Un jeune bidasse russe revient de son service
militaire en Tchétchénie le visage monstrueusement brûlé
après l'attaque de son tank par les boeiviki. Pour oublier, Kostia,
dont le visage terrorise les enfants, se met à boire comme seuls
les Russes savent le faire... à mort. Il suit en cela l'enseignement
d'un peintre raté qui lui a appris deux choses : boire de la vodka
sans simagrées et ouvrir ses yeux au monde pour mieux le peindre. Traduit du russe Fox
Mulder " Touche ton genou, qu'elle a
dit alors. Je l'ai touché. Rachel,
Actes Sud 2010 ;
Babel 2016 Andréï Guelassimov a choisi
de raconter la vie dun homme ordinaire. Celle dun
professeur duniversité vieillissant, Sviatoslav Semionovitch
Kaufman, père juif et mère russe ce qui nest
pas rien quand on est né en Union soviétique. L'Année
du Mensonge, Actes Sud 2006 Grand amateur de boissons fortes et daventures
féminines, Mikhaïl, le héros de LAnnée
du mensonge, ne sattarde pas longtemps dans un vrai travail
mais reste disponible pour le premier business venu. Cest
ainsi quil se retrouve un beau jour avec la singulière mission
dapprendre à boire, à fumer et à courir les
filles au jeune fils renfermé et agoraphobe dun nouveau Russe,
PDG de son état, son ancien patron. Les
Dieux de la steppe, Actes Sud 2016 Dans un village de Sibérie, Petka,
un petit garçon toujours pieds nus, va chaque jour à la
gare voir passer les convois militaires qui parfois sarrêtent.
Nous sommes en 1945, et la guerre ici nest pas tout à fait
finie, une offensive contre les Japonais est imminente, mais dans ce village
du bout du monde la vie suit son cours
|
Andreï GUELASSIMOV
|
Chantal,
Fanfan, Catherine, Édith, Françoise, Manuel, Rozenn,
Jacqueline, Nathalie, Monique S, Renée,
Lisa
Claire, Fanny, Séverine, Denis, Monique L, Marie-Odile Muriel, Suzanne |
Lisa (à Paris)
J'ai lu La Soif il y a quelques mois et je dois dire que je n'ai
pas voulu le relire pour la semaine. J'en ai gardé de bons souvenirs.
Enfin "bons" n'est pas le terme adéquat : j'avais
trouvé la lecture pas forcément agréable mais très
intéressante. Je trouvais bien décrite cette vie après
la guerre. Et surtout, la Russie est un pays qui m'intéresse beaucoup
en ce moment. Je ne me souviens pas en détail du roman mais je
l'ouvre en grand.
Renée (à Narbonne)
Deuxième lecture aussi enthousiaste que la première, pour
cette histoire d'une renaissance grâce à l'amitié
et à l'art.
Ces quatre amis sont liés par le sang versé au combat, ils
se doivent solidarité. En parallèle, Kostia retrouve le
plaisir de dessiner grâce à ses jeunes frères, il
arrive à oublier aussi bien son visage ravagé par le feu
que l'absence de son père pendant son enfance. Il s'accepte.
Monique S (dans la Sarthe)
J'ai tout aimé dans ce livre : le fond, et la forme.
Tous les thèmes de la Russie d'aujourd'hui : la guerre et ses atrocités,
le traumatisme des soldats blessés, l'alcoolisme, l'amour, la famille,
l'enfance.
La forme est particulière par ses juxtapositions. On glisse sans
s'en rendre compte, sans espace ou changement de chapitre dans un autre
lieu, une autre époque, avec d'autres personnages. La première
fois, en haut de la p. 125, j'ai été interloquée,
suis revenue en arrière... puis j'ai accepté le "pacte
de lecture".
C'est l'effet du rêve, de l'alcool, mais surtout des réminiscences
du traumatisme. Comme lors de l'explosion du char, le destin nous tombe
dessus, on est soudain plongés dans quelque chose d'imprévisible,
d'inouï, d'inconcevable. Il faudra des mois, des années, pour
réaliser, digérer ce qui s'est passé. Souvent, aussi,
on ne sait pas ce que les autres voient de lui, ce qu'il a dessiné.
On ne l'apprend qu'après coup par les paroles des autres.
Et l'événement traumatique remet à jour des souvenirs
d'enfance, des blessures de l'ego, de l'amour et repose avec acuité
les questions essentielles de la vie exprimées p. 60 :
"Je pensais en les regardant
: pourquoi ça se passe comme ça pour moi ? Pourquoi
il y a ceux qui brûlent, et d'autres qui sont sauvés ?
Pourquoi le père que j'avais est-il devenu père d'autres
enfants ? Pourquoi l'homme que je voulais avoir comme père
m'a-t-il abandonné pour partir sur la mer Noire ?"...
J'aime la place du dessin et de l'art dans cette histoire, le personnage
loufoque, mais au passé si riche et à l'immense générosité
du directeur d'école, j'aime l'amitié indéfectible
qui lie les copains d'armée, et j'aime les portraits d'enfant si
tendres. C'est d'ailleurs par les enfants d'abord que le narrateur peut
envisager comme possible son nouveau "visage", quand le petit
garçon de la voisine lui dit p. 126 : "Moi
je sais..."
Un livre actuel de la Russie, qui parle de l'expérience de la violence
effroyable de la guerre, des souffrances des "survivants", mais
avec une infinité de nuances de tendresse et d'humanité.
J'ouvre en grand.
Monique L (à Paris)
Ce livre est profondément émouvant. C'est un livre sur la
souffrance : celle psychologique de l'enfance, de la relation aux
parents, de la souffrance physique, celle de la guerre. Et sur la capacité
de l'art à transcender les douleurs et celle de la vodka à
permettre d'oublier pour continuer à vivre.
Kostia est attachant. C'est par le dessin qu'il renouera avec son passé
(son enfance) et retrouvera une raison de vivre. Une évolution
toute en douceur. Il retrouvera cette envie de dessiner auprès
des enfants de son père. Les enfants ont une place importante dans
ce récit.
J'ai été frappée par la force de l'amitié
qui lie ces hommes rudes pas très sentimentaux et très différents,
même si cela s'explique par le drame qu'ils ont partagé.
C'est bien écrit. Le passé et le présent se mélangent.
Les réminiscences sont bien rendues comme par exemple celle de
l'hôpital. Pas de misérabilisme.
J'ouvre aux ¾.
Marie-Odile (dans les Pyrénées)
J'ai commencé à lire ce texte sur la pointe des pieds, guettant
le moment où, vu le contexte évoqué, ça deviendrait
trop dur et où j'abandonnerais peut-être, et puis non, j'ai
suivi sans frayeur le déroulement du récit qui passe imperceptiblement
d'un moment à un autre de la vie de Constantin. J'ai été
rassurée, je crois, par une sorte de tendresse du personnage, une
sensibilité mêlée de résignation, une façon
d'accepter les choses comme elles sont (l'absence du père, le départ
du maître, le différend entre les copains et... sa gueule
brûlée). Plutôt que la vodka qui plonge dans l'oubli,
je retiendrai, pour fil conducteur, le dessin qui parcourt le texte avec
sa magie salvatrice, attribuant à chacun "ce
que le destin leur avait enlevé ou ne leur avait pas accordé",
guérissant du passé mais obligeant à regarder les
choses en face. Il me plaît que la dernière page se termine
par les rires, les paroles rassurantes de l'enfant et le dessin du visage
"de celui n'est pas
méchant".
J'ouvre aux ¾ ce beau texte sur lequel on pourrait dire beaucoup
(Russes et Tchétchènes, relation au père, aux femmes,
au corps, l'enfance, la douleur etc.). Je vous souhaite un bel échange.
Chantal
(à Vars comme ceux qui suivent)
J'ai adoré. C'était un livre comme je les aime. Un livre
de l'humain. Pas de théorie. Du charnel, du corps pour aller vers
ce qu'on sent, vers les sentiments : l'amitié, la fraternité.
La construction et les passages d'un temps à l'autre sont très
bien faits, avec la vodka, le traumatisme. Il sera sauvé par l'enfance,
les enfants. La paternité a une grande place, c'est le directeur
aussi qui lui a ouvert une voie. C'est un livre de l'humanité.
J'ouvre en grand.
Fanfan
J'ai adoré. J'ai été bouleversée. C'est mon
livre préféré de la semaine. J'appréhendais
pourtant. Au début comme à la fin, le monstre couche le
petit garçon. Page 107, j'ai aimé "comment
dessiner l'attente". Le dessin est rédempteur. Il se dessine.
Ce sont des histoires de miroirs. J'ouvre en grand.
Édith
J'ai beaucoup aimé. Le fond et la forme. J'ouvre en grand. Dans
cette manière de présenter sa trajectoire : l'enfance,
ses camarades, sa mère par rapport à son père, quelle
tendresse, quelle douceur. Et si le présent de l'enfant avec Olga
durait jusqu'à la fin ? Et le rapport au dessin ! On
peut rapprocher le personnage handicapé de celui de Venin.
J'ai souri au signe de croix par rapport à Venin,
aux moments cruciaux ainsi qu'au
chien qui se noie. Et la description de la jalousie ! Il se saoule.
La soif, mais la soif de quoi ? J'ai lu ce livre dans un cocon de
silence.
Françoise
J'ouvre en très grand. Rien à voir avec le livre d'hier
qui ne m'a pas touchée. C'est d'une grande humanité. Oui,
le dessin est rédempteur. Le fil conducteur, ce sont les enfants.
La jalousie est un passage formidable. Jai pensé aux Âmes
grises, aux gueules cassés. J'ai retenu aussi ce moment
"comment
dessiner l'attente". C'est prenant. Les personnages
sont très attachants. Il n'y a pas de position sur la guerre en
Tchétchénie. La camaraderie crée un lien indéfectible.
J'ai été beaucoup émue.
Manuel
J'ai aimé le début, la vodka à caser dans la salle
de bain : quel humour dans cette description. Et puis toutes ces couches
l'enfance. J'ai aimé que le directeur joue ce rôle par rapport
au dessin. Et l'épisode du Gréco. Toutes les scènes
en Tchétchénie. Quant à la religion et Allah, ils
se battent pour la même connerie. Comme dans le
livre sur le chien, il y a beaucoup de couches, beaucoup de pistes,
beaucoup de choses en peu de pages. Et on ne se perd pas. J'ai adoré,
j'ouvre en grand.
Fanny
Je serai brève. Parmi les deux Russes qui étaient sur notre
liste de propositions, ma préférence avait été
à l'autre (La
brèche de Vladimir Makanine). J'ai eu dans le premier quart
du livre du mal à rentrer dedans, j'ai eu du mal à me retrouver
parmi les différents personnages. Ensuite j'ai plongé. La
construction est très forte, les passages sans transition réussis
et l'exercice est surprenant. C'est une grande humanité :
la jalousie, l'attente. Dans le
livre sur le chien, le narrateur écrit la suite de la vie de
sa fille, ici la page 104 m'y a fait penser, quand il imagine qu'il
aurait pu avoir des enfants. Et la fin avec l'enfant, c'est très
réussi. J'ouvre aux trois quarts car j'ai eu quelques réserves
au début.
Catherine
Je me joins au concert : j'ai adoré. La forme. Le cheval fou de
Chantal. Traumatisé, physiquement et psychiquement, on le suit.
C'est extraordinaire quand il revit tout. Je trouve ça magistral,
comme Manuel, car c'est très court. Il reconstruit ce que les gens
ont vécu. À l'hôpital c'est génial. L'attente
est la peur. J'ai beaucoup aimé le directeur. Et le rôle
de la vodka ! C'est un livre génial, très riche. J'ouvre
en grand, il m'a pris la tête.
Rozenn
Des Russes partent plusieurs jours pour boire.
Muriel
Je suis moins emballée. Au début c'était comme pour
Fanny. On ne comprend rien. Puis j'ai compris les "passages"
du passé au présent. C'est quelque chose de trop court,
d'un peu froid, comme un constat. Pourquoi il a été retiré
de l'école. Je n'arrive pas à imaginer ses amis, ils ne
sont pas assez typés. L'argent, on ne comprend pas bien. Ça
m'a quand même plu. Dans les passages vers le passé, cela
me paraît plus filmique. Ça ne m'a pas vraiment émue.
Ça n'a pas fait tilt. Il y a trop de thèmes qui ne sont
pas assez développés. La jalousie, la guerre, mais c'est
tout à fait intéressant.
Séverine
J'ai été intéressée. Pour moi c'est sur livre
sur l'art. La guerre ne vient exacerber que ce qui était là
avant. Les artistes qui ne vivent pas dans un milieu favorable, ça
c'est intéressant. J'ai pensé au livre d'Édouard
Louis Qui
a tué mon père. Le directeur est pour moi le plus
beau personnage. La soif ? C'est la soif d'autres choses. Je suis
admirative de la traduction. J'ouvre aux trois quarts. La rencontre avec
le père est factice, la jeune fille du début c'est cousu
de fil blanc. C'est pour moi un livre sur la soif de l'art.
Denis
C'est
très noir. Cela m'a donné un coup de blues, j'en ai été
déprimé. C'est le seul livre de la semaine qui m'a fait
ça. La vodka, c'est trop : elle fait des ravages chez les
Russes et ils s'en foutent. Par exemple, j'ai rencontré dans un
séminaire un mathématicien russe émigré aux
USA, médaille Fields, et je n'avais jamais vu personne descendre
autant d'alcool dans une journée. Il est mort maintenant, à
50 ans. Il organisait sa cuite, s'assurant que ses étudiants le
mettraient au lit. Quel gâchis ! Et rappelons-nous Sylvain
Tesson sur le lac Baïkal et son demi-litre de vodka quotidien.
A part ça, concernant le livre, je suis admiratif de la forme,
du montage. C'est très visuel. J'ai pensé au film israélien
Valse
avec Bachir, autour d'un événement traumatisant.
Mais avec tous ces thèmes qui déferlent, c'est trop pour
moi. J'ai pensé aussi à Tortilla
Flat, la joyeuse bande de paumés. Des échanges cons,
pas si cons. J'ouvre à moitié. (Voir quelques
semaines plus tard.)
Nathalie
J'ouvre en grand. Cela faisait longtemps ! Putain cette écriture
! Pas une fausse note d'écriture, pas une dissonance. J'aime tout.
C'est le genre de livre que je ne veux pas terminer. C'est un livre de
consolation. Le point de vue pose problème : ce n'est pas
le point de vue tchéchène. J'ai connu des casques bleus
qui ne s'en sont pas remis. Quand on a connu ça, on ne peut pas
vivre hors du groupe, car les autres ne peuvent pas comprendre. Dans l'appartement
il y a des passages que j'ai un peu zappés. Il y a une prolepse
au sujet du verre : on annonce le résultat avant la cause.
J'ai eu énormément de plaisir. Je veux lire d'autres livres
de cet auteur. Le meilleur de la semaine pour moi. Marina est christique.
Suzanne
Je suis mal à l'aise justement. Je ne suis pas emballée.
Je n'ai pas été touchée. Vous avez dit beaucoup de
choses. Le talent est révélé après. Cet homme
n'est plus ("je ne suis
pas ton fils", lui dit son fils). La guerre qui fait des
hommes, ça m'agace profondément (14-18, etc.). Il y a un
truc par rapport à l'attente pour Sergueï : quelle attente ?
Le dessin, l'art ? Avec une espèce d'illusion que l'art peut remplir
l'essentiel. Je vois un parallèle par rapport à la Au
revoir là-haut de Lemaître. Ce n'est pas forcément
l'essentiel. Quel est l'essentiel pour cet homme ? Que tu ne sois
pas méchant, lui dit l'enfant. J'ouvre à moitié.
Rozenn
J'ouvre en grand. Au début, c'est amorti, comme imbibé.
C'est très dense, très fort. J'ai lu il y a longtemps, il
y a 24 heures. Quelque chose de faible d'abord. Le héros est un
peu flou, un peu mou, dans la vodka il est amorti. N'est-il pas amorti
plus au début qu'à la fin ? Ce ne sont pas des amis, et
ils ne peuvent pas se séparer. C'est un délire les plus
forts que j'ai vu depuis longtemps. Tout ce qui me fascine. Tout ce que
je déteste dans la Russie. Pour moi c'est un livre sur la guerre
et non sur la Tchétchénie.
Jacqueline
J'ai lu l'autre
roman russe qu'on a failli choisir. Et Les
dieux de la steppe, un roman volumineux ; à la fin
de la seconde guerre mondiale, c'est vu par un enfant. Je retrouve des
petites choses de l'humanité, dans une situation de guerre et pas
de guerre. Il s'agit de la même humanité dans une situation
différente. Cela me reste. J'ai une admiration pour cet écrivain
qui n'a pas vécu cela. On y croit. On y est. Dans
le chien, il y a une expérience vécue. Là, non.
Marina par rapport au Greco, c'est emblématique de ce qu'est l'art :
chacun retrouve quelque chose, elle reconnaît dans la reproduction
dun tableau du Greco son village natal arménien. J'ouvre
en grand.
Claire
La force de l'auteur, c'est que ce n'est pas autobiographique, la force
du livre, c'est la forme : on ne peut lire vite ; les passages,
les ruptures temporels me rappellent Confiteor
et sa virtuosité. Je suis proche de l'avis de Séverine.
J'aime les évocations du maître en art (le directeur), les
gueules cassées. J'aime beaucoup quand il recrée les êtres
par le dessin dans sa tête p. 105 :
"A l'un, je dessinai
une jambe, à un autre - une femme. A un troisième ses amis
qui avaient été tués. A un quatrième, je faisais
un enfant en bonne santé. A tous ces hommes, je donnais de la vigueur,
à leurs femmes de la beauté, à leurs enfants de la
drôlerie. Je dessinais ce qu'ils n'avaient pas. Je n'y serais pas
arrivé aussi bien avec es crayons." J'ouvre aux
trois quarts car le sens du livre n'arrive qu'après.
Rozenn
J'ai un bémol concernant les femmes inexistantes.
Plusieurs
Si, il y a Marina, et pas seulement.
Chantal
L'interview
de l'auteur que j'ai lue m'a rappelé La
fin de l'homme rouge de Svetlana Alexievitch que nous avions lu.
Catherine
J'ai pensé au film Voyage
au bout de l'enfer, avec les scènes de roulette russe,
la guerre du Vietnam où ils sont liés de la même façon.
Denis
(quelques semaines plus tard)
J'ai relu ce livre depuis, une fois épongé le côté
déprimant, et je le trouve marquant. J'ai particulièrement
apprécié la "rédemption" du narrateur par
le dessin. Je l'ouvrirai aux ¾.
DOC
SUR GUELASSIMOV ET SES UVRES
Quelques
repères sur l'auteur
- Andreï Guelassimov,
fils de militaire, est né en 1966 à Irkoutsk
en Sibérie orientale. Enfant, il lit Jules Verne, Mark Twain et
Stevenson. Il a 15 ans quand la famille s'installe à Yakoutsk
en Sibérie centrale pour suivre le père. Il y tombe amoureux
de sa future femme.
- Il suit des études d'anglais,
fait des petits boulots,
devient professeur, étudie en 1996-1997 à l'Université
de Hull, soutient en 1987 à Moscou (MPGU) une thèse
sur les influences orientales d'Oscar Wilde. Il enseigne à l'université
YSU aux USA dans l'Ohio la stylistique anglaise.
- Il vit à Moscou depuis 2002. Il y a suivi les cours au GITIS
(l'Institut d'études théâtrales) du prestigieux metteur
en scène Anatoli
Vassiliev.
- Puis il enseigne la littérature anglo-saxonne à l'université
de Moscou, devient scénariste et se consacre entièrement
à la littérature.
- Il est marié, a trois enfants et vit éloigné de
la capitale et du milieu littéraire.
Ses uvres
Il a été découvert en France avec Belles
étrangères : douze écrivains russes, Actes
Sud, 2004.
Voici par ordre de publication en Russie, les livres tous traduits sauf
un par Joëlle Dublanchet :
- 2001 :
Fox Mulder a une tête de cochon (recueil de cinq nouvelles),
Actes Sud 2005 (son premier livre ; il a commencé par publier
des nouvelles)
- 2002 : La
Soif, Actes Sud 2004 ; Babel
2006 (son deuxième livre)
- 2003 : Rachel,
Actes Sud 2010 ;
Babel 2016
- 2003 : L'année
du mensonge, Actes Sud 2006 ; Babel
2010
- 2008 : Les
Dieux de la steppe, Actes Sud 2016, trad. Michèle Kahn
- 2009 : La Maison du lac (non traduit)
- 2010 : L'Anneau du Loup Blanc (non traduit)
- 2015 : Fred (non traduit)
- 2016 : Dieu aime les histoires (non traduit)
- 2017 : Rose des vents (non traduit)
La Soif au cinéma et en
BD
- 2014 : Andreï
Guelassimov reçoit le prix du meilleur
scénario, lors de la 21e édition du Festival
du cinéma russe à Honfleur pour le film La Soif
de Dmitri Tiourine (2013) ; bande-annonce ICI
- 2015 : projet d'adaptation graphique du roman La Soif d'Andreï
Guelassimov sur le site
behance.net
Dans la presse
=>sur La Soif
- "L'ombre
tchétchène", Philippe-Jean Catinchi, Le
Monde, 18 novembre 2004.
- "Le
poignant chant de guerre d'Andreï Guelassimov", Nathalie
Crom, La Croix, 17 mars 2005.
- "Le
sentiment tragique de la littérature russe renaît",
Contrepoints, 24 septembre 2010.
- "La
Soif d'Andrei Guelassimov" (article incluant une vidéo),
La Russie d'aujourd'hui, 21 octobre 2013.
- "Andreï
Guelassimov, prince de l'ellipse", Émilie Grangeray,
Le Monde, 17 mars 2005.
=>sur d'autres livres et sujets
- "Guelassimov,
Occident de parcours", Philippe Lançon, Libération,
17 mars 2005 (sur son parcours).
- "Andréi
Roublard", Natalie Levisalles, Libération, 23
novembre 2006 (sur le roman L'année du mensonge).
=>ce que
dit Andreï Guelassimov
- Philippe
Lançon raconte
dans Libération
en 2005 que ce n'est pas dans
un collège anglais mais
dans le nord de la Sibérie qu'Andreï Guelassimov aura découvert
les auteurs qui inspirent ses nouvelles : Hemingway, Fitzgerald,
plus tard Salinger ("Il a changé ma vie"). Des
Russes, il ne cite guère que Ludmila
Petrouchevskaia, aux récits vibrant dans les cruautés
de la vie quotidienne russe. Dans la nuit sibérienne et la brutalité
soviétique, la sensibilité des grands nouvellistes a soulagé
Guelassimov : "Je ne me suis pas mis à l'anglais pour
communiquer, mais pour les lire. On pensait alors ici qu'on ne communiquerait
jamais avec le monde extérieur."
(...) A Yakoutsk, d'autres héros l'ont sauvé : Faulkner,
Graham Swift, Brodsky, Audrey Hepburn et le footballeur Ruud
Gullit...
- "Nos
démons" par Andreï Guelassimov, Le Nouvel Obs,
26 octobre 2006 :
dans ce long article où il évoque l'assassinat d'Anna Politkovskaïa,
la guerre en Tchétchénie, la traque des Géorgiens
et le fatalisme, il dit : "En Russie, on
dit qu'il y a toujours une petite part de vérité dans un
mensonge. Ma tâche d'écrivain est de la découvrir.
Mais que la tâche est difficile ! En règle générale,
j'évite la compagnie des écrivains. Sous le communisme,
les sociétés d'écrivains nomenklaturistes étaient
un monde épouvantable. Nous sommes vaccinés contre le besoin
d'appartenir à tout prix à un groupe pour exister. Je préfère
mon lac, ma bicyclette et ma famille. Je n'ai eu que deux expériences
collectives. Jeune homme, j'ai été acteur et régisseur
dans la troupe de théâtre de ce génie d'Anatoli Vassiliev.
Il m'a appris à penser. Il m'a appris l'art. Puis j'ai enseigné
la littérature anglo-saxonne à l'université. Aujourd'hui,
je prépare pour la télévision une adaptation des
nouvelles de Tolstoï consacrées à la guerre du Caucase,
où il fut jeune officier pendant trois ans au milieu du XIXe siècle.
Il combattit les "rebelles tchétchènes" sans états
d'âme. Mon précédent roman,
La Soif,
décrit les terribles désordres psychologiques qu'a provoqués
la guerre de Tchétchénie chez les soldats russes. C'est
une façon de témoigner, même si en Russie ce livre
n'a intéressé personne."
- "Salon
du livre: la Russie vue par ses écrivains", Nelly Kaprièlian,
15 mars 2012 : Andreï Guelassimov est un optimiste qui croit
en Dieu depuis qu'il a lu la Bible au début des années 90,
jusque-là interdite en URSS, et prône les vertus de l'amour.
"En littérature, je me définis comme un néosentimentaliste,
contrairement à Vladimir Sorokine et Viktor Pelevine, qui sont
des satiristes." (
) pour La Soif, Guelassimov, qui
enseignait alors dans une fac en Sibérie, raconte comment il a
vu ses étudiants envoyés en Tchétchénie en
revenir changés : "Ils restaient apathiques pendant les
heures de cours, sans réaction, comme s'ils avaient perdu tout
trait humain."
- Vidéo
d'Andreï Guelassimov au Salon du livre 2018 à Paris où
la Russie était pays invité d'honneur (2 min 35) :
il parle de son écriture, de La Soif.
L'édition et les auteurs russes
dont Andreï Guelassimov
- "Presque
tous les écrivains russes interrogent le passé",
Le Monde, 17 mars 2005, entretien par Émilie
Grangeray avec Michel Parfenov, directeur de la collection "Lettres
russes" aux éditions Actes Sud, qui décrit le paysage
littéraire et éditorial contemporain. Selon lui, "le
rôle de la littérature est de mettre en lumière le
refoulé né du fait que l'équivalent d'un procès
de Nuremberg n'a pas eu lieu en Russie". Il semblerait que beaucoup
de jeunes auteurs, sans renier pour autant leur famille russe, puisent
leur inspiration dans la littérature occidentale. "Il ne
faut pas oublier que, pendant longtemps, les Soviétiques n'ont
pas eu accès à ce qui s'écrivait ailleurs. Ainsi,
entendre Andreï Guelassimov dire qu'il doit davantage aux auteurs
américains est quelque chose de tout à fait réjouissant
: c'est la preuve du désenclavement, et du refus de tout provincialisme
des nouveaux écrivains."
- "Internet,
rampe de lancement pour les écrivains en Russie", Alain
Beuve-Méry, Le Monde, 14 mai 2010
: La Soif d'Andreï Guelassimov "a d'abord connu un
grand succès sur le Net, en Russie. La Soif a fait figure
de roman générationnel pour tous les étudiants qui
ont été contraints de faire la guerre en Tchétchénie.
L'engouement sur la Toile n'a pas enrayé les ventes papier. Au
contraire, environ 200 000 exemplaires se sont vendus. Et si Andreï
Guelassimov n'a pas touché les dividendes de son ouvrage, c'est
parce que son éditeur ne l'a pas payé !"
- "La
nouvelle vogue des histoires courtes", Émilie Grangeray,
Le Monde, 3 mars 2005 : pour Andreï Guelassimov, "ce
genre de textes courts est sans doute de plus en plus populaire parce
qu'il tend à refléter la structure d'une journée.
Pas d'une année, ni de dix. Or, de nos jours, on préfère
vivre ici et maintenant".
- "Étude
de la collection Lettres russes, Actes Sud", de Camille Pizzaballa,
sur site Monde
du livre, 19 juillet 2016 : un éclairage détaillé
sur l'édition de la littérature russe en France (et pas
qu'Actes Sud), parmi laquelle Andreï Guelassimov.
La traductrice
- Professeure de russe, traductrice (de La Soif et de trois autres
livres de Guelassimov), elle reçoit en 2008 le Prix Russophonie
récompensant la meilleure traduction du russe vers le français
pour L'Année
du Mensonge dAndreï
Guelassimov et Pathologies
de Zakhar Prilepine dont elle devient
la traductrice attitrée. Elle reçoit également, en
2015, le Prix Jules Janin de lAcadémie Française pour
la traduction de Coup
de soleil et autres nouvelles dIvan Bounine.
- À propos de son prix Russophonie, elle affirme : "Voir
mon travail reconnu par un jury composé déminents
spécialistes de la Russie, et des littératures française
et russe. Je tiens à exprimer ma reconnaissance à tous ceux
qui ont uvré pour la création de ce prix : il
permet de faire sortir de lombre les travailleurs solitaires que
nous sommes, et surtout, de mieux faire connaître en France une
littérature russe foisonnante et vivante".
- Joëlle Dublanchet explique ce quelle entend par une "bonne"
traduction : "fidélité au texte, à son
contexte, et recherche permanente du mot juste, et surtout, du ton juste".
- A propos des traductions d'Andreï Guelassimov, elle précise :
"Dans Lannée du mensonge, Andreï Guelassimov
dresse par petites touches un portrait de cette Russie daprès
perestroïka qui se cherche et a du mal à se trouver. Son style
est vif, nerveux, très souvent elliptique ce qui rend parfois
la traduction difficile. Il faut plonger dans la psychologie du personnage
pour comprendre pleinement ce quil veut dire et trouver le style
qui lui convient le mieux. En outre, lauteur emploie un vocabulaire
argotique, émaillé de grossièretés. Or rien
nest plus difficile à traduire que largot, entre autres
parce quil y en a plusieurs.
Jai eu demblée des relations confiantes et amicales
avec A. Guelassimov dont jai fait la connaissance en novembre
2004, à loccasion des Belles Étrangères. Les
éditions Actes Sud venaient de publier La Soif. Il mest
arrivé de contacter lécrivain pour me faire préciser
quelque chose, mais la difficulté, avec lui, nest pas tant
dans la compréhension que dans le rendu de son style." ("Trois
questions à Joëlle Dublanchet", site Spoutnitsi,
9 février 2008)
Nos cotes d'amour
pour le livre, de l'enthousiasme au rejet :
|
||||
à
la folie
grand ouvert |
beaucoup
¾ ouvert |
moyennement
à moitié |
un
peu
ouvert ¼ |
pas
du tout
fermé ! |
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