Klaus Mann
Le Tournant
Mephisto
Fuite au Nord
La danse pieuse
À travers le vaste monde
Le volcan

Nous avons lu Klaus Mann pendant l'été 2010.
Nous avions lu La mort à Venise en 1999 et choisirons à nouveau de passer un été avec un Mann, avec Les Buddenbrook en 2022.

Sabine
Je serai de tout cœur avec vous, en pensée, vendredi. Klaus Mann est un auteur que j'affectionne particulièrement. Je l'ai connu via le Capes (épreuve de version) avec Le Tournant (Der Wedepunkt) qui m'avait enchantée. La description du Berlin d'entre deux guerres est enlevée, palpitante. Mes lectures de K.Mann remontent à 1986-1990 environ, je n'ai donc rien de bien précis à dire si ce n'est que l'écriture me semblait riche, les émotions intenses. Pour finir, la vie de K.Mann est aussi fort passionnante et triste : celle d'un homme portant, de façon très lucide , le poids du père, du père-écrivain, de l'homosexualité, de l'horreur de la guerre. Son suicide est aussi tragique qu'inecluctable et fait penser à la destinée de Stefan Zweig.

Annick L
Je regrette sincèrement de ne pas être parmi vous pour cette soirée Klaus Mann. Je ne sais pas qui l'a choisi mais c'était vraiment une bonne idée. J'avais lu des œuvres de son père à l'époque de mes études germanistes mais rien du fils, une figure littéraire assez émouvante qui a été visiblement écrasée par l'ombre paternelle : c'est horrible ce que Thomas Mann écrit peu de temps après le suicide de son fils : "Il travaillait trop vite et trop facilement". Comment peut-il porter ce jugement définitif ?
Donc j'ai lu Le Volcan au mois d'août et j'en garde une impression mitigée : le parti-pris de se centrer sur la communauté allemande en exil est très intéressant, on suit le fil de l'ascension irrésistible d'Hitler de l'extérieur, par informations rapportées, en s'éloignant d'ailleurs de plus en plus, de l'Europe encore jusqu'aux USA. Passionnant aussi ce portrait de groupe d'exilés avec leurs sentiments contradictoires d'amour et de rejet, d'incompréhension, voire de haine, pour ce qu'est devenu leur pays. La plus belle image que j'en garderai est celle que Marion incarne à travers sa personne et ses mises en scène. Cette évocation du statut et des souffrances de l'exil est sans doute assez universelle (pour d'autres réfugiés politiques d'autres époques et d'autres pays). Cette fresque humaine est émouvante et très diverse.
Et puis Klaus Mann fait revivre aussi 6 années capitales dans l'histoire de l'Europe (montée du fascisme, guerre civile espagnole, lâcheté des autres pays...) avec leurs enjeux politiques, sociaux et humains. Quelques pages sont saisissantes : scènes en Espagne ou en Autriche lors de l'annexion par l'Allemagne. Dans ces moments-là on se sent emporter par un souffle et un lyrisme remarquables. J'aime beaucoup la métaphore du volcan...
Mais dans la mesure où l'on doit suivre jusqu'au bout le parcours de certains personnages, mon intérêt a connu quelques baisses de régime : tous ne sont pas aussi attachants et il y a des longueurs dans la composition d'ensemble qui donne une impression hétéroclite. Enfin j'ai été très agacée par les scènes avec l'ange. Là ça devient carrément baroque !
Mais je suis très heureuse d'avoir lu ce livre marquant, avec ses qualités et ses quelques enflures qui nous donne à voir, dans une sorte de dedans-dehors, la montée progressive en Europe de la barbarie fasciste.
Merci pour ce choix.
Manu
Je suis très content qu'on ait proposé une lecture de Klaus Mann. J'avais lu Méphisto et La danse pieuse il y a quelques années. J'ai eu la même expérience de lecture : des moments sublimes et des longueurs. Le Volcan raconte l'histoire des immigrants allemands à partir de 1933. Le récit s'étale jusqu'en 1939. L'arrière plan historique est passionnant. Le récit parfois se traîne avec beaucoup de discours théoriques politiques. Je me suis demandé ce qu'il faisait là l'ange. Je n'ai pas trouvé cet artifice narratif réussi. Je retiendrai du Volcan de bien belles pages mais pas l'ensemble.

Monique
J'ai lu 25 pages du Volcan. Ça ne m'intéresse pas à cause de l'écriture trop démonstrative et explicative. Ça me semble fabriqué. J'étais également happée par d'autres livres qui me plaisaient plus !
Claire
J'ai lu Le Tournant parce que Brigitte l'avait aimé. Je l'ai lu sans hésiter. Ça m'a fait penser au livre de Lanzmann Le Lièvre de Patagonie. Le bonhomme est extraordinaire et on traverse l'histoire. C'est époustouflant. L'auteur est parfois dans la mondanité mais à la page d'après c'est magnifique. Sidérants la famille, le milieu artistique. Passionnant l'anticonformisme tout en étant un grand bourgeois. Les relations parents-enfants, les lectures des uns et des autres... C'est passionnant. La liberté dans la relation frère-sœur... L'approche des arts est passionnante notamment avec Picasso. Ainsi que le parcours entier qu'il fait : sa sœur, l'exil, l'engagement dans l'armée américaine, son retour en Allemagne. L'aspect politique est passionnant car c'est du vécu, c'est un engagement sincère. On ne parle pas des Juifs ni des camps ou bien très peu. Tous les écrivains français sont évoqués. Ses liens avec André Gide sont étonnant. Il évoque Sartre très rapidement. Il est en même temps irresponsable, superficiel comme il le dit lui-même.
Françoise O+
J'ai lu Fuite au Nord en premier. C'est un beau récit. C'est l'histoire d'une Allemande qui fréquente des communistes mais qui décide de fuir vers la Suède. Les descriptions des paysages sont magnifiques. Il y a une scène d'amour belle et désespérée. Le sentiment du bonheur qui, dès qu'il est éprouvé, est déjà fini est très bien rendu.
J'ai également lu Le Tournant et je m'attendais à un livre sur la souffrance. J'ai sauté des chapitres... Mais à partir du chapitre X (1936) et l'exil, je n'ai pas lâché le livre. C'est une page d'histoire importante que je connaissais mal. Une Allemagne cultivée, dont je n'entendais plus parler dans le monde actuel. Klaus Mann est lucide quand il parle de la mort de Roosevelt : c'était l'homme qui pouvait faire la paix. Que va-t-il se passer ? Il a une intuition de ce qui va se passer après quand il est interprète, il parle aux prisonniers allemands c'est impressionnant. Pendant la libération de l'Italie il est en première ligne avec un porte-voix pour parler aux Allemands. L'entrée dans Munich... À la fin, c'est plutôt un journal et une série de lettres. C'est la réécriture d'un livre sorti aux USA. C'est un homme désespéré. Il parle très très peu de ses amours.

Françoise D
C'est quelqu'un de très antique.

François O
Son père est un personnage extraordinaire...
Jacqueline
J'ai lu des nouvelles qui ont été publiées à différentes périodes de sa vie en Allemagne et aux États-Unis. Il y a plein de sensibilité. Une des nouvelles raconte la vie d'une veuve avec 6 enfants ; un jeune homme arrive, c'est un ancien élève de son mari ; ce jeune homme se comporte magnifiquement avec ses enfants ; la mère est séduite, mais le jeune s'en va en la laissant enceinte de son septième enfant ; elle l'élève de façon heureuse et épanouie. Le jeune homme est un personnage très antique. L'écriture est très sensible et juste. Une autre nouvelle raconte l'histoire d'un jeune soldat dont on se moque : on l'appelle le professeur ; il veut être soldat mais il a du mal.
J'ai lu la Fuite au Nord que j'ai beaucoup aimé et qui a été publié en 1934 à Amsterdam et en allemand. Je suis très contente d'avoir lu des textes de cette époque que je connaissais mal. Je constate qu'il n'évoque que les camps de regroupement. C'est très intéressant de voir comment la jeune femme est déchirée entre cet amour qu'elle découvre et ce qu'elle quitte en Allemagne et qui la tourmente tant. Ce déchirement c'est dans le fond l'histoire des émigrés : il n'y a pas de bonheur possible.
J'ai commencé Le Tournant mais je n'ai pas eu le temps de finir pour ce soir. La première partie m'amuse beaucoup. Klaus Mann faisait du théâtre avec sa sœur. C'est un document sur la république de Weimar, c'est passionnant. Je suis un peu agacée par Klaus Mann qui a beaucoup de chance mais qui en fin de compte en profite peu.
Françoise D
J'ai lu La Danse pieuse qui est son premier livre. Il a été publié en 1926 alors qu'il avait 19 ans. Ce roman est considéré comme le premier en langue allemande sur l'homosexualité et qui déclenchera un scandale. Il y a beaucoup d'éléments autobiographiques. Ça m'a fait penser au film Cabaret. C'est intéressant mais je n'ai pas beaucoup aimé l'écriture, c'est un peu laborieux. J'ai trouvé intéressante l'atmosphère de cette époque de l'entre deux guerres avec l'explosion des arts.
J'ai lu À travers le vaste monde co-écrit avec sa sœur Erika. C'est le récit de leur arrivée aux USA en 1927. Ils sont très complices car ils se font passer pour des jumeaux. Ils ne rencontrent que des Allemands exilés. Ils font une tournée de conférences sur le sujet The Literary with twins. Ça ne m'a pas plu. Je ne suis pas allée jusqu'au bout : c'est un livre anecdotique et superficiel. Sa sœur et lui sont des personnages hors du commun. Mais encore une fois, l'écriture est pénible.
Brigitte
A l'occasion d'une hospitalisation j'ai lu Le Tournant sur les conseils de mon libraire il y a quelques années. Je connaissais le père et j'avais lu plusieurs de ses livres mais pas le fils. J'ai été emballée par ce livre qui est très intéressant. Comme Adèle H, il est le fils d'un monstre de la littérature. Le fait qu'il ne pourra pas être à la hauteur fait qu'il reste superficiel. Il se réfugie dans la superficialité, alors qu'il est doué. Je pense qu'il est subtil et profond. Il ya des passages magnifique sur la guerre, l'art, les gens qu'il fréquente. Il y a des restitutions fortes. Je n'avais pas envie de lire d'autres livres que celui-là. Peut-être que c'est son roman le plus abouti.
Lona (avis transmis de Bretagne)
J’ai lu La Danse pieuse : c’est bien écrit: pourtant la lecture m’a semblé longue et lassante... Entre le monde très particulier des cabarets et du cirque, des gens paumés, absorbés par l’oisiveté, la dépression, la drogue, le suicide, l’homosexualité, l’amour des corps et le narcissisme, je n’ai rien trouvé qui, - comme semblait le laisser entendre la quatrième de couverture - pouvait être une interrogation sur le chaos de la période pré-hitlérienne. Il me semblait que la naissance prochaine d’un enfant aurait pu susciter un peu d’espoir ?
Peut-être suis-je passée à côté de l’essentiel ? Cela ne m’étonnerait pas : car j’ai eu toutes les difficultés pour entrer dans ce texte ! Je vais fermer ce livre et l’oublier !
Marie-Thé
Livre dense, passionnant, riche, et souvent d'actualité. J'ai pensé à Lanzmann, mais aussi à Sophie Scholl (Die Weisse Rose). Le parcours de Klaus Mann me rappelle celui d'Annemarie Schwarzenbach.


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