Extrait de Wikipedia

Quatrième de couverture :

"Quel que soit notre destin, il habite les montagnes au-dessus de nos têtes."

Pietro est un garçon de la ville, Bruno un enfant des montagnes. Ils ont 11 ans et tout les sépare. Dès leur rencontre à Grana, au coeur du val d’Aoste, Bruno initie Pietro aux secrets de la montagne. Ensemble, ils parcourent alpages, forêts et glaciers, puisant dans cette nature sauvage les prémices de leur amitié.
Vingt ans plus tard, c’est dans ces mêmes montagnes et auprès de ce même ami que Pietro tentera de se réconcilier avec son passé – et son avenir.
Dans une langue pure et poétique, Paolo Cognetti mêle l’intime à l’universel et signe un grand roman d’apprentissage et de filiation.

Traduit de l’italien par Anita Rochedy



Paolo COGNETTI (né en 1978)
Les huit montagnes (publié en Italie en 2016)

Nous avons lu ce livre pour ouvrir notre cinquième Semaine lecture du 7 au 14 juillet 2018 dans les Hautes-Alpes. Les 7 livres lus pendant la semaine : ICI

Voir en bas de page la documentation sur l'auteur et ses œuvres.

Voici d'abord nos 20 cotes d'amour (15 participants à la Semaine lecture + 5 à distance) :
Françoise, Séverine, Rozenn, Chantal, Fanny, Édith, Monique L
Denis, Fanfan, Muriel, Jacqueline, Claire, Catherine, Marie-Odile, Manon, Renée
Manuel, Nathalie R, Suzanne, Monique S

Le nouveau groupe parisien a lu ce livre une année plus tard, en mai 2019 :

Ana-CristinaValérie Anne, David Nathalie B

Monique L (depuis Paris)
Une magnifique description de la montagne, une histoire d'amitié et de solitude, un récit d'initiation : l'auteur nous fait partager son amour pour la montagne d'une façon magistrale. Avec lui on observe, on écoute, on sent, on lit les paysages. C'est avec nostalgie et émotion que j'ai lu ce livre qui m'a rappelé mes nombreuses randonnées en montagne et ce que je ressentais alors.
Ce récit est aussi celui de l'amitié à toute épreuve qui unit Paolo et son frère de montagne Bruno, son double. Bruno me fait penser à Novocento de Baricco. J'ai trouvé très intéressante la description des rapports entre Pietro et son père, leurs évolutions dans le temps. La manière dont s'est transmis en héritage l'amour de la montagne du père au fils est bien décrite.
L'écriture est simple, légère et poétique. Les descriptions de la montagne et de ses divers aspects sont magnifiques. J'ouvre en entier.
Renée (à Narbonne)
Magnifique histoire d'amitié, entre deux enfants que tout oppose avec pour cadre les hautes alpes italiennes. Les descriptions sont superbes.
C'est aussi un roman sur le déterminisme social : Bruno enfant rêve de quitter sa ferme et ses montagnes malgré l'amour qu'il leur porte mais avec l'opposition de ses parents il devient maçon et devient un "taiseux", un sauvage. Et un roman sur les difficultés des paysans pour sortir un maigre salaire.
Marie-Odile (bretonne lisant dans les Pyrénées)
Je n'ai compris le titre que dans la dernière partie qui est comme l'aboutissement d'un long cheminement sur les sentiers de la vie et de la montagne.
J'ai eu quelques craintes au départ car ça commence comme un récit d'enfance assez ordinaire. Celui-ci ressemblerait à beaucoup d'autres sans ce cadre montagnard et sans cette sensibilité qui ne fera que croître par la suite. Il est émouvant de voir l'enfant devenir un homme. J'ai aimé par-dessus tout la part faite à l'amitié. Le narrateur montre toujours une extrême délicatesse dans l'évocation du père, de l'ami, de l'orientation à donner à sa vie, de la construction de soi et de son chalet tout là-haut, dans les descriptions subtiles et jamais ennuyeuses de la montagne, des arbres, des neiges, de l'herbe, de la lumière, du lac, dans le lien établi entre l'ici et l'ailleurs.
En lisant, j'ai eu l'impression de monter et descendre cette pente autant de fois que lui. Mais rien n'est jamais pesant. Rien n'est inutile, surtout pas la contemplation. Chaque pas est un pas en avant.
Beau texte, à la sortie duquel on regarde, sinon la montagne, du moins sa vie autrement.
Il dit comment être soi sans nier la société à laquelle nous ne pouvons échapper, mais en restant fidèle à nos valeurs et à ceux qui les partagent. Je l'ouvre aux ¾.
A lire aussi du même auteur Un garçon sauvage qui exprime la même quête. Ce texte rappelle parfois Erri de Luca (la montagne, l'Italie, la réflexion sur la vie).
Monique S (dans la Sarthe)
Une histoire, simplement humaine, interrogeant le rapport père et fils, la relation mère et fils, l'amitié entre effet de miroir et source de rivalité ; une histoire agréable à lire. Mais ce n'est pas tant l'histoire, ni les personnages qui m'ont retenue dans ce livre.
Sur le plan humain, rien de très original : un père bourru et une mère confidente, un copain qui n'a pas accès aux mêmes études et mêmes choix de vie ; une opposition un peu cliché entre vie de couple et famille et vie indépendante. Pour finir, qui est le plus libre ? Le personnage principal se surprend à porter comme son père le deuil d'un ami-frère mort en montagne. Reproduction ?
Ce qui m'a vraiment plu durant tout le livre, c'est la montagne ! Pas tant l'Himalaya et l'Annapurna que cette montagne italienne, plus sobre, intimement parcourue entre forêt, alpages, et cimes. Ces passages sur la montagne m'auraient suffi, comme je préfère du grand Rigorni Stern les livres non romancés, sans personnages, tels Arbres en liberté ou Le Livre des animaux.
Cette présence majestueuse de la montagne selon les saisons, selon les étages, nous renvoie à notre chemin de vie, fait de fragilité, d'avancée, de courage, de chances et accidents... d'émerveillements aussi. Elle nous met au même niveau que le brin d'herbe, que le torrent, que la neige... Certains comparent l'auteur à Thoreau. C'est vrai quant à l'expérience de retour à la nature "sauvage", mais comme penseur et poète, Thoreau a des intuitions fulgurantes, époustouflantes, inouïes – comme les grands scientifiques, les grands créateurs ou les grands mystiques – qu'on ne retrouve pas chez Cognetti.
J'ouvre à moitié. Et pour ceux et celles qui sont à la montagne, ce livre est sans doute une bonne introduction !
Manon (à Paris)
Je vous envoie mon avis concernant Les huit montagnes dont je ferme à l'instant le livre, un avis sans aucun recul que je vous livre ; je n'aime pas trop ça... mais tant pis. Ce livre se prête tant à votre première journée à Vars, c'est une très bonne idée de le programmer. Il se prête un peu moins de premier abord à un appartement parisien, mais il m'a du coup permis de voyager avec vous !
Dans les premières pages, j'avais l'impression de retrouver La Gloire de mon père de l'autre côté des Alpes et j'ai donc couru dans les montagnes avec Berio et Bruno. J'ai adoré cette ambiance sauvage, la découverte des lieux, des plantes, des sensations du jeune Milanais.
Après, les différents sauts dans le temps m'ont quelque peu décontenancée et parfois même perdue, jusqu'à la dernière partie que j'ai lu d'une seule traite ! Il est beau le rêve de Bruno, il est fou dans un monde où l'argent est roi, mais moi j'ai voulu y croire !
Je n'ai pas cru à beaucoup de choses concernant l'évolution des personnages – la mort du père, la justification cousue de fil blanc de sa double personnalité, Berio qui veut devenir cinéaste, Berio qui part au Népal... Tout pour moi n'était qu'excuse afin de retrouver Bruno, le taciturne et rêveur Bruno ! Mon dieu que j'ai aime ce personnage ! Je ne peux pas croire que lui soit mort sous une avalanche ! Impossible ! La fin me déçoit terriblement si c'est celle que l'on lit ! Moi je crois qu'il a souhaité disparaître, devenir un montagnard mi-homme, mi-bête, mi-arbre, comme il en parle d'ailleurs lui-même !
Bref, sans aucun recul, j'ai beaucoup aimé et j'ouvre aux ¾ !
Catherine (à la montagne à Vars comme ceux qui suivent)
J'ai beaucoup aimé ce livre. Tout d'abord, j'ai aimé la montagne, présente tout au long du livre, et ce livre était parfait pour entamer notre semaine à Vars. J'ai aimé l'amitié entre Pietro et Bruno. Comme Manon, j'ai tout de suite pensé à Lili et Marcel dans les collines provençales ; j'ai aimé la description de la relation entre le père et le fils, au début surtout, l'initiation à la montagne ; mais j'ai aimé aussi le personnage de la mère, plus en retrait mais avec une vraie présence. Mon personnage préféré a été Bruno, son enracinement montagnard, la construction de la maison, son rêve un peu fou d'élevage. J'ai moins aimé la partie sur le Népal et l'Himalaya. La fin est triste et je préfère l'oublier. Je l'ouvre aux ¾.
Françoise

J'ai beaucoup aimé. J'aime beaucoup la montagne. Cela m'a rappelé mon voyage au Népal. Avec les descriptions, on y est. Et l'histoire d'amitié est touchante. L'écriture est très simple, descriptive. Ce qui va bien avec le thème. C'est très nature. Je ne connaissais pas du tout ce jeune auteur. C'est net, on identifie l'auteur et le narrateur. J'ai été embarquée. Le récit est attachant. J'ouvre en grand, je ne boude pas mon plaisir.
Denis

Je l'ai lu dimanche dernier, un dimanche terne où je m'emmerdais. J'ai été totalement captivé. Je me suis retrouvé : le torrent, le copain... Cela m'a tiré des larmes, m'a rappelé ma jeunesse. C'est très bien. La suite de la filiation, c'est très bien, mais c'est moins percutant que lorsqu'ils sont tous jeunes. Les descriptions sont charmantes. Pour moi il est évident que c'est authentique. La partie au Népal m'a lassé, c'est moins original. Ma question : comment réagissent ceux qui ne connaissent pas la montagne ? J'ouvre trois quarts.

Manuel
Je te donne la réponse… La montagne n'est pas ce qui m'attache le plus. L'enfance, j'ai trouvé ça convenu, cela ne me touche pas. Ce qui me touche, c'est le père à Milan qui est mal en ville. Et la mère qui "tire" les enfants. La montagne il y a plein de mots inconnus qui concernent la montagne.

Muriel
Quels mots ?
Manuel
La désalpe par exemple. J'ai apprécié le rapport des deux garçons. La montagne ? Je suis dedans. J'ai pris le livre comme un roman. Je n'ai pas fini, donc j'ouvre à moitié.
Fanfan
J'ai bien aimé. Pour moi c'est très autobiographique. J'ai adoré la façon simple de décrire la montagne, différente pour chacun. J'ouvre trois quarts.
Séverine
J'avais entendu une lecture d'une partie de ce texte à la Maison de la poésie avec Jacqueline et Claire. J'ouvre en grand. Pour la montagne, les rapports, la solitude qu'entraîne la montagne et cette mère très sociable. Ce sont des histoires de solitude par rapport à la montagne. J'ai aimé la carte comportant des traits représentant les personnes.
J'ai adoré ce livre. C'est une belle histoire. J'ai même versé ma larme. Le garçon sauvage, c'est la même veine autobiographique. C'est une belle découverte et - une fois de plus je le redis - sans le groupe que je n'aurais pas faite sans le groupe lecture.

Rozenn
Je suis allée trois fois dans ma vie à la montagne, en particulier dans une auberge de jeunesse où j'organisais entre autres le tableau des corvées. La montagne, pour moi, ce sont des efforts. La montagne c'est terrifiant : regardez cette montagne (et Rozenn nous montre l'Eyssina par la fenêtre, terrrrrifiant dans la nuit...). Il y a une subtilité des sentiments, par exemple la jalousie. C'est à peine dit. Il y a une opposition entre la solitude et l'aspect sociable. J'ai aimé les descriptions, alors qu'en général je saute quand elles sont longues. Je retrouve tout ce que je n'aime pas, mais c'est de toute beauté (Rozenn nous dit à qui elle offrira le livre, chut).
Chantal

Quand j'ai vu les premiers chapitres, je me suis demandé : que vont penser les Parisiens du groupe ? Je suis rentré dans cette légende népalaise avec les huit montagnes. Pour ma part, j'ai quitté ma montagne à 11 ans. J'ai retrouvé dans le livre ce que je vivais enfant et l'arrachement à un paradis pour soi. J'ai retrouvé dans les descriptions les mêmes termes que je connais ; les cembros, les barnes. J'arrive de la Maurienne, avec cette légende : qui vit le plus ? Celui qui reste dans sa montagne ou celui qui va butiner ?

Le vieux Népalais rencontré par le narrateur dessina un cercle,
puis "à l'intérieur, il traça un diamètre, puis un deuxième, perpendiculaire au premier,
et puis encore un troisième et un quatrième le long des bissectrices,
obtenant ainsi une roue à huit rayons."


"Nous disons qu'au centre du monde, il y a en a un autre, beaucoup plus haut : le Sumeru.
Et autour du Sumeru, il y a huit montagnes et huit mers.
C'est le monde pour nous
.

Tout en disant ces mots, il traça à l'extérieur de la roue une petite pointe au-dessus de chaque rayon,
puis une vaguelette d'une pointe à une autre.
Huit montages et huit mers.
A la fin, il entoura le centre de la roue d'une couronne qui devait, pensais-je,
être le sommet enneigé du Sumeru."

Et avant d'effacer le mandala, le vieux Népalais précisa :
"Et nous disons : lequel des deux a le plus appris ?
Celui qui aura fait le tour des huit montagnes,
ou celui qui sera arrivé au sommet du mont Sumeru ?
" (p. 207)

(dessin extrait du blog Fine stagione)

Chantal
J'ai vu (p. 209) qu'il dit qu'ils lisaient Bookchin
.

Plusieurs
Qui ????

Jacqueline
C'est un Américain qui a écrit des essais, anar, libertaire.

Chantal
Et j'ai remarqué aussi la question qu'ils se posent : "comment résoudrions le problème de la famille cette ennemie" ?...
Rozenn, se décidant
Finalement, j'ouvre en entier.
Nathalie R
Il y a de magnifiques descriptions. Quand on a le sentiment d'appartenir à rien. Oui, il y a des lignes de force, mais aussi des faiblesses quand le narrateur s'écoute. Et l'attitude vis-à-vis des femmes c'est pénible (Nathalie cite plusieurs passages pas très flatteurs pour le narrateur). De même son comportement vis-à-vis de son père, vis-à-vis de son ami. Son ami n'est pas un double pour moi. Quand il va à la faillite, il ne fait rien pour lui. La narration est lacunaire ; ainsi la mort de l'oncle est artificielle. Ce qui est très bien c'est l'enfance, indépendante de l'adulte. J'ouvre à moitié.
Fanny
Mon rapport à la montagne est bizarre. Ce livre me donne envie de me retrouver dans la nature pour marcher. Or lorsque j'étais enfant, j'ai été traînée par mes parents en randonnée, ce qui alors m'ennuyait. Ce livre m'a saisie : est-ce un récit ? Un roman ? Il y un article qui donne des éléments. J'imaginais l'auteur plus jeune.
C'est magnifique. Le narrateur est imparfait, humain. Un livre qui entraîne à se départir de tout jugement sur les personnages. Il y a plein de métaphores, comme le torrent, les huit montagnes. J'ouvre en grand. C'était un vrai plaisir de lecture où on n'a pas envie de le poser, on a envie de savourer. Après Malraux, quel plaisir !
Muriel
J'ouvre trois quarts. Ce n'est pas un chef-d'œuvre, mais c'est très plaisant. J'ai adoré le passage où son ami fait venir les animaux. Il y a une atmosphère de joie. J'avais complètement oublié l'épisode du Népal. Le père est très dur. J'ai aimé le personnage de la mère. Si c'est autobiographique, je m'en fous. J'aime l'idée que le père lègue ce bout de terrain. Je connais ça, le père tyran… L'ensemble m'a plu.
Jacqueline
C'est un ravissement. Ce qui m'a plu, ce sont les rapports. La façon dont le narrateur change les rapports au fur et à mesure. L'histoire de la mère et du père qui quittent la montagne, ancrée dans leur vie. J'avais entendu la lecture à la Maison de la poésie, très émouvante et sans déflorer. Je suis emballée. Mais j'ai oublié. Le sens de la parabole des huit montagnes. J'ai beaucoup aimé la construction de la maison, contrairement à Rozenn et à Muriel. A la deuxième lecture, j'ai eu l'impression d'un roman. J'ouvre aux trois quarts.
Édith
Rozenn, je te retrouve, car je suis dans la plaine. La montagne m'impressionne Je l'ai découverte à 70 ans. Dans ce livre, j'ai aimé les relations. Le cadre pourrait être autre que la montagne. Les descriptions pourraient être transplantées. J'aime la sensibilité. J'ouvre en très grand. Je me suis projetée. J'ai transposé Ce n'est pas un chef-d'œuvre, mais on le lit avec plaisir, c'est un livre qui porte.
Suzanne
Un bon livre je ne le lâche pas. Celui-là je l'ai lâché. Il a eu un prix, bon, mais il ne m'embarque pas. J'ai eu enfant ces expériences. Ça ne m'embarque pas. Ce qui m'a fait décoller, c'est le vécu de la relation de ces deux amis, hors des mots. Le père a compris quelque chose d'extraordinaire, les rapprochant. Pour ce qui est de l'écriture, c'est bien écrit. Il n'y a pas de pic littéraire. Un plaisir mais sans plus. D'habitude je fais une deuxième lecture, là non. J'ouvre à moitié, je ne suis pas embarquée. Ben oui.
Claire
En fait à vous entendre, je trouve ce livre à la fois banal et enthousiasmant. Une fois fini j'ai relu le début. Il y a une voix, un passé simple qui passe, un récit intense, un charme subtil. Pas de lyrisme. Des personnages forts : la mère, les deux jeunes, le père. La littérature est présente : Mark Twain, Hemingway… Le narrateur se place à une certaine distance. Les mots portent, avec une certaine simplicité. Au fur et à mesure, j'ai senti de plus en plus nettement que c'était autobiographique, ce qui m'a paru une faiblesse. J'avais envie de lire un livre du courant Nature writing, eh bien en voilà un.
J'ouvre aux trois quarts. (Asticotant Nathalie) Au fait, j'ai remarqué que ton avis sur le livre était presque uniquement moral…

Nathalie (restant morale)
...

Suzanne
Quant à moi, je me pose la question : est-ce qu'on peut vivre solitaire en vivant hors de la société ?


AVIS DU NOUVEAU GROUPE PARISIEN (réuni le 24 mai 2019)
Ana-Cristina
Au début, j'ai été séduite par l'écriture simple et sobre, parfois murmurée, mais au bout d'un moment, j'ai eu du mal à m'intéresser, ai alterné entre ennui et lecture laborieuse.
La quatrième de couverture parle d'"hymne à l'amitié", mais personnellement je n'ai vraiment pas été convaincue par l'histoire d'amitié entre Pietro et Bruno. Quoi qu'il en soit, c'est une vision du monde qui ne m'intéresse pas. C'est presque trop écrit, à la limite de la sincérité. Les rapports de Bruno et son père qui vient réclamer son fils aux parents de Bruno m'ont renvoyée à Padre padrone, l'éducation d'un berger sarde, de Gavino Ledda, publié en 1975, qui fait certainement partie de la culture de l'auteur. Le côté "mon fils m'appartient".
Anne
J'ai bien aimé. Cela me renvoie à ma propre envie de solitude en communion avec la nature. C'est une belle description d'une amitié compliquée, car impulsée par les parents. Quand on ne peut pas penser l'histoire de nos parents, l'amitié est un roc, l'amour non. Le personnage ne peut pas répondre au désir de son père mais va ailleurs – au Népal – pour trouver son chemin. C'est un livre profondément écologique. Pietro ne fait pas le deuil véritable d'une relation avec son père qui ne lui appartient pas, lui échappe. Vivre en solitaire n'empêche pas le conflit avec soi-même.
Valérie
Les livres sur la nature ne m'intéressent pas. Je me suis ennuyée sur les 100 premières pages. Puis j'ai cru qu'enfin cela démarrait, mais c'est retombé très vite. Je n'aime pas les personnages, je trouve un côté moralisateur à la mère qui veut aider tout le monde. Bruno vole la place du fils réel qu'est Pietro, on se demande en quoi ce serait justifié, car Bruno n'est pas attachant, voire pitoyable à la fin du livre. C'est une amitié qui n'en est pas vraiment une, ils ne savent même pas communiquer entre eux. Quant au personnage du père, on croit qu'on va apprendre de lui, suite au secret révélé, mais au fil des pages, on n'en sait finalement pas beaucoup plus.
Ces personnages ont des vies ratées, Pietro louvoie et n'arrive pas à trouver son identité propre. A l'image d'une histoire qui oscille entre Népal et retour à l'Italie. Le livre se lit facilement mais l'intérêt s'émousse au fur et à mesure.
Nathalie B
Je n'attendais rien de particulier avec ce livre. Je ne connaissais pas l'auteur et n'avais jamais entendu parler de ce roman. Eh bien j'ai beaucoup aimé. J'ai beaucoup aimé la poésie de l'écriture, j'ai trouvé les personnages attachants ; ils n'ont pas du tout raté leur vie, ils ont simplement des valeurs autres que celles qui prédominent aujourd'hui : ce n'est pas la réussite financière qui les anime. Ce sont des personnages courageux, travailleurs, énergiques. La mère n'est pas du tout moralisatrice. Elle est généreuse. Elle ne pousse pas du tout Bruno et son fils à être amis. Elle se contente de faire en sorte qu'ils se connaissent. Et c'est eux qui décident de leur relation. Au contraire de Valérie et Ana-Cristina, je trouve au contraire c'est bien une amitié masculine qui nous est racontée, qui ne se paie pas de mots (lorsque Pietro et Bruno participent à la construction de la maison de Pietro par exemple – ils n'ont pas besoin de mots, ils travaillent ensemble, cela leur suffit, leur silence est plein d'amitié). Le personnage du père de Pietro est rude, taiseux, souvent en colère ; il ne retrouve son être profond que lorsqu'il part en montagne. Il ne peut que regretter que son fils ne partage plus ses balades en montagne, mais il lui a transmis cet amour de la Montagne. C'est un homme solide, exigeant, dont la part tragique remonte à l'épisode de la mort de son ami, dont il épousera la sœur tout en étant banni par sa belle-famille lui reprochant l'accident tragique. C'était pourtant la famille d'adoption de cet orphelin. On n'a pas besoin d'en savoir d'avantage pour le comprendre. J'ai lu avec beaucoup de plaisir ce roman, aimé regarder ces hommes parfois rudes qui ne s'épanchent pas, fidèles à leur essence, notamment Bruno qui ne peut s'imaginer vivre sans sa montagne, qui est son oxygène, quitte à y sacrifier sa vie familiale. J'aime la musique de l'écriture de l'auteur.
"Le glacier fascinait l'homme de science qu'était mon père... Il lui rappelait ses études de physique et de chimie, la mythologie sur laquelle il s'était construite." (p. 62)
"Nous fermions le portail et allions dîner pendant que les vaches commençaient à ruminer dans l'obscurité" (p. 217)
"Sur le petit pont de bois, quand je me baissais pour boire, je surpris l'automne en train de jeter un sort à mon torrent." (p. 254)
David
C'est un livre en somme extrêmement "simple", l'histoire qui se déroule, comme les personnages. Bien sûr le retour à la montagne signifie une autre façon de vivre autour de laquelle Pietro tourne sans converger. Bruno pour sa part ne parvient pas à poursuivre son histoire familiale. Et pourtant, aucune de ces demi-défaites ne semblent entamer leur fil de vie.
J'ai attendu un certain temps qu'il y ait une révélation, un rebondissement, des mystères qui auraient expliqué la psychologie des personnages et puis... rien, et ce rien finalement a son charme, comme si l'auteur, ne se payant pas d'effets scénaristiques, laissait à l'imaginaire du lecteur le soin de chercher ses propres pistes.


DOC SUR PAOLO COGNETTI ET SES ŒUVRES
- Les livres de Paolo Cognetti traduits en français
- Parcours : quelques repères
- Articles, interviews

Les livres de Paolo Cognetti traduits en français
- Sofia s'habille toujours en noir, Liana Levi, 2013 (en 2012 en Italie) ; Piccolo, 2018 ; lire un extrait ICI
- Le garçon sauvage, éd. Zoé, 2016 (en 2013 en Italie) ; 10/18, 2017
- Les huit montagnes, Stock, coll. "La Cosmopolite", 2017
(en 2016 en Italie)

Parcours : quelques repères
- Né à Milan en 1978.
- Études universitaires en mathématiques, abandonnées pour des études de cinéma, afin "d'apprendre à raconter des histoires".
- Fonde, avec Giorgio Carella, une société de production indépendante (CameraCar). Il réalisera des documentaires, sur la littérature américaine par exemple, sur New York.
- Publications italiennes : participe à un recueil de nouvelles rassemblant les nouvelles plumes italiennes, un véritable "manifeste générationnel", La qualità dell'aria (2004, éd. Minimumfax), puis publie des nouvelles (M
anuale per ragazze di successo, Una cosa piccola che sta per esplodere), en 2010 un guide personnel sur New York (sur les traces des écrivains qu'il admire comme Ernest Hemingway, Raymond Carver), en 2012 un "roman à nouvelles", forme hybride entre le roman et le recueil, Sofia si veste sempre di nero (Sofia s'habille toujours en noir), un journal en 2013, Il ragazzo selvatico (Le garçon sauvage), et un roman en 2016, Le otto montagne (Les huit montagnes), traduit dans une trentaine de pays et dont la traduction française obtient le Prix Médicis étranger en 2017.
- La montagne : désireux de faire vivre la montagne en dehors des pistes de ski, il monte en 2017 avec son association Gli urogalli un festival consacré à la littérature, aux arts et aux nouveaux montagnards baptisé Il richiamo della foresta (L'Appel de la forêt) en hommage à Jack London.

Son blog : http://paolocognetti.blogspot.com

Articles, interviews
- "Paolo Cognetti, disciple de la montagne", Florence Noiville, Le Monde, 9 septembre 2017
- "Rencontre avec Paolo Cognetti, qui remporte le Médicis étranger", entretien, Marianne, 9 novembre 2017
- "Le otto montagne / Les huit montagnes de Paolo Cognetti", Emmanuelle Caminade, L'Or des livres, 29 novembre 2017
- Vidéo : Paolo Cognetti présente Les huit montagnes, Hachette France, 31 juillet 2017 (2 min 37)
- Vidéo : rencontre avec Paolo Cognetti autour de son livre, 14 décembre 2017, Librairie Mollat Festival "Lettres du monde" à Bordeaux (3 min 36)


extrait du site L'Or des livres

 

Nos cotes d'amour pour le livre, de l'enthousiasme au rejet :
à la folie
grand ouvert
beaucoup
¾ ouvert
moyennement
à moitié
un peu
ouvert ¼
pas du tout
fermé !

 

 

Nous écrire
Accueil | Membres | Calendrier | Nos avis | Rencontres | Sorties | Liens