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(Duchesse) Claire de Duras (1777-1828)
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Nos 17
côtes d'amour pour Ourika
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Nathalie |
Jacqueline(avis
transmis)
Très occupée, je l'ai lu dans l'édition
scolaire que j'ai trouvée en passant à la bibliothèque.
Un livre court, qui se lit bien et vite. La dénonciation du racisme
ne m'a pas vraiment convaincue en tant que telle. Peut-être plus
à cause des canons romanesques de l'époque (la conversation
entendue qui déclenche la prise de conscience des préjugés
et l'écroulement d'une illusion) qu'à cause d'une réelle
invraisemblance : la situation d'Ourika est comparable à bien des
situations, plus proches dans le temps, d'enfants transplantés
"pour leur bien". Le choc de voir son identité confrontée
brutalement à un fait culturel incompréhensible, la solitude
d'Ourika, m'ont évoqué la situation du héros de Sauer
dans L'ancêtre,
à son arrivée comme à son retour
Que Madame de Duras ait pu fréquenter les mêmes salons que
Stendhal m'a donné envie de relire Armance
qui aurait été inspiré de son roman Olivier ou
le secret.
Je regrettais de ne pas avoir lu Ourika dans la "bonne
édition". Au dernier moment, elle n'était pas disponible
chez mon libraire, qui m'a envoyé à la librairie Gallimard.
C'en était encore une
autre avec trois courts romans dont justement Olivier ou le secret.
Je vais pouvoir comparer
Nathalie(avis
transmis de Nantes)
Je traîne la patte depuis quelques semaines pour lire les livres
proposés par le groupe. J'ai passé mon tour pour Antoine
Wauters malgré un début de lecture assez passionnant
et j'ai définitivement renoncé à mettre le nez dans
Proust. En fait, je n'arrive plus à trouver
suffisamment de temps pour lire, d'autant plus que j'ai inauguré
un club lecture dans mon collège.
Bref, j'ai fait un effort pour Ourika, compte tenu du peu de pages
à lire. Mais j'avoue tout de suite que je n'y ai pas trouvé
mon compte.
L'écriture et le contenu me semblent assez conventionnels pour
une écriture "soignée" du XVIIIe siècle
telle que nous en étudions au lycée. De fait, je n'ai pas
réussi à me passionner pour cette "religieuse"
qui, à la veille de sa mort, nous partage son histoire. Je crois
que je ne suis pas idéaliste : Cette idée de sacrifier ses
désirs en se tournant vers Dieu et en se retirant du monde me laisse
de marbre. L'amour qu'elle porte à ce jeune homme reste très
platonique et je préfère cent fois une Princesse de Clèves
ou la Roxane de Cyrano.
Je ne dis pas que l'idée n'est pas originale. Le problème
pour moi est que Mme Duras se sert d'un fait attesté pour le tourner
au discours qu'elle a envie de tenir. Mourir à 16 ans et mourir
d'amour ne sont pas la même chose. À aucun moment, je n'ai
eu l'impression que le propos permet de rendre compte de la pensée
de la "véritable" Ourika.
Pour moi, Ourika porte les paroles de sa maîtresse (ou de l'auteur)
Ce n'est pas une étrangère qui s'exprime, c'est une femme
qui a été formatée par la pensée de celle
qui l'a adoptée et qui lui a permis de s'élever intellectuellement.
Certaines remarques insistent sur la destinée d'Ourika. Les propos
de Mme de... dénoncent le fait qu'Ourika aurait "brisé
l'ordre de la nature", qu'elle se serait "placée
dans la société sans sa permission", que
pour la rendre heureuse "il eût fallu en faire une personne
commune". Ourika renchérit elle-même sur les propos
de celles qui l'ont aliénée.
Ourika elle-même se compare à un singe, elle renie sa couleur
! Quelle femme noire libre d'esprit pourrait affirmer cela si elle n'a
pas subi un lavage de cerveau ? Elle en va jusqu'à masquer par
des gants et des vêtements sa couleur de peau.
L'idée également que le corps et l'esprit peuvent être
séparés, occultant ainsi les mouvements involontaires du
cur, me renvoie à des principes de morale judéo-chrétienne
qui font d'Ourika, non pas un modèle de femme noire, intégrée
dans une société française, mais une femme dont l'identité
s'est perdue au fil des années et un simple modèle de pensée
de son époque.
En quoi le questionnement de savoir si les chagrins inspirent plus d'intérêt
par leurs résultats ou par leurs causes est-il intrinsèquement
lié à la personnalité d'Ourika ?
Ce questionnement est lié aux préoccupations de l'époque,
pas à son statut d'étrangère. Ourika est assimilée,
pas intégrée. Elle ne semble pas avoir conscience de ce
qu'elle est devenue par le biais de l'éducation qu'on lui a imposée.
Elle annonce vouer un "culte" sans réaliser que celle
qui l'a adoptée pourrait être considérée comme
un bourreau. Son identité a complètement disparu et elle
se met à juger son peuple comme des barbares et des assassins.
Je ne reviendrai pas non plus sur la mascarade de la danse de salon.
En réalité, le texte me semble plus intéressant sur
la vision qu'il donne de son époque que sur le personnage présenté.
Je ferme entièrement par rejet.
Claire
J'informe Maëva qui n'a pas encore repéré, car on ne
l'affiche pas..., que nous avons deux profs dans le groupe, Nathalie dont
on vient de lire l'avis et Sabine qu'on va lire. L'une, en dépit
de sa distance professorale, plonge la tête la première dans
l'identification et l'autre ne peut avoir un avis hors de la référence
scolaire. On les aime quand même...
Sabine
(avis transmis de Nîmes)
Ourika a été exhumée grâce à
Olympe de Gouges, programmée depuis deux ans pour l'épreuve
du bac de français. Après la Princesse
de Clèves et Joséphine Baker au Panthéon, les gonzesses
sont à l'honneur dans les couloirs des ministères.
C'est formidable que cette nouvelle ait été rééditée.
L'arrière-plan historique est riche, l'histoire sympathique. L'écriture
est convenue (en droite ligne après les pièces d'' Olympe
et la Manon L'Escaut de l'abbé Prevost) et pour les élèves,
c'est parfait. Ce n'est pas ma tasse de thé. L'étude faite
en préambule m'a bien plus intéressée.
J'ouvre aux ¾.
Brigitte entreet
(à
l'écran)
C'est une lecture que j'ai trouvée rafraîchissante car différente.
J'ai trouvé étonnant l'accord entre un sujet moderne et
cette écriture très marquée par son époque.
Il y a beaucoup de choses convenues au niveau du procédé,
notamment cette présentation par un jeune médecin, ainsi
que le fait qu'Ourika surprenne la conversation entre sa "bienfaitrice"
et Mme de
, qui la confronte à la réalité de
sa situation de jeune fille très éduquée, mais noire.
Le sujet est intéressant, d'autant plus qu'il est traité
avec la mentalité début XIXe. Mme de Duras essaie de traiter
de l'influence de l'éducation sur l'avenir de celui (ou celle)
qui en bénéficie. C'est presque un cas d'école. En
effet, il me semble peu vraisemblable que dans la réalité,
même dans ce milieu très préservé, Ourika n'ait
jamais été confrontée à la moindre remarque,
ou attitude, en lien avec sa couleur de peau.
J'ai beaucoup apprécié aussi de lire comment la Révolution
est vue par Ourika, pour qui il n'y a pas d'enjeu personnel : elle
ne fait partie d'aucune classe sociale française. Rien ne la concerne,
hormis peut-être le thème de l'esclavage. J'ai été
amusée par ces personnages de salon, dont l'esprit est très
ouvert aux idées nouvelles, qui changent de point de vue sur la
Révolution quand ils se trouvent atteints directement.
Cette lecture me donne envie de découvrir un peu plus cette Clalre
de Duras, dont j'avais entendu parler, sans jamais aller plus loin.
Ouvert entre ½ et ¾.
Monique L(en
chair et en os comme les suivants)
J'ai commencé ma lecture par la préface de Benedetta Craveri
que j'ai trouvée passionnante et qui introduit bien le texte de
Mme de Duras.
Pour apprécier ce court texte, il faut avoir en tête qu'à
l'époque de Mme de Duras, les "nègres" étaient
au mieux des bibelots de luxe et surtout le plus souvent maltraités.
La princesse de Beauvau se montre novatrice en considérant et élevant
Ourika comme sa propre fille et non comme un amusement. Ourika reçoit
une éducation brillante et raffinée. Ses capacités
intellectuelles lui permettent de profiter pleinement de cette éducation
et elle n'a aucun mal à se conformer au milieu dans lequel elle
vit. Cette constatation me paraît déjà une nouveauté
à l'époque.
Mme de Duras décrit l'intolérance de la société
et son rejet de l'altérité. Elle fait preuve d'une grande
sensibilité et d'une compréhension surprenante de ce que
pouvait ressentir une femme noire vivant en France.
Le récit est bien construit avec l'intervention du jeune médecin
qui écoute Ourika. On passe du je du médecin au
je d'Ourika avec un retour du je du médecin, dans les
dernières lignes de l'uvre pour un effet coup de poing :
"Ici la jeune religieuse
finit brusquement son récit. Je continuai à lui donner des
soins : malheureusement ils furent inutiles ; elle mourut à la
fin d'octobre ; elle tomba avec les dernières feuilles de l'automne".
La modernité du récit réside dans le fait d'avoir
donné la parole à une femme "noire". C'est un
récit concis et dense sous la forme d'une longue confidence d'Ourika,
devenue religieuse à son médecin : un positionnement thérapeutique
qui devait être assez original en ce début de XIXe siècle.
L'auteur y analyse avec justesse l'autodépréciation d'Ourika,
intériorisant la dévalorisation que lui fait subir le regard
de l'autre ; Ourika en vient à masquer son corps. Elle se réfugie
un temps dans l'amitié de Charles pour échapper aux regards
de dédain qu'elle ne voit que trop désormais. Tout s'enchaîne
alors : le mariage de Charles, la naissance d'un enfant, la mort souhaitée,
le regret de n'avoir pas été une "vraie" esclave
parmi les siens et le retour de la marquise de
- son électrochoc
du début -, qui la met sur la voie de la solution : accepter
son sort, se consacrer à Dieu et se laisser mourir.
Mme de Duras n'adopte pas le ton vengeur des écrivains engagés
dans une lutte idéologique, son roman n'en est que plus percutant.
J'ouvre en entier (en prenant en compte l'époque où il a
été écrit).
Fanny
Le style m'a un peu gênée dans ma lecture.
Je n'ai pas eu envie de lire l'introduction.
Le texte est court mais m'a quand même lassée.
J'ai bien aimé quand elle prend conscience qu'alors qu'elle est
élevée comme tout le monde, elle ne sera jamais de ce monde.
C'est bien amené, c'est assez fort et cela m'a touchée.
J'ai trouvé exagéré qu'elle prenne aussi difficilement
conscience qu'elle est amoureuse.
Mais c'est le style, les phrases ampoulées - même si c'est
l'époque - qui m'ont empêchée d'apprécier.
J'ouvre à moitié car le thème est intéressant
et l'histoire touchante. Mais le procédé (on sait depuis
le début qu'elle va mourir) et le style ont cassé mon empathie.
Rozenn
J'aime justement l'aspect vieilli. J'ai beaucoup aimé le style,
qui m'est familier, que j'ai plaisir à retrouver. Et j'ai aimé
les procédés "classiques".
Et je trouve audacieux d'écrire ce qu'elle écrit.
Je n'ai pas aimé la présentation, je me fous des salons...
mais c'est pas vrai, j'ai abandonné quand il restait 10 pages,
c'est long avec les citations, et en y revenant j'ai vu que c'était
intéressant. Elle aurait pu faire plus rapide, surtout avec ce
texte si fluide.
Il y a un décalage entre l'aspect des salons et le sujet, les éclairés
et le dédain manifesté.
J'ai aimé le personnage, le style, la dénonciation. J'ouvre
en grand.
Etienne(à
l'écran depuis Rennes)
Je ne serai pas très long. Je suis assez partagé, car des
choses me plaisent, d'autres me déplaisent.
J'admire Mme de Duras d'arriver à broder si habilement, de parler
de tout et de rien. Les pages se lisent très bien, mais comme Fanny,
le coté ampoulé m'a gêné. Avec ce côté
convenu, on a lu des choses moins sages.
Cette ancienne esclave qui s'intègre à ce point, c'est assez
troublant. Il y a un côté tragédie, de par cet aspect
insoluble.
J'ai beaucoup aimé l'introduction, très très longue,
et sa très bonne mise en situation.
Je me rappelle avoir lu dans la Maison de Châteaubriand à
la Vallée-aux-loups le portrait de Mme de Duras.
(photo de ce portrait au mur de la demeure de Chateaubriand
prise en
octobre 2022 par Annick L)
Maëva
J'aimerais commencer avec un petit mot rapide sur la préface que
j'ai trouvé fascinante. L'éclairage que Benedetta Craveri
donne sur la vie et l'uvre de Mme de Duras offre une seconde lecture
très intéressante pour Ourika afin de situer ce texte
dans le contexte social et politique de l'époque, mais aussi dans
la vie de cette "femme auteur".
J'ai envie de partager une citation de cette introduction qui m'a fait
sourire, lorsqu'elle relate les propos du duc de Duras au sujet de sa
nouvelle épouse après la mort de Claire : "c'était
difficile de comprendre le bonheur de se sentir plus intelligent que sa
femme" (p. 67).
Au sujet du texte, je l'ai trouvé particulièrement
contemporain puisqu'il peut se transposer à d'autres questionnements
d'identité actuels. Ourika parle d'une discrimination raciale,
pourtant elle porte les mêmes problématiques que toutes les
discriminations sociales : l'invisibilisation et le mépris.
Le traitement du racisme n'a rien de révolutionnaire, il est pourtant
novateur pour l'époque, même s'il est imparfait à
l'heure actuelle.
D'autre part, le texte soulève un aspect sur la condition féminine
qui continue à exister de nos jours, celui de la maternité
et du couple : "moi
qui ne devais être la sur, la femme, la mère de personne"
(p. 90). Aujourd'hui, les femmes peuvent exister
sans mari ou enfants, pourtant ce choix reste largement controversé
et la marginalisation demeure d'actualité.
Ourika ne peut se défaire de son sort, il y a une forme d'inéluctabilité
dramatique dans cette histoire comme le dit Mme de
: "elle
s'est placée dans la société sans sa permission,
la société se vengera" ou "elle
ne peut vouloir que de ceux qui ne voudront pas d'elle"
(p. 86). Nous assistons à cette chute
bouleversante en sachant parfaitement qu'il n'y a pas d'issue. Nous sommes
aussi impuissants qu'Ourika puisque nous savons dès les premières
lignes qu'elle finira au couvent dans un isolement total.
Plus généralement, la description du chagrin est si palpable
qu'elle est pesante et tangible, je pense notamment à la succession
de questions culpabilisantes qu'Ourika s'adresse à elle-même
: "Qu'importait au monde
qu'Ourika vécût ? Pourquoi était-elle condamnée
à la vie ?" (p. 101)
ou le passage d'une infinie tristesse lorsque Charles déclare :
"je n'ai commencé
à vivre que depuis deux mois" (p. 100)
rendant leur passé commun anecdotique ou "il
était donc bien facile de tromper ceux dont l'intérêt
était ailleurs" (p. 102).
La durée du récit m'a semblé adaptée ; au
départ je me suis demandé si le désespoir d'Ourika
quant à sa condition n'arrivait pas bien vite, mais après
coup je trouve qu'il s'inscrit plutôt justement dans la narration.
Comme Rozenn, les tournures classiques ne m'ont pas gênée,
bien que l'introduction de la préface ait certainement contribué
à me plonger dans l'ambiance.
Même si la rédemption d'Ourika ne se trouve que dans les
mains d'une intervention divine, et que la piété religieuse
est quelque chose qui me laisse assez insensible, j'ai été
émue par ce récit et touchée par son caractère
intemporel.
J'ouvre aux ¾ .
Muriel
J'ai lu un peu des deux, la moitié de la présentation (mais
ça va finir quand ?), la moitié du texte (ah tiens je vais
revenir à la préface), la moitié de la présentation
(ah oui c'est bien finalement) et enfin la fin du texte.
J'ai trouvé très bien l'introduction. Et le style ? Ben
évidemment, y a pas de phrases sans verbe à l'époque...
Le sujet est intéressant. Et la découverte de la fille au
hasard d'une écoute qu'elle est noire et foutue dans cette société-là
n'est pas invraisemblable.
Ce qui m'a plu aussi est de voir de l'intérieur, du côté
des nobles, que la Révolution est une catastrophe... on n'est pas
habitué à ce point de vue.
Brigitte
Tu dois connaître Le dialogue des Carmélites ?
Muriel
Le
texte de Bernanos non, mais l'opéra
oui.
Brigitte
Elles vont à l'échafaud... (voir
ici).
Renée(à
l'écran depuis Narbonne)
J'ai beaucoup aimé la présentation qui montre qu'on mettait
sur le même plan un cheval, une poule, une autruche et une petite
captive. Elle met très bien dans l'ambiance, la vie de Mme de Duras
est très bien racontée, on comprend la place des femmes
à cette époque et c'est grâce à son intelligence
qu'elle a su imposer un salon. Comme l'a fait remarquer Maëva en
citant M. de Duras se remariant (et ressentant enfin "le bonheur
de se sentir plus intelligent que sa femme"), intelligence dont
son mari était fier, mais dont il se sentait écrasé
(ça n'a pas trop changé de nos jours).
Quant à l'écriture, il faut la mettre dans son contexte.
Certaines choses sont très modernes, par exemple :
- le médecin qui lui permet de se libérer par la parole
et espère la guérir, tel un psy
- le prêtre qui ne l'invite pas particulièrement à
rencontrer Dieu, mais à trouver sa voie ("ce bonheur était
entre vos mains"), comme dans le développement personnel d'aujourd'hui...
Oui c'est un peu désuet, mais j'ai beaucoup aimé, alors
qu'au départ j'étais réticente, plus intéressée
par le roman contemporain, par l'envie de me confronter à des problèmes
de société actuels.
Cependant, je suis tombée sous le charme. J'ai eu beaucoup de plaisir,
j'ouvre aux ¾, et même en grand.
Catherine entreet
C'est une histoire qui a suscité chez moi une réflexion
davantage qu'un plaisir de lecture. Un avantage certain à ce livre
: il est court. L'histoire est émouvante mais je n'ai pas été
très touchée car j'ai été plutôt rebutée
par le style trop emphatique pour moi ; je sais bien que c'est le style
de l'époque, mais j'ai du mal.
J'ai bien aimé le début, Ourika amenée en France
en même temps que des objets et des animaux. J'ai aimé aussi
la brutalité de la prise de conscience d'Ourika de sa condition
qui la condamne à rester seule et à part. Elle ne pourra
jamais se marier dans la société dans laquelle elle a été
élevée et donc, étant une femme, le seul avenir possible
lui est interdit. Certes, elle est bien traitée, elle reçoit
une éducation, elle est même aimée par sa protectrice
qui veut son bien, se donne bonne conscience, mais fait plutôt son
malheur. Le racisme n'est jamais exprimé, mais est en toile de
fond. Il est tout simplement inimaginable pour tout le monde qu'un Blanc
puisse aimer et épouser une femme noire.
Le thème et le contexte sont très intéressants :
la transplantation brutale d'un enfant d'un monde à un autre, comme
un objet ou un animal, un sujet de curiosité, l'éducation
dans un milieu duquel elle sera inévitablement rejetée,
une fois adulte et après la disparition de sa protectrice. C'est
un sujet qui reste très actuel : on continue à transplanter
des enfants d'un continent à un autre, théoriquement pour
leur donner une vie meilleure, mais sans se poser la question du mal que
l'on peut leur faire en les arrachant à leur milieu. L'arrière-plan
historique donne une dimension supplémentaire au texte, même
s'il est seulement évoqué. La Révolution, qui a aboli
l'esclavage, ne change au fond pas grand-chose sur l'acceptation d'une
femme noire par la société.
J'ai beaucoup aimé la préface, peut-être plus que
le texte lui-même. Je ne l'ai lue qu'après avoir lu la nouvelle
car je préfère ne pas être influencée. Le personnage
de Claire de Duras est assez fascinant. Les héros ou le sujet de
ses textes sont franchement inhabituels pour l'époque : une femme
noire, l'impuissance masculine. C'est courageux. Et la préface
donne un éclairage nouveau à la nouvelle ; on trouve des
points communs entre l'histoire de Madame de Duras et celle d'Ourika,
la déception sentimentale, le côté passionné,
sans concession. Mais Ourika n'a pas la possibilité de créer
un salon et de côtoyer Chateaubriand et Madame de Staël.
Je l'ouvre entre la moitié et ¾ pour l'ensemble. Je ne connaissais
pas du tout Madame de Duras et je ne regrette pas cette lecture.
Annick A
Je suis beaucoup plus intéressée par la présentation
et la biographie de Madame de Duras que par le roman. La dimension historique
de la Révolution, vue sous l'angle peu courant de la noblesse et
son immigration, ses peurs, ses souffrances et son courage, est très
bien décrite. On y voit aussi la vie des salons et les nombreux
échanges littéraires.
Concernant Ourika, pour moi ce n'est pas un roman sur le racisme.
À part l'introduction qui raconte comment, pour épargner
l'esclavage à certains enfants, il était de bon ton pour
les protéger de les offrir en cadeau au même titre que les
objets ou les animaux, on n'y voit aucune trace de racisme à l'égard
d'Ourika qui, offerte dans ce contexte à Madame la maréchale
de B, est au contraire choyée et élevée comme une
Blanche.
Le cur du roman est la souffrance intime d'une femme qui ne peut
sortir de la place où elle est assignée par la société.
Durant des pages, elle s'apitoie sur son sort à la manière
des romantiques, et le côté larmoyant m'a agacée,
bien qu'elle ait vraiment des raisons de se sentir mal. Par contre, j'ai
été intéressée par la façon dont elle
s'est construite à travers ses identifications. Venue du Sénégal
à l'âge de deux ans, elle se vit comme Blanche en s'identifiant
à travers ses modèles, des Blancs, nobles, riches et cultivés.
Brutalement, elle découvre qu'elle ne l'est pas. Elle est donc
atteinte dans sa construction identitaire et n'a aucune possibilité
de se raccrocher à d'autres modèles. Elle s'effondre, et
ne peut plus se reconnaître dans la glace. Elle n'a plus de semblables
car les Noirs, de son point de vue, sont des barbares et des assassins.
Au moment de la Révolution, son état s'améliore car
elle se reconnaît dans les autres par la souffrance : "Je
ne me sentais plus isolée depuis que le monde était malheureux".
La Révolution, décevante, ne résout en aucune façon
sa situation, et son issue est de se créer une famille d'appartenance,
le couvent, en s'identifiant aux religieuses. Il y a d'intéressants
passages au moment de la Révolution vu sous un angle peu abordé.
J'ouvre un quart.
Claire(attention
avis épouvantablement long)
J'ai découvert
ce livre par hasard en cherchant de "petits" livres.
La plupart du temps, j'aime découvrir un texte sans en rien savoir.
Dans ce cas, j'ai apprécié la présentation de Benedetta
Craveri et sa place avant Ourika.
J'ai été d'emblée enthousiasmée par l'esprit
de cette préface, par la densité d'information, par l'élégance
de la plume, par le fait qu'il s'agit moins d'une préface que d'un
véritable roman, constitué de la vie romanesque de Madame
de Duras. J'ai applaudi la maîtrise de l'insertion des citations
nombreuses qui donne la parole aux personnages du roman, et notamment
en direct à Mme de Duras dans sa correspondance, et qui jamais
n'alourdissent le récit. J'ai admiré l'art de restituer
une époque, une vie, et le contexte d'Ourika. Ainsi permet-elle
de rendre vraiment stupéfiant ce récit.
Où d'emblée me frappe, tout comme dans la présentation,
la plume ciselée, et le plaisir des formules dès qu'Ourika
entre en scène : "me
sauver de l'esclavage, c'était me donner deux fois la vie",
"il faut payer le bienfait de savoir par le désir d'ignorer",
"on louait tout ce qui prêtait à la louange, on excusait
tout ce qui prêtait au blâme". Et l'hommage
exquis à la bienfaitrice : "On
valait auprès de Mme de B tout ce qu'on pouvait valoir, et peut-être
un peu plus, car elle prêtait quelque chose d'elle à ses
amis sans s'en douter elle-même."
J'ai admiré son audace à faire parler à la première
personne une Noire (ce qui serait impossible aux États-Unis maintenant
dans une partie de l'édition), à affirmer l'égalité
en montrant le rôle de l'éducation, à mettre en scène
des êtres bons et égalitaires, comme l'abbé (pour
qui il n'y a pour Dieu "ni
nègres ni blancs : tous les curs sont égaux devant
ses yeux" - faut le faire à l'époque !),
à montrer les limites de la Révolution soucieuse des droits,
mais ni des Noirs, ni des femmes. Mme de Duras est vraiment étonnante
! (Elle a deux raisons familiales d'être concernée par les
Noirs : son père guillotiné qui valorisait leurs droits,
sa mère ayant des liens avec les Antilles).
J'ai trouvé intéressante la réaction de Nathalie,
qui pourtant rejette le livre : Mme de Duras a parfaitement réussi
son coup en lui faisant apparaître l'aliénation complète
d'Ourika qu'elle (Nathalie) ne peut supporter. Je suis Annick
dans son démontage identitaire (Ourika n'a plus aucune identification
possible) et Maëva qui en montre l'actualité.
J'ai trouvé intéressant l'arrière-plan historique
qu'Ourika nous fait vivre de l'intérieur : prémisses de
la Révolution, Terreur, Restauration, révolte de Saint-Domingue.
J'ai trouvé intéressants les personnages : Mme de B, l'abbé,
Charles, la marquise qui joue deux fois le rôle de révélation
avec clairvoyance et une forme de bonté aussi. La révélation
de sa couleur m'a fait penser à Americanah
de la Nigériane Chimamanda Ngozi Adichie que nous avions lu, où
l'héroïne prend conscience de sa couleur aux USA.
On a une avancée narrative intéressante avec des événements
qui créent une tension et l'artifice du récit emboitée
fonctionne très bien. Un art de narrer, quoi !
J'ai
lu le roman de Mme de Duras Olivier et le secret, bien
plus long,
un roman épistolaire qui joue à cacher et subtilement dévoiler
le secret (l'impuissance de l'amoureux).
Je
reviens à la présentation qui crée un double emboîtement,
tel un écrin pour cette histoire, avec les histoires d'amour et
d'amitié de Mme de Duras, vraiment très bien racontées.
On sent l'admiration de l'historienne, sa jubilation à la présenter.
Apparemment
possédée par le démon des lieux d'écrivains
à notre programme (le hasard joue beaucoup quand même...),
je suis allée à Lübeck pour Thomas
Mann lu cet été, à Bath pour Jane
Austen, à Illiers bien sûr pour Proust,
et j'ai donc
vu les cèdres du Liban que Chateaubriand a offerts à Mme
de Duras dans le parc du délicieux château
d'Ussé près de la Loire où elle a vécu
aussi.
J'étais déjà fascinée par les salonnières
et j'ai une petite collection à ce sujet. Je
me suis donc passionnée par Mme de Duras : sa personnalité,
l'art de la conversation que pointe l'introduction, qui n'est pas que
mondanité - Benedetta
Craveri
la préfacière a d'ailleurs écrit un gros livre sur
ce sujet, L'âge
de la conversation .
J'ai craqué pour l'aura qu'elle eut auprès de personnalités
remarquables (d'où le name
dropping que j'ai listé) : Chateaubriand of course, mais Humboldt
qui est un génie et dont les
Lettres à Claire de Duras (1814-1828)
que j'ai feuilletées ont vraiment attiré ma curiosité.
Le succès international de Mme de Duras m'a ébaubie... Je
me suis rappelé le roman que nous avions lu concernant Humboldt,
Les
arpenteurs de Daniel Kehlmann.
Brigitte
Il y a eu aussi Le
procès des étoiles.
Claire
Ah oui !
(Saisissant les volumes...) Entichée donc de salonnières,
j'ai
des livres sur ces femmes extraordinaires :
- Les grands
salons féminins, un vieux livre aux pages à découper
qui évoque 23 salons
- Salons
européens : les beaux moments d'une culture féminine disparue
de Verena von Der Heyden-Rynsch, avec une page aussi sur Rachilde
- ou encore L'esprit
de conversation de Chantal Thomas
- et L'âge
de la conversation de Benedetta Craveri de notre préfacière.
J'adore Madame de Staël, qui est une Grande, une femme politique,
et dont j'ai visité le château
de Coppet en Suisse : toute l'Europe intellectuelle s'y retrouvait.
J'avais avant de le visiter, lu, ne connaissant rien d'elle, une biographie
patapouf qui m'avait transportée.
Mon
coup de cur va à Madame
Geoffrin qui est le sujet d'un tableau célèbre (montrant
la reproduction...) :
Lecture de la tragédie de L'orphelin de la Chine de Voltaire dans le salon de Madame Geoffrin par Gabriel Lemonnier, 1812, musée national du Château de Malmaison |
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Commandé par
limpératrice Joséphine, ce tableau de 1812 avait
pour but est de réunir en une scène pour la postérité
ceux qui ont compté sur la scène mondaine, philosophique
et artistique au cours du siècle des Lumières. Il s'agit d'une composition imaginaire car ces 53 personnes ne se sont jamais retrouvées ensemble chez Mme Geoffrin. |
On peut reconnaître des hommes : Marivaux, d'Alembert et Diderot (qui firent tous deux le projet de l'Encyclopédie chez Madame Geoffrin), Montesquieu, Jean-Jacques Rousseau, Soufflot, le duc de Choiseul, Jean-Philippe Rameau, Helvetius (dont l'épouse Anne-Catherine tenait un salon réputé), Crébillon, Fontenelle, Turgot, Soufflot, Jussieu, Buffon, Pigalle, Daubenton, Réaumur (que de rues...). |
Et il y a des femmes : outre Mme Geoffrin, l'actrice Mlle Clairon, Mlle de Lespinasse autre salonnière célèbre, la comtesse d'Houdetot salonnière qui perça le cur de J.J. Rousseau, la duchesse d'Enville, Mme de Graffigny et Mme du Bocage, écrivaine elle aussi.... |
Lisa
(avis transmis de Suisse après la soirée)
Je ne connaissais pas du tout avant que le livre soit programmé
ici. Je partais avec une bonne impression, j'avais envie d'aimer.
J'ai été vraiment très intéressée par
la préface. Et je l'ai même préférée
au récit
Sur Ourika, je n'ai que peu de choses à dire. Je n'arrive
pas à me former une opinion sur ce livre : intéressant,
mais je me suis un peu ennuyée, court mais avec des longueurs
J'ai trouvé le style un peu lourd. Donc j'ouvre à moitié
car je ne sais qu'en penser.
En incluant la préface, j'ouvre aux ¾ car c'est ce qui m'a
le plus intéressée.
Françoise(avis
transmis)
La préface est très intéressante, peut-être
même plus que la narration, en ce qu'elle nous fait connaître
Claire de Kersaint puis de Duras.
Il n'est pas anodin évidemment qu'elle soit métissée.
C'est une période historique importante, entre Révolution,
Lumières et salons littéraires.
Mais il ne faut pas oublier que cette période - qui se prolonge
tout le 19e - fait les femmes sans aucun droit, soumises entièrement
à leur mari, et dont les salons littéraires pour l'élite,
sont un décor illusoire.
Ça m'a rappelé un film vu récemment sur Arte The
Duchess, adapté d'une histoire vraie de Georgiana
Cavendish, Duchesse de Devonshire, femme brillante au charisme lumineux,
coqueluche de la haute société londonienne, et cependant
totalement soumise à son mari qui l'humilie et la fait souffrir.
Mais Claire est une combattante, et elle fait preuve d'une grande clairvoyance.
J'aime beaucoup l'écriture qui me rappelle celle de Choderlos
de Laclos que j'adore, entre autres. Là encore je me suis régalée
de la correspondance.
Quant au fond, ça reste un sujet d'actualité, hélas,
racisme mâtiné ou non de paternalisme, où l'on voit
plus généralement qu'on ne peut faire le bonheur de quelqu'un
sans tenir compte de la personne, quelles que soient ses bonnes intentions.
Finalement j'ouvre aux ¾.
Claire (non pas de Duras, mais de Voix au chapitre,
réagissant à l'avis écrit transmis par Françoise)
Attention, Claire de Duras n'est pas métis ! Elle a un aïeul,
gouverneur de la Martinique, mais qui n'est pas noir.
Françoise
Je croyais que sa mère l'était.
Claire
Des Îles, oui, mais d'une famille riche, de colons.
Au fait, voilà ce que j'ai apporté pour résumer l'histoire
d'Ourika, en 4 images à boire
et manger... :
Ourika est vraiment née
en Afrique et offerte à la maréchale de B. |
Son histoire est écrite par Madame de Duras : |
La maréchale élève tendrement
Ourika, c'est une véritable mère
|
Mais le destin d'Ourika est
bouché : ne lui reste que le couvent... |
Le groupe de Tenerife
s'est réuni le 13 décembre 2022
Nieves donne ainsi un écho de la réunion : on était huit à y participer. La lecture d'Ourika a plu, a intéressé tout le monde. Or, comme il était prévisible, on est tout de suite passé aux questions du racisme et de l'esclavage, et là, j'aurais bien aimé en parler davantage, car il me semblait qu'on avait des approches différentes. Pourtant on s'est plutôt arrêté au sujet de "la pomme" (plusieurs textes ont été lus).
Nieves
J'ai bien aimé ce court roman écrit dans un style très
élégant et abordant un sujet fort attachant. Situé
à une époque où l'esclavage n'était pas encore
aboli, je trouve que Madame Duras a été très courageuse
en choisissant une Noire comme protagoniste de son premier roman.
Mais a-t-elle voulu questionner l'esclavage ? Et le modèle de société
où elle a vécu ? Pourquoi situer au premier plan ce personnage
? On était libre de s'exprimer, de pas suivre les standards sociaux
dominants ?
En revenant à l'histoire, cette fille, à la peau noire,
est née au Sénégal où elle a été
achetée par le gouverneur Bouffleur à l'âge de deux
ans, pour être offerte à des gens huppés de l'époque,
fin du XVIIIe, où on pouvait offrir en cadeau un enfant aussi bien
qu'un animal ou une plante exotique. Elle arrive à Paris chez une
famille de l'aristocratie, les Beauvau. Ils l'accueillent comme si c'était
leur fille, en particulier, Madame de B., donc, elle va recevoir une éducation
privilégiée : manières et savoirs indispensables
à une fille de la haute société. Bonne élève,
elle réussit très bien en jouissant de tous ces bienfaits
qui la font oublier la couleur de sa peau.
Cependant, on sait que cela ne va pas marcher, Ourika c'est un élément
qui brise ce monde féerique. En effet, ça arrive un jour
où une amie de Madame de B. lui fait voir l'incompatibilité
de la situation. Ourika, écoutant de loin la conversation prend
conscience sur le coup de son anomalie, tombant ainsi dans une dépression
qui la conduit petit à petit à la mort. Sa famille d'accueil
est incapable de comprendre l'origine de son changement de caractère,
son angoisse et son malheur visibles sur sa figure. Elle se sent de plus
en plus à l'écart "négresse,
dépendante, méprisée, sans fortune, sans appui, sans
un être de mon espèce à qui unir mon sort",
et décide de se laisser mourir.
Or, elle ne questionne pas son entourage, vivant une contradiction entre
la gratitude envers la famille d'accueil dont elle a reçu tout
ce qu'elle a, ce qui va être plutôt qu'un bienfait, un écueil.
C'est pourquoi elle arrive à penser que sa couleur de peau est
le vrai problème et cela la mène à accepter le rejet
dont elle est la victime. "Elle
n'a pas remplie sa destinée : elle s'est placée dans la
société sans sa permission (
) et au lieu de combattre
la douleur, elle s'allie avec elle et se laisse emporter jusqu'à
la mort".
À vrai dire le seul geste humain envers cette jeune femme lorsqu'elle
est grièvement malade vient du médecin qui va la soigner
au couvent où on l'a installée. Ce n'est qu'à lui
qu'elle se sent capable de vider son cur. D'ailleurs, l'usage du
JE par les deux personnages, Ourika et le jeune étudiant en médecine,
contribue à accentuer chez le lecteur, la sensation de profondeur
et d'authenticité de la souffrance irréparable qui l'a déchirée.
Or, si bien le roman a fait scandale dans les classes cultivées
européennes par le fait que Claire Duras ait créé
une protagoniste à la peau noire, il ne s'agit pas d'un récit
antiraciste. N'oublions pas que l'esclavage n'a été aboli
définitivement en France qu'en 1848. Malgré l'essor des
idées révolutionnaires, l'aristocratie qui a accueille Ourika
échappe à la révolution, vit de loin la révolte
de Saint Domingue et de plus près la Terreur de Robespierre, mais,
tout de suite arrive la Restauration. Madame de B, tout en étant
malade Ourika, accepte d'immédiat d'épouser son petit-fils
Charles, avec une riche héritière sans se demander l'effet
que ce mariage pouvait avoir sur Ourika, Charles étant son meilleur
ami et confident. Au fait, comme Madame de B. paraît ne pas trouver
d'explication ni de solution à sa souffrance, on ne voit pas qu'elle
ait mauvaise conscience, puisqu'elle part au mariage en laissant Ourika
alitée.
Très belle écriture et très belle histoire qui n'approfondit
pas les questions formulées plus haut : pourtant elle y fait réfléchir
en étant toujours d'actualité. Pour moi, le message principal
serait : ce n'est pas (encore ?) dans les normes
d'accepter la différence, la seule issue est la disparition du
différent.
José Luis
Livre bien étrange que ce petit roman Ourika. D'une écriture
plus proche du XVIIe que du XVIIIe siècle, il fait aussi penser
aux livres à finalité morale et même religieuse à
l'adresse des filles de bonne famille. C'est sans doute la raison pour
laquelle je n'ai pas réussi à l'aimer, même si dans
le rapport collectif qu'on en avait fait, on peut lire quelque chose comme
: "Nous l'avons tous aimé". J'avais pourtant dit
bien clairement et à voix haute que, en le lisant, je m'étais
énormément ennuyé. Mais on sait bien - et tout enseignant
de n'importe quel niveau éducatif, ou tout parent, ou tout membre
d'un couple, etc., en a l'expérience - que ce qu'on dit ou qu'on
demande de faire à ses élèves ou à ses enfants,
etc., est très souvent mal compris, voire de manière contraire
au sens attendu par les producteurs du discours à eux adressé.
Il ne faut donc pas s'étonner que dans le cas présent il
y eut confusion, surtout si on n'a pas eu l'occasion de négocier
le sens du discours. Parce que, comme j'avais l'habitude de dire à
mes étudiants, une langue n'est pas un instrument de communication,
mais un instrument de production et construction partagée de sens,
comme résultat de la négociation entre les intervenants
dans l'acte langagier. Et, pour compliquer les choses, ajoutais-je, au
terme, toujours provisoire, de cette négociation, on ne peut jamais
être sûr du sens du message. Bref, je n'ai pas aimé
ce petit livre ni du point de vue du contenu, ni du point de vue de la
forme, si toujours est-il possible de séparer ces deux dimensions,
ce que je ne crois pas.
Pour avouer cette indifférence au sujet d'Ourika, il faut
sans doute être ou très ignorant ou très osé
puisque, d'après la note de "Présentation de l'éditeur",
Goethe en avait été bouleversé par sa lecture, l'écrivain
John Fowles affirme qu'il "touche
vraiment un des points les plus profonds de l'art, le désespoir
de ne jamais atteindre la liberté dans un milieu déterminé
et déterminant". La note de l'éditeur conclut
que cette nouvelle regarde vers Sartre et vers Camus car, en fin de comptes,
il s'agit de "l'examen
clinique d'une outsider, de l'éternel étranger dans la société
humaine".
Je n'ai ni les connaissances ni la formation suffisante pour contredire
l'avis de l'éditeur de cette édition du roman (Garnier
Flammarion, 2010), aussi je me contenterai d'exprimer
mes sentiments après ma lecture de ces pages, pas plus longues
qu'une brochure :
1. D'un côté je ne peux que rester admiratif devant le personnage
de l'autrice : son intelligence, son courage, sa capacité à
dénoncer hypocrisie de la haute société dont elle
fait partie.
2. Mais d'un autre côté, je n'arrive pas à comprendre
la naïveté, et même l'égoïsme, de l'une
des héroïnes du roman, M. de B., cette âme apparemment
généreuse, qui pris en charge l'éducation de la petite
Sénégalaise Ourika, qu'elle éleva comme si c'était
sa propre fille. Mais en lui cachant qu'elle ne pourrait jamais être
ni son égale ni celle de son fils, ni celle des courtisans et courtisanes
à la peau blanche parmi lesquels elle la fait évoluer, comme
un joli caniche ou un quelconque exotique animal de foire, ce qui lui
causa un malheur dont Ourika ne se récupérera point.
3. Moins critiquable, et même digne d'être applaudie, me semble
l'attitude de Mme de... qui est consciente de ce qui est en train de se
passer et de ce qui inévitablement se passera. D'ailleurs elle
en avertit Mme de B
, qui ne peut qu'accepter le bien-fondé
des points de vue de son amie :
"Pendant que nous sommes seules, dit Mme de ... à Mme de B., je veux vous parler d'Ourika : elle devient charmante, son esprit est tout à fait formé, elle causera comme vous, elle est pleine de talents, elle est piquante, naturelle ; mais que deviendra-t-elle ? et enfin qu'en ferez-vous ? Hélas ! dit Mme de B., cette pensée m'occupe souvent, et, je vous l'avoue, toujours avec tristesse : je l'aime comme si elle était ma fille ; je ferais tout pour la rendre heureuse ; et cependant, lorsque je réfléchis à sa position, je la trouve sans remède. Pauvre Ourika ! je la vois seule, pour toujours seule dans la vie !"
Mais Mme de B. ne fera rien pour arracher Ourika à son malheureux
destin. Mme de
, par contre, et c'est pour cela que c'est le seul
personnage que j'admire dans cette petite nouvelle, prend les choses en
main au risque de se faire haïr et consciente qu'elle fera nécessairement
mal à la jeune fille, mais un mal nécessaire, le mal que
la vérité cause souvent, le mal qui lui rendra sa liberté,
au prix fort de quitter le milieu douillet - mais qui n'était pas
le sien - dans lequel elle avait été élevée.
"Je lui veux plus de
bien que vous", dit Mme de
à Mme de B. "Je
désire son bonheur et vous la perdez".
Des années devront encore passer pour qu'une autre Ourika quelconque
puisse être vraiment libre sans passer par les mêmes souffrances
que celle-ci !
Voici donc quelques éléments d'interprétation à partir desquels ceux proposés par d'autres lecteurs pourront, après négociation, construire ensemble un sens partagé qui devra nécessairement n'être que provisoire.
Elle est
l'auteure de trois romans sur l'inégalité, se révélant
dans les situations amoureuses : inégalité noirs-blancs,
inégalité sociale, impuissance. Est-elle une autrice militante
intersectionnelle d'aujourd'hui ? Euh...
Claire Louisa Rose Bonne, duchesse de Duras, née Claire de Coëtnempren
de Kersaint, est née en 1777 à Brest et morte en 1828 à
Nice.
Qui
connut des produits dérivés de son livre Ourika,
tant le succès fut grand, avec des éditions pirates à
l'étranger ? La duchesse de Duras !
Avec Papa et Maman
Elle était comme Germaine Necker (Madame de Staël)
la fille d'un homme intelligent et libéral, Guy de Coëtnempren,
comte de Kersaint et contre-amiral. Il avait épousé, suite
à une mission en Martinique une riche Créole (=d'ascendance
française, d'une famille de colons), Claire Louise Françoise
de Paul d'Alesso d'Eragny, cousine germaine du gouverneur de la Martinique
: un mariage convenu, un couple peu harmonieux ; la Révolution
permit le divorce en 1792. Peu après, l'amiral de Kersaint, qui
appartenait à cette noblesse avancée caractéristique
du XVIIIe siècle et n'avait pas hésité à soutenir
la cause de la Révolution, et qui, en tant que député
girondin opposé à la condamnation de Louis XVI, avait renoncé
volontairement à son immunité parlementaire, fut guillotiné.
Claire a quinze ans, sort à peine de deux ans au couvent
du Panthémont rue de Grenelle où sont placées
les filles de la haute société et elle est quasiment chef
de famille : sa mère n'a jamais eu la moindre initiative et il
s'agit d'aller récupérer à la Martinique les biens
de l'amiral.
Les voilà en 1794 aux Etats-Unis où Claire retrouve son
amie de couvent, Anne de La Tour du Pin, devenue fermière, qui
marque à ses armes ses mottes de beurre, se lie d'amitié
avec les Indiens.... (voir Les
Mémoires de la marquise de La Tour du Pin). On comprend
qu'une telle jeunesse ait rendu Claire de Kersaint assez peu conformiste...
Après leur séjour à Philadelphie puis à la
Martinique, et une fois les questions de fortune réglées
(en possession d'une fortune considérable léguée
par un parent établi aux Colonies), mère et fille reviennent
en Europe et séjournent à Londres où sont volontairement
réfugiés nombre de nobles soucieux d'éviter la répression
s'exerçant en France.
Une fois mariée
À Londres, elle rencontre en 1795, à 18
ans donc, Amédée-Bretagne-Malo de Durfort, duc de Duras,
qu'elle épousera deux ans plus tard. Elle est mère aussitôt,
de Félicie en 1797 et de Clara en 1799. Ils acquièrent
le château d'Ussé en Touraine, où à leur retour
en France en 1808 ils séjourneront jusqu'en 1815.
Son mari sera admis à la cour de Louis XVIII et la renommée,
dans le Paris post-révolutionnaire, de son salon, fera de la maison
des Duras un des centres de la vie littéraire parisienne, que ce
soit au 22 rue de Varenne, ou aux Tuileries. Ils acquièrent un
pied-à-terre en région... : le
château d'Ussé. L'amitié
de Chateaubriand lui ouvrira les milieux littéraires.
Les langues parlées par
Madame de Duras
Claire de Duras appartient à une génération où
lon étudie langlais, litalien, le latin : elle
parle donc anglais (d'où le vers en exergue de Byron dans Ourika),
lit litalien dans le texte, traduit des textes latins...
Sa fille cadette parlera elle, allemand : bien quélevée
par une bonne anglaise et habituée par sa mère à
pratiquer tous les jours la langue de son pays de naissance, elle sintéressera
davantage à la langue et à la littérature doutre-Rhin...
Humboldt, pour compléter ses connaissances lui fera parvenir les
"plus jolies éditions dauteurs allemands", que
son frère Guillaume, le grand philologue, aura choisies lui-même.
Quand Goethe écrit à Mme de Duras, il sait que c'est sa
fille qui lui traduira sa lettre écrite en allemand. Madame de
Duras sétait passionnée pour Werther, mais
en traduction.
La littérature
Claire de Duras ne comptait pas faire carrière dans la littérature
et cest à contrecur quelle céda aux pressions
de Chateaubriand et publia anonymement, en 1823, Ourika, un des
trois brefs romans quelle avait écrits alors quelle
sétait retirée à la campagne lors dune
maladie contractée vers 1820.
Les deux autres sont Édouard, écrit en 1825 et Olivier
ou le Secret, écrit en 1822, mais publié seulement en
1971 !
En outre, elle compila Les Pensées de Louis XIV, extraites
de ses ouvrages et de ses lettres manuscrites, publiées en 1827.
Les Mémoires de Sophie et Amélie et Pauline
furent publiés en 2011.
Le Moine du Saint-Bernard reste inédit.
Le contexte "noir" d'Ourika
Voici les premiers mots d'Ourika : "Je fus rapportée
du Sénégal, à l'âge de deux ans, par M. le
chevalier de B."
L'esclavage, supprimé par la Convention, est rétabli en
1802. La traite est interdite par Napoléon en 1815, mais l'esclavage
ne sera définitivement aboli qu'en 1848. Lesclavage étant
interdit sur le territoire français, une mode étrange se
répandit dans la deuxième moitié du XVIIIe siècle.
Ainsi, en 1785 le chevalier de Boufflers, gouverneur
du Sénégal, fit don à Delphine, future marquise de
Custine, et Elzéar de Sabran, son frère, futur comte (emprisonné
en 1812 à Vincennes après que sa correspondance avec Madame
de Staël eut été détournée et lue...),
d'un enfant noir qu'ils appelèrent Vendredi. La duchesse d'Orléans
reçoit une petite fille. Le chevalier expédie à sa
tante, Marie-Charlotte de Rohan-Chabot, épouse du maréchal
de Beauvau-Craon, qui navait pas denfant, une petite fille,
Ourika, qui mourut à 16 ans et dont elle parle dans ses Mémoires
de façon émouvante ; le maréchal, alors âgé
de 65 ans, et son épouse, au lieu de la destiner à la domesticité,
la firent élever comme la fille quils navaient pas
eue, dans le somptueux hôtel de Beauvau qui abrite depuis 1861,
sur la place du même nom, à Paris, le ministère de
lIntérieur, qui gère les questions d'immigration...
En 1787, le chevalier offre à la reine Marie-Antoinette Jean
Amilcar ; lorsque Marie-Antoinette sera emprisonnée en
1792, elle continuera à se préoccuper du sort de son protégé
depuis sa prison...
Bien plus tard, Chateaubriand a lui-même reçu un petit négrillon,
nommé Morgan, de son ami Drovetti, consul général
de France à Alexandrie. Morgan vit dans lentourage de Chateaubriand
et celui-ci demande en 1826, à lauteur dOurika
: "Voulez-vous servir de marraine à Morgan ? Je serai le
parrain". Mme de Duras accepte et lui annonce que l'archevêque
de Paris fera le baptême...
On pourra lire avec intérêt voire stupéfaction "Des
Européens au marché aux esclaves : stade suprême de
lexotisme ? Égypte, première moitié du XIXe
siècle", Roger Botte, Journal des africanistes,
2016.
Le succès d'Ourika
7000 exemplaires d'Ourika s'envolent, sans compter les éditions
pirates, les traductions et les contrefaçons belges !
Ce phénomène exceptionnel, affirme Marie-Bénédicte
Diethem dans son introduction à Ourika,
doit être replacé dans le contexte du temps où le
tirage d'un roman dépasse rarement 1500 exemplaires (ce fut le
cas de textes de Balzac, Stendhal, Dumas).
Le succès est tel que les produits dérivés se multiplient
: on vend au magasin les Trois-Sultanes rue Vivienne des rubans à
l'Ourika. Les femmes portent des blouses à l'Ourika,
une des couleurs les plus en vogue, une sorte de gris foncé, est
l'"Ourika", on fabrique des pendules et des vases à
l'Ourika dont l'un subsiste encore au château d'Ussé
(voir ci-dessous).
Publications
Ourika, Ladvocat,
1824, en ligne sur gallica
(voir ci-dessous les nombreuses éditions, antérieures
car privées, et ultérieures) ou wikisource
Édouard, Ladvocat, 1825, puis 1879 (sur gallica)
et enfin un siècle plus tard : Édouard,
Mercure de France, 1983, en ligne sur
wikisource et gutenberg
Pensées de Louis XIV, extraites de ses ouvrages et
de ses lettres manuscrites, Firmin
Didot, 1827.
Publications posthumes
Réflexions
et prières inédites, Débécourt,
1839 (sur gallica),
puis Hachette-BNF,
2022
Olivier
ou le Secret, Éditions José Corti, 1971
Le sujet de ce roman (l'impuissance) - aurait servi de modèle à
lArmance
de Stendhal sur gallica
Mémoires
de Sophie suivi de Amélie et Pauline
: romans démigration, éditions Manucius, 2011,
présentation et notes Marie-Bénédicte Diethelm.
Mémoires de Sophie avait été auparavant partiellement
publié par Agénor
Bardoux dans sa biographie de Claire de Duras, La Duchesse de Duras,
Calmann Lévy, 1898, en ligne sur gallica.
uvre inédite
Le Moine du Saint-Bernard (évoqué
dans une lettre à Rosalie Constant, datée du 15 mai 1824).
Correspondance
L'amante
et l'amie : lettres inédites 1804-1828,
François-René De Chateaubriand, Delphine De Custine,
Claire De Duras, édition de Bernard Degout et Marie-Bénédicte
Diethelm, préface de Marc Fumaroli, Gallimard "Collection
Blanche", 2017.
Les
éditions d'Ourika sont nombreuses - un "best seller
sous Louis XVIII", dira Lucien Scheler dans Le Bulletin du bibliophile,
1988.
Au XIXe siècle
1823,
à l'Imprimerie royale
|
1823 sur
gallica
; édition reprise par Hachette-BNF |
1824, chez Ladvocat, sur gallica |
<=Édition originale ayant appartenu à Pierre Bergé | ||
, hors commerce, tirée à une quarantaine d'exemplaires non mis dans le commerce. Élégante impression sur papier vélin, exécutée par l'Imprimerie royale qui n'avait encore jamais publié de romans. Dans une lettre à Rosalie de Constant, Madame de Duras évoque l'édition comme un tirage d'essai limité à 30 exemplaires réservés à ses amis : demi-percaline marbrée à la Bradel, dos orné de filets dorés, pièce de titre de veau rouge (reliure de la seconde moitié du XIXe siècle). | ||
1824 : d'autres éditions 1824 :
le tableau du baron
Gérard est exposé au
Salon, au Louvre, Ourika raconte son histoire et ses
malheurs, tableau dont on perdu la trace, connu par la représentation
gravée d'Alfred Johannot. Louis XVIII commande un vase représentant
Ourika (voir ci-dessous). 1853 : publié
par Hachette dans la collection "Bibliothèque
des chemins de fer", avec deux autres textes Ernestine
de Marie-Jeanne Riccoboni et Caliste d'Isabelle de Charrières
(publiée comme Ourika par Claudine Hermann aux éditions
des Femmes) ; voir le livre de 1853 avec
Ourika en
ligne ici. 1861 avec un autre roman Edouard chez Renault et Cie, sur gallica, édition d'Ourika reprise sur wikisource. 1878, à la Librairie des bibliophiles, avec une notice de M. Lescure, sur gallica, et en ligne sur le site Gutenberg. |
Au
XXe siècle
En France : | ||
1950 : Ourika suivi de Édouard,
éd. Stock, Delamain et Boutelleau, préface Jean Giraud,
étude Joë Bousquet "Madame de Duras et Stendhal" |
1979 : éd. des Femmes, "une édition féministe" de Claudine Herrmann, rééd. Mercure de France, 1983 | 1996 : Robert Laffont, "Bouquins", Ourika est incluse dans le volume Romans de femmes du XVIIIe siècle, édition de Raymond Trousson |
Dans le monde anglo-saxon : | ||
1993 :
University
of Exeter Press, Angleterre, présentation de Roger Little,
édition bilingue augmentée en 1998
|
1995 : Ourika: The Original French Text, New York, MLA Texts and Translations |
1995 : Ourika: An English Translation, trad. de John Fowles, New York, MLA Texts and Translations |
Au XXIe siècle
2006, éd.
Bleu autour, préface Christiane Chaulet Achour |
2010,
Gallimard
Folio classique, avec deux autres romans, Édouard
et Olivier ou le Secret, édition Marie-Bénédicte
Diethelm, préface Marc Fumaroli |
|
2013, éd. Hachette-BNF : Ourika et Édouard | ||
Trois éditions scolaires en France : | ||
2010
: Gallimard,
"Folioplus classiques", dossier Virginie Belzgaou
|
2019
: Hatier,
dossier de Nathalie Laurent
|
2022
: Gallimard,
"Folio+Lycée", dossier de Rachel Boucobza
|
Aux USA
2009 : Approaches
to Teaching Durass Ourika,
Mary Ellen Birkett, Christopher Rivers, New York: Modern Language Association
of America
Peu après la publication
d'Ourika
Comme signalé ci-dessus, le succès
incroyable du roman vit fleurir en 1824 de nombreuses adaptations d'Ourika
pour les théâtres de la capitale, dont trois sont rééditées
dans Les
Ourika du boulevard, Sylvie Chalaye, L'Harmattan, 2003.
Contrairement au roman, ces trois pièces furent accueillies "par
des bâillements et des sifflets". Aux yeux des spectateurs
parisiens de l'époque, la sémillante Ourika était
beaucoup trop éloignée de l'image avilissante du "bon-nègre"
pour plaire. Contrairement au roman qui permet "de se faire illusion
en lisant", disait la presse, grimer nos jolies actrices en négresse
nuit à leur réputation car "la couleur noire ne
plaît pas au théâtre".
Récemment
- En 2011 : Ourika, Théâtre
de la Tempête, mise en scène Philippe Adrien. Extrait
sur youTube
- En 2016 : création au Théâtre de Nesle, Paris
8e, d'Ourika
d'hier à aujourd'hui, mise en scène Elisabeth Tamaris.
Jouée en mai 2022 au Théâtre
Darius Milhaud, Paris 19e.
Ses
copines
- Anne de La Tour du Pin, connue au couvent
- Joséphine de Damas, marquise de Sainte-Maure, autre amie de couvent
- Rosalie de Constant, cousine de Benjamin Constant
- Anne-Sophie Swetchine, dorigine russe, amie de Joseph de Maistre,
qui tient un salon 71 rue Dominique
- Germaine de Staël : aaaah, quelle femme !
Les participants au salon de Madame de Duras
- Des écrivains ou
philosophes : Chateaubriand, Madame
de Staël, Benjamin Constant, Lamartine,
Joseph de Maistre, le vicomte de Bonald,
le marquis de Custine...
- Des savants : Humboldt, particulièrement fidèle,
Arago, Cuvier, dont la duchesse suit les cours au Collège de France,
l'astronome Arago, le sinologue Abel de Rémusat,...
- Des puissants : le duc de Richelieu, le maréchal Soult,
le duc de Raguse, le comte Molé, Talleyrand...
- Des personnalités
étrangères fréquentent le salon de Claire de Duras
lors de leurs séjours à Paris : le duc de Wellington (le
vainqueur de Waterloo), le chevalier Stuart ambassadeur d'Angleterre,
le comte Pozzo di Borgo ambassadeur de Russie...
Ce qu'ils disent d'elle
Chateaubriand, le premier lecteur d'Ourika :
"En lisant les premières pages, j'ai pleuré".
"Je suis tout ému d'Ourika".Chateaubriand dira de Madame de Duras, dans Les Mémoires doutre-tombe, quelle était dotée dun esprit qui réunissait quelque chose de la force de la pensée de Mme de Staël à la grâce du talent de Mme de La Fayette.
Sainte-Beuve (1804-1869) lui consacrera une étude en 1855 dans Portraits de femmes (rééd. par les Classiques Garnier, 2014). C'est clair, Sainte-Beuve fait partie des groupies :
"Ce serait bien incomplètement connaître Mme de Duras que de la juger seulement un esprit fin, une âme délicate et sensible, comme on le pourrait croire d'après son influence modératrice dans le monde ( ) Elle était plus forte, plus grande, plus passionnément douée que ce premier aspect ne la montre ; il y avait de puissants ressorts, de nobles tumultes dans cette nature, que toutes les affections vraies et toutes les questions sérieuses saisissaient vivement ; comme l'époque qu'elle représente pour sa part et qu'elle décore, elle cachait sous le brillant de la surface, sous l'adoucissement des nuances, plus d'une lutte et d'un orage."
Voici là comment naît Ourika, raconte
Sainte-Beuve :
"En 1820 seulement, ayant un soir raconté avec détail lanecdote réelle dune jeune négresse élevée chez la maréchale de Beauvau, ses amis, charmés de ce récit (car elle excellait à raconter), lui dirent : 'Mais pourquoi nécririez-vous pas cette histoire ?' Le lendemain, dans la matinée, la moitié de la nouvelle était écrite. Édouard vient ensuite ; puis deux ou trois autres petits romans non publiés, mais qui le seront avant peu, nous avons lieu de le croire. Elle sefforçait ainsi de se distraire des souffrances du corps en peignant celles de lâme ; elle répandait en même temps sur chacune de ces pages tendres un reflet des hautes consolations vers lesquelles, chaque jour, dans le secret de son cur elle sacheminait.
L'idée d'Ourika, d'Édouard, et probablement celle qui anime les autres écrits de Mme de Duras, c'est une idée d'inégalité"
Mais, nous dit Sainte-Beuve :
"On lui en voulait en certains cercles fanatiques pour léclat de son salon, pour ses opinions libérales, pour lespèce de gens, disait-on, quelle voyait : ses amis recevaient quelques fois dodieuses lettres anonymes" (parmi de nombreux portraits littéraires, Madame de Duras, Revue des Deux Mondes, 2e quinzaine, juin 1834)
Balzac dans Illusions
perdues (Un grand homme de province à Paris) met
en scène devant Madame de Bargeton qui joue un rôle déterminant
dans le destin de Lucien de Rubempré, la marquise d'Esnard qui
invite ainsi le poète Canalis :
"Hé ! bien, faites-moi le plaisir de venir dîner lundi chez moi avec monsieur de Rubempré, vous causerez plus à l'aise qu'ici des affaires littéraires ; je tâcherai de racoler quelques-uns des tyrans de la littérature et les célébrités qui la protègent, l'auteur d'Ourika et quelques jeunes poètes bien pensants."
Victor Hugo dans Les Misérables, tome 1, situe l'époque :
"L'émotion parisienne la plus récente était le crime de Dautun qui avait jeté la tête de son frère dans le bassin du Marché-aux-Fleurs. On commençait à faire au ministère de la marine une enquête sur cette fatale frégate de la Méduse qui devait couvrir de honte Chaumareix et de gloire Géricault. Le colonel Selves allait en Égypte pour y devenir Soliman pacha. Le palais des Thermes, rue de la Harpe, servait de boutique à un tonnelier. On voyait encore sur la plate-forme de la tour octogone de l'hôtel de Cluny la petite logette en planches qui avait servi d'observatoire à Messier, astronome de la marine sous Louis XVI. La duchesse de Duras lisait à trois ou quatre amis, dans son boudoir meublé d'X en satin bleu ciel, Ourika inédite."
Trois ou quatre amis ? Plutôt quinze à trente "bienheureux du Paradis" (Le Frondeur, 30 janvier 1826, précise Marie-Bénédicte Diethelm dans son introduction à Ourika)
Stendhal qui rend compte dans New Monthly Magazine de publications étrangères, chronique longuement Ourika dès juin 1824 :
"L'auteur en est la duchesse de Duras. Et pour un premier essai dans la profession, elle a fait preuve de beaucoup de savoir-faire pour préparer les moyens de son succès (...) dans l'ensemble, pour un premier essai, et celui d'une duchesse, c'est un ouvrage qui lui fait honneur."
En 1826, Stendhal expose à Mérimée
les difficultés du roman qu'il projette sur l'impuissance (Armance)
dont le thème lui est inspiré par ce qu'il sait du roman
non publié de Mme de Duras Olivier et le secret et dont
provisoirement il nomme le héros Olivier...
Toujours cette année-là, Stendhal s'inquiète :
"la duchesse de Duras, dont le talent est si célèbre, est en ce moment dangereusement malade. [ ] La duchesse est lauteur de quelques très jolis romans, dans lesquels elle a peint les impossibilités de lamour, si je puis mexprimer ainsi. Ourika ne peut pas se marier avec son amant parce quelle est de couleur, et Édouard ne peut pas devenir le mari de la duchesse de Nevers parce quil nest pas noble. La duchesse de Duras a lu à quelques intimes un roman intitulé Olivier que lon dit supérieur à ses premiers ouvrages, mais qui na point été imprimé". (Chronique publiée en décembre 1826 dans La Revue britannique)
En 1828, Stendhal rend compte de la disparition de Claire de Duras :
"la perte de la duchesse de Duras, qui mourut à Nice voici quelques mois, est un événement profondément déploré dans le grand monde de Paris [ ]. Cétait une femme dun talent supérieur [ ]. Mme de Duras a peint les tableaux les plus touchants de lamour en lutte contre les difficultés et les malheurs. Comme si elle voulait démontrer que 'le chemin de lamour véritable nest jamais facile', elle a pris pour thème de ses romans les obstacles insurmontables qui menacent le bonheur des amoureux" (dans une chronique du 20 avril 1828).
George Ticknor, un Américain qui rédigea ses Mémoires, donne un aperçu du salon de Claire de Duras :
"ardente, enthousiaste, extraordinairement instruite, bien que toujours simple et sans prétention, elle ne pouvait parler sans captiver tous ses auditeurs, même les plus célèbres [ ]. Cétait surtout dans les petites réunions intimes quon pouvait juger le charme magique de sa parole. Un soir quelle navait à sa table que sa plus jeune fille, M. de Humboldt et moi, je fus littéralement soulevé en lécoutant" (cité par Georges-François Pottier, "Des femmes à lhonneur : Claire de Duras (1777-1828), écrivaine", 2014).
Humboldt à propos de Claire de Duras :
"vous parler de ce qui vous est ravi, de celle qui faisait le plus bel ornement de la France, dont la bienveillance de caractère égalait pour le moins lélévation du plus noble talent, ce nest pas vous rappeler la douleur dans une calamité si grande, cest un besoin de lâme de soccuper sans cesse de ce qui a fait le bonheur de notre vie [ ]. Je serais le dernier des hommes si je ne lui conservais un culte dans mon cur". (Lettre à la duchesse de Rauzan, fille de Mme de Duras, le 19 février 1828)
Lorsque, à la fin de lannée 1823,
Madame de Duras fait paraître Ourika, la sensation est générale
en France et en Europe. En 1825, la publication dÉdouard,
le deuxième roman de la duchesse, rencontre également un
succès international.
La cour de Prusse
est enthousiaste. La princesse Louise Radziwill, née Louise de
Prusse, écrit à Humboldt pour le remercier de lui avoir
fait découvrir les ouvrages de Madame de Duras. Le roi Frédéric-Guillaume
III, porte aux nues Madame de Duras dont il est un grand lecteur. À
Paris, il se rend volontiers dans le salon de la duchesse, rue de Varenne,
en compagnie de ses fils et de ses neveux.
Le baron James de Rothschild, qui est originaire de Francfort, déclare
que Madame de Duras est une femme de génie...
Et puis Goethe, dont la réaction à la cour de Weimar est rapportée par Humboldt dans une lettre à la duchesse :
"Jentre chez Goethe. Je sais, me dit-il, que vous connaissez la Duchesse de Duras, lauteur dOurika et dÉdouard. Que vous êtes heureux ! Elle ma fait cependant bien du mal. À mon âge, il ne faut pas se laisser émouvoir à ce point. Parlez-lui de mon admiration : remerciez sa fille de ce quelle chérit notre langue et Schiller, Votre ami et le mien. Puis, à la Cour, on ma raconté quun autre roman (de Walter Scott) ayant été placé sur sa table, il le fît ôter avec ces mots : quen trois mois on nose me placer un livre là où se trouve Ourika wo Ourika liegt. / Je ne vis que de Votre gloire."
Madame de Duras transmettra à Goethe un exemplaire magnifiquement relié dOurika. Goethe en remercie la duchesse par une lettre en 1827. Il lui dit entre autres que ses "ouvrages si pleins desprit et de goût, si profondément sentis, sont au nombre des fleurs les plus belles et les plus gracieuses dans le jardin de la vie."Il dit aussi : "Il est un point sur lequel toutes les belles âmes sympathisent entre elles : cest en voyant lesprit né libre et le cur avec ses inspirations se heurter aux barrières étroites que leur oppose le monde extérieur, et leur élan arrêté par des obstacles qui réagissent dans tous les sens.
Cest sous ce point de vue que je trouve une haute signification dans le charmant livre dOurika, que jaime depuis longtemps, et que son extérieur élégant rend maintenant encore bien plus précieux pour moi. Ce nest pas le tableau dune âme humaine luttant contre des usages consacrés par le temps, ou dautres empêchements conventionnels, cest le combat de deux natures opposées. Une séparation, établie par le créateur lui-même, on veut la franchir et la faire disparaître ; et un être aimant et digne dêtre aimé périt dans cet effort. Tout ce quune position élevée peut y ajouter de difficultés nest pas dune haute importance ; dans la position sociale la plus simple, le mal est aussi radical, et ses funestes résultats sont aussi inévitables."
Au
château d'Ussé, deux cèdres offerts par Chateaubriand
à Madame de Duras
Le peintre François Gérard (1770-1837) avait alors une grande renommée, non seulement française, mais aussi européenne : surnommé "le peintre des rois, le roi des peintres", il fut en effet le portraitiste de toutes les familles souveraines européennes... (Il avait un atelier au Louvre, comme le stipula le ministère de l'Intérieur). Il avait des relations suivies avec Humboldt et Mme de Duras. On lit ici sur gallica certaines de leurs lettres.
Deux images en témoignent, illustrant Ourika : un vase et une gravure. La duchesse de Duras confiera au baron François Gérard :
"En vérité je me sens, depuis ce matin, un peu d'orgueil d'être l'auteur d'Ourika. M. de Duras, qui est venu chez moi en rentrant, partage mon admiration pour votre charmante composition. Je voudrais bien, monsieur, que vous n'eussiez pas d'engagement à dîner pour après-demain dimanche, et que vous puissiez venir recevoir de nouveaux remerciements et l'assurance qu'on sent dans cette maison tout le prix du petit chef-d'uvre que vous y avez placé. Malheureusement vous n'aurez pas M. de Humboldt. M. de Chateaubriand me l'a pris."
ou encore :
"Vous croyez bien, monsieur, que je ne pense qu'à ma chère Ourika. Je suis dans un grand embarras ; je voudrais bien faire faire la vignette, je voudrais bien ne pas me détacher du tableau. Serez-vous assez bon pour me donner quelques renseignements sur les meilleurs graveurs de ce genre ? J'avais pensé à envoyer le tableau en Angleterre, mais s'il est possible de trouver ici un artiste aussi habile dans ce genre, je le préférerais ; ce que je veux avant tout, c'est que la vignette ne soit pas indigne de votre charmant ouvrage, et c'est beaucoup demander."
Finalement, Ourika a été gravée par Tony Johannot. Théophile Gautier disait de lui :
"Tony Johannot est sans contredit le roi de lillustration. Il y a quelques années, un roman, un poème ne pouvait paraître sans une vignette sur bois signée de lui ".
Il s'agit d'une gravure, façonnée d'après un tableau perdu du baron Gérard, premier peintre du roi. Il met en scène une scène d'Ourika où le personnage du roman, devenu nonne, raconte l'histoire de sa vie à un médecin venu veiller sur sa santé.
Gravure d'Alfred Johannot,
1824, d'après le baron François Pascal Simon Gérard,
Ourika, jeune négresse, raconte son histoire et ses malheurs,
peinture, 1823
reproduite dans Ourika,
édition de Roger Little, University of Exeter Press, 1998
Louis XVIII a chargé Gérard de peindre la même scène pour le vase ci-dessous, donné à Madame de Duras et qui se trouve encore aujourd'hui au château d'Ussé, où Duras a vécu à l'époque.
Vase
de Sèvres, 1823, Château d'Ussé qui appartenait aux
Duras
Gravure
dessinée par Marie Marguerite Françoise Jaser, 1840
représentant Mme de Duras
Elle est l'auteure
de la présentation très développée d'Ourika,
en édition GF, publiée
l'année précédente
en italien en 2009, éditions
Adelphi.
Professeure de littérature
française à l'Université,
auteure de nombreux livres, travaillant également dans la presse
(radio, presse écrite).
Petite-fille du grand philosophe, historien et homme politique Benedetto Croce, mère de deux filles nées du mariage avec le critique, essayiste, scénariste Masolino d'Amico, elle épouse ensuite un diplomate français, Benoît d'Aboville et vit entre Naples, Rome et Paris.
Ses livres traduits en français
:
- Madame
du Deffand et son monde, préface de Marc Fumaroli, trad.
Sibylle Zavriew, Seuil, coll. Points Essais, 1999, réédité
par Flammarion, 2017.
- L'âge
de la conversation, trad. Éliane Deschamps-Pria, Gallimard,
2002 (prix du Mémorial-grand prix littéraire d'Ajaccio,
prix Saint-Simon), coll.
Tel, 2005
- Marie-Antoinette
et le scandale du collier, trad. Éliane Deschamps-Pria,
Gallimard, coll. "Hors-série Connaissance", 2008, 93
p.
- Reines
et favorites : le pouvoir des femmes, trad. Éliane Deschamps-Pria,
Gallimard, 2009, 484 p., Folio, 2009.
- Les
derniers libertins, trad. Dominique Vittoz, Flammarion, 2016,
672 p.
- La
contessa, trad. Dominique Vittoz, Flammarion, 2021 (il s'agit
de Virginia Verasis, comtesse de Castiglione).
Elle a reçu de nombreux prix. Citons le Prix du Rayonnement de la langue et de la littérature françaises attribué par l'académie française en 2006 à une étrangère..., en 2017 le prix mondial Cino-Del-Duca, juste après Sylvie Germain, et avant Philippe Jaccottet, Kamel Daoud, Joyce Carol Oates, Maryse Condé, Haruki Murakami...
2010 : Historienne, Odile Métais-Thoreau publie Une femme rare : dans les pas de la duchesse de Duras, Odile Métais-Thoreau, éd. du Petit Pavé, 2010.
Les colloques témoignent de la résurrection de Claire de Duras :
2014 : Claire de Duras, née à Brest en 1777, est mise à l'honneur dans sa ville d'origine : "De la Révolution à la restauration : Claire de Duras (Brest 1777-Nice 1828), une femme de lettres et de pouvoir", colloque international, Université de Bretagne-Occidentale, 27-28 novembre 2014 (direction Eric Francalanza) Faculté des Lettres, Langues et Sciences humaines et sociales Victor-Segalen.
2015 : Un séminaire
fut consacré à "Claire de Duras (1777-1828), romancière
de la Restauration" à la Sorbonne le 3 avril 2015, sous
la direction de Marie-Bénédicte Diethelm, dont voici
ici le programme et dont on peut écouter les interventions.
Si Marie-Bénédicte Diethelm est la grande prêtresse,
Marc Fumaroli en est le grand prêtre... :
- Introduction
par Marc Fumaroli, de l'Académie française
- Bertrand Degout (Maison de Chateaubriand-Vallée-aux-loups) :
"Claire
de Duras et Chateaubriand"
- Marie-Bénédicte Diethelm (Paris IV) : "Claire
de Duras, écrivain majeur"
- Jean Balcou (Université de Brest) : "Claire
de Duras, fiction et politique"
- Éric Francalanza (Université de Brest) : "Le
mariage dans les romans achevés de Madame de Duras (Ourika,
Olivier ou le Secret, Mémoires de Sophie)".
Le séminaire donne lieu à la publication des interventions
suivantes dans la Revue d'histoire littéraire de la France,
Presses Universitaires de France, n° 3, 2016 :
- "Avant-propos",
Marc Fumaroli
- "Madame
de Duras et Chateaubriand : temps cyclique et temps de la politique",
Bernard Degout
- "Goethe
et Claire de Duras", Marie-Bénédicte Diethelm.
Dans la presse
-
Racisme, lactification, exclusion : Ourika de Madame de Duras,
1823, Christiane Chaulet Achour, Diacritik, 6 février
2017.
- Histoire
de Brest : "Claire
de Duras, la littéraire" (1/2), "Claire
de Duras, lantiraciste" (2/2), Rédaction Côté
Brest, Actu.fr, 10 et 16 novembre 2019.
- "Claire
de Duras, romancière de laltérité",
Morgane Avellaneda pour la Bibliothèque nationale de France, Libération,
6e chronique "Fières de lettres", 5 novembre 2020.
Dans les publications spécialisées
- "Madame
de Duras, cette inconnue", R. Tezenas du Montcell, La Revue
des deux mondes, 1er août 1968.
- "Ourika ou
les couleurs de la mémoire", Anne Chamayou, maîtresse
de conférences, Cahiers Saint Simon, "Des Mémoires
au roman : le roman de la mémoire", n° 29, 2001.
- "La Galathée
noire ou la force dun mot : Ourika de Claire de Duras,
1823", Valérie Magdelaine-Andrianjafitrimo, Orages,
n° 2, mars 2003.
- "Douceur
de la vengeance : portraits masculins dans Ourika de Claire de
Duras", Mary Donaldson-Evans, Itinéraires, numéro
inaugural, 2008.
- "Claire de Duras
: grande dame et 'femme auteur'", Marie-Bénédicte
Diethelm, La Littérature en bas-bleus : romancières
sous la Restauration et la monarchie de Juillet (1815-1848), dir.
Marie-Bénédicte Diethelm, Classiques Garnier, 2010, p. 239-257.
- "Des
femmes à lhonneur : Claire de Duras (1777-1828), écrivaine",
Georges-François Pottier, Mémoires
de lAcadémie des Sciences, Arts et Belles-Lettres de Touraine,
t. 27, 2014.
- "La réception des romans de Claire de Duras : un exemple de la place faite à une femme auteur dans lhistoire littéraire", Amélie Legrand, Une "période sans nom" : les années 1780-1820 et la fabrique de lhistoire littéraire, Classiques Garnier, 2016, p. 223-239.
- "Ourika de Claire de Duras (1824), un roman de la conversion à laube du XIXe siècle", Eric Francalanza, Revue d'histoire littéraire de la France, n° 33, 2017
- "Fiction et politique chez Madame de Duras", Jean Balcou, Revue dHistoire littéraire de la France, n° 3, 2017.
- "Claire de Duras, Chateaubriand et lannée des quatre romans, 1822", Marie-Bénédicte Diethelm, Femmes artistes et écrivaines dans lombre des grands hommes, dir. Hélène Maurel-Indart, Classiques Garnier, 2019, p. 65-83.
Et pour terminer, deux mémoires récents
:
- "Les
personnages et leurs modèles de Prévost à Chateaubriand
dans les fictions achevées de Claire De Duras", Irène-Olive
Larney, mémoire de Master 2, Université de Bretagne Occidentale,
2020.
- Par une étudiante
au Swarthmore
College, une université réputée à 30 km
de Philadelphie : "Qui
est Ourika ? Méditations sur une figure littéraire et la
condition de la femme noire", Abigail Ximena Young, mémoire
universitaire, Département
Langues et Littérature modernes, 2021.
Entretemps, deux types de correspondance avec Madame
de Duras sont publiées, celle avec Chateaubriand et celle
avec Humboldt qui est objet d'un prix :
Lettres
à Claire de Duras (1814-1828), correspondance inédite,
présentée, établie et annotée par Marie-Bénédicte
Diethelm, préface de Marc Fumaroli de lAcadémie française,
éd. Manucius, 2016.
Le Prix Sévigné avec le soutien de
la Fondation La Poste a été attribué à la
publication de la correspondance d'Alexandre de Humboldt à Claire
de Duras. FloriLettres
(revue littéraire de la Poste), n° 182, 2016, comporte
les articles suivants : "Édito : Alexandre de Humboldt Lettres
à Claire de Duras", "Entretien avec Marie-Bénédicte
Diethelm", "Lettres choisies d'Alexandre de Humboldt",
"Portrait croisé Humboldt et Claire de Duras".
L'amante
et l'amie : lettres inédites, François-René
De Chateaubriand, Delphine De Custine, Claire De Duras, édition
de Bernard Degout et Marie-Bénédicte Diethelm, préface
de Marc Fumaroli, Gallimard "Collection Blanche", 2017.
Notons que la correspondance avec Chateaubriand intéressait depuis
longtemps, comme le montre cette article ancien : "Une
Amitié féminine de Chateaubriand - Madame de Duras : lettres
inédites", Revue des Deux Mondes, Victor Giraud,
1909.
Vraiment pas grand-chose à se mettre sous la dent...
Du
côté des autrices : Claire de Duras, 12 mars 2020, 5
min 16, une émission de Mathilde Doiezie, en partenariat avec l'association
Le Deuxième texte.
Ourika ponctue tout du long l'émission d'une série documentaire de 4 épisodes d'une heure consacrés à la naissance du racisme, intitulée "Dans l'ombre des Lumières, la construction de la race", avec Sarga Moussa, directeur de recherche CNRS, LSD, France Culture, 15 juin 2022.
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