Les villageois ont surnommé le petit vacher Patte folle, à cause de son bras atrophié. Lui appelle ses vaches Opale ou Émeraude. Il a dix ans et, près du réservoir, il émerveille ses amis avec ses marionnettes. Ils sont sur le territoire de la Mère Sacrée, puissance protectrice du village. Un cobra qui veille sort de terre et senroule autour du corps de lenfant. Qui gagnera, du jeune rêveur ou du serpent ? Saneh Sangsuk est né en 1957 près de Bangkok. Diplômé en langue et littérature anglaises, romancier, il s'est imposé, notamment avec L'Ombre blanche, comme un talent majeur de sa génération. "Il y a dans ce texte une beauté dépouvante. Comme si le cobra Sanek Sangsuk senroulait autour de son lecteur et ne le lâchait plus." Le Nouvel Observateur Traduit du thaï par Marcel Barang
L'Ombre
blanche : portrait de l'artiste en jeune vaurien, 2000 Tableau tragique et drôlatique
de la course au bonheur d'un jeune homme dans un Bangkok violent, où
la misère et la débauche, les sentiments exacerbés,
les amitiés naïves et salutaires, les trahisons et le crime
constituent le seul bagage de héros anticonformistes et sans concession.
Dans ce roman autobiographique, Saneh Sangsuk livre une descente aux enfers
d'un sombre lyrisme et d'un humour désespéré, confession
diabolique d'un désir de sainteté, de la quête sauvage
d'une innocence impossible et marquée par l'obsession d'une faute
originelle. Par l'érotisme et la transgression, l'écriture
opère la rédemption du narrateur devenu ermite, réfugié
dans une quasi-ruine, à l'orée d'un village du nord de la
Thaïlande... Une
histoire vieille comme la pluie, 2004 "Le révérend père Tiane avait un nombre infini de choses à raconter. Ses histoires étaient parfois loufoques parfois tristes parfois effrayantes et maintes fois regorgeaient de formules magiques et de miracles... L'histoire de la fois où il s'était rendu en pèlerinage en Inde et il s'était trouvé confronté à une harde d'éléphants à en avoir le souffle coupé, les enfants l'avaient déjà entendue et voulaient l'entendre encore ; l'histoire de la fois où il en était encore à s'entraîner pour le pèlerinage et où un cobra de douze coudées était venu lui tenir compagnie sur sa couche par une nuit glacée de la saison froide de cette année-là, les enfants l'avaient déjà entendue et voulaient l'entendre encore ; [...] l'histoire du tigre mangeur d'homme dont l'âme de la victime avait fini par l'habiter et par faire de lui un tigre saming au corps de tigre dominé par l'âme maléfique [...] les enfants l'avaient déjà entendue et voulaient l'entendre encore..." S.S. Seule
sous un ciel dément, 2014 "Aux temps du Bouddha", une très vieille bonzesse, pleine de sagesse et de compassion, raconte son histoire à ses disciples. Jeune femme pauvre, brue dans une famille princière qui la traite en esclave, elle a donné naissance à un fils, Wélou. Ce petit garçon vif et gai est son seul bonheur, toute sa vie et même sa survie : grâce à lui elle a enfin une place dans la maison de son mari. Mais un matin à laube Wélou est mordu par un cobra. La jeune femme, affolée, fuit la maison, lenfant dans les bras, à la recherche de ce qui pourrait le sauver Commence une longue quête éperdue à travers la jungle, les villages et le temps. Un livre intense, inattendu, envoutant. Saneh Sangsuk, né en 1957 près de Bangkok, diplômé en langue et littérature anglaises, simpose comme un talent majeur de sa génération. LOmbre blanche (Seuil, 2001) et Venin (Seuil 2001 et Points) lont fait apprécier du public français. L'ambassadeur de France Laurent Bili a remis les insignes
de Chevalier des Arts et des Lettres au romancier Saneh Sangsuk le 7 novembre
2008. Selon les mots de l'ambassadeur, Saneh Sangsuk est indiscutablement
le romancier thaïlandais le mieux connu en France. Venin,
son bref et captivant roman, a été publié aux éditions
du Seuil, puis en poche, et s'est vendu à plus de 25000 exemplaires.
L'ombre blanche est reconnu par les critiques européens
comme un chef d'uvre, qui fait de Saneh Sangsuk l'un des grands
écrivains contemporains... |
Saneh SANGSUK
(né
en 1957)
|
Rozenn,
Manon
Jacqueline, Muriel, Monique S |
Lisa (depuis Paris)
Je ne sais pas vraiment quoi penser de ce court roman... J'ai été
un peu agacée lors de ma lecture : je comprends que c'est une sorte
de conte, mais quand même ce petit garçon qui se trimballe
un serpent de 50 à 60 kilos, mouais j'y crois moyen. Et puis j'ai
décidé de faire abstraction de la vraisemblance et le livre
m'a quand même plu. Jai beaucoup aimé la fin, un peu cruelle.
Je ne comprends pas la morale s'il y en a une. J'ai hâte de lire
vos avis. J'ouvre à moitié.
Monique S (dans la Sarthe)
D'habitude, je n'aime pas trop les contes. Mais avec ce récit court
et dépaysant, on est plongé dans une vie d'enfant, avec
toute sa rudesse.
En même temps que l'histoire, on découvre toute une vie sociale,
une vie de famille, des paysages, la vie d'un village avec ses peurs et
ses croyances. Autour de l'enfant, on découvre les animaux, les
autres enfants, l'accoucheuse, le gourou... Et la nature, sous un autre
climat, est très présente. L'enfant a une riche vie intérieure :
il nous entraîne dans le rêve (les nuages rouges du soir),
dans l'art des marionnettes, et l'art de raconter.
Puis, quand arrive le serpent et son emprise, quelle belle lutte pour
"rester debout" d'abord, pour aller chercher de l'aide sans
ébrécher les coutumes (la cérémonie au temple),
sans surseoir à ses devoirs (aller voir si les vaches sont bien
rentrées et attachées : toute la richesse de ses parents)
et enfin paraître devant le village dans toute l'horreur de sa situation.
La fin évidemment me déçoit : j'aurais voulu que
cet enfant si courageux puisse vivre la vie dont il avait rêvé.
Sa victoire extérieure ne compte pas pour lui ; l'important, c'est
la force de l'esprit, qui à un moment lui a failli. Et c'est pour
lui comme si le fil de la marionnette s'était cassé.
J'ai bien aimé ce livre parce qu'il nous fait entrer dans une autre
culture de l'intérieur. En ce qui concerne le style, j'ai aimé
les répétitions du début (que l'on perd ensuite,
c'est dommage) répétitions très présentes
dans les "poésies premières", quand la littérature
était encore orale. J'ouvre aux trois quarts.
Marie-Odile (dans les Pyrénées)
J'ai lu d'une traite ce texte court qui a parfois des allures de conte
(récit hors du temps, répétitions). J'ai aimé
l'innocence de l'enfant, sa façon de nommer les vaches, de jouer
aux marionnettes. Mais lorsqu'il devient la proie du cobra, tout change
brutalement. J'ai pensé au combat de Gilliat et la pieuvre dans
Les Travailleurs de la mer de V. Hugo. La bête maléfique
enserre, étouffe. Ici le prédateur et la proie se confondent
de façon monstrueuse et effrayante. Et cette frayeur, alimentée
par les souvenirs du père, ne m'a plus lâchée, pas
même à la fin car la mort du serpent ne délivre pas
l'enfant "qui avait
décidé d'accepter sa défaite".
Je me suis demandé ce que pouvait signifier un tel récit.
Que les vux ne se réalisent pas ? Qu'on ne lutte pas
contre l'imposture ? Que lorsqu'on baisse les bras on perd
la raison ? J'ouvre à moitié.
Manon (à Paris)
Mais quelle scène d'anthologie !! Mais quelle beauté
de l'écriture !! Mais quelle bataille !! Mais quel livre !!
J'ouvre en grand !
Manuel (à Vars comme ceux qui suivent)
Je n'aime pas. C'est invraisemblable. Et ce gourou ! C'est cruel, bizarre.
Je n'aime pas. Je suis resté complètement extérieur.
Heureusement, c'est court.
Françoise
Je n'ai pas aimé non plus. Je n'ai pas grand-chose à dire.
Et même dans la perspective d'un conte, quels symboles ? Les
descriptions sont longues. Je n'ai pas été embarquée.
Je compatis. C'est un enfant qui réfléchit beaucoup pour
son âge
. Quelle cruauté ! Je n'ai pas aimé.
Je ferme.
Jacqueline
Je ne peux pas le fermer. C'est plutôt désagréable.
J'ai été prise dans l'histoire. Prise par le conte. J'ai
été un peu pressée à le lire. Quant à
l'histoire des vaches, je voyais plutôt des buffles, ce sont des
bêtes de somme, huit, donc le père accède à
une certaine richesse. J'ai beaucoup aimé cet enfant dans le village.
Est-ce que c'est un conte
contre ? Il respecte la religion.
J'espérais que ces vux se réalisent. Il le laisse
crever le bourreau. J'ai du mal à lire la fin. J'étais tendue
vers la fin. C'est terrible. J'ouvre trois quarts. L'effet est très
fort. Mais sans que ça me plaise.
Chantal
Je l'ai lu d'une traite, mais comme on lit des mots. Ce n'est pas un enfant,
je ne l'ai pas cru. Quant au cobra
j'ai rigolé quand le môme
avance avec. Livre fermé.
Fanny
J'ai
bien aimé le début notamment les noms donnés aux
animaux. Quand arrive le cobra, c'est une peur de cauchemars. Quand l'enfant
se balade avec, j'ai cru p. 44 et ensuite à répétition
qu'il était mort. J'y ai vu une part de fantastique. C'est un conte
fantastique macabre. Je n'ai pas eu de plaisir de lecture. C'était
terrible. Le final dans le village avec le serpent, c'est très
long. J'étais contente que ça se termine. J'ouvre un quart
pour le début. C'est désagréable. Mais j'aime bien
l'écriture.
Édith
Je l'ai lu deux fois, ce conte. Les vaches font comme une comptine. Je
retiens les marionnettes, le prêtre avec l'histoire du zizi. Marie-Odile
m'influence. C'est une culture différente. Le pouvoir de Songwât
ne renvoie-t-il pas à la dictature ? C'est un conte avec une dimension
politique. J'ouvre à moitié. Mais ça ne m'a pas emballée.
Il devient fou. Peut-être y a-t-il un sens caché.
Nathalie
Je le ferme car je ne vois pas le sens. C'est très triste. Cet
enfant est une merveille. La bêtise mène à la folie.
C'est un cauchemar. Dans la traduction, j'ai été gênée
par gaga (p. 30) et aussi tudieu, enculé, Patte folle, estropié.
La haine pour un tout petit... c'est l'enfant sacrificiel de la communauté.
La partie avec le serpent est insupportable. Le livre m'oppresse. Il me
rend triste. Je n'aime pas du tout.
Suzanne
Je l'ai lu d'une traite. J'aime bien les contes. Je n'ai pas pu penser.
La vraisemblance n'a pas d'importance. Le révérend Tiane
joue un rôle particulier. Marie-Odile m'a donné des pistes.
La folie est une manière de s'en sortir. Cette histoire incroyable
se déroule dans une autre culture et donc différemment de
chez nous on sauve le gamin. La lecture m'a embarquée sans réfléchir.
Il faut se mettre dans une autre pensée. J'ouvrirais aux trois
quarts, mais seulement à moitié pour ce que j'en fais.
Séverine
Je ne peux pas dire que j'ai aimé, mais j'ai été
indifférente. Si c'est un conte, on devrait trouver une morale.
Avant qu'arrive le serpent, l'enfant se voit marionnettiste et il a déjà
du succès. C'est pour moi politique : le serpent empêche
qu'il soit artiste, qu'il s'exprime. Je n'ai pas eu de plaisir, mais pas
de traumatisme... J'ouvre un quart.
Muriel
J'ai beaucoup aimé. Il y a quelque chose de fantastique. J'ai noté
la charge contre la religion une charge d'enfer. Face à la pauvreté
matérielle et intellectuelle, Songwât a pris le pouvoir.
La religion s'impose auprès du petit, qui en danger de mort, n'interrompt
pas la prière. Les parents sont sous l'emprise des dieux et des
déesses et ils s'enfuient. Il est puni par la déesse. Tout
le village le lâche y compris ses parents, c'est ce qui m'a plu :
un conte fantastique et une charge contre les superstitions. J'ouvre aux
trois quarts. J'ai
lu un autre livre de cet auteur, Seule
sous un ciel dément, c'est un peu le même genre,
fantastique, mais trop long, j'ai préféré Venin.
Pour moi aussi, la traduction Patte folle pour nommer l'enfant
estropié ne va pas.
Claire
Le traducteur traduit peut-être littéralement Patte folle,
enculé, etc. Dans ce cas, pourquoi changerait-il
Rozenn
Il y a plusieurs religions présentes dans le livre, comme le truc
de moines en restauration où les parents travaillent et Songwât,
ce truand, un tartuffe : toutes les religions sont condamnées.
Cet enfant est aussi condamné. Il avait une porte de sortie avec
le fait de raconter des histoires. Il se bat comme la chèvre de
Monsieur Seguin. Il ne trouve pas d'aide. Les villageois sont en train
de l'aider, pensent-ils.
Je viens d'Israël où j'ai ressenti une colère contre
les religions. C'est une charge énorme que ce livre, forte :
j'ouvre en entier.
Quelques petites phrases avec anaphores m'ont gênée, mais
c'est un détail.
Catherine
Je n'ai pas été très sensible à ce livre.
Je n'ai pas compris. J'aimerais discuter avec un Thai. J'aimerais qu'on
m'explique. J'ai un peu aimé le début, c'est pourquoi j'ouvre
¼. Ça ne correspond pas à ce que j'ai vu là-bas,
où il y a une influence animiste.
Fanfan
Je ne suis pas du tout rentrée dedans. Pourtant j'aime les contes.
Le style est lourdingue. Je me suis forcée. Le petit garçon
avec les vaches, je n'ai pas compris ce qui se passe, je suppute en vous
entendant, il perd la raison quand il s'arrête de se battre. Pourtant
les bouddhistes c'est pas nul, mais là ça ne tient pas debout.
Même spirituellement. Livre fermé.
Denis
Je
suis encore dans l'atmosphère du livre d'hier, l'idylle
avec chien..., et j'ai eu du mal à entrer dans celui-ci. En
général, je suis amateur de contes. Je ne leur trouve pas
toujours une signification bien claire, et cela ne me pose pas problème.
Je me dis que c'est un monde imaginaire qui se passe de logique.
Ici, c'est le thème du venin, du poison, qui m'a intéressé,
mais je n'ai pas approfondi. Je me suis rappelé un court métrage
de Hitchcock, Poison
(un film qu'il a réalisé pour la TV américaine en
1958, d'après Roald Dahl), où un homme, couché dans
son lit, croit qu'un serpent très dangereux est caché sous
les draps. Il appelle au secours, un autre homme arrive qui, au lieu de
l'aider, exploite la situation à son avantage. Un beau petit suspense.
Le héros de Sangsuk exploite tout différemment, et de façon
très surprenante, la menace du venin.
Ce livre m'a aussi rappelé un récit de Rumer Godden,
Le fleuve,
dont Jean Renoir a tiré son
film. Cela se passe en Inde, sous la colonisation anglaise. Il s'agit
d'un jeune garçon qui s'est fait une cachette dans un arbre, qu'il
partage avec un cobra. Il ignore le danger et finit évidemment
par être mordu. Dramatique... (c'est la grande sur qui raconte).
Le canevas narratif de Venin m'a surpris : je m'attendais
à ce que le "méchant" soit mordu... Mais la fin
d'un conte est souvent difficile à prévoir (par exemple
les Contes
africains
édités chez Gründ, que je lisais
à mes enfants).
J'ouvre à moitié, récit typique ou pas.
Claire
Je n'avais pas vraiment d'avis comme souvent..., mais après vous
avoir entendus, pour moi ce n'est pas un conte, mais une fable politique.
Le tyran règne dans tous les domaines ; il n'a aucune bonté
pour l'enfant qui est mal foutu. Je n'ai pas été "traumatisée"
Dans le long épisode du serpent, j'ai été parfois
partagée entre comique et grandiose. Je suis restée sur
ma faim. J'ouvre à moitié, j'ai une espèce de frustration.
J'ai lu ceci dans Le Monde
ces jours-ci, on se croirait dans l'univers de Venin...
(Il s'agit des 12 footballeurs âgés de 11 à 16 ans et leur entraîneur de 25 ans qui se sont retrouvés bloqués par la montée des eaux de la mousson dans une grotte en Thaïlande.)
"Tout
le royaume semblait au chevet des disparus : le premier ministre et chef
de la junte militaire, le général Prayuth Chan-ocha, était
venu, la semaine dernière, rencontrer les familles des adolescents,
qui priaient, mains jointes à l'entrée des grottes. On l'a
vu essuyer une larme devant les mères éplorées, les
assurant néanmoins être optimiste pour la suite des événements.
Le roi Vajiralongkorn a fait savoir, par l'entremise de son secrétariat
personnel, qu'il s'inquiétait du sort des élèves
footballeurs.
Chamans et autres sorciers s'étaient mis de la partie, dans une
nation où le culte des phii (esprits) reste très
vivace, en parallèle à la religion bouddhiste. Certains
ont sacrifié des poulets et des porcs dans l'espoir que les esprits
aident les jeunes footballeurs à rester en vie. Un journaliste
de l'Agence France-Presse a rapporté avoir vu un reusee (ermite)
vêtu d'une tunique en peau de tigre prier silencieusement à
proximité des caves. Le patriarche suprême du Sangha le
clergé bouddhique a appelé ses concitoyens
à prier ensemble pour la survie des jeunes gens bloqués
sous terre.
Les représentants des autres religions minoritaires s'étaient
associés à la prière générale, les
chrétiens chantant des cantiques dans les églises et les
musulmans du sud du pays dédiant la dernière prière
du vendredi aux enfants." (voir l'article
complet)
Plusieurs
Et si on interrogeait le traducteur pour qu'il nous explique ce qu'on
comprend mal dans Venin ? (Ce qui est fait immédiatement,
grâce à son
site où figure son mél.)
Nous participons à un club de
lecture et sommes 19 à avoir échangé ce jour au sujet
de Venin que vous avez traduit. Nous avions d'ailleurs avec nous
les trois autres livres de Saneh Sangsuk.
Nous nous sommes posé de nombreuses questions :
- sur le sens de ce récit : quelle portée symbolique
lui donner : politique, antireligieuse ? Y a-t-il des clés
propres à la culture thaï qui nous échapperaient ?
Notamment concernant le serpent ?
- sur le genre de ce texte : reçu par plusieurs comme un conte,
ou un récit fantastique, ou encore une fable ; en quoi est-il
autobiographique (d'après ce que nous avons lu) ?
- sur la traduction : nous nous sommes interrogés sur les
termes Patte folle, gaga, Tudieu, enculé
- sur les allusions à la religion : Révérend père,
monastère renvoient à quelles religions ?
- sur la réception en Thaïlande de ce livre : est-il
lu ? Et comment est-il perçu ?
24h après, nous avons une réponse de Thaïlande : merci Marcel Barang !
Activité fort sympathique, et
vous vous posez de bonnes questions.
La religion en question c'est évidemment le bouddhisme, que l'auteur
dénonce au même titre que les autres piliers de la société
thaie, administration locale (État), esprit communautaire (tous
les Thais sont frères et surs, pi nong kan) et famille.
Le serpent, ici comme ailleurs dans le monde, c'est le mal, c'est l'adversité.
A lutter sans concession contre un démon plus fort, plus colossal
que lui, l'enfant, tout en en venant à bout, finit par perdre la
raison : il y a un parallèle politique à faire avec
les événements de 1992 notamment (et des années 2010),
où la lutte sans merci de camps opposés conduisait et conduit
à une perte de raison collective et d'autodestruction sociale.
Si dimension personnelle il y a, c'est celle qui a fait pendant le plus
clair de sa vie de l'auteur, un être asocial et un paria, dont les
écrits iconoclastes (voir L'Ombre
blanche) affriolaient quelques bonnes âmes, mais étaient
traînés dans la boue par les bien-pensants. Grâce au
ministère français de la culture qui, en faisant de lui
un chevalier des arts et des lettres, lui a donné "une crédibilité"
locale forcée, Saneh de nos jours est un grand écrivain
reconnu chez lui (mais toujours impécunieux) et, du coup, il s'est
éloigné de sa sensibilité jadis mûrie dans
le monde livresque occidental, pour tartiner sur des thèmes de
sa culture ancestrale, pas toujours de façon réussie.
Peu importe le label, conte, fable, récit fantastique. Ce texte,
grâce a son écho a l'étranger, est fort lu ici, a
fait récemment l'objet d'un film et a même été
diffusé comme livre en trois langues (thai, anglais, français) !
Je ne vois pas en quoi les mots que vous listez posent problème,
sauf peut-être tudieu because saut religieux. ;-)
Bonnes lectures.
Quelques repères sur l'auteur
- Né en 1957 près de Bangkok, dans une famille paysanne,
Saneh Sangsuk est le fils d'un chef de village. Jeune
rebelle, il est placé à 16 ans par son tuteur et avec lui
dans un camp militaire au moment de la chute de la dictature.
- En 1976, il intègre l'université
et en ressort diplômé en langue et littérature anglaises.
- Il a commencé à écrire des nouvelles dès
le collège, inspiré par les auteurs thaïlandais et
internationaux : Oscar Wilde, Rabindranath Tagore, Juan Ramón Jiménez,
Franz Kafka, Hemingway, Henry Miller et James Joyce, ces derniers décisifs
(Sangsuk cite Ulysse comme l'une de ses motivations pour écrire).
- Il est confronté à des problèmes matériels
importants. En 1994, il publie son unique roman en Thaïlande,
Lombre blanche, à compte d'auteur, dans la maison dédition
Arunthaî qu'il a créée ; ce roman autobiographique
dans lequel il raconte ses frasques d'adolescent n'a aucun succès
en Thaïlande, mais est bien reçu par un public international
(traduit en sept langues).
- Parallèlement à l'écriture, il a travaillé
pour l'USAID (Agence
américaine pour le développement national), dans la publicité,
comme traducteur : La faim de Knut Hamsun, Le soleil se
lève aussi dHemingway, La Métamorphose
de Kafka, et aussi : Rabindranath Tagore, Oscar Wilde, Joyce, Oscar
Wilde, David Ogilvy.
- En 2008, il reçoit l'insigne de chevalier de l'Ordre des Arts
et des Lettres par l'ambassadeur
français pour sa contribution à la littérature.
- Aujourd'hui, il vit retiré à Phetchaburi,
à 160 km de Bangkok, loin de la vie littéraire d'un pays
qui ne s'intéresse que tardivement à son uvre.
Les uvres de Saneh SANGSUK traduites
en français
Toutes publiées au Seuil,
coll. "Cadre vert", et traduites par Marcel Barang :
- L'Ombre
blanche : portrait de l'artiste en jeune vaurien, 2000, 496 p.
- Une
histoire vieille comme la pluie, 2004, 228 p.
- Venin, 2001
(publié en 2000 en Thaïlande) ; puis Points 2005,
96 p.
- Seule
sous un ciel dément, 2014, 160 p.
Des articles sur Saneh SANGSUK
- Une présentation panoramique et illustrée
de l'uvre de Saneh Sangsuk par des amoureux de la Thaïlande
et de sa littérature :
alainbernardthailande
- Un article savant qui donne des éclairages sur
l'auteur et sur son écriture : "Le
rejet des mythes canoniques bouddhiques dans Lombre blanche
de Saneh Sangsuk : vers un non-bouddhisme", Frédéric
Maurel, Moussons (Recherches en sciences sociales sur l'Asie
du Sud-Est), n° 4, 2001
Dans la presse généraliste
(au fur et à mesure des traductions)
- "Plus
fort que moi", Les Inrockuptibles, 9 janvier 2001 (sur
L'ombre blanche)
- "Opéra
de Sangsuk", Cécile Moscovitz, Libération,
8 février 2001 (sur L'ombre blanche)
- "Une seule
vie", La Quinzaine littéraire, 1er février
2001 (sur L'ombre blanche)
- "Morsure
entêtante", Livres Hebdo, 11 mai 2001 (sur Venin)
- "Le
vaurien thaï", Jean-Luc Douin, Le Monde, 22 juin
2001 (sur Venin et L'ombre blanche)
- "Saneh
Sangsuk Venin", Nathalie Agogue, Libération, 28
juin 2002 (sur Venin)
- "Un
tigre dans son auteur", Natalie Levisalles, Libération,
16 septembre 2004 (sur Une histoire vieille comme la pluie)
- "Traduit
du thaï", La Quinzaine littéraire, 1er novembre
2004 (sur Une histoire vieille comme la pluie)
- "Un
conte bouddhique parfait", Maurice Mourier, La Quinzaine littéraire
(sur Seule sous un ciel dément), 1er septembre 2014.
Sur le traducteur Marcel Barang
- "Thaï
crayon", interview du traducteur Marcel Barang sur la littérature
thaï, Natalie Levisalles, Libération, 16 septembre
2004
- Marcel Barang, "La
traduction littéraire passe par le mot à mot",
Impressions
dExtrême-Orient, n° 3, décembre 2013
- Un portrait du journaliste "Marcel
Barang, une histoire française en Thaïlande", Jean-Noël
Orengo, Arrêt sur info, 22 juillet 2015
- Un portrait du traducteur sur le site de la belle revue littéraire
Jentayu (nouvelles voix d'Asie), réactualisé selon
les traductions (Jentayu publie par ailleurs un hors
série sur la littérature contemporaine thaïe).
- Le site de Marcel Barang sur la littérature thaïe :
thaifiction.com ;
et son blog : marcelbarang.wordpress.com
Fiction et réalité
En Indonésie, le corps d'une femme avalée par un python
de sept mètres, a été retrouvé intact dans
le ventre de lanimal :
Le Monde, 16 août 2018 et pour
le voir pour le croire : ICI
sur le site witfm
Nos cotes d'amour
pour le livre, de l'enthousiasme au rejet :
|
||||
à
la folie
grand ouvert |
beaucoup
¾ ouvert |
moyennement
à moitié |
un
peu
ouvert ¼ |
pas
du tout
fermé ! |
Nous écrire
Accueil | Membres
| Calendrier | Nos
avis | Rencontres | Sorties
| Liens