Au fil de sa carrière


TOUS LES LIVRES
traduits de Paul Auster (avec la date de leur publication aux USA)

Romans
- Fausse Balle, 1982, non traduit
-
Trilogie new-yorkaise
, 448 p., comportant les 3 romans suivants publiés d'abord séparément :
Cité de verre, 1985, 176 p.
Revenant
s, 1986, 88 p.
La chambre dérobée, 1986, 168 p.
- Au pays des choses dernières (le voyage d'Anna Blume), 1987,
272 p.
-
Moon Palace, 1989, 480 p.
- La Musique du hasard, 1990
, 320 p.
- Léviathan, 1992, Prix Médicis étranger
, 432 p.
- Mr Vertigo, 1994
, 400 p.
- Tombouctou
, 1999
, 224 p.
- Le livre des Illusions, 2002
, 384 p.
- La Nuit de l'oracle, 2003
, 240 p.
- Brooklyn Follies, 2005
, 368 p.
- Dans le scriptorium, 2006
, 160 p.
- Seul dans le noir
, 2008
, 192 p.
- Invisible, 2009
, 304 p.
- Sunset Park, 2010
, 336 p.
- 4321, 2017
, 1216 p.
- Baumgartner, 2023
, 208 p.

Jeunesse
- Le Noël d'Auggie Wren, 1990

Œuvres romanesques
- Tome I
:
•L'Invention de la solitude •Le Voyages d'Anna Blume •Moon Palace •La Musique du hasard •Leviathan •Smoke •Le conte de Noël d'Auggie Wren •Brooklyn Boogie

- Tome II
: •Trilogie New-Yorkaise •Espaces blancs •Le Carnet rouge •Pourquoi écrire ? •L'Art de la faim •Disparitions
- Tome III
:
•Mr Vertigo •Tombouctou •Le Livre des illusions •La Nuit de l’oracle •Brooklyn Follies •Dans le scriptorium

Essais, mémoires, autobiographies, correspondance
- L'invention de la solitude, 1982 (autobiographique)
- L'Art de la faim, 1992
Le Carnet rouge,1993, treize récits
- Le diable par la queue, suivi de Pourquoi écrire ?, 1997
- La Solitude du labyrinthe, dialogue avec Gérard de Cortanze, 1997
- L'Histoire de ma machine à écrire
, avec des peintures de Sam Messer, 2002
- Constat d'accident et autres textes
, 2003
- Chronique d'hiver, 2012 (autobiographique)
- Excursions dans la zone intérieure
, 2013 (autobiographique)
- Ici & maintenant
: 2008-2011, correspondance avec Coetzee,
2013
- La pipe d'Oppen
: essais, discours, préfaces (quatorze textes en hommage à des hommes qui l'ont marqué soit en les rencontrant soit en les lisant, dont Beckett, Perec, Robbe-Grillet), 2016
- Une vie dans les mots : conversations avec Inge Birgitte Siegumfeldt, 2017
- Pays de sang : Une histoire de la violence par arme à feu aux États-Unis, avec le photographe Spencer Ostrander, 2023

Scénarios
- Smoke
suivi de Brooklyn Boogie, 1995
- Lulu on the bridge
, 1998
- La Vie intérieure de Martin Frost
, 2007

Théâtre
- Laurel et Hardy vont au paradis
suivi de Black-Out et Cache-Cache

Biographie
- Burning Boy : vie et œuvre de Stephen Crane
, 2021

Poèmes
- Disparitions

Autres
- Le diable par la queue
contient Laurel et Hardy vont au paradis, Black-out et Cache-cache, le manuel d'Action Baseball (un jeu de cartes) et un roman policier, Fausse balle
- Je pensais que mon père était Dieu : et autres récits de la réalité américaine
: textes rassemblés par Auster, mais dont il n'est pas l'auteur
-
Préface de Traité du funambulisme de Philippe Petit
-
Traductions de Mallarmé, Sartre, Simenon, Blanchot...

Paul Auster (1947-2024)

Nous avons lu cet auteur en mars 2025.

Nous avions lu Trilogie new-yorkaise en 1991.

Délaissant La Storia que nous avions choisie l'été dernier, le groupe breton a programmé à la place Moon Palace lu en commun et d'autres livres de Paul Auster au choix. Nous avons à notre tour programmé Paul Auster au choix quelques mois plus tard. Résultat : 22 lecteurs de 18 livres de Paul Auster !

Les 12 cotes d'amour du groupe le 7 mars 2025
Danièle
Fanny

DeàJacqueline
Annick L CatherineMonique LRenée
Entre et Brigitte
Richard
Claire Thomas
Françoise

Les avis bretons divers =>ici

Monique L(avis transmis)
J'ai choisi ce livre de Paul Auster parce que j'en avais entendu parler et qu'il était dans ma liste de lecture depuis quelque temps.
Au départ, j'étais un peu sceptique : apprendre à un gamin à voler à force de détermination et de ténacité m'a paru comme un sujet plutôt surréaliste et surtout improbable.
L'incipit étant prometteur : "J'avais douze ans la première fois que j'ai marché sur l'eau. L'homme aux habits noirs m'avait appris à le faire", j'ai continué, intéressée par la gouaille de Walt et son côté déluré. Petit à petit j'ai adhéré à cette pseudo bibliographie d'une vie mouvementée, invraisemblable et aux multiples rebondissements. Bizarrement (j'en suis moi-même surprise !) j'ai été happée et j'ai vu Walt voler.
L'écriture y est sans aucun doute pour quelque chose, le ton également qui alterne entre sérieux et humour. J'ai trouvé truculente la langue de Walt.
C'est un étonnant récit sur la vie, ses choix, ses conséquences, ses désillusions, la faculté à se reconstruire après avoir connu une gloire sans égale, suivie d'une descente aux enfers toute aussi fracassante… Il y est question de l'amitié, de l'amour, de la mort !
C'est un récit qui allie de façon magistrale le réalisme, presque naturalisme par moments, et le fantastique.
J'ai apprécié que l'intrigue nous fasse traverser les États-Unis sur un fond historique : le racisme, le Ku Klux Klan, la crise de 1929, la pègre mafieuse...
Les personnages même secondaires sont tous incroyables. Ils ont tous connu dans leurs vies des très hauts et des très bas. Il y a quelque chose de très américain de valoriser le fait de faire fortune en partant de rien.
C'est après la lecture que je me suis posé des questions sur cet homme sans culture qui cherche à faire de l'argent, même provenant de sources douteuses, ce qui a de quoi inquiéter dans la période actuelle. Mais il est vrai que Walt sait faire montre d'empathie. Je ne modifie donc pas mon appréciation.
C'est un livre surprenant qui m'a provoqué un vrai plaisir de lecture. J'ouvre aux ¾.
Thomas
J'avais découvert Paul Auster de manière purement fortuite (normal, me direz-vous, pour un auteur chez qui le hasard occupe une telle place !), choisissant son Léviathan au rayon anglais de la FNAC à Montparnasse pour la seule raison que son titre me plaisait. Et j'avais tout de suite accroché à cette histoire (attention, que ceux qui ne l'ont pas lu se bouchent les oreilles !) un peu farfelue de poseur de bombes sous les répliques de la Statue de la Liberté. Un peu plus tard, rebelote avec Invisible, où je me rappelle un excellent tour de passe-passe sur l'identité du narrateur et des pistes de réflexion très intéressantes sur le récit de manière plus générale. Fort de cet excellent début, j'avais enchaîné avec La Musique du hasard, qui m'avait plutôt déçu, puis The New York trilogy qui m'était complètement passée au-dessus de la tête, peut-être parce qu'elle était beaucoup trop abstraite pour moi.
   
Un peu refroidi par ces deux dernières expériences, je n'avais pas relu ce cher Paul depuis, et ce n'est que grâce à vous que j'ai décidé de m'y replonger. Me disant que sa Trilogie new-yorkaise était peut-être une erreur de jeunesse, une œuvre pas tout à fait aboutie, je me suis plongé dans Moon Palace avec envie. Hélas, malgré un début prometteur (je m'attendais à un long parallèle avec les œuvres de Jules Verne qui ont bercé mes premiers pas en littérature), force était de constater que la magie n'opérait plus ! Peut-être parce que la recette, à base de personnages hauts en couleurs et d'histoires à la limite du fantastique, s'est usée avec les lectures ? Je ne saurais dire, mais si je n'ai pas passé un mauvais moment avec Moon Palace, je suis resté sur ma faim (un comble pour un roman dont le titre est le nom d'un restaurant !), attendant en vain le twist ou la révélation qui aurait pu tout changer ! (La découverte des différentes filiations ne m'ayant guère ému, je dois le dire !). Pour un autre auteur, j'aurais peut-être ouvert à moitié, mais là, compte tenu de la déception (la lune de miel entre Paul et moi est définitivement terminée...), je n'ouvre qu'au quart !
  
J'espère que vos avis me permettront peut-être de me réconcilier avec Paul Auster en m'indiquant quelle perle m'a échappé !
Françoise
Le peu que j'avais lu de Paul Auster ne m'avait pas emballée (la Trilogie new-yorkaise) et j'étais contre ce choix.
                  
J'ai choisi celui-ci parce qu'il était court et aussi parce que le titre Dans le scriptorium m'a intriguée et fait espérer quelque chose de nouveau.
Je me suis accrochée mais rien ne m'a plu, pas émue, pas amusée, énervée.
Une espèce de mystère, d'intrigue, de flou entretenu, l'impression de s'engluer sans jamais avoir d'éclaircissement.
Le personnage principal n'a aucun intérêt, n'est pas attirant dans aucun sens du terme, et n'inspire pas l'empathie, ni la curiosité.
On se perd dans des souvenirs énigmatiques, on ne sait pas à qui on a affaire. C'est artificiel. L'ennui !
Je dois avouer que je ne l'ai pas terminé.
À cause du personnage, j'ai pensé à La nuit du décret, roman magistral de Michel del Castillo, mais on en loin, c'est comme le négatif d'une photo, là, le personnage est fascinant, trouble, obscur, pas sympathique non plus, loin de là, mais on a envie de savoir, l'auteur attise notre curiosité et nous le dévoile petit à petit. La tension est extrêmement bien rendue.
Je le ferme.
Danièle(avis transmis)
J'ai choisi
Mr Vertigo, que beaucoup d'entre vous ont déjà lu je crois… mais moi pas encore.
Tout m'a plu dans ce roman.
L'originalité de l'histoire, qu
i se passe aux États-Unis, et commence dans la ville de Saint-Louis : un gamin orphelin, Walt, extrait de sa pseudo-famille avec laquelle il croupissait dans la mendicité, par un être énigmatique qui lui promet de lui apprendre à marcher au-dessus de l'eau s'il le suit en toute confiance. Beau début !
À mi-chemin entre David Copperfield, pour le parcours du personnage principal, et La Strada de Fellini, pour la truculence des personnages.
La situation est souvent tendue, car le Maître, Yehudi, est souvent très dur avec lui, mais les dialogues sont rendus avec tellement de gouaille, de verve et d'humour, surtout de la part de Walt, qui a l'esprit de répartie et s'exprime dans une langue truculente et inventive, que la lecture en est jouissive.
L'évolution des personnages est également très bien rendue : le Maître est de plus en plus à l'écoute de son élève, l'élève s'affirme de plus en plus et arrive à gérer seul sa vie, avec des hauts et des bas, mais toujours en confiance.
Car Walt est un être résilient, intelligent et plutôt optimiste. Il se trouve d'ailleurs souvent dans des situations horribles où il n'a plus rien à perdre…
J'ai aimé la bienveillance qui se cache sous les dehors rustiques, les différents personnages emblématiques : Mama Sioux, calme et pleine de sagesse, Esope, le surdoué infirme qui s'élève par son intelligence et l'aide du Maître au-dessus des personnes de sa classe sociales, le Maître tout puissant et souvent dur, mais bienveillant au fond. Il lui inflige au début des tortures pour mieux l'aguerrir, car il sait où il veut emmener son élève.
En fait nous avons là un roman de formation, dans lequel le héros passe les épreuves avec succès et s'affranchit même de la douleur de perdre les personnes qu'il aime et que nous avons côtoyées tout le long du roman.
Ceci étant, la petite histoire de la grande histoire qu'ils traversent, avec le Ku Klux Klan, la crise financière de 1929, la guerre de 39-45… Sans compter l'atmosphère de Far West dans certains épisodes…
C'est un livre riche et envoûtant parfois plombant. J'ai eu plusieurs fois plus de mal à m'en remettre que Walt !!
J'ouvre en grand.
Renée(à l'écran)
Je n'avais à ce jour lu de Paul Auster que Dans le scriptorium. J'avais trouvé le début et la fin magnifiques, avec l'idée du romancier qui a perdu la mémoire, visité par les personnages de ses romans. Cependant le centre du livre m'a paru assez creux. Je me suis ennuyée. Pas envie de lire un autre Auster.
Ouvert ½.
J'avais grand tort, car dès la première page de Invisible, j'ai eu l'impression qu'il écrivait "pour moi". J'ai été emportée dans cette histoire d'écrivain et des questions qu'il se pose sur la légitimité de raconter une histoire vraie, sur les difficultés qu'il y a à se raconter à la première personne : "En parlant de moi-même à la première personne, je m'étais étouffé, rendu invisible (...) Il fallait que je me sépare de moi-même, que je prenne du recul". La construction du roman est assez proche de celle de Lermontov dans Un héros de notre temps, avec des interventions de l'auteur, du "narrateur", des journaux intimes, etc. J'ai été un peu gênée par la description des amours incestueuse du frère et la sœur ; on comprend assez vite que c'est un fantasme malsain du narrateur. J'ai beaucoup aimé ces personnages complexes, tourmentés, jamais là où on les attend. Ouvert en grand.
Dans L'invention de la solitude, le "Portrait d'un homme invisible" est le portrait de son père, un inconnu pour lui, une personne "qui ne laissait pas de trace". Auster semble angoissé par la fuite du temps, par la mort.
La chambre dérobée, le troisième récit de la Trilogie new-yorkaise, j'ai beaucoup aimé. Ouvert aux ¾.
   
Les obsessions d'Auster sont la mort, l'invisibilité (donc ne pas laisser de traces) : de là découle l'écriture de soi, d'un ami, du père... Il aime enfermer son héros dans de petites chambres-prisons, MAIS pour se retrouver il voyage, va vivre à l'étranger et c'est là qu'il se retrouve. Cependant partout dans le monde il habite une petite chambre.
Au vu de mes lectures et à l'écoute des autres il me semble qu'on doit se lasser si on veut lire TOUT Auster : toujours un narrateur, des écrivains et leurs difficultés devant la page blanche, l'angoisse de la mort, l'invisibilité, et seule l'écriture peut sauver.
Jacqueline de
à
Je n'avais jamais lu Paul Auster. À sa mort, j'ai découvert Baumgartner. Cette histoire de vieillesse et de mort m'a énormément touchée. Cependant, je n'ai pas su convaincre le groupe de la choisir ! Par contre j'avais très envie de lire autre chose de cet auteur et de le connaître mieux.
J'ai vu Une trilogie new-yorkaise adaptée au théâtre dans une mise en scène passionnante. Je me souviens très mal de ce que ça raconte, juste des mélanges curieux de situations, quelque chose d'un peu cérébral... Par contre, ensuite, en descendant les petites rues derrière la place des Abbesses, j'avais l'étrange impression d'être encore dans la pièce.
En prévision de ce soir, il me fallait choisir dans l'abondance de l'œuvre de Paul Auster… : j'avais lu son dernier roman, je pensais lire le premier : L'invention de la solitude (quel beau titre !) et pourquoi pas aussi Mr Vertigo dont il avait été question… Les hasards des bibliothèques ont fait que j'en ai lu aussi d'autres…
Excursions dans la zone intérieure, ce sont des souvenirs de jeunesse : cela m'a plu même si je me serai passée de deux descriptions de films, mais c'est très intéressant par rapport au reste de l'œuvre.
         
Mr Vertigo
a été un vrai plaisir de lecture : j'ai adoré ce gamin et sa manière de raconter les choses. Cela m'a fait penser à Fantasia chez les ploucs, ou à Dickens, avec un côté invraisemblable et magique. Je ne l'ai pas lâché !
Tombouctou faisait suite
dans mon édition qui comportait quatre romans. Comme tout ça devenait addictif, j'ai continué… Cette histoire racontée par le chien d'un poète, vagabond et paumé : ça devrait plaire à Françoise ! Quant au titre, "Tombouctou" (une espèce de paradis où les chiens se retrouvent avec leur maître après la mort), je pense qu'il a été choisi pour sa sonorité, il m'évoque le pitchipoï yiddish… J'ouvre ¾ comme Mr Vertigo.
4321, c'est quatre versions de la jeunesse d'un même personnage contemporain de Paul Auster. Ils s'appellent tous du même nom et deviennent écrivains. L'un meurt très tôt. Étudiants, ils vivent les émeutes noires, la lutte contre la ségrégation et contre la guerre du Vietnam, les protestations étudiantes, des histoires d'amour diverses… On retrouve certains éléments évoqués par Auster dans ses souvenirs. Et c'est une belle évocation de l'Amérique de cette époque. J
'ouvre ¾.
L'invention de la solitude et Excursions, j'ouvre entre ½ et ¾.
    
Enfin, connaissant mieux Auster, j'ai relu Baumgartner. Dans le premier chapitre j'ai retrouvé ce vieux prof de philosophie aux prises avec "la malveillance des objets".

Catherine
À mourir de rire, le premier chapitre !

Jacqueline
Il est veuf depuis dix ans, d'une femme qui s'appelle Anna Blume. Elle écrivait des poèmes et aussi des nouvelles que Baumgartner va relire avec nous (il y est question de baseball, d'études universitaires et de guerre du Vietnam)… Cela m'amusait de reconnaître, agencés autrement, des thèmes familiers à Auster… Je découvrais aussi une fin beaucoup plus ouverte que je ne l'avais comprise à ma première lecture et la relecture m'a procuré autant de plaisir, sinon plus. Je pense que si on ne lit qu'un livre de Paul Auster, ce devrait être celui-là ! J'ouvre en grand.
Catherine
J'ai lu Baumgartner grâce à Jacqueline ; effectivement c'est un livre assez différent des autres romans, plus intimiste, un roman de la fin de vie. J'ai beaucoup aimé, c'est un livre très touchant, sur le vieillissement, le couple, l'amour, le deuil ; ça résonnait en moi, peut-être une question d'âge... Le personnage de Baumgartner est très attachant, il tombe, il se fait mal sans arrêt, les objets lui en veulent, c'est souvent drôle et l'humour est entremêlé à des choses graves. C'est un beau roman, très réussi.
  

Mr Vertigo est très différent. De façon générale, je trouve que Paul Auster a un vrai talent de conteur avec des livres page-turners, ça se lit vite et on est embarqué dès l'incipit "j'avais douze ans la première fois que j'ai marché sur l'eau. L'homme aux habits noirs m'avait appris à le faire". Je suis complètement d'accord au sujet de ce livre avec ce qu'a dit Monique. Le gamin est attachant. Tous les personnages d'ailleurs, y compris les personnages secondaires, Esope, maman Sue. Il a un talent pour créer des personnages. J'ai aimé le côté fantastique - voler - allégorique, mélangé à une traversée de l'Amérique des années 30, le racisme, le Ku Klux Klan, la Dépression, la pègre ; pendant que je lisais ce livre, j'ai fait un rêve une nuit : je volais, moi aussi, j'ai été déçue au réveil...
J'ai lu aussi Léviathan, choisi à cause du titre, et c'est un peu d'actualité. J'ai de nouveau beaucoup aimé. Comme avec Mr Vertigo, j'ai été embarquée dès le début. Le narrateur raconte la vie de quelqu'un qui s'est fait exploser, on est happé par les personnages, Sachs, Maria qui est inspirée de Sophie Calle. On est dans une Amérique plus tardive, l'époque de Reagan. Il est question aussi d'écriture, du pouvoir de la littérature.
Pour finir, j'ai commencé la Trilogie new-yorkaise : je n'ai lu que la première histoire, Cité de verre ; j'ai assez accroché au début et puis mon intérêt s'est émoussé, c'était peut-être le livre de trop, j'ai été beaucoup moins touchée ; on retrouve des thèmes présents dans les autres romans, le rôle du hasard, le questionnement sur l'identité avec les personnages-miroir, on y retrouve des personnages d'écrivains.
J'ouvre ¾ pour l'ensemble.
Annick L
Paul Auster est l'un des auteurs qui m'ont marquée dans mon parcours de lectrice. J'ai aimé beaucoup de ses romans : Le voyage d'Anna Blume,
Moon Palace, Léviathan, Mr Vertigo, moins Trilogie new-yorkaise. J'aimais retrouver son univers, assez réaliste dans son ancrage, mais nous entraînant toujours au-delà. J'aimais aussi retrouver ses personnages, des paumés, des marginaux, en quête de leur identité, d'une place quelque part dans la société, subissant les aléas de rencontres improbables. Des personnages qui me touchaient et un univers romanesque original.

           
Pour notre rencontre, j'ai d'ailleurs relu La Musique du hasard, dont le titre renvoie à un thème marquant chez Paul Auster. Et j'ai ressenti le même plaisir addictif à me plonger dans les aventures rocambolesques du personnage principal qui court tête baissée vers sa perte, un récit étoffé par une galerie de portraits et des scènes mémorables.
Puis je me suis lancée dans L'invention de la solitude, un livre composite qui associe deux récits autobiographiques de nature très différente.
Dans le premier, que Paul Auster a écrit juste après la mort de son père, il tente de raviver la mémoire de cet homme qui n'a pas du tout investi la vie de famille, un père absent, très pris par sa vie professionnelle et fondamentalement incapable de communiquer. Son récit autobiographique, à la première personne, ne suit pas un ordre chronologique, d'un souvenir à l'autre, ravivé par son séjour dans l'ex-maison de son enfance ou par des objets liés à sa présence. Une démarche très proustienne. Pour cela, il s'est plongé dans une solitude totale, pressé par le besoin de rattraper le temps perdu avant que sa présence au monde ne s'efface totalement. : "Au lieu de m'aider à enterrer mon père ces mots le maintiennent en vie, peut-être plus en vie que jamais". Le portrait qui s'en dégage n'a rien d'élogieux puisqu'il ne s'appuie sur aucun sentiment d'attachement. C'est factuel, mais très personnel, donc touchant. Et la figure de ce père fantomatique m'a fait penser à bien des personnages de ses romans.
La seconde partie, intitulée "Le livre de la mémoire" m'a un peu déroutée, non par le projet lui-même, mais par sa forme déroulée en onze fragments, à partir de moments marquants de son existence. Cette fois, le narrateur prend ses distances avec l'emploi d'une troisième personne et la désignation d'un personnage qui l'incarne sous le pseudonyme de A.
Cela se lit donc par bribes, avec des sauts dans le temps (à des âges différents) et dans l'espace (des USA à Paris, à Londres, etc.). Un texte fondateur pour comprendre l'œuvre de cet auteur et les thèmes qui la traversent. Mais je me suis lassée de parcourir cette méditation qui fonctionne comme un ressassement : le temps qui passe, la mémoire et la mort, le rapport à l'enfance et le besoin de transmettre (pour lui qui est devenu père à son tour), l'impérieuse nécessité d'écrire et les conditions nécessaires (en exil, en se retirant du monde), de hasard des rencontres qui l'ont construit (amoureuses ou intellectuelles). D'autant que Paul Auster est un grand érudit et que son "récit" est nourri d'innombrables références et citations (5 pages de notes à la fin de l'ouvrage). Dans ce flux émergent quelques beaux passages qui ont retenu mon attention et j'ai l'impression de mieux comprendre le travail de cet écrivain auquel je reste attachée.
J'ouvre ¾.
Brigitte
entre et(à l'écran)
J'ai lu Léviathan et la Trilogie new-yorkaise, il y a quelques années. J'ai lu récemment 4321.
  
Paul Auster sait toujours fort bien raconter les péripéties de la vie de ses nombreux personnages dans sa ville de New-York. Son texte se lit facilement, il est souvent intéressant. Cependant, quand je ferme un de ses romans, je suis toujours déçue. J'ai toujours l'impression qu'il n'a pas emmené son lecteur aussi loin que cela aurait été possible.
Je parlerai plutôt de 4321, qui est celui dont je me souviens le mieux. L'idée de départ d'un seul personnage, dont il nous raconte les quatre destinées possibles, est très séduisante. Mais, finalement ces quatre Ferguson (hormis les différences factuelles introduites par l'auteur) se ressemblent beaucoup : amour de Rose la mère, goût pour les lettres, amour du cinéma, de la littérature française, du sport surtout le baseball, opposition à la guerre au Viêt-Nam… Un très grand écrivain aurait su en faire quelque chose de beaucoup plus impressionnant.
Très belle description de la relation entre Ferguson et sa mère dans sa toute petite enfance.
J'ouvre entre ½ et ¾.

Richard
J'ai lu un seul livre et qui me semble sans rapport avec tout ce que vous avez dit, The Book of illusions, livre que j'ai trouvé dans la bibliothèque de mon fils, offert par un Argentin...
              
J'ai eu une déception par rapport au titre, car il ne s'agit pas d'illusions, mais de chagrin.
Ce qui est similaire aux autres livres évoqués, c'est que le narrateur est un écrivain.
Le livre commence par la mort de sa famille dans un accident d'avion. Pour chasser son deuil, son chagrin, il se lance dans l'écriture de la vie d'un acteur du cinéma muet, Hector. Le même narrateur, alors, passe par plusieurs liaisons : il veut sauter une femme par-ci par-là qu'il connaît dans son travail. Les épisodes se succèdent, et on se dit : so what ? J'avais l'impression d'un scénario de Netflix où chaque épisode est indépendant, mais maintient les personnages principaux. J'ai cette impression avec les histoires de David Zimmer, qui est le nom de l'écrivain, et ça finit toujours par une déception.
Ce fameux Hector est vedette du muet et il a décidé de produire ses propres films. Il le fait avec sa femme Frieda qui a accepté de tourner avec lui à condition que personne ne voie ses films et qu'on détruise toutes les copies et tous les négatifs ! J'ai failli arrêter à mi-chemin. Mais la fin du livre sauve mon appréciation : Hector qui entretemps aura disparu et qui sera finalement au Mexique, meurt ; sa femme s'obstine à brûler les copies, c'est navrant pour le narrateur. Il réalise que la collaboration de Hector et Frieda n'est qu'une illusion si toutes les copies sont brûlées. Mais il a l'espoir qu'il en reste quelque part dans quelques studios et ceci lui donne de l'espoir : la dernière phrase du livre est optimiste (ou illusion ?) : "I live with that hope".
Le titre évoque un livre de Chateaubriand sur les illusions, car le narrateur après avoir fini son livre sur Hector un ami demande de traduire en anglais l'œuvre de Chateaubriand des Mémoires d'outre-tombe.
Je ne recommanderais pas vivement ce livre : ¼ ce serait why not ; ½ oui, ça se lit. Ce sera ½, recommandé quand même.
Je n'ai pas envie de lire d'autres livres, vu les thèmes présentés dans les livres que vous avez lus, sauf Baumgartener.
Fanny(à l'écran)         
Je suis tombée dans Paul Auster il y a une trentaine d'années. J'en ai lu plusieurs, mais avec le temps je suis incapable de me rappeler le sujet de chacun : la Trilogie new-yorkaise, La Musique du hasard, Brooklyn Follies,
  
Moon Palace... et j'ai calé sur Le voyage d'Anna Blume.
        

Pour notre séance de ce soir, j'ai commencé par lire Baumgartner. J'ai plusieurs fans dans mon entourage et qui m'avaient dit avoir été un peu déçus par ce récit plus conventionnel que ses autres livres. Pour ma part j'ai été très touchée par ce récit et ses parts d'autobiographie. J'ai eu beaucoup d'empathie tout au long de ma lecture et j'ai trouvé très subtile et "juste" la manière de parler des émotions et de la mémoire.   
          
Ensuite j'ai ouvert La Musique du hasard car il me semblait que je ne l'avais jamais lu. Dès les premières pages, je me suis rappelé ce roman. J'ai poursuivi jusqu'au bout, toujours avec le même plaisir, même en connaissant l'histoire. Je me suis attachée aux deux protagonistes et j'ai aimé le côté irréaliste de cet enclos à part, où ils construisent leur mur. Là aussi, il est question d'histoires humaines avec des parcours personnels et une histoire d'amitié naissante qui s'entrecroisent. Je rebondis sur l'avis d'Annick relatif à la déchéance des personnages tout au long du roman. Sur un plan réaliste, c'est patent, mais j'ai trouvé, concernant le personnage qui reste jusqu'au bout, qu'il y avait en parallèle un cheminement intrinsèque, une forme de quête identitaire dont il ressort grandi.
       
Ensuite j'ai lu Seul dans le noir, une première lecture. Plusieurs dimensions dans ce livre : l'histoire de l'écrivain et de sa famille, l'histoire des personnages de son roman qui vient briser le mur entre réalité et fiction en s'invitant dans la vie de l'auteur, et les insertions sur les films notamment Le voyage à Tokyo (il m'a donné envie de le voir).
Et pour finir, je suis en train de re-relire Cité de verre, dans mon souvenir celui de la Trilogie newyorkaise que j'ai le plus aimé. Plaisir retrouvé même si je me rends compte que certains passages sont très conceptuels, ce qui le rend peut-être moins accessible.
Un roman de Paul Auster reste toujours pour moi une valeur sûre pour m'évader et me trouver happée par l'histoire et le style.
Ce que j'aime, c'est sa manière de parler des histoires d'hommes et de femmes et de les mettre en scène. Ses romans entremêlent psychologie des personnages et sociologie par la fresque sociale qu'il dépeint. Et j'aime aussi beaucoup la manière dont il joue avec la réalité et la fiction, laissant ces deux mondes s'interpénétrer.
Vous m'avez donné envie de découvrir certains que je n'ai pas encore lus notamment Mr Vertigo, 4321 et Dans le scriptorium.
J'ouvre en grand pour l'ensemble de son œuvre.
Claire
Je faisais partie de ceux qui étaient tièdes pour proposer du Paul Auster.
J'avais lu avec le groupe
Trilogie new-yorkaise il y a... 34 ans, et tout en saluant le savoir-faire narratif, j'avais repéré de l'artifice. Même si j'avais aimé le suivre et le lire, car alors il était novateur, le relire n'a pas déclenché pour moi de l'enthousiasme. On a failli aussi choisir sa femme, publié aussi chez Actes Sud : je n'avais pas beaucoup aimé Tout ce que j'aimais lu dans le groupe et pas du tout Un été sans les hommes.
J'ai par contre cette année vu une adaptation théâtrale de la Trilogie qui m'a amenée à me replonger dans le livre sans enthousiasme du tout ; en revanche l'adaptation et la mise en scène d'Igor Mendjisky, Une trilogie new-yorkaise, m'a énormément plu, et pourtant ça durait 3h30.
J'ai apprécié un roman suédois récent, L
es détails de Ia Genberg : or une histoire d'amour commence par le cadeau de la Trilogie, la narratrice est fana (voir ›ici) et va jusqu'à l'appartement d'Auster et sa femme pour "sentir" la littérature... : c'est de la provocation ! Bon, je blablate...
J'ai choisi Léviathan, en dépit de ses 400 pages, parce que le livre s'ouvre sur une phrase minuscule à peine visible : "L'auteur remercie tout spécialement Sophie Calle de l'avoir autorisé à mêler la réalité à la fiction"
. L'un des personnages de Léviathan, publié en 1992, est inspiré de Sophie Calle, de ses pratiques artistiques fondées sur des rituels. Elle développe ceux qui mentionnés dans le livre dans une série de 7 ouvrages rassemblés en un ravissant coffret intitulé Double-jeux, publié en 1998.
Je suis une groupie de Sophie Calle et j'avais ce coffret de livres qui m'avait séduite à la sortie d'une de ses expositions et que je n'avais pas encore lu.
L'occasion fut trop belle...
Je me suis donc mise à lire Léviathan qui commence par l'explosion mortelle d'un personnage dont personne ne connaît l'identité, sauf le narrateur qui se met à écrire les raisons de cette explosion avant que l'enquête ne les découvre et, pour ce faire, raconte la vie du personnage et la sienne. Le plus intéressant est bien sûr la rencontre avec Maria/Sophie Calle, tout le reste m'a barbée, j'ai eu une impression d'artifice à nouveau : en créant une tension grossasse dès la première page : il va falloir assurer sur les 400 pages et ça n'en finit pas.

Catherine
Claire est d'une mauvaise foi !

Claire
Oui... J'ai aussi ouvert Paul Auster Une vie dans les mots : conversations avec I.B. Siegumfeldt, où chacun des livres de Paul Auster est passé au peigne fin par lui-même et une spécialiste qui a passé ses nuits avec ses œuvres. J'y ai lu le chapitre consacré à Léviathan qui ne m'a pas du tout intéressée : potins et objectifs grandiloquents sur le livre (le titre "est une référence directe à la notion d'État développée par Hobbes" et le livre est "un commentaire sur le climat politique de l'époque"...)
  
J'avais un joli petit livre de Paul Auster,  Le Carnet rouge, rassemblant 13 nouvelles archibrèves qui sont des relevés de la réalité, une sorte de carnet d'écrivain. Auster indique dans le livre de Conversations que l'histoire n° 12 est reprise dans un épisode de Léviathan, confiant également que le nom du narrateur a les mêmes initiales que lui, l'épouse du narrateur s'appelle Iris qui est le nom de la femme du narrateur, Siri, écrit à l'envers - capital n'est-ce pas ! - bref, tout m'a énervée ou laissée indifférente.
Par contre Sophie Calle m'a vraiment enchantée avec sa folie habituelle.
Dans Léviathan, Paul Auster invente des pratiques pour Maria, façon Sophie Calle. Il évoque aussi des rituels que Sophie Calle avait déjà utilisés. Elle rendra compte dans une exposition et dans un livre de la mise en œuvre du livre. Ainsi, Maria/Sophie s'astreint chaque jour à un "régime chromatique" : orange le lundi, rouge le mardi... Voici par exemple les menus du lundi et du mardi : menu jaune de purée de carottes-crevettes-melon-jus-d'orange, menu rouge de tomates-steak tartare-grenades-vin (voir l'expo sur le site de la galerie Perrotin).
  
N'en restant pas là, Sophie Calle a demandé à Paul Auster de lui concocter un personnage de fiction, auquel elle s'efforcerait de ressembler : il refuse, mais lui rédige un texte extra "Manuel d'instructions à l'usage personnel de S.C. concernant la façon d'embellir la vie à New York (à sa demande)" : il s'agit de sourire, offrir sandwichs et cigarettes aux démunis, s'approprier un coin d'espace public, l'observer et en prendre soin. Elle suit les conseils à la lettre, choisit une cabine téléphonique en pleine rue et rend compte de la performance dans Gotham Handbook, signé Calle et Auster. J'ai adoré !
Pour en savoir plus, voir mes infos ›ici.
Enfin, pour rester dans l'ambiance austerienne..., j'ai commencé à regarder un documentaire d'Arte Paul Auster confidential (1998) de 2h15 (!), de Gérard de Cortanze et Guy Seligmann : c'était exaspérant ! Mais il est beau ! Il est beau ! Je n'ai pas récidivé avec le documentaire Paul Auster, le jeu du hasard (2018) de Sabine Lidl (jolie bande annonce ›ici). J'ai regardé une jolie nécrologie en vidéo ›ici dans C'est à vous et eu de la nostalgie en regardant Apostrophes où en 1987, Paul Auster était l'invité de Bernard Pivot pour parler de son livre La Cité de verre.
Bref, j'ouvre pour les livres de Paul Auster et pour son personnage dans Léviathan... hors du livre, mais grâce au livre.


Nos cotes d'amour, de l'enthousiasme au rejet :
                                        
à la folie
grand ouvert
beaucoup
¾ ouvert
moyennement
à moitié
un peu
ouvert ¼
pas du tout
fermé !

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