu de Tanguy Viel.
J'ai vraiment été happée et impressionnée par ce livre. C'est un huis clos rendu vivant par le style. Un récit remarquable. J'ai été saisie par le mode d'expression puissant de l'accusé, ses métaphores, ses images. Le langage est foisonnant et tellement captivant. C'est ce qui m'a le plus impressionnée dans ma lecture. Toute la puissance, toute la force du livre est dans cette expression.
La construction du récit est très efficace. Les informations nous sont données petit à petit, ce qui crée un suspens qui pour moi a bien fonctionné. On épouse totalement les méandres de la pensée de Kermeur qui peu à peu invite le juge et donc nous, à partager son univers, ses pensées, ses convictions et le mécanisme qui l'a amené implacablement au drame. Martial Kermeur est un homme bouleversant, il se livre sans détour. Cette confession est profondément émouvante, et d'une admirable densité. Avec une évocation de la Bretagne minée par le chômage et le gros temps, la Bretagne des petites gens, des hommes rudes, des taiseux.
Je ne sais pas s'il est fréquent que des juges se comportent comme celui de ce roman. Cela n'a guère d'importance en ce qui concerne mon jugement sur ce roman, mais cela fait chaud au cœur. J'ouvre ce livre en entier.
Manuel
J'ai adoré, je ne me suis pas ennuyé du tout. Du coup j'ai lu deux autres livres de cet auteur que j'aime beaucoup : Paris-Brest et La Disparition de Jim Sullivan. Il nous amène à un point où on est content de voir ce type tomber à l'eau. J'adore cette prose, même si c'est improbable. Mais l'art ne doit pas forcément reproduire la réalité. Une œuvre d'art doit être complètement fabriquée.

Claire
Bien sûr, mais il faut qu'il emporte en nous faisant marcher, sinon on le lâche.

Manuel
Les objets ont une vraie présence, par exemple la maquette. C'est très bien rendu. La vie surgit. J'ouvre 3 fois en grand ! Il commet un crime et on a une jouissance à aller voir le commettre. C'est formidable, remarquable.

Richard
Je ne connaissais pas cet auteur. J'ai regardé ce qu'est l'article 353. Ce livre est un produit de littérature et de marketing très réussi, avec le début accrocheur. Ensuite c'est un peu long car on connaît déjà le crime. Avec la construction du livre, divers éléments sont apportées au fur et à mesure. C'est de la fiction, mais ce n'est pas crédible. Cela existe-t-il ? Qui achète sur plan ?

Plusieurs
Moi ! Moi ! Moi !
Richard
C'est un escroc et personne n'a réagi, le narrateur est un lâche, il ne fait rien. Ce qui m'a plu, c'est l'usage des métaphores utilisées. Mais le long monologue est lassant. J'ai aimé l'analyse des rapports entre le père et le fils. J'ouvre à moitié.
Françoise
Je l'avais déjà lu et avais un peu oublié. J'ai voulu le reparcourir, mais en fait je l'ai relu en entier car j'ai été à nouveau accrochée : j'ai plus aimé à la deuxième lecture. J'aime bien ce type de construction comme dans Chronique d'une mort annoncée, où on connaît la fin et on retricote, j'ai beaucoup aimé. Un ouvrier de l'arsenal parlera-t-il comme cela ? J'avoue que le stéréotype a joué pour moi. Mais il a une culture syndicale. J'ai apprécié l'écriture. Il y a le loto, l'industrie qui se meurt, le divorce. J'ai aimé la relation avec son fils, l'histoire de la nacelle. Son geste s'explique par rapport à son fils. Il y a aussi de l'humour. J'ouvre en grand.
Fanny
J'ai adoré le premier paragraphe. Quelle accroche ! Mais rapidement, je me suis ennuyée profondément. Heureusement que le style est accrocheur et m'a permis d'aller jusqu'au bout. Je n'ai ressenti aucune empathie pour le narrateur, c'est totalement construit. C'est le monologue d'un loser. Il a "failli" gagner au loto ! C'est typique d'un loser. Le crime est-il prémédité ? Pour moi, ce n'est pas un stratège. Si je n'ai pas eu d'empathie avec le narrateur, j'ai eu de la sympathie pour le juge, c'est le personnage le plus intéressant pour moi. J'ai pensé à Echenoz, très construit, creux. J'ouvre ¼.
Etienne, entre et
Article 353 du code pénal est un livre qui m’a globalement bien plu même si j’émettrai quelques réserves. Pour commencer, j’ai été assez rapidement happé par le style assez nerveux. L’écriture est intense, introspective, utilise des phrases sinueuses mais percutantes. Elle donne l’impression d’une plaidoirie déclamée dans une sorte d’urgence d’un homme qui nous envoie sa tragédie en pleine figure. J’ai donc lu ce récit presque d’une traite, sans ressentir de l’ennui à aucun moment contrairement à certains. Enfin, la séduction de la langue a opéré sur moi, je retiens de sublimes métaphore comme celle de la page 98 : “Peut-être que la mémoire ce n'est rien d'autre que ça, les bords coupants des images intérieures, je veux dire, pas les images elles-mêmes mais le ballottement déchirant des images à l'intérieur de nous, comme serrées par des chaînes qui les empêchent de se détacher, mais les frottements qui les tendent et les retiennent ça fait comme un vautour qui vous déchire les chairs, et qu'alors il n'y a pas un démon ou un dieu pour vous libérer, le supplice peut durer des années.
(Pendant qu'Etienne lit cet extrait du livre, Brigitte lit son propre papier où elle a elle aussi noté et recopié cette phrase...)
Cependant je n’arrive pas à me délaisser d’une impression de superficialité, de factice, un peu comme si la virtuosité de l’écriture dépassait les personnages. Comment croire qu’un homme avec autant de lucidité, qui arrive à analyser ses émotions de façon si juste, puisse arriver à se faire berner à ce point (une station balnéaire à Brest ?) ? C’est ce qui me laisse le sentiment que l’écrivain a créé ses protagonistes et leur fait dire ce que lui aurait pensé à leur place sans qu'ils aient leur existence propre. C’est un peu comme si je voyais les fils du spectacle de marionnettes… J’ai aussi pensé à un beau roman publié en 2017 par Sorj Chalandon (Le jour d'avant), qui utilise un peu le même procédé, le style en moins, mais l’originalité du dénouement en plus.
J’ouvre donc entre moitié et ¾ et je pense revenir de nouveau par curiosité vers cet auteur.
Brigitte
Je ne connaissais pas du tout cet auteur. Son livre m'a beaucoup intéressée, malgré un titre que je trouvais rébarbatif. Je n'avais pas envie de lire un livre de droit, ni une polémique sur la justice.
En fait, il ne s'agit absolument pas de cela, mais plutôt d'une réflexion sur ce qu'est l'intime conviction pour celui qui rend la justice.
L'histoire en elle-même n'est pas vraiment originale, c'est la façon de l'aborder qui fait la qualité du livre. Selon moi, on peut y voir une façon de traiter le problème du mal, qui arrive sans qu'on y prenne garde, qui se répand partout provoquant des drames gravissimes, toujours de façon sournoise, sans jamais perdre son apparence de “normalité”.
J'ai beaucoup aimé l'écriture, l'usage des mots qui rebondissent sur les objets, le paysage, la lumière… en leur donnant une dimension active dans les échanges entre les protagonistes.
Comme Etienne, je voulais citer la phrase sur la mémoire : “Peut-être que la mémoire ce n'est rien d'autre que ça, les bords coupants des images intérieures, je veux dire, pas les images elles-mêmes mais le ballottement déchirant des images à l'intérieur de nous, comme serrées par des chaînes qui les empêchent de se détacher, mais les frottements qui les tendent et les retiennent ça fait comme un vautour qui vous déchire les chairs, et qu'alors il n'y a pas un démon ou un dieu pour vous libérer, le supplice peut durer des années.(p. 98). J'ouvre aux ¾.
Annick L (qui a proposé le livre)
J'aime beaucoup beaucoup cet auteur qui dit s'inspirer d'Echenoz - même si son style est différent, tout à fait reconnaissable. J'ai lu plusieurs livres de Tanguy Viel, dont le premier, Le Black Note, où j'avais été saisie par son style, épuré et rythmé, comme un air de jazz (mais aussi, plus récemment Paris-Brest, assez sombre et déprimant).
Ce roman est mon préféré car il est vraiment incarné, plongé dans le réel, et très visuel. On ne s'ennuie jamais car l'évocation des scènes et du contexte, très efficace, permet d'entrer rapidement dans l'histoire. En plus cette fable sociale m'a beaucoup émue. Je me suis attachée à cet anti-héros, ce loser qui n'a que son fils pour se rattacher à quelque chose. Cette histoire dépasse largement le contexte de cette petite ville de Brest en pleine deshérence, il suffit d'écouter les infos ! Elle est aussi à hauteur humaine, grâce à l'écoute et à l'attitude bienveillante du juge (on dirait presque un psy). Les deux premières pages sont saisissantes, comme dans un bon polar ! Du coup le lecteur sait tout sur ce crime. Il peut s'intéresser au parcours de ce malheureux, à cette lente descente aux enfers qui va être racontée par le narrateur. Fort heureusement il y a, au fil du récit, une bonne dose de détachement et d'humour. J'aime ce recul chez Tanguy Viel, qui permet d'échapper au mélodrame. Autre plaisir : plus on fait connaissance avec le personnage cynique et manipulateur du promoteur immobilier, plus on se réjouit de la vengeance que lui a réservée sa victime.
Effectivement la fin est assez peu crédible, mais ce n'est pas grave et je me laisse volontiers emporter par ce happy end. Pour la soirée j'ai relu le livre avec grand plaisir en dégustant l'écriture et les échappées fréquentes sur le paysage, le ciel, les oiseaux qui donnent un peu de souffle à ce huis clos. J'ouvre en très grand. Last but not least, j'ai découvert que l'auteur est un très bel homme, qui sait défendre son œuvre avec talent… ce qui ne gâche rien.

Discussion ensuite sur les modifications de l'article 353 de procédure du code pénal par l'auteur, qui sucre d'abord cette phrase incluse dans l'article : "Avant que la cour d'assises se retire, le président donne lecture de l'instruction suivante, qui est, en outre, affichée en gros caractères, dans le lieu le plus apparent de la chambre des délibérations"
Soit ! L'auteur omet les mots en rouge pas anodins :

L'article reproduit entre guillemets dans le livre, cité par le personnage du juge
La loi ne demande pas compte à chacun des juges
composant la cour d'assises des moyens par lesquels ils se sont convaincus,
elle ne leur prescrit pas de règles desquelles ils doivent faire particulièrement dépendre la plénitude et la suffisance d'une preuve ; elle leur prescrit de s'interroger eux-mêmes dans le silence et le recueillement et de chercher, dans la sincérité de leur conscience, quelle impression ont faite, sur leur raison, les preuves rapportées contre l'accusé, et les moyens de sa défense. La loi ne leur fait que cette seule question, qui renferme toute la mesure de leurs devoirs : "Avez-vous une intime conviction ?". 
Le "vrai" article
Sous réserve de l'exigence de motivation de la décision, la loi ne demande pas compte à chacun des juges et jurés composant la cour d'assises des moyens par lesquels ils se sont convaincus,
elle ne leur prescrit pas de règles desquelles ils doivent faire particulièrement dépendre la plénitude et la suffisance d'une preuve ; elle leur prescrit de s'interroger eux-mêmes dans le silence et le recueillement et de chercher, dans la sincérité de leur conscience, quelle impression ont faite, sur leur raison, les preuves rapportées contre l'accusé, et les moyens de sa défense. La loi ne leur fait que cette seule question, qui renferme toute la mesure de leurs devoirs : "
Avez-vous une intime conviction ?".

Jacqueline, avec un argument implacable
C'est le narrateur qui a fait la modification et pas l'auteur.

Claire, après la soirée
- Sur l'impression d'ARTIFICE chez le lecteur : à propos de son livre Cinéma, Tanguy Viel dénonce lui-même ses artifices (il en fera peut-être autant plus tard pour ce livre...) : "Il faut dire que Cinéma m'a un peu coincé dans mon travail. C'était presque une impasse, dans la mesure où il y avait un principe formel très fort : j'avais fini par radicaliser inconsciemment l'idée que l'écriture n'était que de la mise en scène et que le scénario, on s'en fichait. J'ai écrit alors quelque chose qui tournait un peu à vide, parce que j'étais dans l'idée d'une écriture dont la chair, la consistance, n'importait pas : c'était très mauvais !" (à Marie-Laure Delorme, Le Journal du Dimanche, 26 août 2001)
- Sur les CODES, Tanguy Viel n'est pas content : "Je n'aime pas qu'on dise que je joue avec les codes. Je n'ai aucun code, je n'ai jamais lu de polar, je crois que j'ai simplement un imaginaire très enfantin, avec des revolvers, de l'argent, des bandits et des escrocs. Dans chaque livre, je travaille avec des scènes presque matricielles qui m'habitent depuis que je suis gosse. Je ne programme rien." (David Carzon, Libération, 7 janvier 2017)
- Sur un STYLE MINUIT : une thèse pose justement la question : Peut-on encore parler d’un style-Minuit à l’orée du XXIe siècle (Éric Chevillard, Éric Laurrent, Laurent Mauvignier, Marie NDiaye et Tanguy Viel) ? (Mathilde Bonazzi, Université de Toulouse II, 2012, 666 p.) ; la réponse est oui : "Ainsi, une analyse approfondie de la ponctuation, la syntaxe et l’énonciation permet de dégager non seulement la singularité langagière de chaque écrivain mais aussi les convergences de pratiques stylistiques qui définissent bien un style collectif Minuit." Des "travers" de Tanguy qui apparaissent en parcourant la thèse réjouissent la non fan que je suis...

 

Synthèse des 9 AVIS DU GROUPE BRETON, réuni le 8 novembre, rédigée par Marithé, suivie de quelques avis détaillés

Christian, Édith, Marie-Claire¾ : Annie, Chantal, Cindy
½ : Marithé, Suzanne
¼ : Jean

Beaucoup de louanges, pour cet ouvrage qui n'a laissé personne indifférent.

  • Des lecteurs élogieux ont parlé d'un livre remarquable, d'un grand texte littéraire, ont noté la précision du vocabulaire, y ont vu un livre humaniste, d'une grande sincérité.
    Autres caractéristiques entendues : livre politique, "roman politique" même, confession, thriller, roman noir faisant penser à Georges Simenon...
    C'est théâtral. À noter aussi toutes ces pages sur l'espace donnant des plans cinématographiques.
    Certains ont pensé à un travail chez l'analyste.
    Au rendez-vous pour beaucoup : émotion, compassion pour des personnages au portrait si bien brossé, délicatesse, dans une construction superbe, plaisir de lecture paraissant avoir culminé chez Marie-Claire qui a dit : "j'ai adoré"...
  • Parmi nous, d'autres ont regretté ne pas avoir été si surpris par le juge à la fin.
    Jean s'est un peu ennuyé avec ce Martial Kermeur qui ne comprend pas. Suzanne a trouvé peu d'intérêt à ce livre, a évoqué une psychologie de bazar, et... ne faut-il pas "désherber les consciences" (!)

Voici un aperçu de notre cheminement dans les méandres d'une intrigue, jusqu'au coup de théâtre final, où "ouf" a remplacé "plouf" (pas terrible, mais facile).
En fait nous n'avons pas vraiment emprunté un chemin : nous étions presque tous en immersion – ce mot est en effet souvent revenu...
Christian
Quelques remarques à propos du livre de Tanguy Viel. Cet écrivain s'intéresse aux vies fracassées, de celles sur lesquelles s'acharne la fatalité. Martial Kermeur, ancien ouvrier de l'Arsenal licencié est une sorte de "vie minuscule" qui commet un meurtre malgré lui peut-être pour en finir avec l'humiliation qu'il subit.
Une sorte de revanche sur un destin qui ne lui a jamais souri. Licenciement de l'Arsenal, puis divorce difficile, un fils Erwan tout aussi frustré que Martial et, pour ancrer le malheur, cette mauvaise rencontre avec Lazenec, promoteur, escroc, menteur et manipulateur, sont les jalons de l' existence de Martial au destin brisé.
Celui-ci mais aussi Le Goff, le maire du village ainsi que d'autres victimes vont se laisser entraîner dans ce projet mythique d'une "station balnéaire" qu'agite ce sinistre Lazenec qui vient à point nommé investir les rêves de ceux qui, crédules, n'ont plus rien ou pas grand chose.
C'est aussi un livre sur le paysage Brestois, gris, au ciel changeant comme la mer opaque. Une écriture précise, économe à la Simenon nous entraîne progressivement dans ce thriller jusqu'au dénouement inattendu.
Le juge, personnage tout aussi capital, écoute attentivement le récit de Kermeur, et l'amènera peu à peu, tel un analyste méthodique, à renouer les fils épars de son existence afin de comprendre l'enchaînement des circonstances qui vont mener Kermeur au meurtre assumé.
Ce juge contredit par la surprenante conclusion du livre, la fameuse phrase de Malraux : "juger c'est ne pas comprendre".
Dans ce livre Tanguy Viel démontre que juger c'est comprendre et qu'au delà du respect dû à la loi existe cette fameuse "intime conviction" (article 353 du Code pénal) qui emporte la rédemption de Kermeur.
Un style efficace, aux phrases courtes, déroule un roman profondément humaniste, roman "cinématographique", qui devrait peut-être susciter l'intérêt d'un cinéaste.
Un film en noir et blanc, bien sûr !
Marie-Claire
Comment faire l'éloge de ce livre sans dire que je l'ai adoré ? Déjà le lieu du déroulement de l'histoire : Brest, une ville qui me tient à cœur, la Bretagne ! mon pays !!! Comment un tel récit dramatique peut susciter l'enthousiasme ?
J'ai aimé le ton de l'auteur, nous situant en tant qu'oreille, nous introduisant dans la peau du juge qui reçoit ce récit. La progression, l'enchaînement des situations, des événements, le récit des manipulations, font monter et ressentir les questionnements que peuvent avoir les juges, le rôle et la mission qu'ils doivent remplir. Tout au long de ce récit, de cette histoire qui se construit pour aboutir à l'aveu définitif, cette écoute attentive, humaniste, presque analytique, nous amène à espérer que le juge agisse en faveur de Martial Kerneur, ce taiseux breton, brisé dans sa vie, dans son histoire familiale : femme, enfant, travail, argent.... L'adition des catastrophes qu'ils ont subies pousse et engendre la colère chez son fils Erwan. De plus la mort du Maire M. Le Goff déclenche chez lui la nécessité d'agir devant ce qu'il analyse comme la lâcheté de son père !…
Ce récit, en huis clos, superbement construit, la montée de nos émotions, de notre écœurement vis-à-vis de ce truand Lazenec, qui écrase, vole et méprise sans aucun état d'âme.
Un truand "embrasseur" enjôleur, mielleux, comme on en a pas mal vu en Bretagne, dans nos zones rurales après les années 60 !… Ils ont bien profité de la gentillesse et de la "niaiserie" bretonne, certains promoteurs.
Une fiction proche de la réalité !!!… Un juge et un article fort à propos !!!
Marithé
Livre lu en juillet 2017 et pour le moment sans relecture (je n'aime ni relire, ni revoir un film). Je garde donc le souvenir d'un bouquin original, juste, réaliste aussi. J'avais l'impression d'être embarquée avec l'auteur dans un univers sombre et gris, aussi gris et monotone que Brest et sa rade, servant de cadre à l'intrigue. J'ai cru à tout ce qui est raconté dans ces pages, j'en ai aimé l'atmosphère, la progression ; j'étais en immersion (mais pas au stade d'Antoine Lazenec). Par moment, j'avais l'impression d'être dans un documentaire.
Je retiens le portrait de ce promoteur, véritable prédateur, sans scrupules évidemment, ayant la faculté de prendre certains pour des imbéciles. Il détecte ses proies, des personnes humbles, qu'il considère comme inférieures et faibles, il sait les séduire... Personnage grotesque, vulgaire, se croyant à l'abri de tout. J'ai été à la fois effarée et... peu surprise. Mais pour rester dans un vocabulaire marin, céder au chant des sirènes ne va qu'un temps et je pense que n'arrive pas n'importe quoi à n'importe qui.
J'ai été sensible à la qualité de présence du juge, comme chez un analyste ; c'est Martial Kermeur qui grâce à cette écoute attentive aura défriché le chemin qui conduira au coup de théâtre final. Cet article 353 du code de procédure pénal appliqué ici, et que je ne connaissais pas, m'a à la fois soulagée et dérangée ; on n'est plus dans l'intime conviction puisque le juge connaît la vérité ; cette vérité pour moi reste en travers du chemin. Je comprends cependant tout à fait que Martial Kermeur en soit arrivé à ce drame. Ces pages m'ont amenée à réfléchir à la charge qui peut peser sur les épaules d'un juge, sa solitude, sa conscience. Je retiendrai aussi la présence de tous ces personnages "secondaires" : Erwan, le maire, et les autres, tous victimes d'un seul.
Je n'ouvre ce livre qu'à moitié car malgré la richesse de l'histoire, je n'ai pas du tout été séduite par l'écriture. Pour moi c'est un bon polar, original, mais pas un grand livre, ennuyeux souvent, et je le redis gris et monotone. Différent de ce qu'on lit habituellement dans le groupe, j'ai été surprise qu'il ait été choisi par Voix au chapitre.
Édith
J'ai lu en deux soirées ce roman. J'en ai relu ensuite et à haute voix les premières pages pour en entendre la force du propos à venir et que j'avais découvert. Propos précis mais qui se cherche dans les images pour dire. Martial Kermeur a SON langage, sa façon d'organiser les mots et les phrases. Il faut accepter (très rapidement pour moi) cette manière de "dire".
Déstabilisant est le récit minutieux et presque sans affect de la noyade de Le Goff. C'est l'acte salvateur pour Martial Kermeur… Martial Kermeur le héros qui parlera au juge tout le long de ce monologue. Juge très silencieux et accueillant par son calme. On découvre les protagonistes du drame au fur et à mesure des analyses souvent imagées (j'aime beaucoup…) qu'utilise Martial afin de nous révéler son geste (pousser hors du bateau Le Goff le promoteur véreux) et prendre cet acte totalement à sa charge… C'est un honnête homme, homme de gauche comme précisé dans le monologue. Sa vie était organisée autour de la garde du château, l'éducation de son fils Erwann, ses relations franches et amicales (bien que très réservées) avec ses concitoyens, sans haine ni désir de revanche malgré leur licenciement collectif). Un dédommagement leur a été attribué… Les codes de son milieu, Martial Kermeur, il les transgresse (achat d'un appartement sur plan) et reste lié honteusement à son promoteur manipulateur Le Goff. Son fils Erwan ne le supporte pas et agit par la destruction froide et vengeresse du Mary Fisher, le bateau de Le Goff et des autres bateaux arrimés au même port. Je comprends son geste par le récit de l'accident de manège : Erwann, 7 ans, tente de retenir de ses petites mains son père accroché au manège qui, pour l'aider à descendre, s'est vu embarqué en l'air du fait d'une remise en marche malencontreuse du manège… La marche arrière lui sauve la vie… Ce qui fera dire à Martial Kermeur lors de son arrestation et du récit de son geste que dans ce moment là "en temps normal il n'y a pas de marche arrière". Ni pour le meurtre, ni pour ce qui a précédé celui-ci, impossible pour Martial de se confronter vraiment à Lazenec… le geste violent de son fils le réveille et lui rend son honneur.
J'ai aimé chacun des personnages de l'univers de Martial Kermeur. France, sa femme, juste évoquée lors de leur rencontre au procès du fils : un lien de pudeur, pas de mots, seul un geste des mains qui se tiennent un peu plus longuement. Catherine, femme de Le Goff, impuissante à conjurer le désespoir honteux de ce dernier et la scène du cimetière. Le Goff, le maire trahi et cette rencontre la nuit de tempête, magnifique d'humanité par le secret dévoilé avec l'aide du whisky, la douleur partagée… "On a tous ses petits secrets", "tu t'es fait avoir aussi", "tu me l'as caché…", "J'ai ruiné la ville…"
Malgré ma répulsion liée à ma morale, le promoteur Lazenec est campé si justement dans sa veulerie et ses manipulations honteuses face à des hommes simples qui ne peuvent imaginer le scénario de la tromperie du fait de l'idée qu'ils se font de la puissance liée à l'argent. Il reste de longs mois dans une confiance à peine ébranlée.
On a le récit imagé de Martial Kermeur et de ces doutes et qui essaie de rentrer dans le cerveau de Lazenec. Ce jeu de dupe va se terminer par le meurtre du manipulateur Lazenec.
Ayant donné raison d'emblée à Martial Kermeur sur la suppression de l'individu Lazenec et bien que n'étant pas juge mais lectrice à parti pris : ce fameux ARTICLE 323 évoqué par le juge silencieux, juste dans les dernières lignes du roman, m'a apporté un soulagement.
UN ACCIDENT KERMEUR ? UN REGRETTABLE ACCIDENT…
C'est un livre que je vais prêter autant pour le fond que la forme de l'écriture.
Je suis allée chercher d'autres titres dont Insoupçonnable et je lis actuellement Le Black Note, son tout premier roman. Même parti pris de récit monologue pour Viel. Il donne aux acteurs du drame une syntaxe imagée et personnelle qui me fait entrer direct dans leur monde mental et y adhérer. A suivre La Disparition de Jim Sullivan.
GRAND OUVERT : double plaisir, forme et fond.

 

DOCUMENTATION
- Quelques repères biographiques
- Les publications de Tanguy Viel
- Des réactions au livre dans la presse, des interviews
- Et l'article 353 du code pénal ?

Quelques repères biographiques
- 1973 : naissance à Brest, enfance en Bretagne jusqu'à 12 ans
- 1998 : premier roman publié à 25 ans aux éditions de Minuit, Le Black Note
- 2002 : pour L'Absolue perfection du crime Prix Fénéon (qui récompense un jeune écrivain et un jeune peintre ou sculpteur de moins de 35 ans et dans une situation modeste) et Prix de la vocation (de la fondation Marcel-Bleustein-Blanchet pour aider un jeune romancier d'expression française âgé de 18 à 30 ans)
- 2003-2004 : Pensionnaire de la Villa Médicis
- Vit près d'Orléans.

Les publications de Tanguy Viel
- 1998 : Le Black Note, éd. de Minuit
- 1999 : Cinéma, éd. de Minuit
- 2000 : Tout s'explique : réflexions à partir d'Explications de Pierre Guyotat, éd. L'Inventaire/L'Invention
- 2001 : L'Absolue perfection du crime, éd. de Minuit ; Poche "double", 2006
- 2002 : Maladie, éd. L'Inventaire/Invention
- 2006 : Insoupçonnable, éd. de Minuit ; Poche "double", 2009
- 2009 : Paris-Brest, éd. de Minuit ; Poche "double", 2013
- 2009 : Cet homme-là, éd. Desclée de Brouwer
- 2010 : Hitchcock, par exemple, ill. Florent Chavouet, éd. Naïve ; intégré dans l'édition de poche : Cinéma suivi de Hitchcock, par exemple, 2018
- 2013 : La Disparition de Jim Sullivan, éd. de Minuit ; Poche "double", 2017
- 2017 : Article 353 du Code p
énal, éd. de Minuit.

Des réactions au livre dans la presse, des interviews
- Interviews de l'auteur à la sortie du livre (janvier 2017) :
Diacritik (3 janvier) : long entretien sur l'écriture
radio :
France Inter "L'heure bleue" de Laure Adler (24 janvier, 54 min)
vidéo : à la Grande Librairie (3 février, 16 min)
vidéo : sur RTL, le livre étant lauréat du Grand Prix RTL-Lire 2017 (20 mars, 24 min)
dans Paris-Match (ça change !) (16 avril)
- Portrait dans Libération mâtiné de propos de l'auteur, à la sortie du livre
- Revue de presse écrite sur le site des éditions de Minuit : ICI

Et l'article 353 du code pénal ?
Il s'agit plus précisément du code de procédure pénale. Tanguy Viel le cite ainsi :
« La loi ne demande pas compte à chacun des juges composant la cour d'assises des moyens par lesquels ils se sont convaincus, elle ne leur prescrit pas de règles desquelles ils doivent faire particulièrement dépendre la plénitude et la suffisance d'une preuve ; elle leur prescrit de s'interroger eux-mêmes dans le silence et le recueillement et de chercher, dans la sincérité de leur conscience, quelle impression ont faite, sur leur raison, les preuves rapportées contre l'accusé, et les moyens de sa défense. La loi ne leur fait que cette seule question, qui renferme toute la mesure de leurs devoirs : "Avez-vous une intime conviction ?". »

Il ne mentionne pas la phrase incluse dans l'article 353 qui précède : « Avant que la cour d'assises se retire, le président donne lecture de l'instruction suivante, qui est, en outre, affichée en gros caractères, dans le lieu le plus apparent de la chambre des délibérations ».

Et il ne tient compte qu'en partie de la modification par la loi qui a concerné cet article :
« Au début de la première phrase du second alinéa de l'article 353 du même code, les mots : "La loi ne demande pas compte aux juges" sont remplacés par les mots : "Sous réserve de l'exigence de motivation de la décision, la loi ne demande pas compte à chacun des juges et jurés composant la cour d'assises". » (Article 12 de la loi n° 2011-939 du 10 août 2011 sur la participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et le jugement des mineurs)

Article avant la modification :
« Avant que la cour d'assises se retire, le président donne lecture de l'instruction suivante, qui est, en outre, affichée en gros caractères, dans le lieu le plus apparent de la chambre des délibérations :
La loi ne demande pas compte aux juges des moyens par lesquels ils se sont convaincus, elle ne leur prescrit pas de règles desquelles ils doivent faire particulièrement dépendre la plénitude et la suffisance d'une preuve ; elle leur prescrit de s'interroger eux-mêmes dans le silence et le recueillement et de chercher, dans la sincérité de leur conscience, quelle impression ont faite, sur leur raison, les preuves rapportées contre l'accusé, et les moyens de sa défense. La loi ne leur fait que cette seule question, qui renferme toute la mesure de leurs devoirs : "Avez-vous une intime conviction ?". »

Article modifié en vigueur (qui n'est donc pas cité ainsi dans le livre, sorti 7 ans après la modification législative) :
« Avant que la cour d'assises se retire, le président donne lecture de l'instruction suivante, qui est, en outre, affichée en gros caractères, dans le lieu le plus apparent de la chambre des délibérations :
Sous réserve de l'exigence de motivation de la décision, la loi ne demande pas compte à chacun des juges et jurés composant la cour d'assises des moyens par lesquels ils se sont convaincus, elle ne leur prescrit pas de règles desquelles ils doivent faire particulièrement dépendre la plénitude et la suffisance d'une preuve ; elle leur prescrit de s'interroger eux-mêmes dans le silence et le recueillement et de chercher, dans la sincérité de leur conscience, quelle impression ont faite, sur leur raison, les preuves rapportées contre l'accusé, et les moyens de sa défense. La loi ne leur fait que cette seule question, qui renferme toute la mesure de leurs devoirs : "Avez-vous une intime conviction ?". »

C'est un détail, mais... l'expression passée sous silence "sous réserve de l'exigence de motivation de la décision" ne nuirait-elle pas à son coup de théâtre ?...

 


Nos cotes d'amour, de l'enthousiasme au rejet :

à la folie - beaucoup- moyennement - un peu - pas du tout
grand ouvert -
¾ ouvert - à moitié - ouvert  ¼ - fermé !

 

 

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