Foliothèque 2000, 272 p. Quatrième de couverture : « Nous voudrions montrer que les Mémoires d'une jeune fille rangée sont un récit autobiographique réussi, fortement structuré, plus complexe et plus travaillé qu'il n'y paraît au premier abord, même s'il ne s'aventure pas dans des expérimentations formelles novatrices. Le "ton juste", que plusieurs critiques avaient salué dès sa parution, réponde à l'ambition que s'est toujours donnée Simone de Beauvoir d'établir avec le lecteur une communication égalitaire et généreuse, qui à la fois lui transmette le goût de sa propre vie et l'amène à mieux se connaître lui-même. » (Éliane Lecarme-Tabone)
Mémoires d'une jeune fille dérangée,
Bianca Lamblin, Balland 1993 (en partie sur
Gallica)
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Simone de Beauvoir (1908-1986)
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Nos cotes d'amour
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Nathalie R (avis transmis)
Quaurait-il fallu pour que je maintienne mon attention ? Le
livre mest tombé des mains après quinze jours de lecture
et je ne lai pas terminé. Suis-je trop jeune ! Trop
vieille ? Y a-t-il un âge pour lire Beauvoir ? Suis-je
dun milieu social trop simple pour my tailler une place ?
Lai-je pris pour ce quil nétait pas ? En
ai-je attendu une révélation qui nest pas venue ?
Lavais-je placé au pinacle des uvres incontournables ?
(Jadore Duras, je peux lire et relire Un
barrage contre le Pacifique plus de dix fois avec autant de plaisir).
Et pourtant, Le Barrage nest pas à proprement parler
une biographie.
J'ai anticipé et commencé il y a plus d'un mois et demi
ma lecture. Je savais le livre long et copieux. J'ai donc commencé
avec courage le pavé et très vite, je me suis dit que je
n'avais aucun problème pour le lire. Ravie, je m'engageai plus
en avant, étonnée de cette facilité. Somme toute,
c'était très narratif. Mais petit à petit, je tournai
les pages tout en luttant contre l'impression que cette écriture
était artificielle et très loin de la sincérité
que j'attendais. Claire eut beau dire "patience, ça va devenir
croustillant", ça n'a pas suffi pour me donner le courage
de poursuivre.
Claire (à distance)
Ah, j'ai dit ça ?
Nathalie
Quel ennui ! Quel ennui ! Aucune possibilité de m'identifier,
même la relation amicale qu'elle entretient avec Élisabeth
Mabille m'a semblé fausse, trop nourrie de détails, trop
éloignée d'une introspection sincère.
J'ai commencé à prendre des notes, par exemple sur "la
promiscuité du mariage" qui m'a fait sourire (Folio p. 100)
et sur ce besoin de vivre "enfin quelques instants sans témoin"
parce que je m'y reconnais totalement. Mais qui pense cela ?
Les mémoires me semblent surchargés d'informations. Entre
temps, j'avais eu entre les mains Juste
après la vague de Sandrine Collette que je découvris
et lus d'une traite en quelques jours puis dont j'allai chercher immédiatement
une autre uvre à la médiathèque pour confirmer
ou infirmer l'idée que j'en avais trouvé une qui elle m'enchantait
!! Et par la forme, et par le fond ! Je réussis même à
donner envie à la bibliothécaire de partir pour le week-end
avec sa vague sous le bras ! (si ! si !)
Donc, Beauvoir et sa vie de jeune fille rangée m'a ennuyée
à mourir. Je n'y ai pas cru un instant. Je ne cessais de voir son
visage accolé à celui de Sartre, j'attendais la femme, je
voyais une enfant précieuse et une écrivaine de 50 ans qui
ne réussissait pas à retranscrire la fraîcheur de
son adolescence. Plus j'avançais, plus je me sentais rejetée
en lisière de cet univers capitonné et à des milliers
de kilomètres de ce monde dans lequel, une fois le frère
mort "à peine démobilisé de la grippe espagnole",
tout le monde sèche ses larmes et où le bonheur "ressuscit[a]"
p. 91.
Bref, j'ai abandonné à la page 150 sur 400. Et en 2019,
je ne l'ouvre pas et je pense que j'ai dû rater quelque chose mais
tant pis. J'attendrai d'être encore plus vieille pour peut-être
reprendre ma lecture et je vous souhaite une bonne soirée je l'espère
très dynamique !
Claire (avis transmis)
L'avis de Nathalie me donne des sueurs froides... et je crains le pire...
Je suis une groupie totale de Simone de Beauvoir sans avoir lu grand-chose
intégralement. J'attendais à la lecture de ce livre de savoir
pourquoi il avait compté pour Didier Eribon que j'avais lu comme
autre transfuge de classe quand nous avons lu cette année Annie
Ernaux.
J'ai d'abord ressenti de l'étonnement : alors que Simone de
Beauvoir est pour moi une contemporaine, ce qui m'a sauté aux yeux,
c'est que sa vie commence en un autre siècle, c'est un roman "en
costume" (au sens propre, d'ailleurs, car Nizan à Normal sup
porte des pantalons de golf...) : la place de la religion est stupéfiante,
le pouvoir des parents nous ramène chez Molière, l'aspect
rigide des murs est incroyable : c'est si guindé que
Zaza et elles, camarades de classe, se vouvoient et que leurs lettres
sont lues par leurs mères. On sent aussi une idéologie réactionnaire
et la haine des intellectuels.
J'ai souvent ressenti de l'admiration : pour la façon dont
elle s'extrait de ce conformisme, en pensant, en sentant, en analysant.
Curieusement il reste la pruderie, l'éloignement du corps, l'absence
de toute affection physique, contrebalancés par une passion pour
la nature qu'elle rend très bien.
J'ai découvert en quoi, comme Ernaux et Eribon, elle est transfuge
de classe : en faisant des études, observe-t-elle, "j'allais
trahir ma classe et déjà je reniais mon sexe ; cela non
plus, mon père ne s'y résignait pas : il avait le culte
de la jeune fille, la vraie. Ma cousine Jeanne incarnait cet idéal
: elle croyait encore que les enfants naissaient dans les choux."
J'adore.
Alors que SdB est peu reconnue par son écriture, j'ai aimé
son style, fait de netteté, de fermeté, et qui donne lieu
à des formules qui m'ont beaucoup plu (voir citations dans
mon avis - trop - développé).
Elle narre certes les années qui passent, mais le récit
est fait de pensée, elle analyse sans arrêt, avec recul.
Et si elle se montre parfois arrogante, elle est impitoyable avec elle-même
de façon que je trouve jubilatoire, surtout quand elle se sait,
respectivement, aveugle.
Comme un roman, le récit vaut aussi par ses personnages, et il
y a de quoi faire ! Le père extraordinaire, assez féministe
paradoxalement, passionné de théâtre, avec une place
immense pour les lectures (j'imagine cette scène de la famille
qui lit à l'unisson tous les quatre ensemble), Zaza bien sûr,
Jacques (on a envie de lui donner des claques, ainsi d'ailleurs qu'à
Simone).
J'ai beaucoup aimé son enthousiasme pour Garric qui illumine ses
jours et dont elle boit les paroles, et qui contribue aussi à la
sortir de sa classe. Si elle entend une voix intérieure :
"Il faut que ma vie
serve !" qui trace sa voie : "m'exprimer
dans une uvre qui aiderait les autres à vivre",
on peut dire que le projet est abouti, chapeau Simone !
J'ai beaucoup aimé aussi le ballet des normaliens : les travaux
d'approche, les jeux et la place de l'écriture ; tous prévoient
de faire uvre, c'est vraiment sidérant.
La narratrice, personnage principal, est formidable : ce que j'ai
trouvé palpitant est que le récit nous fait assister à
sa prime formation intellectuelle, sa passion de la culture (philosophie,
littérature, cinéma, théâtre, peinture...),
ses goûts d'avant-garde qui tranchent avec son milieu. Elle aussi
fera uvre et ce qu'elle rêve d'écrire, c'est un "roman
de la vie intérieure". Bien joué !
Ce qui m'a frappée aussi, c'est la tragi-comédie, avec de
vraies "scènes" ou elle pleure, crie qu'elle ne veut
pas mourir ou quand elle imagine que si sa sur "disparaissait,
elle n'aurait même pas besoin de me tuer pour mourir."
A ce sujet, j'aime sa sorte d'humour : "je
me récitais ironiquement le mot de Heine : "Quelles
que soient les larmes qu'on pleure, on finit toujours pas se moucher"
ou quand elle va voir un abbé spécialisé
"dans le renflouage
des intellectuels en perdition".
Un seul bémol : alors que le suspense devient insoutenable
vis-à-vis de Sartre, il y a une accélération en fin
de livre, mais pas à propos de Sartre, on ne sait même pas
si elle réussit l'agrég, s'ils couchent ensemble (remboursez !)
et la mort de Zaza est trop longue : frustration de fin de volume donc.
Mais c'est un détail et j'ouvre en grand ce livre qui m'a passionnée
tout du long...
Catherine (avis transmis)
Cest une relecture car je lavais lu vers 16 ou 17 ans, mais
peut-être pas jusquau bout car je nen navais pas
gardé un souvenir très précis. Javais ensuite
commencé Le
deuxième sexe que javais abandonné en cours
de route.
Je lai donc relu il y a quelque semaines. Jai un avis mitigé.
Jai surtout aimé le début, la partie sur son enfance
et la fin, ses études supérieures, la rencontre avec Sartre.
Son adolescence lui a semblé longue, mais à moi aussi... ;
il y a beaucoup de longueurs, de redites ; elle tourne en rond, ressasse
sans fin les mêmes questions et problèmes et le livre m'est
un peu tombé des mains à ce moment-là.
Cest un témoignage très intéressant sur la
vie et léducation dune jeune fille dans un milieu bourgeois
parisien à cette époque. Les choses ont quand même
heureusement évolué depuis. Je reste très admirative
de son parcours : se dégager comme elle la fait de son
milieu et de son mode de pensée nétait pas évident.
Jai aimé les passages sur la lecture et la littérature
qui tiennent une grande place dans le livre et dans sa vie, moins tout
ce qui concerne la religion.
Je ne regrette pas de lavoir lu, jai beaucoup aimé
lécriture. Je ne suis pas sûre malgré tout que
je lirai le reste de ses mémoires. Jhésite entre ½
et ¾.
Etienne(avis
transmis)
Jattendais de lire ce livre avec impatience et je dois admettre
que ma déception est grande. La grossophobie ne faisant aucunement
partie de mes critères de selection de lecture, je partais donc
joyeusement la fleur au fusil. Simone de Beauvoir, sorte de terra incognita
pour moi, il est probable quinconsciemment jattendais quelque
chose qui pouvait saffilier dune manière ou dune
autre à Annie Ernaux (qui fut une de mes
grande découvertes avec le groupe). Mais le comparatif cest
arrêté dès les premières pages. Hélas !
Que cest lent, terne et poussif ! Une valeur sociologique du
récit proche du néant... Plus de 450 pages dinformations
indigestes ou superflues... Les atermoiements amoureux avec Jacques ont
progressivement fini par devenir lépine irritative insupportable
(je laime ; en fait non ; en fait si ; oh et puis
non...). Pourquoi nous infliger ça ? Son émancipation
intellectuelle, religieuse, tout cela est extrêmement évidemment
très intéressant mais un peu de concision que diable !
Aussi, cette écriture très "première de la classe",
sans relief, appliquée au style journal intime ma interloquée.
Est-ce la Simone de Beauvoir adulte ou ladolescente qui parle ?
Mystère... Mais dans les deux cas ça ne marche pas pour
moi. Que nai-je failli métouffer quand nous apprenons
"la gaucherie" des essais de Sartre ! Voilà un autre
point : par certains moment beaucoup trop humble et par dautres
frôlant le mépris dans ses interactions sociales, jai
eu du mal à ressentir de lempathie pour elle.
La fin du récit trouve tout de même grâce à
mes yeux pour sa valeur historique avec ses rencontres de Sartre, Nizan,
etc.
Encore une fois, entendons-nous bien, jessaie de juger la romancière :
Beauvoir est une figure majeure du féminisme et tout simplement
du paysage intellectuel français du 20e siècle mais, en
tout cas à la lecture de ce livre, une écrivaine mineure
selon moi.
Jouvre donc au ¼, mais mon entêtement me poussera certainement
à ouvrir Le
deuxième sexe dont je pressens quil meût
mieux convenu.
Claire, atteinte de grossophobie chronique
Deux tomes pour cet essai, soit 1000 pages...
Geneviève
(avis transmis)
Je suis en train de lire les "Mémoires" de Simone de
Beauvoir dans le train qui m'emmène en Bretagne, je ne pourrai
donc pas vous écouter, malheureusement.
J'ai presque fini, je l'ai lu avec un très grand intérêt.
Je suis surprise du peu dont je me souviens alors que je l'avais lu dans
les années 70 et que j'avais beaucoup aimé. Il m'en restait
le souvenir d'une réflexion sur le statut des femmes et ce n'est
pas ce qui me frappe aujourd'hui. Je suis fascinée par la description
d'un monde qui a disparu et dans lequel j'ai pourtant vécu mes
premières années de lycée. Les angoisses autour de
la foi et de la morale paraissent parfois incompréhensibles et
pourtant le personnage de Simone, souvent agaçant, entre arrogance
et désespoir, reste attachant. Le contraste entre une naïveté
confondante et une immense culture philosophique est sidérant.
On mesure le chemin parcouru en moins d'un siècle et il est énorme,
malgré toutes les menaces de régression. Au final, il m'en
reste à la fois une nostalgie d'un monde disparu et un immense
soulagement que nous en soyons sortis. Un vrai talent de conteuse aussi
qui parvient à faire revivre ce Quartier Latin bien différent
qui vous accueille ce soir. J'ouvre le livre complètement, une
vraie re-découverte !
Monique L (avis transmis)
Je ne suis pas arrivée à la fin du livre. J'en ai lu les
trois quarts.
Le premier mot qui me vient à l'esprit pour qualifier cette lecture,
c'est "ennui". Je partage en cela l'impression de Riesmann à
qui Simone de Beauvoir avait lu quelques pages de son premier roman. Que
c'est long !
J'avais lu la première partie avant notre dernière rencontre.
J'avais fait part à Claire de ma difficulté à apprécier
ce texte. Ses réflexions m'ont poussée à persévérer.
Je ne nie pas que j'aie trouvé dans la suite quelques réflexions
et analyses intéressantes.
La première partie ne m'a pas parue crédible. C'est de la
mémoire reconstituée et je m'en méfie beaucoup. Vous
souvenez-vous de vos impressions avant 6 ans ? On peut voir cet écrit
comme une reconstitution travaillée du parcours de la jeunesse
de l'auteur qui veut nous faire partager son émancipation.
Il pourrait y avoir un intérêt en relation avec tous les
intellectuels croisés, mais cela reste très superficiel.
Ce texte me paraît vieilli, même dans l'écriture parfois,
surtout dans les descriptions de paysages. Je n'ai rien contre les pleurs,
mais Simone et sa sur me semblent atteindre un summum !!
J'avais lu ce livre il y a très longtemps et j'en avais gardé
un bon souvenir. Je n'ai pas retrouvé mes notes à ce sujet
(c'était dans des cahiers ou des fiches à l'époque).
Je pense que j'avais été plus séduite par le rejet
des valeurs bourgeoises et du conformisme. Je suis un peu gênée
de mal "noter" un tel monument, mais j'ouvrirai au ¼.
Nous avons commencé par les deux plus
jeunes (mais n'avons pas poursuivi de la sorte), d'où l'indication
de nos âges, partant de l'hypothèse qu'il y aurait peut-être
une sensibilité différente selon les générations.
Sans trop d'étonnement finalement, cela s'est bien sûr avéré
plus complexe. Brigitte a noté que certain.e.s se sont identifié.e.s
à Simone de Beauvoir, d'autres non.
Fanny (45 ans)
Je connaissais bien sûr son parcours, mais je n'avais rien lu de
Simone de Beauvoir. J'ai manqué de temps et il me reste un tiers
du livre à finir.
Je suis partagée entre les avis de Claire et de Nathalie. Dans
les premières pages, j'ai accroché, mais j'ai rapidement
éprouvé une certaine lassitude.
J'y ai vu un grand intérêt dans la valeur de témoignage
d'une autre époque, c'est pour moi une analyse sociologique vue
de l'intérieur. J'aime sa description de Paris, notamment des cafés,
cela me fait regretter de ne pas les avoir connus à cette époque.
La place de la famille à cette époque et dans ce milieu
est également très bien rendue, on voit la place du père
et de la mère et également celle de l'homme et de la femme.
Par contre, je trouve ce récit long et quelque peu nombriliste,
même si sur ce point c'est sûrement inhérent à
la dimension des mémoires. Pour le dire de façon assez directe,
j'aurais aimé lire une version courte.
Au niveau de sa petite enfance, les souvenirs sont nécessairement
reconstruits, j'ai trouvé cette reconstruction très intellectualisée,
cela a créé pour moi une certaine distance qui a fait barrage
à l'émotion que j'aurais pu ressentir.
Bien sûr mes réticences concernent le livre, aucunement la
femme pour qui j'ai le plus grand respect. J'ouvre ½.
Séverine (45 ans, deux jours de plus que
Fanny)
J'ai adoré ce livre, c'est un "page turner", cela doit
être mon côté midinette. Je suis en train de lire La
force de l'âge. Ce livre n'est pas artificiel, c'est d'une
grande honnêteté, elle se livre, elle a conscience d'être
une petite bourgeoise. On comprend comment son milieu l'a conduite à
ses positions féministes. Ce livre se lit bien, il est très
travaillé. Il y a de nombreuses références littéraires
dont Le
grand Meaulnes où on retrouve peut-être la notion
de liberté. On vit son évolution dans le temps, son regard
sur son époque. Comment peut-on trouver cela ennuyeux ?
J'ouvre en grand.
Denis
Je n'ai pas tout lu car j'ai eu le livre tardivement. J'ai commencé
par le début, mais j'ai trouvé que cela se traînait
beaucoup et je suis allé plus loin en sautant bien des pages. Peu
à peu, j'ai été conquis par l'écriture, que
j'ai trouvée remarquable de précision, au-delà des
longueurs. Je me suis senti assez libre d'aller et venir dans le volume,
puisque le récit est simplement chronologique et que je ne risquais
pas de m'y perdre.
La relation avec Zaza m'a intrigué surtout en découvrant,
dans les lettres de la fin, qu'elles se vouvoient. Je suis donc remonté
jusqu'à trouver la première apparition de Zaza. Je ne connais
rien aux histoires de petites filles et n'ai pas lu grand-chose, mais
cela m'a rappelé L'amie
prodigieuse, par l'intensité de la relation, l'admiration
de Simone pour Zaza. Rapprochement que je ne défendrais pas avec
énergie... La relation avec Jacques, en revanche, ne semble guère
intéressante pour Simone.
Ce qui m'a le plus intéressé, dans ma lecture superficielle,
est la description des murs de ce milieu bourgeois très catholique.
Je vois pas mal d'ironie dans ce que Simone nous en rapporte 30
ans après, il faut bien le dire. C'est un tableau sociologique
très riche et fouillé. Par exemple, l'analyse de ce que
l'on qualifie de "inconvenant" dans ce milieu. J'ai connu des
personnes dans ce style.
Les vidéos indiquées par Claire (celle
avec Josée Dayan) montrent Simone sous un autre angle :
elle souhaite être mieux connue d'un public plus large, et le cinéma
constitue un tel moyen. Sans détour, simplicité, honnêteté,
lucidité.
J'ouvre aux ¾, c'est un document extrêmement intéressant.
Annick A
Je l'ai lu à 20 ans et ce livre m'a beaucoup marquée, il
a eu une influence sur ma vie. Je l'ai relu et je l'ai encore apprécié.
C'est très bien écrit donc on ne tombe pas dans le côté
midinette. Je ne situais pas Simone de Beauvoir dans la génération
de ma mère, mais dans la mienne. C'est notre génération
qu'elle a marquée, ce qu'elle décrit c'est ce que nous avons
vécu avant mai 68. Il s'agissait d'un monde très catho et
bourgeois, c'est le milieu que j'ai connu. Ce livre a un intérêt
sociologique dans la description de toute une époque.
Séverine
C'est une femme bourgeoise qui a aidé à l'émancipation
de plein de femmes.
Annick A
Elle parle avec légèreté de la guerre de 14. Son
rapport à la foi et à la sexualité est très
marqué par son milieu. Prendre un métier pour une femme,
c'était déchoir.
Elle a une grande capacité d'analyse et d'introspection mais il
y a quelques longueurs (notamment sur Jacques) et quelques répétitions.
Les intellectuels sont prisonniers de leur milieu.
J'attendais davantage du passage sur la perte de la foi, c'est décrit
rapidement et de manière un peu pauvre. Elle donne l'image d'une
petite enfance très heureuse, mais avec angoisse, mélancolie
et solitude plus tard. C'est très bien analysé. La mère
de Zaza, c'est une horreur !
Simone de Beauvoir passe par des moments de désenchantement, elle
ne devient pas jalouse, elle se croit laide mais elle s'en fiche.
Il y a quelques longueurs. Mais j'ouvre en grand.
Brigitte
Le livre est paru en 58 et j'ai dû le lire dans les années
60. J'ai lu L'invitée,
La
force de l'âge, Les
Mandarins, Une
mort si douce
et sans doute encore d'autres de ses uvres.
A l'époque cette lecture n'a pas transformé ma vie.
J'ai hésité et finalement je l'ai relu pour la réunion
de ce soir. J'ai trouvé intéressant de le lire différemment
50 ans plus tard.
Dans les deux cas, j'ai trouvé le début un peu fastidieux,
j'ai été plus intéressée à partir du
moment où elle commence l'université. Elle a une vitalité
et un dynamisme extraordinaires : elle mène de front trois
disciplines, français, philo et mathématiques ; elle
lit un nombre incalculable de livres ; elle donne l'impression de
traverser Paris en un quart d'heure ,; vu par elle, Paris est beaucoup
plus petit qu'en réalité. Simone est extrêmement intelligente,
brillante et bosseuse mais elle en parle à peine, comme si cela
allait de soi.
L'amie Zaza va en Allemagne, elle est accueillie comme Française
sans hostilité malgré les guerres de 14 et 70, cela m'a
frappée. Par ailleurs, j'ai été étonnée
par le fait que tous ces étudiants de haute volée ne voyageaient
pas, leurs parents non plus. Ce n'est pas forcément lié
au milieu, mais à la culture intellectuelle. Maintenant, les jeunes
de cette génération voyagent beaucoup.
J'ai été interpellée par le critique du Figaro
(au moment de la sortie du livre) qui s'interroge sur la difficulté
pour un enfant intelligent, telle Simone de Beauvoir, qui doit grandir
dans une famille où les parents ne le sont pas.
J'ai également été frappée par le fait que
les divers protagonistes rapportent très souvent qu'ils ont passé
la nuit à pleurer ; j'ai l'impression qu'aujourd'hui, on parle
beaucoup d'avoir la pression, d'être stressé, ou encore traumatisé.
Le lecteur ne réussit jamais à m'identifier avec elle, elle
conserve toujours une distance, ou une sorte de sécheresse, c'est
pourquoi, j'ouvre seulement à moitié.
Annick A
Elle a une haute idée d'elle-même.
Françoise
C'est ce qui a permis son émancipation.
Brigitte
Je pense que ce n'est pas pour s'émanciper qu'elle a autant travaillé.
Le travail pour elle c'est normal, elle ne connaît pas la procrastination.
Annick A
C'est peut-être une reconstruction.
Séverine
C'est une cérébrale, davantage intellectuelle que romancière.
Françoise
Je l'avais lu dans ma jeunesse, vers 15-16 ans je pense, et j'avais tout
oublié. Je l'ai relu complètement bien sûr. Je suis
surprise de ne pas me souvenir au moins d'avoir été choquée
par la description de ce milieu bourgeois, réactionnaire, obtus,
car c'était à cent lieues du mien, il n'y avait pas de mariage
arrangé, les mères ne lisaient pas la correspondance de
leur fille du moins pas ouvertement la religion
n'avait pas la même importance.. Mais il est vrai qu'en lisant Simone,
on la considérait comme étant de notre génération
alors qu'elle était de celle de nos mères ! Je mesure
maintenant tout le chemin parcouru, sa pugnacité, son travail acharné,
ses luttes, et comment la pauvre Zaza en a été la victime.
On est content que Simone s'en soit si bien sortie. Nous lui devions et
devons beaucoup. Je suis très admirative.
Malgré des longueurs et des redites, c'est un livre pas exceptionnel
mais important que j'ouvre en grand, sans doute par sentimentalisme, mais
j'assume.
Jacqueline
N'étaient la curiosité de relire ce texte de Beauvoir lu
dans ma jeunesse et le groupe lecture, je doute que j'aurais persévéré !
Il y a quelque chose d'un peu laborieux dans ce texte, pourtant soucieux
de vérité et d'authenticité. Alors que dans Les
mots, Sartre arrive avec ironie à nous faire sentir ses
perceptions d'enfants avec les mots de l'écrivain qu'il est devenu,
j'aurais aimé un plus grand recul de l'écrivain Beauvoir
sur son vécu. Cette distance, elle apparaît au début
de l'âge mur, mais plus comme une froide analyse et peut-être
une justification que comme le travail de l'écrivain qu'elle veut
être. Le recours parfois au journal qu'elle tenait m'apparaît
plus comme un souci d'objectivité que comme une tentative de retrouver
et transmettre un ressenti. Les emportements furieux, classiques, des
jeunes enfants, sont vus de manière externe comme si elle ne les
connaissait que par les récits qu'on lui en a faits. Peut-être
cette critique me vient par comparaison avec des textes bien postérieurs
d'autres femmes écrivains : Duras dans L'amant
(après Un
barrage contre le Pacifique dont il est d'une certaine manière
une reprise avant d'être encore repris...)
ou Annie Ernaux dans
Mémoire de fille. D'une certaine manière, à
une autre époque, celle de ma mère, le projet de Beauvoir
me paraît très proche de celui d'Annie Ernaux : rendre
compte d'une époque au travers de textes autobiographiques. Et
ce qui me plaît chez Annie Ernaux n'est peut-être que la poursuite
de ce qu'entreprenait Beauvoir... J'ouvre à moitié.
Lisa (avis transmis après la soirée)
J'ai été un peu ambitieuse, et je ne l'avais commencé
qu'une semaine avant la réunion du groupe. Autant vous dire que
je ne l'ai pas fini à temps (toujours pas fini encore).
Comme tout le monde, je connaissais Simone de Beauvoir, quelques aspects
de sa vie et de son combat, mais rien de plus.
J'avais hâte de commencer ses mémoires. Et je n'ai pas été
déçue.
Pour commencer, j'adore le style : un peu suranné mais facile
à lire, en lisant je suis immédiatement transportée
à ces années-là.
Je trouve l'aspect mémoires enfantines assez peu réussi :
je doute que ce soit ses réactions et réflexions d'enfant,
elle n'arrive pas vraiment à se glisser dans la peau de l'enfant
et adolescente qu'elle était. Mais peu importe finalement :
j'aime sa vision adulte des choses, je trouve intéressant de se
replonger à cette époque, découvrir le poids de la
famille, de la religion, etc.
Je ne l'ai pas encore fini mais je vais me délecter de ce livre
jusqu'au bout.
J'ouvre en grand !
AVIS DU GROUPE DE TENERIFE réuni le 3 septembre 2019
Ana
La lecture de ce livre ne m'a pas enthousiasmée car il ne m'a pas
émue ni passionnée. En outre je l'ai trouvé long,
chargé de répétitions souvent exagérées.
De fait, j'arrêtais la lecture souvent et je la reprenais quelques
jours plus tard.
J'ai pourtant apprécié l'écriture, malgré
la longueur des réflexions et des hésitations.
Ce que je considère très intéressant, c'est la personnalité
de l'écrivaine : sa passion pour les études et pour
la lecture ; sa brillante intelligence, son goût pour la liberté,
sa forte volonté et même l'arrogance qu'elle manifeste :
"Je suis sûre
de monter plus haut qu'eux tous. Orgueil ? Si je n'ai pas de génie,
oui ; mais si j'en ai comme je le crois, comme j'en suis sûre
parfois, ce n'est que de la lucidité".
Elle aura dû connaître Sartre pour découvrir qu'elle
n'était ni l'unique, ni la première. À découvrir
la modestie, à être une femme un peu plus humble : "C'était
la première fois de ma vie que je me sentais intellectuellement
dominée par quelqu'un".
Nieves
Ce livre m'a intéressée.
D'abord parce que Simone de Beauvoir analyse avec subtilité et
profondeur une période de grandes transformations des valeurs traditionnelles
(famille, religion, société
) et elle le fait, non
seulement en procédant à une introspection exhaustive sur
elle-même, mais aussi à travers les personnages qui l'ont
entourée et leurs différentes manières d'affronter
leurs vies (Jacques, Pradelle, Zaza, les Normaliens).
Deuxièmement, j'ai beaucoup aimé l'écriture :
ces descriptions de la nature, des relations avec de différents
personnages
Il est vrai que je la trouve des fois un peu trop rude
et excessivement érudite, comme les passages sur l'exploration
de ses angoisses vis-à-vis de la religion, ou toutes ses oscillations
sur le rôle qu'elle doit avoir dans la vie... Cependant, tous ces
va-et-vient donnent un sentiment d'authenticité. On se croirait
des fois à l'intérieur même de ses réflexions.
Puis, intéressant aussi pour la lucidité avec laquelle elle
décrit le rôle de la femme dans son époque et la confiance
dans son écriture comme moyen d'éveiller les consciences.
Elle croit fermement en la littérature comme une arme de futur.
Au fait, n'oublions pas qu'elle a commencé à écrire
cette autobiographie près de 50 ans après la publication
du Deuxième
sexe. Croirait-elle que son témoignage personnel, le fait
de parler de sa propre vie, pourrait arriver plus facilement aux lecteurs ?
Finalement, je trouve intéressante la clairvoyance avec laquelle
elle décrit le contexte socio-politique où les bourgeois
se montrent déroutés ou désespérément
accrochés à leur mode de vie (sa mère, la famille
de Zaza...), et où les jeunes, en particulier, n'ont pas le courage
de changer l'ordre établi, sauf une minorité audacieuse
dont Simone de Beauvoir et Sartre font partie.
Pour tous ceux qui, comme moi-même, avons vécu, ne serait-ce
que de très loin, mai 68, le mouvement existentialiste et l'engagement
de beaucoup de ces personnalités envers de causes diverses, Simone
de Beauvoir ne peut nous être indifférente.
La question qu'on se pose vis-à-vis de ce livre, c'est comment
à l'âge où elle l'a écrit, a-t-elle été
capable de rendre avec autant de précision ses sentiments, émotions
et pensées depuis son enfance jusqu'à sa première
jeunesse ? Elle devait avoir une mémoire prodigieuse
José Luis
Il s'agit, sans doute, d'un témoignage exhaustif très utile
pour comprendre le fonctionnement d'une partie de la société
française du premier tiers du XXe siècle, ainsi que de certains
individus faisant partie de cette société. Le pouvoir écrasant
de la religion et de l'argent et le poids étouffant des apparences
y est présenté de manière précise et minutieuse.
Cela dit, je n'ai pas été capable d'apprécier l'écriture
qui véhicule cette pertinente critique sociale. J'ai trouvé
cette écriture très froide, très rigide, fade, manquant
de chaleur, de gaieté, sombre, même aux moments où
l'auteure parle de sensualité, de bonheur ou de joie. Surtout,
pour le dire d'une manière sans doute un peu radicale et qui demanderait
d'être nuancée : malgré la grande richesse du
vocabulaire et la maîtrise scripturale, l'écriture me semble
très conventionnelle à tel point que je me risquerai à
affirmer qu'elle manque de style, de "signature". Je sais que
je vais soulever des réactions emportées voire colériques,
mais je mentirais si je m'exprimais autrement que je viens de le faire.
Nathalie
Comme beaucoup de jeunes filles de ma génération, j'avais
lu ce livre adolescente, à sa sortie. Sartre étant mon père
spirituel, Simone de Beauvoir devint aussi une référence
pour moi. Eux deux m'ont ouvert le chemin de l'engagement social, ils
incarnaient l'intellectuel.le engagé.e. Á l'époque,
j'aurais aimé leur écrire, mais j'étais pétrifiée
par leur aura et leur capacité intellectuelle. Qu'aurais-je pu
leur dire du haut de mes quinze sinon ma profonde admiration. Cependant
je reconnais volontiers que c'était davantage le message existentiel
délivré que l'écriture qui m'avait subjuguée.
Á quatorze/quinze ans, j'étais subjuguée par l'écriture
tourmentée de Dostoïevski.
J'ai relu les Mémoires avec un réel plaisir. J'ai
admiré de nouveau son honnêteté intellectuelle, la
recherche du mot précis, sa force existentielle, son art pour restituer
chaque étape de sa vie, de la petite enfance, petite fille modèle
pour être aimée, l'adolescence, années de détresse
et désespoir et enfin ses premières années de jeune
fille et ses pointes d'humour (même si nous n'en n'avons pas touché
mot lors de notre rencontre mensuelle). Sa soif d'absolu, son besoin de
transmission me touchent profondément. J'ai envié sa force
pour se confronter à tout un conditionnement social, éducatif
et religieux, que moi-même je n'ai pas réussi, loin s'en
faut. Le pouvoir qu'elle octroie à la littérature (lectrice
éperdue, la lecture lui a permis de survivre, comme c'était
souvent le cas à cette époque), à l'écriture,
à l'introspection, sont édifiants. Elle a pu renoncer à
l'admiration de son père et déchoir Dieu tout-puissant et
s'insurger face à l'injustice faite aux femmes de sa génération
également. Il me semble que ses commentaires sur ce que veut dire
la difficulté d'être une femme restent encore d'actualité.
Son cheminement initiatique est exemplaire. Tout son effort titanesque
de transparence et cohérence me frappe encore.
Á aucun moment, j'ai souffert de l'ennui en relisant ce livre.
J'ai été happée par son style fluide (même
le timbre de sa voix me revenait), la rigueur de ses analyses dont elle
fait une description minutieuse presque clinique créant une proximité
et une identification aisée. Là se trouve son désir
de transmission et sa générosité envers le lecteur.
Certains peuvent penser que ce livre manque de qualité littéraire,
pourtant le choix précis des mots est un art littéraire
en soi. Puis son texte est traversé d'envolées lyriques
quand elle parle de sa communion avec la nature. Lignes poétiques
qui moi me laissent plutôt insensibles.
Ce fut de belles retrouvailles avec cette grande femme du XXe siècle
mue par un désir farouche de liberté. Cette relecture s'est
révélée être un bain de jouvence. Quelle belle
leçon de parcours initiatique pour atteindre une liberté
et une autonomie chèrement payées puisque Simone de Beauvoir
remettra TOUT en question, soit un lourd tribut de solitude et détresse.
Sa meilleure amie Zaza, elle ne pourra pas se libérer du carcan
social et religieux et paiera de sa vie cette impossibilité. Au
bout du compte, c'est l'histoire d'une libération d'un ordre établi,
d'une personne déterminée à devenir soi-même
et il s'agit d'un livre intentionnel qui a frayé une voie royale
à l'émancipation, même si moi-même je ne suis
pas devenue une femme émancipée. Peut-être pour cette
raison je n'ai pas donné ce livre à lire à ma fille
qui est une jeune fille maintenant. Je doute qu'elle ait pu apprécier
ce témoignage à sa juste valeur et vivant depuis longtemps
à Tenerife, je ne sais pas si aujourd'hui, au lycée, Les
Mémoires de Simone de Beauvoir font partie du programme en
Terminale.
UN PEU DE DOCUMENTATION
SUR SIMONE DE BEAUVOIR
- Quelques dates
- Ses publications
(par "genres") : récits autobiographiques, roman, recueils
de nouvelles, essais, théâtre...
- Des articles
sur Mémoires d'une jeune fille rangée
QUELQUES DATES |
- 1908 : Naissance 103
boulevard du Montparnasse, à létage "noble",
au-dessus du café de la Rotonde et face au Dôme... Père
avocat et mère fervente catholique. - 1910 : Naissance de sa sur, Henriette (Hélène). - 1913 : Elle entre, à cinq ans, au cours Adeline-Désir, un institut catholique privé pour les filles de la bonne société, 41 rue Jacob. Elle y reste jusquau bac. À dix ans, elle y rencontre Élisabeth Lacoin, "Zaza", sa grande amie. - 1919 : Des revers de fortune obligent sa famille à déménager au 6e étage du 71 rue de Rennes, sans ascenseur ni eau courante, jusquen 1929. - 1925 : Après un double baccalauréat de philosophie et de mathématiques élémentaires, elle prépare une licence de lettres classiques à l'institut Sainte-Marie-de-Neuilly, un certificat de mathématiques générales à lInstitut catholique, et une licence de philosophie à la Sorbonne, qu'elle termine en 1928. - 1928-1929 : Elle se présente à la fois un diplôme d'études supérieures (sujet : "le concept chez Leibniz"), et au concours d'agrégation de philosophie. Pour préparer lagrégation, elle étudie à la Sorbonne et suit les cours de la rue dUlm. Cest là quelle fait la connaissance de René Maheu (qui la surnomme "Castor"), Paul Nizan et Jean-Paul Sartre. En 1929, elles sont 4 femmes à être reçues et 9 hommes, sur 76 candidats. Beauvoir est deuxième derrière Sartre. Elle est, à 21 ans, la plus jeune agrégée de philosophie de France. Mort de Zaza. Pour être indépendante et séloigner en particulier dune mère omniprésente, elle vit dans un petit studio appartenant à sa grand-mère, 91 avenue Denfert-Rochereau, de 1929 à 1931. - 1931-1932 : Elle est nommée professeure un an à Marseille (elle s'y découvre une passion pour la randonnée), puis à Rouen (jusqu'en 1936). Sartre enseigne au Havre. À Rouen elle a pour élève Olga Kosakiewicz et collègue Colette Audry. - 1936 : Le couple se retrouve à Paris. Elle enseigne au lycée Molière de 1936 à 1939. Expérience du trio : elle, Sartre, Olga. Elle habite en 1936-1937 à lhôtel Royal-Bretagne, 11 bis rue de la Gaîté puis en 1937, à lhôtel des Bains, 33 rue Delambre. - 1937-1939 : Elle loue une chambre (et Sartre une autre) 24 rue Cels, à lhôtel Mistral, de lautomne. 1938 : Liaison amoureuse avec Jacques-Laurent Bost. - 1939 : Elle habite à lhôtel du Danemark, 21 rue Vavin. Elle en est renvoyée du lycée à la suite de sa liaison avec Bianca Bienenfeld, l'une de ses élèves. Déclaration de guerre : Sartre est mobilisé, puis fait prisonnier lors de l'offensive allemande de 1940. Bost est blessé. Intense activité épistolaire. - 1942-1943 : Elle habite à lhôtel dAubusson, rue Dauphine et partage sa chambre avec deux lycéens, Nathalie Sorokine et Bourla. - 1943 : Elle est suspendue de l'Éducation nationale, non pour détournement de ces deux mineurs comme on le dit souvent (cette affaire se clôt en effet par un non-lieu), mais parce que le recteur dacadémie dénonce le fait quelle vit en concubinage, quelle enseigne Proust et Gide à ses étudiants et quelle affiche un mépris supérieur de toute discipline morale et familiale. Publication du roman L'Invitée : succès immédiat. -1943-1946 : Lhôtel La Louisiane, 60 rue de Seine, est ladresse de Beauvoir et Sartre. - 1944 : Parution de l'essai Pyrrhus et Cinéas. - 1945 : Elle est réintégrée à la Libération par arrêté, mais n'enseignera plus jamais. Pièce de théâtre Les bouches inutiles. Roman Le Sang des autres. Premier numéro de la revue Les Temps Modernes, que Simone de Beauvoir fonde avec Sartre, Raymond Aron, Michel Leiris, Albert Ollivier et Maurice Merleau-Ponty. - 1946 : Roman Tous les hommes sont mortels. - 1947 : Essai Pour une morale de l'ambiguïté. Premier voyage aux États-Unis. À Chicago, elle se lie avec Nelson Algren, son "amour transatlantique" (titre de la correspondance éditée par Sylvie Le Bon de Beauvoir, publiée après sa mort en 1997) : une relation passionnée des deux côtés. - 1948-1955 : Elle habite 11 rue de la Bûcherie où elle écrira Le Deuxième sexe et les Mandarins. Elle y accueille Nelson Algren en 1949 puis Claude Lanzmann. 1948 : Séjour aux USA. Voyage avec Algren au Mexique et au Guatemala. Publication de L'Amérique au jour le jour, L'Existentialisme et la sagesse des nations. 1949 : Long séjour de Nelson Algren en France. Publication de Le Deuxième Sexe (deux tomes : Tome I : Les faits et les mythes et Tome II : L'expérience vécue) qui se vend à plus de 20 000 exemplaires dès la première semaine. 1950 : Séjour à Chicago et sur le lac Michigan avec Algren. 1951 : Séjour chez Algren. Ils correspondent jusqu'en 1964. - 1952 à 1958 : Elle habite avec Claude Lanzmann. - 1954 : Prix Goncourt pour son roman Les Mandarins. - 1955 : Recueil d'articles Privilèges (réédité sous le titre Faut-il brûler Sade ?). Elle loge à partir de 1955 avec Lanzmann au 11 bis de la rue Victor-Schlcher, elle y restera jusqu'à sa mort. - 1957 : La Longue marche : essai sur la Chine, écrit après un voyage de deux mois en Chine, en 1955, avec Sartre. - 1958 : Mémoires d'une jeune fille rangée, que suivront trois autres volumes de mémoires : La force de l'âge (1960), La force des choses (1963), et Tout compte fait (1972). - 1960 : Long séjour de Nelson Algren à Paris ; ils cohabitent et voyagent ensemble. Elle s'engage contre la guerre d'Algérie, dénonce la torture pratiquée en Algérie et en métropole, signe "Le manifeste des 121" qui appelle à l'insoumission ; elle prend la défense de Djamila Boupacha accusée de terrorisme. - 1964 : Publication d'Une mort très douce, qui évoque la mort de sa mère. Dans ce deuil, Simone de Beauvoir est soutenue par Sylvie Le Bon, étudiante en philosophie qu'elle adoptera en 1981. - 1967 : Elle s'engage contre la guerre au Vietnam, participe au Tribunal Russell qui enquête sur les crimes de guerre des États-Unis et conclut au génocide. - 1966-1968 : Retour au roman avec Les belles images et à la nouvelle avec le recueil La femme rompue. - 1970 : Essai La vieillesse. Le volume est presque unanimement applaudi. - 1971 : Elle lance avec des féministes le "Manifeste des 343", publié par Le Nouvel Observateur et Le Monde : 343 femmes, pour protester contre l'illégalité de l'avortement, déclarent publiquement avoir avorté, afin de provoquer un débat. Elle cofonde en juin, avec Gisèle Halimi, le mouvement Choisir pour aider les femmes en difficulté, en particulier pour l'avortement. - 1972 : Elle témoigne en octobre au Procès de Bobigny, où une mère est poursuivie pour avoir aidé sa fille de 16 ans à avorter après un viol. - 1974 : Elle devient présidente de La Ligue du Droit des femmes. Elle publie un numéro spécial des Temps Modernes, "Les femmes s'entêtent". - 1975 : Elle se rend à Lisbonne avec Sartre pour soutenir la "Révolution des illets". - 1979 : Parution de Quand prime le spirituel (réédité sous le titre Anne, ou quand prime le spirituel), son premier ouvrage, refusé en 1938 par les éditions Gallimard et Grasset. - 1980 : Mort de Jean-Paul Sartre. - 1981 : Publication de La Cérémonie des adieux suivi de Entretiens avec Jean-Paul Sartre : août-septembre 1974, qui retrace les dix dernières années de son compagnon, et clôt ses mémoires. - 1983 : Elle publie les Lettres au Castor et à quelques autres (Tome I : 1926-1939, et Tome II : 1940-1963), qui comprend la presque totalité de la correspondance qu'elle a reçue de Sartre. D'autres lettres seront retrouvées après sa mort. Elle reçoit le Prix Sonning, dit "le Nobel danois". - 1984 : Publication de Simone de Beauvoir aujourd'hui, six entretiens de 1972 à 1982 avec Alice Schwarzer. Elle participe au film Le Deuxième Sexe, réalisé pour la télévision par Josée Dayan (on la voit ICI parler de ce film). - 1986 : Décès à Paris, à l'âge de 78 ans. |
PUBLICATIONS (par "genres") |
Récits
autobiographiques - 1948 : L'Amérique au jour le jour - 1958 : Mémoires d'une jeune fille rangée - 1960 : La force de l'âge - 1963 : La force des choses - 1964 : Une mort très douce - 1972 : Tout compte fait - 1981 : La Cérémonie des adieux suivi de Entretiens avec Jean-Paul Sartre : août-septembre 1974 Romans - 1943 : L'Invitée - 1945 : Le Sang des autres - 1946 : Tous les hommes sont mortels - 1954 : Les Mandarins tome I et tome 2 - 1966 : Les belles images Recueils de nouvelles - 1967 : La femme rompue - 1979 : Quand prime le spirituel ou Anne, ou quand prime le spirituel Essais - 1944 : Pyrrhus et Cinéas - 1947 : Pour une morale de l'ambiguïté - 1949 : Le deuxième sexe Tome I : Les faits et les mythes et Tome II : L'expérience vécue - 1955 : Privilèges - 1957 : La Longue marche : essai sur la Chine - 1970 : La vieillesse (rééditée en deux tomes : Tome I et Tome II) - 1972 : Faut-il brûler Sade ? (réédition de Privilèges) Théâtre - 1945 : Les bouches inutiles, pièce en deux actes et huit tableaux Lettres de Jean-Paul Sartre à Simone de Beauvoir - 1983 : Lettres au Castor et à quelques autres Tome I : 1926-1939, et Tome II : 1940-1963 (édition de Simone de Beauvoir) Entretiens - 1984 : Simone de Beauvoir aujourd'hui, six entretiens de 1972 à 1982 avec Alice Schwarzer. Publications grâce à Sylvie Le Bon de Beauvoir Fille adoptive et héritière de l'uvre de Beauvoir, elle a publié après sa mort de nombreux écrits, en particulier sa correspondance avec Sartre, Bost et Algren : - 1990 : Lettres à Sartre Tome I : 1930-1939 et Tome II : 1940-1963 - 1990 : Journal de guerre (septembre 1939-janvier 1941) - 1997 : Lettres à Nelson Algren : un amour transatlantique, trad. de l'anglais par Sylvie Le Bon - 2004 : Correspondance croisée avec Jacques-Laurent Bost - 2008 : Cahiers de jeunesse (1926-1930) - 2013 : Malentendu à Moscou, nouvelle, L'Herne Deux albums sur Simone de Beauvoir - 2008 : Simone de Beauvoir : écrire la liberté, Sylvie Le Bon de Beauvoir et Jacques Deguy, Découvertes Gallimard #990033 - 2018 : Album Simone de Beauvoir, Sylvie Le Bon de Beauvoir, La Pléiade Présentation par Michel Kail - 2017 : Idéalisme moral et réalisme politique : quatre articles parus dans Les Temps modernes ("L'existentialisme et la sagesse des nations", "Idéalisme moral et réalisme politique", "Littérature et métaphysique", "il pour il") |
Sur Mémoires d'une jeune fille rangée |
Sur le livre : pour rendre compte de l'ambiance de l'époque, voici à titre d'exemple, un article lors de sa sortie, par Émile Henriot, "de l'Académie française", dans Le Monde du 7 janvier 1959. (Émile Henriot (1889-1961), poète,
écrivain, essayiste, critique littéraire, fit partie
de l'équipe fondatrice du Monde
et y tint "le feuilleton littéraire" jusqu'à
sa mort. |
Sur l'écriture : l'écriture de Simone de Beauvoir "a toujours été minorée par la critique et même déclassée esthétiquement". Un article étayé de Sandrine Vaudrey-Luigi fait le point sur "Unité et valeur stylistique des Mémoires d'une jeune fille rangée" (Journée d'études Simone de Beauvoir, 6 octobre 2018) |
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