Littérature africaine


Le 5 septembre 2025, nous nous sommes retrouvé.es en présence de Tirthankar Chanda, spécialiste de la littérature africaine, auteur de plus de 200 émissions à ce sujet à RFI, autour de 4 romans d'époques et de pays différents, choisis avec lui, et que nous avons lus pendant l'été.

Était également avec nous Kidi Bebey, écrivaine et journaliste, et auteure d'une série d'articles dans Le Monde sur la littérature africaine.

Voici les livres à notre programme, dans l'ordre chronologique de leur publication, de 1979 à 2023 : deux francophones, un lusophone, un anglophone, de 4 pays différents. Moins de 1000 pages en plus de deux mois ! Certains d'entre nous en ont lu d'autres, en plus...

           

Sony LABOU TANSI (du Congo, 1947-1995), La vie et demie (publié en 1979), préface Alain Mabanckou, Points Signatures, 168 p.

Mia COUTO (du Mozambique, né en 1955), Terre somnambule (Terra Sonâmbula, 1992), nouvelle traduction du portugais Elisabeth Monteiro Rodrigues, Métailié, 2025, 256 p. (première traduction de Maryvonne Pettorelli, Albin Michel, 1994).

Abdulrazak GURNAH (de Tanzanie, né en 1948, prix Nobel 2021), Les vies d'après (Aftervives, 2020), trad. de l'anglais Sylvette Gleize, Denoël, 2023, 384 p.

Nathacha APPANAH (de l'Ile Maurice, née en 1973), La mémoire délavée, Mercure de France, coll. Traits et portraits, 2023, 160 p. ; rééd. La mémoire délavée, Folio, 160 p.

Nota bene : Nous avions lu en 2017 d'Ahmadou KOUROUMA (Côte d'Ivoire, 1927-2003), Les soleils des indépendances (1970), Points, 216 p. Tirthankar Chanda a insisté, conseillant de le lire si on ne l'avait pas lu, à la place de La vie et demie.

DE LA DOC - DES INFOS - DE LA DOC =>ICI

Pourquoi la littérature africaine ?
Nos lectures précédentes liées au "continent noir"
Des expositions
actuelles concernant l'Afrique
Une visite guidée
Un film

40 émissions de radio, 40 auteurs classiques

Émissions concernant les auteur.es que nous lisons
Des femmes !


31 LECTEURS des différents groupes
Cliquez pour lire leurs avis sur les différents livres


Annick AAnnick L Audrey Brigitte T Catherine Chantal Christelle ChristineCindy Claire •Danièle ÉdithFanny Françoise D Françoise H Jacqueline Jean-Paul Jérémy KatellLahcen Margot Marie-Odile Marie-ThéMonique L Monique M Nathalie B Nieves PhilippeRenée Rozenn Suzanne

Le groupe parisien ancien s'est réuni
avec deux invités spécialistes le 5 septembre 2025,
le groupe nouveau le 12, le groupe breton
le 25


LES COTES D'AMOUR POUR CHAQUE LIVRE LU

Annick A Annick L
Christelle
Jacqueline
Renée
Rozenn

Brigitte T Catherine
Entreet
Monique L
ChristineClaire
Édith
Danièle •Françoise Fanny

DES LIVRES LUS EN COMPLÉMENT :

Fanny

Marie-Odile
Rozenn



Claire

Suzanne

Claire


ET VOICI NOS AVIS SUR LES LIVRES

En guise de préparation à la soirée, certains d'entre nous se sont retrouvés à Paris quelques jours avant au Petit Dakar : essentielle culture gustative en complément de la littérature.

NOS INVITÉS
Kidi Bebey et Tirthankar Chanda

LES LECTEURS
du groupe parisien réuni le 5 septembre 2025
Cliquez pour lire leurs avis sur les différents livres


Annick AAnnick LCatherine Christelle Christine
Claire •Danièle Fanny FrançoiseJacqueline Jérémy Katell Monique L Nieves Renée Rozenn

Notons la virtuosité de Voix au chapitre... : afin de pouvoir garder du temps pour échanger avec nos précieux invités, nous avons procédé à notre rituel tour de piste, mais chacun avait trois minutes pour exprimer ses réactions aux quatre livres. Nous étions en effet 17...
Nous n'avons pas lu ces livres dans une simple juxtoposition ou succession : ils se situaient les uns par rapport aux autres dans notre expérience de lecture.

Jacqueline
Je me demandais comment faire avec 4 livres sans compter ma relecture de Kourouma dont j'étais fan… Je crois que je peux ouvrir en grand chacun des quatre, mais pour des raisons tellement différentes ! L'ensemble des livres choisis m'a confortée dans l'idée d'une Afrique plurielle et diverse, terre de rencontre et d'échanges avec ce que certaines rencontres peuvent avoir de destructeur et de douloureux. Contrairement à la tradition africaine, je ne parle qu'une seule langue, et le peu que je connaissais concernait surtout l'Afrique de l'Ouest ou du Nord. J'ai découvert l'Afrique de l'Est et, incidemment, été amenée à un peu préciser quelques notions de géographie ! Sur les 4 auteurs, 3 m'étaient inconnus (voyant le nom de Mia Couto en bibliothèque, je l'avais même pris pour une femme !)
Par contre, j'avais découvert Sony Labou Tansi en 2016 au Tarmac avec Machin la Hernie, dont j'ai gardé une très forte impression. En sortant, j'avais acheté son premier roman La vie et demie et je ne suis pas sûre, alors, de l'avoir lu en entier… Il fait partie de ces livres qui me résistent et j'étais contente de cette nouvelle occasion de m'y confronter. C'est donc par lui que j'ai commencé. J'ai beaucoup aimé l'avertissement, pas le temps de développer... j'y reviendrais volontiers. Mais c'est pour elle que j'ouvre en grand. Ensuite, il y a cette fable nourrie d'une imagination si concrète qu'elle rend souvent la lecture insoutenable (d'ailleurs aussi insoutenable que les dictatures dont il est question)… J'ai aimé les histoires de Pygmées, leur rencontre avec les jumeaux, puis, plus loin, les efforts d'un des multiples Jean, pour créer leur ville et leur musée… Un résumé de l'histoire coloniale ?
Je ne connaissais pas, même de nom, Abdulrazak Gurnah… ! c'était très reposant de revenir à une écriture de roman classique bien construit, avec de l'action et des personnages attachants, et aussi un point de vue intéressant sur l'histoire mondiale.…Tellement reposant que je n'ai pas suffisamment prêté attention au nom de Hamzah quand il est arrivé dans l'histoire et que pendant assez longtemps, prenant un soldat pour un autre, j'ai cru qu'il s'agissait d'Ylias… J'ouvre en grand pour l'intérêt et pour tout ce que j'ai appris.
Pour Mia Couto, je l'ai lu dans une édition plus ancienne dans la première traduction de Maryvonne Lapouge Pettorelli. J'ai été frappée par la poésie du texte ; j'ai aimé que ce soit là une espèce de fable sur l'écriture et la transmission. J'étais un peu accablée par la noirceur de la situation en Afrique et par la guerre. Que faire ? Par ailleurs, je ne suis pas certaine que sans le groupe je serais allée jusqu'au bout… Et puis, pour voir, je suis allée en chercher la nouvelle traduction d'Elizabeth Monteiro Gomes en bibliothèque, où je suis tombée sur le dernier livre de Patrick Chamoiseau dont le titre posait cette question Que peut Littérature quand elle ne peut ? Je n'ai pas encore eu le temps de regarder les réponses de Chamoiseau, pas plus que de lire jusqu'au bout la nouvelle traduction ; mais ce qui est certain c'est que je suis happée par le texte : J'ouvre en grand dans cette traduction.
Je termine rapidement avec le beau livre de Natacha Appanah que j'ouvre en grand pour tout : la forme du livre, la sensibilité de la narratrice et sa réflexion sur la mémoire, le témoignage sur l'exil et la condition des migrants…

La vie et demie : en grand
Terre somnambule : en grand
Les vies d'après : en grand
La mémoire délavée : en grand
De Kourouma : Les soleils des indépendances et En attendant le vote des bêtes sauvages : en grand ; outre ma relecture de Kourouma, j'ai découvert sa biographie par Jean-Michel Djian publiée au Seuil (encore eux ! comme d'ailleurs le Goncourt à polémique de Yambo Ouologuem, Le Devoir de violence) : très intéressante ! Avec une préface de Jacques Chevrier que notre invité a mentionné.

Monique L
La lecture de ces livres a été une belle découverte d'auteurs et d'œuvres que je n'avais jamais lus.
Le premier livre que j'ai lu, La mémoire délavée de Nathacha Appanah, est un récit plein de délicatesse dans lequel l'auteur explore avec pudeur et tendresse la vie de ses aïeux. Elle s'interroge à partir de documents officiels, de souvenirs qu'elle remonte patiemment, ceux de sa propre enfance, ceux entendus de ses parents, grands-parents et autres proches. Elle assemble toutes ces informations avec une grande finesse. C'est un hommage magnifique de sincérité et de tendresse à ses grands-parents. Le vol d'étourneaux du début et de la fin correspond bien à ce récit par sa grâce. J'ouvre en grand.
Ensuite, j'ai lu Les vies d'après d'Abdulrazak Gurnah : ce livre m'a beaucoup intéressé pour son côté historique que je ne connaissais pas. J'ai découvert à la fois un auteur, un pays, la colonisation allemande de l'Afrique de l'Est puis sa colonisation anglaise. L'auteur m'a embarquée dans cette histoire avec des personnages touchants, complexes et très humains qui nous permettent de ressentir la dureté de leurs vies malmenées par les tumultes de l'histoire. On sent l'empathie de l'auteur pour ses personnages. C'est une histoire sensible et incarnée. C'est en ce sens une vraie prouesse. Ce qui m'a le plus marquée, c'est le côté universel et humain de tous ces personnages, leur dignité et leur sagesse. J'ouvre aux ¾.
Ensuite, j'ai lu La vie et demie de Labou Tansi. Ma lecture de ce conte qui avait bien débuté est devenue laborieuse. Le côté déjanté devient lourd à la longue. C'est un récit à la fois fantastique, absurde et qui manie l'épouvante, l'horreur et l'humour caustique. J'ai apprécié la façon dont apparaît l'opposant Martial qui n'arrête pas de revenir hanter le pays et troubler la tranquillité de tout guide providentiel. C'est une dénonciation des excès, du chaos et des iniquités des régimes dictatoriaux : corruptions, arrestations arbitraires, meurtres, incestes, viols, guerre. J'ouvre au ¼.
Ensuite j'ai lu Terre somnambule de Mia Couto : il m'est très difficile de parler de ce livre. Il y a trop de choses que je n'ai pas comprises dans le sens qu'elles ne font appel à rien. Il me manque trop de références sur les traditions, les croyances, les mythes et les contes des Mozambicains. Ce fut une lecture déstabilisante à la fois par la langue et par les côtés fantastiques et oniriques où les morts réapparaissent, où, un enfant est transformé en coq et se retrouve homme à la fin. Le fait que deux histoires s'entremêlent est perturbant, la fuite de la guerre de Tuahir et de Muindinga et le récit des cahiers de Kindzu. L'écriture est surprenante avec l'invention de mots et la création de phrases originales. Cela peut être poétique ou brutal. (Chapeau à la traductrice qui a su nous rendre accessible les particularités de cette langue). C'est un livre intéressant qui m'a fait penser à un tableau de Jérôme, Bosch ou au surréalisme : des images qui interrogent. J'ouvre entre ½ et ¾.
Entre ces deux derniers livres, j'ai lu Tout s'effondre de China Achebe : j'ai beaucoup aimé ce livre que j'ouvre en grand. Il m'a permis d'approcher le ressenti d'un colonisé auquel on arrache sa culture, ses coutumes et le fonctionnement du clan.
Puis j'ai lu Une si longue lettre de Mariana Bâ. J'y ai un peu plus appris sur les coutumes face au veuvage et sur les possibilités d'indépendance des femmes tout au moins déjà privilégiées. J'ouvre aux ¾.

La mémoire délavée : en grand
Les vies d'après : ¾
La vie et demie
: ¼
Terre somnambule : entre ½ et ¾

Tout s'effondre : en grand
Une si longue lettre
: ¾

Fanny
Dans
La vie et demie, j'ai trouvé l'écriture très crue, sans que cela soit pour moi un bémol. C'est très différent de ce que je suis habituée à lire, comme à l'opposé de la littérature romantique. Le rapport au corps, qu'il s'agisse des massacres ou du sexe, est décrit de manière très directe, parfois brutale. Certaines scènes m'ont rappelé Anima de Wadji Wouawad. J'ai moins ressenti cela dans la seconde partie du livre, à partir de la deuxième génération. J'ai parfois craint une forme de lassitude, mais toujours le récit a su me raccrocher au livre. Avec un point de départ d'emblée fictif, avec un pays imaginaire et des morts qui continuent à parler, ce roman livre un récit d'une société dictatoriale qui se perpétue au fil des générations. Le procédé est finalement très réaliste et donne du poids au récit. Il n'y a pas, ou peu, de bonnes figures : Martial qui pourrait faire office de martyr résistant viole sa fille. Chacun concourt à la perpétuation d'une société totalitaire qui elle-même court à sa perte et sombre dans la folie. J'ouvre ¾.
Terre somnambule : Je me suis assez rapidement trouvée happée par ce récit. J'ai aimé la construction qui lie l'histoire de Muidinga et Tuahir et la lecture des cahiers. J'ai été bercée par le style et les images. La profusion de mots types mots-valises m'a également plu ; j'ai été assez admirative du travail de la traductrice. Je me suis trouvée embarquée dans un voyage très éloigné de mon univers et de mes repères. Mais est arrivée la scène où Tuahir tripote Muidinga : ce passage m'a choquée. Je n'y ai lu aucune distance de la part de l'auteur, j'ai eu l'impression que c'était présenté comme un geste de tendresse. Nouveau rappel d'ailleurs à la fin du chapitre 10, à la fin de vie de Tuahir où les propos sont, je trouve, ambigus. Bien sûr, j'ai lu ce passage totalement influencée par mon métier, mais cela a vraiment amené une cassure dans ma lecture. À partir de là, l'image de ce vieil homme tripotant cet enfant qu'il semble avoir sauvé m'a poursuivie. La magie du verbe n'a plus opéré, comme un réveil brutal. J'ai poursuivi ma lecture par curiosité et pour savoir ce qu'il adviendrait de Farida et de Gaspar, mais impossible de repartir en voyage. Hâte de découvrir vos avis et votre perception de ce livre, ils me feront peut-être comprendre autrement ce passage et changer de point de vue. Mais pour le moment, pour cette raison, je ferme le livre.
Les soleils des indépendances : Ce livre a été pour moi un grand dépaysement, j'ai aimé me sentir transportée ailleurs, à travers les expressions langagières ("bâtard de bâtardise"), les légendes, l'animisme, les us et coutumes et les croyances. J'ai aimé certaines expressions et images (exemple dans le dernier chapitre : "les lois, les ordres et les soleils des indépendances étaient aussi nombreux que les poils d'un bouc et aussi complexes et mélangés que le sexe d'un canard"). Cet univers est tellement éloigné du mien qu'il m'a demandé un effort constant pour entrer dans le roman ; la réserve vient de ma méconnaissance et non de la narration. J'ai eu un grand intérêt intellectuel, mais peu de plaisir pur de lecture. Je me suis aperçue, après avoir terminé le livre, que je l'avais déjà lu avec le groupe. Aucun souvenir ne m'est revenu, mais mon avis reste à peu près le même. J'ouvre à moitié.
Les vies d'après : J'ai débuté ce livre avec plaisir, trouvant la lecture facile et le style agréable. Sur le début, j'ai eu un peu de mal au moment des transitions d'une histoire à l'autre, en changeant de chapitre, mais au bout de quelques pages, je replongeais dans le récit. Mais sur l'ensemble, que c'est long ! À partir de la rencontre amoureuse entre Hamza et Afiya, je me suis beaucoup ennuyée, mon côté midinette n'a pas suffi. La rencontre est cousue de fil blanc et, ensuite, que de redites sur le passé de chacun, qu'on a lues et relues plusieurs fois ! Néanmoins, j'ai trouvé la lecture instructive sur l'histoire des guerres en Afrique. J'ai également trouvé intéressant de traiter le sujet de l'impact de ces guerres sur la vie des différents personnages. J'ouvre ½.
La mémoire délavée
: Je me suis plongée avec grand plaisir dans ce récit, de la première à la dernière ligne. Je l'ai trouvé beau, plein de tendresse pour ses aïeux, en particulier ses grands-parents. J'ai aimé le style poétique et ce travail de mémoire. J'ai également appris beaucoup de choses sur la migration des Indiens vers l'île Maurice. Cela me donne envie de lire Les rochers de Poudre d'Or. J'ouvre en grand.
Récitatif de Toni Morrison (qu'avait vivement recommandé Rozenn en lien avec ces lectures "africaines") est un récit concis, qui va à l'essentiel, se lit très facilement, d'une traite, tout en étant bien écrit. Ce récit ne peut pas ne pas inciter à réfléchir et à questionner nos codes et nos représentations. En cela, je le trouve à la fois touchant, intelligent et militant. J'ouvre en grand.

Synthèse : Au cours de cet été africain, je dois dire que j'ai été saisie par la différence de style entre les auteurs :
- La poésie et la sensibilité de Nathacha Appanah, mon coup de cœur ouvert en grand.
- Ma difficulté à accrocher avec le côté un peu âpre du Soleil des indépendances, ouvert à moitié pour l'intérêt, mais sans plaisir de la lecture, tout comme la première fois.
- La balade de Terre somnambule, fermée malgré le style enchanteur, car j'ai été très dérangée par la relation entre le vieil homme et l'enfant.
- La fable, mais ô combien d'actualité, de La vie et demie, avec sa critique acerbe de la dictature, ouvert ¾.
- Et la romance plaisante, mais trop redondante à mon goût, des Vies d'après, ouvert ½.
Je mets à part Récitatif que j'ai davantage perçu comme un exercice de style virtuose, ouvert en grand.
Par-delà ces différences de style, j'y ai vu aussi des similitudes dans le thème de la violence, de la guerre et de la colonisation. Et dans tous les cas, un grand intérêt et un voyage en terrain littéraire inconnu.

La mémoire délavée : en grand
Soleil des indépendances :
½
La vie et demie
:
¾
Terre somnambule : fermé

Les vies d'après :
½

Une si longue lettre
: ¾ Récitatif : en grand

Annick A
Terre somnambule, j'ai beaucoup aimé : les expressions africaines, très imagées, la beauté du style très particulier. J'ouvre en grand.
La mémoire délavée, j'ouvre en grand : j'ai beaucoup aimé le rapport aux ancêtres.
Quant à Mia Couto, il introduit un langage dans le réel intéressant qu'on ne rencontre pas dans d'autres livres.

Terre somnambule : en grand
La mémoire délavée
: en grand

Claire
Encore une fois, le groupe est l'occasion de s'étonner que le même livre suscité le rejet ou l'enthousiasme... je pense à la La vie et demie du Congolais Sony Labou Tansi. Je n'ai pas relu les deux Kourouma qu'on avait lus dans le groupe, qui ne m'avaient pa
s emballée, en restant à l'impression d'une certaine virtuosité qui pour moi tournait à vide sans tenir la route (de la lecture). J'ai lu pour ma part les livres chronologiquement, allant ainsi de 1979 à 2023.
La vie et demiee
m'a rappelé Monsieur le président du Guatémalien Asturias que nous avions lu, qui est consacré également à un dictateur avec le même excès et la même répétitivité. Bien que séduite par le livre objet et la préface de Mabanckou, j'ai été très vite lassée par les répétitions et le côté grand guignol et boutique aux horreurs. S'il m'a d'abord amusée, il m'a également fatiguée. De loin en loin, j'ai retenu des passages d'une écriture brillante, par exemple la description de Chadaï : "c’était un corps parfaitement céleste, avec des allures et des formes systématiques et carnassières, des rondeurs folles, qui semblaient se prolonger jusque dans le vide en cuisante crue d’électricité charnelle, elle avait le sourire clef des filles de la région côtière, les hanches fournies, puissantes, délivrantes, le cul essentiel et envoûtant, puis son regard s’arrêta sur ses lèvres — elle les avait garnies, provocantes, appelantes", écriture dont j'ai regretté qu'elle ne soit pas plus au service de quelque chose de moins foldingue et plus ramassé. Le côté surréaliste, plus que fantastique, le côté délire même, m'a semblé plus puéril que relevant d'une imagination débordante. J'ouvre au ¼.
Dans Terre somnambule, j'ai adoré le langage - une découverte ! - et la virtuosité de la traductrice. L'alternance des deux récits m'a paru intéressante au début. Mais j'ai trouvé que les deux récits patinaient, s'embourbaient. Les personnages ont peu de consistance et il faut tenir la durée. Dans le premier tiers, j'étais partie pour ouvrir en grand, mais finalement j'ouvre ½. J'ai fait gloups quand j'ai vu comme Fanny la scène de pédophilie. J'ai appris que Mia Couto admirait l'écrivain João Guimarães Rosa, auteur d'un unique livre culte Diadorim (près de 1000 p., préface de Vargas Llosa : pour un été brésilien ?...)
Alors que je lis lentement, j'ai lu Les vies d'après en trois fois, sans le lâcher. J'ai trouvé la narration remarquable, avec des arrêts, des accélérations, c'est tout le temps prenant, et pour qui aime les histoires sur fond de contextes historiques, on est gâté. La fin elle-même est inattendue. On vibre, on est intéressé, c'est passionnant. J'ouvre en grand.
Je n'ai pas regretté de lire dans l'ordre chronologique, car j'ai eu l'impression que mes réactions étaient ascensionnelles : mon plaisir fut complet avec La mémoire délavée. J'ai apprécié l'objet : les images, le format, le volume dans la main, le papier, étonnant pour un Folio, ainsi que la collection ("Traits et portraits" - des autoportraits ponctués d'illustrations - collection dans laquelle nous avions lu L'Africain de Le Clézio, dont j'avais d'ailleurs visité la maison familiale à l'île Maurice). J'ai aimé le genre (ni essai ni roman ni-ni-ni ou et-et-et), l'écriture délicate avec une construction relevant d'un tissage subtil, l'intérêt de ce qui est narré, instructif, ainsi que les émotions, exprimées ou suscitées à la lecture : j'ai vraiment admiré.
Après ça, j'ai lu Tout s'effondre du Nigérian China Achebe (1958), qui m'a beaucoup intéressée, parce que ça se passe avant la colonisation, qui démarre avec les prêtres, l'école : j'ai trouvé un peu longue la partie précédant la colonisation. Grâce à une émission de Tirthankar, le livre m'a donné envie de lire Le pauvre christ de Bomba du Camerounais Mongo Beti (1956), qui m'a sidérée du point de vue faussement naïf d'un boy, noir bien sûr, d'un prêtre corps et âme en mission sincère - un livre qui fit scandale et fut interdit - et Une vie de boy du Camerounais Ferdinand Oyono (1956), cette fois du point de vue non naïf du boy d'un vraiment sale colon. J'ai enfin lu Une si longue lettre, de la Sénégalaise Mariama Bâ (1979), que j'ai trouvé remarquable : à lire ! Influencée par Rozenn, j'ai ajouté le texte d'une Afro-Américaine, la seule nouvelle écrite par Toni Morrison, avec une postface de Zadie Smith plus longue que la nouvelle, Récitatif, qui raconte la relation de deux femmes qui se sont connues jeunes dans un foyer et se retrouvent plusieurs fois au cours de leur vie : on ignore laquelle est noire, laquelle est blanche, ce qui bien entendu, comme dit Fanny, interroge le lecteur sur nos représentations, mais bon...

La vie et demie : ¼
Terre somnambule : ½
Les vies d'après : en grand

La mémoire délavée : en grand

Tout s'effondre : ¾
Le pauvre christ de Bomba : ¾
Une vie de boy : ¾

Une si longue lettre
: en grand

Récitatif : ½

Jérémy
En première page du livre Tout s'effondre, figuraient les avis d'autres lecteurs de la bibliothèque. Il y avait deux "un peu", trois "beaucoup", deux "pas du tout" et zéro "passionnément". Pour ma part, j'ouvre ce livre "beaucoup". Je l'ouvre donc aux ¾.
Comme tous les autres livres de la sélection, je n'en avais jamais entendu parler et je ne connaissais pas du tout l'auteur. Quelques citations qui m'ont marqué :
- "Un cœur fier ne se laisse pas abattre quand tout s'effondre" (p. 36).
- "Il n'y a rien à craindre de quelqu'un qui crie" (p. 155)
.
Okonkwo est un homme fier, attaché aux traditions, qui ne montre pas ses sentiments. Il est violent envers ses femmes et ses enfants. Il est ambitieux, très travailleur, attaché à la terre. Son père est pour lui un contre-modèle. Il est en quelque sorte un self-made man. J'ai beaucoup apprécié la description des rites, des traditions, des dieux, la lutte, les oracles, la culture des ignames, et donc l'importance de la terre et de sa mise en culture, la supériorité des garçons sur les filles : Okonkwo aurait préféré que sa fille favorite soit un garçon.
Il y a aussi les contes que l'on raconte aux enfants, ceux pour les filles et ceux pour les garçons, les différents dieux, des oracles, etc. J'ai également beaucoup apprécié la description de la préparation des mariages et des rites qui l'entourent, notamment la négociation de la dot avec un certain nombre de sacs de cauris. J'ai à nouveau entendu parler des cauris récemment, car Mamiwata, le gagnant de Drag Race France, a réalisé une robe inspirée des cauris. Ce livre a donc eu pour moi un écho dans l'actualité contemporaine.
Ce que j'ai donc beaucoup apprécié dans ce livre, c'est donc tout son aspect documentaire sur la vie quotidienne et tous les moments forts de la vie de ces tribus. Les récoltes, les plantations, la réparation des habitats, les fêtes, les rites de passage, les morts, et notamment les enfants morts qui reviennent persécuter les autres et leur mère, les jumeaux qui sont tués et enterrés dans la forêt maudite, etc.
Malgré tout, aussi intéressant soient-il, tous ces aspects sont peut-être décrits de manière un peu trop longue et répétitive. J'aurais préféré que l'arrivée des éléments perturbateurs, à savoir les missionnaires, les colons, et la manière dont ils fracturent les familles et le clan, soit décrite de manière un peu plus précise, un peu plus poussée. Leur arrivée est finalement assez tardive dans le roman et elle est traitée rapidement. J'aurais vraiment apprécié que cela soit plus développé. À la fin, j'en ai presque voulu aux hommes du clan de ne pas se battre, de ne pas déclarer la guerre aux Blancs. On aurait presque envie que les hommes du clan leur courent après. Pour qu'Okonkwo se suicide, c'est qu'il était vraiment profondément désespéré, car il savait qu'en se suicidant, il serait enterré dans la forêt maudite. Or, en homme profondément attaché aux rites ancestraux, cette idée devait lui être tout à fait insupportable.
En définitive, j'ouvre ce livre aux ¾. La plongée dans les rites ancestraux m'a vraiment beaucoup intéressé. Je trouve le personnage d'Okonkwo très attachant, bien qu'il soit violent. Les personnages de femmes, s'ils sont présents, restent relativement secondaires. Si j'ai aimé ce livre, malgré tout, je ne sais pas ce qu'il m'en restera dans quelques mois ou quelques années. Cela tient peut-être à son écriture, qui, bien que fluide, manque peut-être un peu de relief.

J'ai eu beaucoup de mal à comprendre La vie et demie, beaucoup de mal à suivre. Il y a un maelström de personnages, d'événements, d'intrigues. C'est foisonnant, mais à la fin c'est épuisant, éreintant. Ce livre m'a suffoqué. C'est peut-être dû au fait que je l'ai lu à petite dose pendant que je randonnais, le soir, avec ma lampe frontale, et donc dans des conditions qui n'étaient peut-être pas idéales. Il aurait certainement fallu que je le lise de manière plus suivie, en prenant des notes au fur et à mesure, pour ne pas me perdre dans ce labyrinthe, dans cette logorrhée.
Je n'ai pas réussi à le finir, il doit me rester quelque chose comme 20 pages, mais cela faisait déjà un moment, que je lisais sans comprendre ce que je lisais, que je n'arrivais plus du tout à suivre l'histoire, la foultitude de personnages, de lieux, d'événements.
Pourtant j'ai trouvé la langue formidable, fulgurante, débordante, chatoyante, luxuriante. Labou Tansi est un véritable écrivain, il n'y a aucun doute possible là-dessus. C'est peut-être un peu injuste de ma part, mais je l'ouvre à moitié, et pourtant, des 4 livres de la sélection que j'ai lus cet été, c'est incontestablement celui qui m'a le plus marqué, et celui dont je pense que je me souviendrai encore dans quelques années, à cause, ou plutôt grâce à sa langue.
La première scène du livre m'a fait penser au film Salo ou les 120 journées de Sodome. C'est très cru, cruel, sanguinolent, il y a de la matière organique, du sadisme, de la sauvagerie sanguinaire, c'est gore, cela fait penser à un conte fantastique. C'est extrêmement visuel. C'est drôle car normalement ce genre, ce n'est pas trop ma tasse de thé, mais ici j'ai tout de suite accroché, je suis tout de suite rentré dedans.
L'écriture m'a aussi rappelé Cent ans de solitude : c'est une sorte de réalisme magique, une intrication du réalisme et du fantastique, l'exagération permanente, l'hyperbole. C'est un livre charnel qui déborde, qui exsude, qui transpire. On sent vraiment l'atmosphère, les lames de plomb du soleil, la chaleur écrasante.
Quelques passages qui m'ont marqué :
- "On n'a pas le même coefficient charnel" (p. 30).
- "Ne pas faire comme tout le monde, c'est la preuve qu'on est crétin" (p. 36).
- "Les yeux avaient disparu dans le boursoufflement excessif du visage, laissant deux rayons de lumière noires dans deux grands trous d'ombre" (p. 38).
- "Et bientôt, des chars marchèrent à la poursuite de cette vase de viande fuyante" (p. 41).
- "La vie, quand on en fait un ramassis d'habitudes, devient moche" (p. 97).

Je trouve qu'il y a donc vraiment des formules extrêmement marquantes, très belles. Le livre transcrit bien l'absurdité, la cruauté de ces régimes autocratiques, dictatoriaux, les chasses à l'homme, les expéditions punitives, la corruption. Pour autant, je trouve qu'il y a trop d'exagérations. Cela devient lassant, épuisant. Je suis d'accord avec l'avis de Claire, il y a quelque chose de grand guignolesque, qui devient éreintant, exaspérant. Il y a par exemple le nombre de viols que Chaïdana a subis, la succession des Jean : Jean Oscar, Jean Brise-cœurs, etc. les histoires de couleurs des bâtiments.

La mémoire délavée : Je crois que j'avais déjà entendu le nom de Natacha Appanah, mais je ne savais rien d'elle. Je n'avais donc pas d'idée préconçue avant de commencer à lire ce livre. Lorsque je l'ai feuilleté, je n'ai pas été emballé. J'ai vu qu'il y avait pas mal de photos et de dessins, et habituellement je déteste ça. J'aime lorsque l'imagination travaille, et je trouve qu'incorporer des photos, des dessins, des illustrations dans un livre, c'est empêcher le lecteur de faire son travail de lecteur. Au début de ma lecture, j'étais un peu circonspect. Cette histoire d'étourneaux, cela me semblait un peu fumeux. Et puis finalement, je suis assez facilement et assez rapidement rentré dans le livre. L'histoire des grands-parents de la narratrice m'a tout simplement intéressé. J'ai été à de nombreuses reprises ému, par exemple par la scène du mariage, par le récit de leur fin de vie, par leur pudeur. Je pense qu'il y a dans ce livre quelque chose d'universel, bien évidemment, car nous pouvons tous nous identifier au travers des anecdotes que nous avons avec nos grands-parents, leurs habitudes, leurs petits travers, leurs gris-gris, leurs superstitions. J'ai beaucoup aimé ce livre qui m'a fait pleurer, je l'ai lu en une journée, très facilement, avec beaucoup de plaisir mais je ne sais pas s'il en restera vraiment quelque chose.

Les vies d'après de Abdulrazack Gurnah : Encore une fois, je n'avais absolument jamais entendu parler de cet auteur. Je me suis senti un peu honteux lorsque j'ai appris qu'il avait reçu le prix Nobel de littérature en 2021. J'ai bien aimé ce livre, mais je ne sais pas s'il m'en restera grand-chose. C'est le premier par lequel j'ai commencé. Je l'ai lu avant de partir en vacances, et je me rends compte, à l'heure où j'écris ces lignes, que mes souvenirs sont déjà bien flous. Je l'ai lu très facilement. C'est une trame romanesque classique. L'écriture, sans être fulgurante, est efficace. Je trouve que les personnages sont bien dessinés et ont une véritable épaisseur. J'ai été intéressé par le contexte et l'arrière-plan historique. Je ne savais rien de la colonisation en Tanzanie, mais je me souviens que la fin m'a un peu agacé. Je l'ai trouvée un peu longue. J'ai trouvé qu'elle était programmatique et que l'on voyait un peu trop le dessein de l'auteur, et qu'il essayait de faire passer un "message". On voit aussi bien arriver l'histoire d'amour. Je l'ouvre quand même aux ¾.

Tout s'effondre : ¾
La vie et demie : ½

La mémoire délavée
: ¾

Les vies d'après : ¾

Renée (discrètement par zoom de Narbonne)
La vie et demie du Congolais Sony Labou Tanzi : L'auteur écrit et témoigne sur "l'absurdité de l'absurde" pour lui, c'est ça l'Afrique post coloniale, un geyser de sang, de tueries gratuites, de dictateurs sanguinaires, de guerres stupides, une succession de violence incontrôlée qui ne s'arrêtera jamais. Il a réussi son projet. MAIS le pessimisme de ce livre le rend difficile à lire, c'est l'horreur absolue. Je l'ai abandonné au bout de 6 pages, puis je l'ai repris, et lu avec difficulté vu la longueur et les répétitions. Je ferme.
Terre somnambule du Mozambicain
Mia Couto : Dès les premières lignes, j'ai été fascinée par l'écriture poétique, les inventions langagières ainsi que par la traduction qui réussit à transcrire la créativité de l'écriture. C'est du réalisme magique, qui ouvre la porte au rêve et à la poésie et qui empêche les héros de trop souffrir de la réalité. J'ai noté : "Ils vont par-delà nulle part, tenant leur venue pour non avenue, dans l'attente de l'à venir" ; ça résume l'incertitude, la précarité, le vacillement de personnages. J'ai aussi été touchée car c'est une ode à la lecture comme "aide à supporter l'horreur". J'ai aussi aimé la construction "à tiroir", comme le faisait Italo Calvino. J'ouvre en grand.
Les vies d'après du Tanzanien Nobel en 2021 Abdulrazack Gurnah : L'écriture est simple mais percutante, les personnages sont incarnés et complexes ; Gurnah écrit sur un épisode peu connu, comme quasiment tout ce qui s'est passé en Afrique début 20è. C'est une critique de l'attitude raciste des Européens vis-à-vis des autochtones. Cependant il montre bien l'ambivalence des personnages : les garçons ont eu une enfance très difficile à cause des Européens, MAIS ils s'engagent dans une guerre qui ne les concerne pas. Pourquoi ? L'officier allemand est brutal, MAIS il apprend l'allemand à Hamza pour lire Schiller. La femme de Hamza est généreuse en accueillant, MAIS veut l'obliger à se marier etc. J'ouvre en grand.
La mémoire délavée de la Mauricienne Nathacha Appanah raconte avec une écriture précise l'histoire de ses aïeux "engagés" pour travailler à l'Île Maurice, histoire d'une déshumanisation, leur identité étant remplacée par un numéro. Les époques se mêlent adroitement. Il y a un beau portrait de son grand-père, conscient d'avoir fui la misère, mais refusant d'oublier les traditions, malgré le grand attachement à Maurice. J'ouvre aux ¾ j'ai hésité avec ½.

La vie et demie : fermé
Terre somnambule : en grand

Les vies d'après : en grand
La mémoire délavée
: entre ½ et ¾

Christelle
J'ai passé un très bon été, ces lectures y ont bien sûr contribué.
Tout d'abord j'ai été séduite par les titres des 4 œuvres particulièrement jolis, poétiques et en même temps très adaptés à chacune d'entre elles. J'ai retenu des styles très différents, des ambiances différentes, et chaque livre m'a permis de découvrir des faits historiques, qui m'ont incitée à me documenter. Ces faits ne sont pas une toile de fond, mais ont de lourdes conséquences sur le destin des personnages.
Le premier livre lu était celui de Labou Tansi. C'est pour moi une farce, et évidemment un drame par son sujet. Mais les excès, entre autres les détails du bain de sang du début, m'ont un peu lassée. Le plaisant prologue dresse le portrait d'un écrivain très très humain, à mille lieues du Guide providentiel...
Le livre de Mia Couto, m'a absolument charmée ; j'ouvre en grand pour l'atmosphère, la poésie, l'inventivité, l'écriture... Des éléments sur les croyances et traditions du pays ajoutent, je trouve, une part mystérieuse et inaccessible très intéressante.
Avec Gurnah, dans Les vies d'après, on revient à quelque chose de plus classique, mais également très prenant. Le contexte historique très présent n'en est pas pour autant écrasant et laisse une large place à l'histoire propre et universelle des personnages principaux.
Le livre d'Appanah m'a beaucoup touchée ; les émotions de l'auteure sont très présentes dans un récit d'apparence simple. J'ai été impressionnée évidemment par les capacités d'adaptation des aïeux d'Appanah qui ont permis un nouvel enracinement à cette famille. J'ai été marquée par le passage où le grand-père dit "je voulais rentrer chez moi" en parlant de l'île Maurice, après avoir écourté son voyage en Inde. L'écriture est jolie et poétique.

La vie et demie : ¾
Terre somnambule : en grand

Les vies d'après : ¾
La mémoire délavée
: ¾

Danièle
En lisant Les soleils des indépendances de Ahmadou Kourouma - étonnant - je me sens solidaire de cet homme, Fama, le dernier descendant de la dynastie des Doumbouya, alors que, dans la vie courante, je crois que je le détesterais : prompt à prendre son couteau, obtus, braillard et sûr de lui, attaché aux traditions ancestrales qui le rendent aveugle à la réalité, toujours prêt à palabrer dans le vide, à l'écart du progrès. Sans doute parce que je suis touchée par son histoire et celle des Malinkés. C'est un personnage touchant, qui se sent responsable de l'avenir de son pays traditionnel, le pays Malinké, dépecé par les interventions des colons européens et transformé historiquement en plusieurs états, devenus au surplus des dictatures après la décolonisation. D'où son désenchantement et sa frustration. Le fil conducteur du roman est le sentiment de spoliation, de frustration qui l'anime et qui forge sa volonté, pris entre son désir sincère d'agir en respectant la loi religieuse et fétichiste, mais aussi d'agir après réflexion : "Et Fama entreprit de penser."
(p. 88) Je sors tout ébaubie, étourdie, de la lecture de ce livre, comme après un passage dans un univers inconnu et chatoyant, mais aussi martyrisé, où l'histoire et la langue jouent un grand rôle. Amadou Kourouma malmène la langue française pour notre plus grand plaisir, nous donnant un petit aperçu de ce que peuvent être la syntaxe et le style de la langue originale. Ce faisant aussi, il prend sa revanche sur la langue des colons qu'il utilise selon son bon vouloir. Il manipule la langue française pour nous donner une image de la langue d'origine (malinké). Avec lui j'ai appris le Malinké, car j'ai été confrontée au fonctionnement de la pensée Malinké, avec ses outrances et sa poésie. On entre dans une langue imagée, crue et poétique à la fois, sans doute habituelle pour qui a vécu en Afrique, mais qui prend ici une tournure grandiose, tonitruante, pour tout dire envoûtante. À l'image de ces palabres, qui sont quelque chose de fondamental et pas du tout une discussion interminable et oiseuse, comme j'en ai lu la définition quelque part. Elles créent un sentiment de communauté et incitent à la sagesse (ce n'est pas pour rien que le toit est construit assez bas, pour éviter les réactions colériques). Cette lecture fut pour moi une plongée dans un univers magique mais aussi un univers douloureux : cet homme a connu la gloire de sa dynastie et vit l'ère des indépendances, après l'ère de la colonisation, autrement dit le déracinement, la perte d'identité, l'oppression, le déclin. Et surtout le sentiment de spoliation. Cette lecture est aussi une confrontation à une mentalité superstitieuse et religieuse (les deux à la fois) qui peut envoûter, mais aussi horrifier ou dégoûter (en particulier la partie consacrée aux viols des femmes et à leur excision) ou amuser (les prières et les sorts et fétiches qui se succèdent sans pour autant améliorer la situation : stérilité ou perte du statut d'origine). Jamais je n'ai été happée ainsi dans aucun autre livre. La fin est attendue mais pathétique et tellement bien rendue, dans un style grandiose et émouvant, décrite comme une scène de film : Fama mourra comme il le désirait, dans ses terres d'origine, en digne représentant de son royaume, et peu importe si c'est mort ou vivant. J'ouvre en très grand.

Sortant de la lecture d'Ahmadou Kourouma, j'ai tout d'abord pensé que je n'aurais pas dû lire ce livre, La mémoire délavée, après Le soleil des indépendances. Le style et la langue sont tout à fait opposés, si bien qu'il m'a été difficile de rentrer dans ce livre. Cependant je ne pouvais m'empêcher d'apprécier la poésie de certains passages : la belle image du vol des étourneaux accordé au monde de la pensée, par exemple, mais peut-être un peu trop recherchée ? Le fil directeur commun est le besoin d'affirmer sa filiation pour combler une frustration. Cela devient au début une autobiographie basée sur une énumération de multiples ancêtres. Les personnages retrouvés dans les archives ne prennent pas corps, ni pour l'auteure ni pour nous. Mais c'est en quelque sorte ce que veut nous démontrer Natacha Appanah, pour insister sur la frustration qu'elle éprouve en retrouvant la trace de ses ancêtres. Mais peu à peu, l'auteure en vient à parler des personnes de la famille qu'elle a connus, en particulier de ses parents et grands-parents. Et là, l'émotion surgit de l'écriture simple. On pense plutôt à Annie Ernaux. Toutes les deux cherchent l'écriture la plus plate possible pour éviter les fioritures et rester au plus près des sentiments profonds : Annie Ernaux écrit : "Le roman est impossible... Pour rendre compte d'une vie soumise à la nécessité, je n'ai pas le droit de prendre d'abord le parti de l'art, ni de faire quelque chose de "passionnant" ou d'"émouvant". Je rassemblerai les paroles […] tous les signes objectifs d'une existence que j'ai aussi partagée. L'écriture plate me vient naturellement, celle que j'utilisais en écrivant à mes parents pour leur dire les nouvelles essentielles". Natacha Appanah écrit, parlant de sa grand-mère : "Là elle accouchait toute seule, accroupie, sur une toile de jute. J'aimerais pouvoir faire de cette dernière phrase quelque chose de banal. J'ai cherché à l'écrire différemment, à remplacer les mots par d'autres - moins évocateurs, plus flous, moins précis -, pour que cette phrase dise ce qu'elle a à dire mais qu'elle le dise de manière détournée, qu'elle devienne fine et plate et banale et qu'on puisse la lire comme une information un peu insipide. Je pourrais aussi y ajouter des adjectifs, des adverbes, d'autres mots encore, parler de ce qu'il y a autour, du décor, du temps, je pourrais tergiverser, noyer cette information dans des éléments de documentation, dans des statistiques." (p. 44) Dans les deux cas, cette recherche de la banalisation, de la platitude, du dépouillement, d'où émerge, bizarrement, une grande force de compassion et pour le lecteur, d'émotion. J'ouvre aux ¾.

Les soleils des indépendances : en très grand
Terre somnambule : ¼ mais je vais le relire
La mémoire délavée : ¾
Tout s'effondre : ¾

Annick L
La mémoire délavée de Nathacha Appanah : Un livre attachant, écrit pour explorer l'histoire de ses ancêtres, à travers la figure de son trisaïeul qui a quitté l'Inde avec femme et enfants pour venir travailler dans les plantations sur l'île Maurice, à la fin du 19e siècle. J'ai été séduite par sa construction originale et la belle fluidité de son style, dès son ouverture métaphorique sur un vol d'étourneaux. Elle tisse habilement deux fils narratifs. Celui de ses recherches, au présent de narration, dans des archives, pour retrouver une trace de leur passage sur cette terre et tenter, vainement, de "faire parler" les documents (qui se résument le plus souvent à un numéro de matricule !) afin de reconstruire leur vie quotidienne à l'époque. Et celui de ses souvenirs heureux d'enfance et de jeunesse dans sa famille mauricienne, entourée de ses parents et grands-parents, qui occupe complètement les derniers chapitres.
Une tâche difficile car la transmission intergénérationnelle ne remonte pas aussi loin : la mémoire ne remonte qu'aux bribes rapportées par sa mère autour de sa propre enfance et de quelques anecdotes marquantes sur sa famille.
J'ai découvert à cette occasion l'histoire terrible de cette vaste entreprise des pays colonisateurs, "l'engagisme", qui a conduit des milliers de personnes, hommes-femmes-enfants, à venir travailler dans leurs plantations. Sa démarche, positive, permet de lever un peu la chape d'invisibilité qui a été plaquée sur ces pauvres gens.
Un parti-pris qui a d'ailleurs une portée universelle, au-delà de ses ancêtres. Heureusement que les travaux de certains chercheurs permettent d'incarner un peu les rudes conditions de vie dans les plantations grâce à l'organisation sociale très hiérarchisée qui y était instaurée.
La dernière partie, nourrie par ses propres souvenirs est évidemment beaucoup plus vivante et chaleureuse. Elle rend compte aussi de la façon dont les membres de sa famille, au fil des générations, ont progressivement construit leur ascension sociale. Un bel hommage !
Nathacha Appanah utilise de façon remarquable de genre hybride de docu-fiction pour mener ce projet littéraire et personnel. Un genre très fécond en cette rentrée littéraire. Ouvert en grand.

Terre somnambule de Mia Couto est un roman superbe qui m'a emmenée très loin, dans un dépaysement assumé par lequel je me suis laissé porter, malgré mon absence de références culturelles et historiques sur cette guerre (d'indépendance puis civile) qui a ravagé le Mozambique pendant des décennies.
J'ai été captivée d'abord par cette langue flamboyante, inventive (avec plein de jeux sur les mots et expressions), métissée entre le portugais et les langues africaines, qui m'a souvent amenée à m'arrêter pour déguster telle ou telle trouvaille qui faisait naître une foison d'images dans mon esprit. Un inventaire en serait fastidieux ! Un style d'une originalité certaine qui contribue totalement à ce voyage imaginaire. Saluons ici le travail remarquable de la traductrice.
Mais aussi une histoire bouleversante de quête identitaire de ces deux jeunes gens, Muidinga et Kindzu, plongés dans un monde en guerre, totalement insensé. J'ai beaucoup aimé l'alternance des deux récits, introduite par la découverte par Muidinga et le vieux Tuahir d'un cahier dans le vieux bus calciné. Je trouve d'ailleurs que la relation "filiale" qui se noue progressivement entre ces deux personnages est particulièrement attachante. Un lien salvateur pour survivre…
Le souffle puissant du narrateur nous fait plonger sans réserve dans un univers hostile où le réalisme des descriptions de cette terre ravagée par les combats alterne avec des scènes oniriques (le rêve est une clé importante) et fantastiques, empruntées à des légendes et croyances, avec la présence constante des esprits des morts, bienveillants ou hostiles, aux côtés des vivants.

Un chef-d'œuvre littéraire. Ouvert en très grand

La vie et demie : en grand
Terre somnambule
: en grand

Rozenn
J'ai lu les quatre livres en une semaine...

[Cris et chuchotements...]

... J'étais seule une semaine cet été et enfermée à cause de la canicule. Une expérience magique ! Une immersion de lecture !
Et je les ai relus cette semaine.
La vie et demie ? Si on avait choisi quatre adjectifs pour chacun des livres, j'aurais dit : fabuleux, époustouflant, terrible, échevelé.
Avec Mia Couto, j'ai été emmenée par la langue ; au début je me suis forcée à lire lentement pour savourer ; mais à la relecture, j'ai calé sur la phrase "Mon cœur a boumboumé". Il reste que j'ai aimé la langue, l'intrigue, la construction, l'enchevêtrement des histoires.
Les vies d'après est mon préféré, même s'il est moins étonnant pour ce qui est de l'écriture. Je voulais absolument savoir ce que devenait Ilyas, et la chute ne m'a pas déçue.
Le livre de Nathacha Appanah est très beau, subtil, mais moins surprenant, plus près de ce qu'on connaît.
Quant à Kourouma, que j'ai lu hier, je suis d'accord, il est extraordinaire : j'ai été totalement embarquée.
J'ai lu aussi avant l'été Récitatif de Toni Morrison et avant de lire la postface, je ne me posais pas la question de la couleur des personnages.

J'ouvre tous ces romans en très grand et j'en veux d'autres.…

Je me suis demandé comment on peut définir la littérature africaine. En quoi est-elle africaine ? Et j'ai lu aussi un essai qui comporte des entretiens avec des écrivains : De quoi la littérature africaine est-elle la littérature ? Pour une critique décoloniale (d'Éric Essono Tsimi, Presses de l'université de Montréal, 2022). Je retiens peut-être que pour les livres choisis, il s'agirait d'une littérature de la migritude.
Est-ce que la littérature ne permet pas justement de dépasser les catégories identitaires figées ? ("Black and White" de Tony Ramos p. 221 Catalogue de l'exposition Paris Noir). Mais peut-être pas les marques de l'Histoire.

La vie et demie : en grand
Terre somnambule : en grand
Les vies d'après : en grand
La mémoire délavée : en grand
Les soleils des indépendances
: en grand
Récitatif : en grand

Catherine
J'ai lu 6 livres : les 4 de la liste + 2 autres, en commençant par
Tout s'effondre de China Achebe, suivi de Natacha Appenah, d'Une si longue lettre, Mia Couto puis La vie et demie et pour finir Les vies d'après.
D'une façon globale, ça a été un vrai plaisir, j'ai beaucoup apprécié le choix des 4 livres qui m'ont permis une vraie découverte de cette littérature que je connais mal, avec une diversité, de pays, d'époque et d'écriture, mais aussi des thèmes communs. Je continuerais bien d'ailleurs car beaucoup d'autres me tentent.
J'ai commencé par Tout s'effondre qui a la particularité de se situer en grande partie pendant l'ère précoloniale et de décrire en détail la vie d'un village igbo isolé, ses lois, ses rites et coutumes. Certaines sont assez choquantes pour le lecteur, occidental tout au moins, l'abandon des jumeaux dans la forêt et qui meurent de faim, le meurtre de l'enfant du village voisin par exemple. On assiste dans la dernière partie du livre à la confrontation avec les Blancs, les divisions qui s'ensuivent. C'est un livre dense, que je n'ai pas lâché. J'ai aimé l'écriture, très imagée, l'utilisation de mots igbo, d'expressions orales, de proverbes "les proverbes sont l'huile de palme avec laquelle on accommode les mots". Le personnage d'Okonkwo est complexe, il est habité par la volonté de domination, le courage, il incarne la résistance au changement tandis que d'autres s'adaptent. On pressent que la fin va être tragique. Je l'ouvre aux
¾
.
J'ai lu ensuite La mémoire délavée de Natacha Appanah. C'est un récit plus qu'un roman, qui retrace l'histoire de sa famille venue d'Inde pour travailler dans les champs de canne à sucre, à la place des esclaves noirs. Je ne connais pas l'histoire de l'île Maurice, j'ai été intéressée par ce récit et touchée par tous ces personnages, les ancêtres dont il reste peu de traces, à qui on a retiré leur identité pour les remplacer par des numéros, le personnage du grand-père mais aussi de la grand-mère qui va prier le dieu des blan
cs avant les examens de sa petite-fille, parce qu'elle a davantage confiance en un dieu qui parle français et anglais. J'ai aimé les photos, l'enquête du début. L'écriture est fluide. Ce livre m'a donné envie de lire d'autres livres de cette autrice. Je l'ouvre entre ½ et ¾, il me marquera moins que le précédent.
J'ai enchaîné sur Une si longue lettre de Mariama Ba, roman épistolaire sur le statut des femmes au Sénégal, la polygamie. Je l'ai également beaucoup aimé. C'est vraiment un livre à lire. Je l'ouvre aux ¾.
J'ai enchaîné avec Terre somnambule de Mia Couto. L'histoire des deux personnages fuyant une terre dévastée, en se cachant pour échapper aux dangers, m'a un peu fait penser à La route, même si le contexte et surtout l'écriture sont très différents. Je me suis attachée aux personnages et à l'histoire, mais j'ai surtout aimé l'écriture, incroyable (avec un bravo à la traductrice), le mélange de surnaturel, de néologismes et de jeux de mots, la construction qui imbrique deux récits qui se rejoignent à la fin. Je l'ouvre aux ¾.
J'ai eu nettement plus de mal avec La vie et demie, très gore dès les premières pages et tout au long du livre. C'est une allégorie des dictatures en Afrique post-coloniale, qui mélange le grotesque, la violence et l'horreur, pour mieux dénoncer la dictature qui détruit tout. Les personnages autour du dictateur rivalisent de lâcheté et de cupidité. C'est une écriture là aussi très particulière, pleine de néologismes, de symboles. La construction est assez désordonnée, on s'y perd un peu. On ne peut pas dire que ça soit une lecture facile ou un plaisir de lecture, mais c'est un livre très fort que je n'oublierai pas. Je ne sais pas comment le classer en revanche. À moitié ?
Pour finir, j'ai beaucoup aimé le livre de Gurnah, d'écriture et de construction beaucoup plus classiques. C'est un autre aspect de la colonisation, l'enrôlement de jeunes Africains dans les guerres des colonisateurs, via le destin de deux jeunes hommes, Ilyas et Hamza. J'ai été très intéressée par le contexte historique que je ne connaissais pas du tout (j'avais même oublié que l'Allemagne avait colonisé une partie de l'Afrique), par les thèmes abordés, les traumatismes liés à la guerre, le déracinement, la mémoire. Les personnages sont très touchants et pleins d'humanité : ¾.

Tout s'effondre : ¾
Une si longue lettre
: ¾

La mémoire délavée
: entre ½ et ¾
Terre somnambule : ¾
La vie et demie : ½
Les vies d'après : ¾

Françoise
Les vies d'après de Gurnah, j'ai beaucoup aimé, préféré à Paradis, lu en vo, auquel manquait la trame historique ici présente. J'ouvre en grand.
Le livre d'Appanah, je suis plus circonspecte, car il ne m'en reste pas grand-chose, même si j'ai beaucoup appris sur l'immigration des Indiens. Je l'ouvre ½.
J'ai commencé Mia Couto et il m'est tombé des mains. L'écriture m'a arrêtée, de même que le côté fantastique. La traduction m'a gênée, sans pouvoir dire quoi que ce soit de la vo, évidemment. Concernant le quatrième, La vie et demie, je n'ai pas eu le temps de le lire, mais certains avis entendus ici ne me donnent pas trop envie de le faire. Je n'avais pas tilté qu'il était également recommandé de lire aussi Le soleil des indépendances, je sais que je devrais le faire.

Les vies d'après : en grand
La mémoire délavée : ½
Terre somnambule : ¼

Christine (du nouveau groupe parisien, présente pour "profiter" de nos invités)
Quatre romans très différents qui traitent de l'après colonisation, des blessures qui perdurent et de la difficulté de se construire en tant que personne héritière de ce passé. Quatre romans qui m'ont fait découvrir des mondes qui m'étaient inconnus.
La mémoire délavée se distingue des trois autres romans par son style délicat parfois poétique. C'est le roman le plus facile à lire car la violence y est délavée. Dans la quête de ses origines, l'auteur découvre un passé commun à tous les engagés qui va au-delà de l'histoire orale familiale. C'est un roman passionnant qui m'a donné envie de lire un autre livre de Natacha Appanah (Tropique de la violence).
Par contre, j'ai eu beaucoup de mal à lire
La vie et demie. Nous ne sommes plus dans le réel mais dans la satire, une satire poussée à son extrême et pleine de violence. Nous sommes plongés dans un régime dictatorial et corrompu où l'individu est soumis au pouvoir. Mais les opposants assassinés reviennent d'entre les morts. Chaïdana, fille d'un opposant tué, traverse le livre sous différentes formes pour tenter de saper la dictature. Mais ce récit aussi difficile à lire, restera gravé dans ma mémoire…
J'ai beaucoup aimé
Les vies d'après, roman plus classique, plus optimiste. J'ai découvert l'histoire coloniale du Mozambique. L'auteur montre que la colonisation a pu avoir des côtés positifs en aidant les gens à avoir une vie moins misérable. Il distingue des individus humains parmi les colons. Mais il nous montre le mépris des différents colonisateurs pour les populations autochtones. Les peuples noirs étaient utilisés sans considération humaine dans la guerre qui fabriquaient des individus noirs dépourvus d'humanité.
Terre somnambule : un jeune garçon et un vieillard perdus dans un monde dévasté par la guerre civile. Dans les cahiers de Kindzu, c'est le parcours d'un homme ayant quitté sa famille et traversant une succession d'épreuves : superstitions, corruption, camp de déplacés… J'ai beaucoup aimé le style de Mia Couto que j'ai trouvé merveilleusement traduit. Que d'implicite, de non-dits, dits à travers ces constructions de phrases bizarres et ces mots déformés et réinventés ! Mais l'enchantement du début s'essouffle et le récit devient moins prenant au fil des pages.

La mémoire délavée : ouvert en grand
La vie et demie : ouvert à moitié
Les vies d'après : ouvert en grand
Terre somnambule : ouvert à moitié

Katell (avis transmis)
C'est une très bonne idée cette sélection de littérature africaine, avec cette diversité.
Un livre m'est tombé des mains (
La vie et demie), trop ésotérique à mon goût.
Un autre n'a pas été désagréable, mais vite oublié (celui de Nathacha Appanah dont tout le monde parle actuellement).
Mon coup de cœur c'est Gurnah, que j'ai adoré. Pas étonnant qu'il soit prix Nobel. J'ai tout aimé : la dimension sociale et historique (une découverte), la langue, les personnages. Le passage de la guerre m'a laissée pantois. Je vais lire Paradis mentionné par Françoise.

La vie et demie : fermé
La mémoire délavée : ½
Les vies d'après : en grand

Nieves (du groupe de Tenerife qui a lu La mémoire délavée en juillet 2025)
J'ai bien aimé cette histoire écrite d'une façon très délicate et poétique, juste avec un désir d'éclaircissement du passé, vu que la mémoire n'est pas très solide, n'est pas un monde clos. C'est justement à cause de cela que l'auteure commence par une belle image, le parallélisme des vols des étourneaux traçant des formes mouvantes dans le ciel et allant d'un endroit à l'autre comme les êtres humains qui quittent leur pays en cherchant une vie meilleure, sans savoir souvent comment ils vont y arriver et ce qu'ils vont y trouver.
Bien que le roman semble un hommage à ses grands-parents, et à son grand-père en particulier, l'écrivaine remonte à deux générations avant pour imaginer, à l'appui de très peu de documents, comment ces coolis étaient arrivés à Port-Louis où ils ont été identifiés avec un numéro avant d'être emmenés à la plantation de Camp Chevreau. Les conditions de vie de tous les migrants sont toujours épouvantables tout au long de l'histoire ; cependant, Nathacha Appanah ne raconte l'histoire de sa famille avec rancœur, je trouve que c'est un récit plutôt émotionnel où elle essaie de reconstruire son passé, tâche pas très facile avec si peu de renseignements et avec les va-et-vient de la mémoire, des fois très fragile. Elle essaie de le faire quand même "mais d'une manière détachée, éclairant en biais ma propre famille et son chemin. Ils m'intéressaient comme m'intéressent l'histoire de l'humanité, la transhumance des êtres depuis la nuit des temps et les façons multiples qu'ont trouvées les hommes d'asservir leur prochain".
On dirait également que la convivialité et la vie en communauté de ces migrants sont pleines de dignité, étant pour elle une forme d'accrochage, bien que quelquefois elle oublie ce passé et s'en prend à la mémoire qui, comme les étourneaux, fait des détours tout le temps et rend difficile la récupération de ce passé dont elle parle avec beaucoup d'affection : "De mes grands-parents, je garde un monde qui ressemble à un cœur vivant avec des veines caves, des artères multiples des faces cachées, des membranes délicates. Je l'oublie parfois pendant de longues semaines et soudain j'ai l'impression de n'avoir que ça, de n'être que cela, ce cœur-là, et sa complexité fragile"
C'est un récit exempt de victimisme, une façon différente de parler des grands drames humains.
Bref, je suis très contente d'avoir découvert cette auteure et aimerais bien lire d'autres ouvrages comme Tropique de la violence ou Rien ne t'appartient.

QUELQUES THEMES ET QUESTIONS ABORDÉS AVEC NOS INVITÉS

- L'impression de fossé culturel ressenti par l'une s'apparente au contraire à un voyage pour l'autre. Ce terme de voyage est l'objet d'une mise au point car Tirthankar Chanda l'appréhende comme un renvoi à l'exotisme. Or dans le terme de voyage, nous voyons plutôt un phénomène relevant des plaisirs de la lecture : être transporté - comme un voyage - le temps d'un livre.

- Les étapes de la littérature africaine écrite ? Tirthankar indique qu'au début du XXe siècle, la littérature était d'abord :
• une littérature coloniale écrite par des Occidentaux (explorateurs, missionnaires ou administrateurs coloniaux), représentant justement l’Afrique à travers un regard exotique et souvent stéréotypé. Et Pierre Loti, demandons-nous ? Mmm, pas vraiment, car ce n'est pas un colon qui réside en Afrique, c'était un marin.
• Un événement historique en 1921, c'est le premier Goncourt écrit par un Noir, Batouala, de René Maran qui, bien placé en tant qu'administrateur colonial au Tchad, raconte la réalité du système colonial ; scandale : à quand un Goncourt écrit par un singe ? !
• Apparaissent ainsi des auteurs formés dans les écoles coloniales (ce qui fait qu'on a pu parler de "littérature des instituteurs") qui rendent compte de la résistance à la colonisation, l'affirmation de l’identité africaine, parallèlement au mouvement majeur de la négritude (Senghor) :
Tout s'effondre de Chinua Achebe rend compte de ce passage (publié en 1958)
• Kourouma, notamment avec
Les soleils des indépendances, subvertit le français en y intégrant des structures malinkés, des proverbes, des expressions populaires, des rythmes oraux : on a pu parler de malinkisation de la langue ; il ouvre une voie à une littérature "décolonisée", affranchie des normes européennes
• Avec les indépendances, les écrivains abordent les désillusions politiques, les colons sont remplacés par des dictateurs (voilà Sony Labou Tansi et La vie et demie), les guerres civiles (qu'on retrouve avec Terre somnambule), des voix féminines apparaissent (Mariama Bâ avec Une si longue lettre).
• Vu les régimes politiques et les conditions économiques, des écrivains s'exilent : une partie de la littérature contemporaine vient de la diaspora ; d'autres influences s'exercent (Amérique du Sud) ; et advient une diversification de thèmes : migration, identité, genre, écologie, mémoire ; voilà Chimamanda Ngozi Adichie, Léonora Miano, Alain Mabanckou...

Citons en complément un article de Tirthankar Chanda dans Le Monde diplomatique, "Tant que l'Afrique écrira, l'Afrique vivra", où il évoque l’évolution de la littérature africaine francophone, marquée par une transition entre deux générations d’écrivains : la génération fondatrice et la nouvelle génération. Voir aussi l'article "Enfants de la postcolonie et migritude, une génération de romanciers loin de l'Afrique", Nadjia Merdaci, Akofena, revue scientifique des Sciences du Langage, Lettres, Langues & Communication, Université Félix Houphouët-Boigny, août 2023, 12 p.

- Tirthankar citera deux noms qui jouent un rôle pour faire connaître l'histoire de la littérature :
• avant tout Jacques Chevrier, titulaire de la chaire d’études francophones à la Sorbonne, auquel il rend hommage dans une émission de radio, et qui fut l’un des plus éminents spécialistes de la littérature africaine qu’il a installée comme objet d’étude à travers ses enseignements et ses publications : en 1974, La littérature nègre, sorte de "Lagarde et Michard" de la francophonie africaine ; il est directeur de la collection Monde noir poche chez Hatier. Tirthankar cite une formule volontairement provocatrice de Jacques Chevrier, disant que la littérature africaine était devenue "un peu moins moche" (ironie visant les jugements condescendants voire méprisants que certains portaient sur ces œuvres, comme si elles n’étaient pas encore "à la hauteur" des standards littéraires européens).
Boniface Mongo-Mboussa a publié Désir d'Afrique (Gallimard, 2002), préfacé par Kourouma, qui constitue une histoire de la littérature africaine : Tirthankar s'entretient avec lui dans une émission à propos de Sony Labou Tansi.

- Y a-t-il des écrivains qui écrivent en langue africaine ? Gurnah dont nous avons lu Les vies d'après a été inspiré par des textes en swahili. Mais c'est surtout Shaaban Robert qui est l’un des plus grands écrivains swahilis de l’Afrique de l’Est.
Les éditions Zulma ont, avec les éditions Mémoires d’encrier, un label en wolof (Céytu), dirigé par l'auteur Sénégalais Boubacar Boris Diop.

- Tirthankar évoque, à propos de la différence entre francophones et anglophones, la tigritude, concept provocateur inventé par l’écrivain nigérian prix Nobel Wole Soyinka en 1962, réponse ironique au mouvement de la négritude porté par les francophones : il préfère agir sans se justifier, revendiquer son identité par la création et la résistance, plutôt que par la seule proclamation : "Un tigre ne proclame pas sa tigritude. Il bondit sur sa proie et la dévore".

- Et la relation entre les écrivains africains et antillais, haïtiens ? Haïti a été la première république noire indépendante en 1804, faisant figure de modèle : "Haïti où la négritude se mit debout pour la première fois", écrit Césaire.

- Pourquoi ne connaît-on pas ou peu la littérature africaine, qu'en est-il du marché de l'édition ?
Il y a une reconnaissance d'estime, précise Kidi Bebey, on voit des livres dans les listes de prix, mais il n'y a pas de reconnaissance populaire.
Se pose la question de l'édition en Afrique qui est plus solide au Maghreb ou dans les pays anglophones. Il y a des co-éditions, avec Philippe Rey par exemple (voir entretien dans Jeune Afrique). La Côte d'Ivoire est en poupe, avec un gros salon du livre à Abidjan.
Et en France, nous ignorons qu'il y a des collections chez les grands éditeurs, sans parler de Présence Africaine, édition fondée en 1947 par Alioune Diop :
• Hatier : collection "Monde noir poche" (ne publie plus, mais on trouve les livres)
• Actes Sud : "
Lettres africaines"
Gallimard : "Continents noirs".

LES LECTEURS du groupe breton
réuni le 25 septembre 2025

Cliquez pour lire leurs avis sur les différents livres

BrigitteChantalCindyEdithMarie-Odile
Marie-Thé
Philippe Suzanne

Brigitte
Mon premier choix de lecture a été Les soleils des indépendances que j'ouvre aux ¾ ; pas plus car si j'ai eu du plaisir à lire, pour autant je me suis parfois ennuyée surtout dans la deuxième partie. Pour moi, beaucoup de messages sont à décrypter, hormis la décolonisation. Il y a plus d'une cinquantaine d'années, Kourouma écrivait que "l'Afrique connaîtrait la paix quand chaque nègre resterait chez lui". On peut faire une lecture avec le regard de notre monde du 21e siècle : le livre est étrangement contemporain. Je me dis qu'une deuxième lecture du livre pourrait enrichir ma réflexion pour mieux s'interroger sur l'héritage de la colonisation… mais je ne l'ai pas fait.
Avec un style agréable, l'auteur me transporte avec grande facilité chez lui en Côte d'Ivoire, chez les Malinkés pour beaucoup ruinés par les indépendances et la décolonisation massive dans les années 60 en Afrique. Je note un titre au pluriel. L'auteur veut-il élargir la réflexion du lecteur ? Est-ce que les pays africains ont tous vécu douloureusement et de façon identique la décolonisation ? Est-ce à dire que c'était mieux sous la colonisation ? Le soleil dans le titre amène à penser que lors de la décolonisation le soleil a peut-être éclairé le peuple africain, mais il a brûlé ses espoirs… L'auteur témoigne que l'indépendance, source d'espoir et de liberté, a apporté des violences, des dangers d'un parti unique et de la corruption. Le peuple a une vie dure et côtoie la misère. Hommes et femmes puisent de la force vitale dans leur patriotisme, leurs traditions, leur croyance en Allah, en la sorcellerie et aux sacrifices, au maraboutage, aux fétiches, pour contrecarrer leur malheur.
Je savoure le style souvent poétique et les expressions imagées me font sourire. Je pourrais en citer des dizaines : il "marchait au pas redoublé d'un diarrhéique - leurs marmailles plus nombreuses que deux portées de souris - le genre de colère qui bouche la gorge d'un serpent d'injures et de baves"...
Je reviendrai sur deux personnages piliers du roman : Salimata, femme intelligente, nous confie sa souffrance ; je voudrais bien l'aider, par moment, cette "diablesse". Violences avec excision et viol dont les séquelles sont racontées avec pudeur. Elle nous confie sa stérilité, source de son malheur et des moqueries des autres. Une phrase qui en dit long : "A la femme sans maternité manque la moitié de sa féminité". Le passage sur sa grossesse nerveuse est poignant. Fama, son mari, prince déchu, cherche à perpétuer la tradition. Il se perd mais essaie toujours de se montrer raisonnable et parfois il sait écouter sa femme. Il souffre profondément du manque d'enfant, mais refuse la polygamie, enfin… au début ! Pris dans les violences lors de la décolonisation, il y laisse son corps et son âme. J'aurais envie de la protéger et de le mettre en garde contre ces soi-disant politiciens. D'ailleurs je vous donne à méditer une phrase page 157 : "la politique n'a ni yeux, ni oreilles, ni cœur ; en politique le vrai et le mensonge portent le même pagne, le juste et l'injuste marchent de pair, le bien et le mal s'achètent ou se vendent au même prix."
Pour finir, je m'attarde sur la photo de couverture : tatouages au henné au creux de la main, censés porter chance à celui qui le porte. Je ne dirais pas que c'est la main de Salimata ni de Fama !

Ma seconde lecture sera La mémoire délavée que j'ouvre ½ - essentiellement parce que je n'arrive pas à avoir de l'émotion lors de ma lecture. Je suis cependant sensible à certains passages poétiques. Peut-être est-ce la forme qui me dérange ? Ce n'est pas un roman, ce n'est pas un document, mais je dirais une recherche intime de Natacha Appanah, mauricienne, sur ses origines indiennes plus que créoles. Comme elle l'écrit p. 45, ce livre est pour moi un drôle de mélange entre récit, savoir, souvenirs de famille, son imagination. J'ai du mal à poursuivre ma lecture et reste très "distante" des mises en scène de l'auteure sur la vie de ses ancêtres déracinés, ces aïeuls migrant de l'Inde pour arriver sur l'île Maurice, où une dure vie de labeur aux champs de canne à sucre les attend. Ça me questionne : en quoi la quête de ses origines est-elle indispensable pour se construire ?

Ma troisième lecture sera Terre somnambule, roman du Mozambique, un pays "maltraité sans frein". Livre que j'ouvre aux ¾. Mia Couto utilise un style souvent imagé, avec l'imaginaire propre à l'Afrique. Des expressions souvent poétiques et des expressions qui me font sourire, ce qui me permet de respirer dans l'enfer de cette guerre civile postcoloniale. Je me suis souvent arrêtée pour relire des phrases que je trouvais belles et des phrases qui méritent réflexion. Par exemple : "Le bonheur est une chose que les puissants ont créée pour l'illusion des plus pauvres".
Les personnages sont des victimes : la terreur, la peur, la fuite, la mort, le désespoir et la tristesse les habitent, mais la vie est toujours bien présente... Dans la machimbombo, dans la brousse, "la route n'amène personne" et seuls des mirages amènent des changements. Important : les croyances leur donnent de la force pour survivre. La relation devient forte entre le vieux et raisonnable Muidinga et Tuahir adolescent orphelin. Tous les deux font preuve d'une incroyable résilience. La découverte des cahiers de Kindzu qui part à la recherche de ses ancêtres et à la recherche de Farida, femme qui cherche le bonheur et qui a beaucoup de rêves, peut paraître improbable, mais elle va changer leur quotidien et donner un sens à leur survie au milieu du désastre.
Je n'irai pas plus loin dans mes lectures africaines. J'ai eu du mal à me plonger dans la lecture de ces trois livres que j'ai sélectionnés dans le choix de Voix au chapitre. J'en garderai une sensibilité des auteurs et une réflexion sur la mémoire de l'Histoire, sur le rôle salvateur des croyances. Je voudrais ancrer dans ma mémoire certaines phrases comme celle sur la politique. De ces livres, je garderai des images qui me font sourire. De plus, j'avoue que certains sujets me dérangent et me mettent mal à l'aise. Je n'en ai pas envie dans une période que je trouve très et trop tourmentée, période au combien anxiogène sur l'avenir.

Les soleils des indépendances : ¾
La mémoire délavée
: ½
Terre somnambule
: ¾

Marie-Odile
J'ai bien aimé le titre, "Les vies d'après", et si toutes les vies sont des vies d'après, dans l'Afrique occupée puis lâchée par les colons allemands puis britanniques, cela prend plus de sens.
Ce roman, j'ai aussi eu envie de l'appeler "Les Misérables" :
- une Afiya-Cosette malmenée par les adultes qui l'élèvent, presque sauvée par l'amour
- des personnages victimes pas vraiment de la société, mais plutôt de l'Histoire,
- la pauvreté, la maladie
- les enfants arrachés aux leurs pour être ici esclaves ou soldats
- une indignation certaine du lecteur face à la misère et aux mauvais traitements infligés par la cruauté des armées coloniales...
J'ai apprécié les parties 1 et 2 et tout ce qu'elles m'ont appris sur l'impact de la première guerre mondiale dans les colonies, comment les armées pratiquent des massacres sans scrupules, imposent aux autochtones une guerre meurtrière qui n'est pas la leur, avec son lot de mépris, d'humiliations, de cruauté, de perversion, d'absurdité, de brutalité et de folie monstrueuse, comment les recrues locales sont utilisées, y compris les femmes qui suivent et approvisionnent la troupe. J'y ai vu un intérêt documentaire. Mais le récit a su aussi capter mon attention, notamment dans les temps forts comme la blessure de Hamza.
Les pointes d'humanité sont très rares. Une certaine remise en cause affleure dans les propos du pasteur de la mission : "On peut comprendre que des gens vivent heureux sur ces terres, même si tant de maladies les accablent (...) Du moins en allait-il ainsi jusqu'à ce que nous arrivions, et ne leur apportions ces mots de malheur que sont le progrès, le péché, le salut" Mais d'ajouter : "Imaginez un instant que nous quittions les lieux demain, ils retourneraient dans le bush à leur état sauvage"...
À partir de la 3e partie, j'ai regretté la lenteur du récit, les longueurs, les dialogues où les personnages parlent avec un langage qui n'est pas le leur, par ex : Aya "coche toutes les cases" pour s'occuper des mères. Mon intérêt a nettement faibli. L'idée d'Ilyas possédé par un trop plein de récit est pour moi traitée de façon maladroite. Puis le rythme s'accélère, survolant de nombreuses années en quelques pages. La fin m'a paru intéressante et inattendue : l'oncle Ilyas participant aux marches nazies mais déporté pour avoir "souillé une femme allemande". Donc c'est peut-être la construction et surtout le rythme du récit qui m'a gênée...
Finalement j'ouvre ½, essentiellement pour l'aspect documentaire qu'il a revêtu à mes yeux, ce roman qui a le mérite d'aborder le thème de la colonisation en période de guerre.

J'ai adoré le début de La mémoire délavée, ce beau texte poétique à l'écriture mouvante, ces phrases qui se déploient, reviennent sur elles-mêmes, avancent, tourbillonnent comme le vol mystérieux des étourneaux, pour tenter de dire ce qui est simple" à l'endroit", mais complexe "à l'envers".
J'ai été émue par l'évocation de ces déplacements de population, par ce qu'on en sait et plus encore ce qu'on n'en sait pas (comment ont-ils fait pour... ?), ces zones de grand silence transmises aux générations suivantes. Silence par exemple sur l'incarcération du grand-père.
Par la suite, les chapitres reconstituant des scènes, comme celle du mariage des grands-parents, avec de multiples détails supposés ou imaginés, m'ont semblé moins fortes et plus on se rapproche du connu, du vécu par l'auteure, plus mon enthousiasme faiblissait.
J'ai apprécié la notion de "délestage graduel de la culture originelle" qui élimine ce qui ne sera pas, pense-t-on, utile mais plutôt encombrant pour l'avenir des enfants, par exemple la langue, et dont on ne se doute pas que c'est un appauvrissement. Il en a été ainsi, hélas, pour toute culture traditionnelle.
J'ouvre ¾ ce texte poétique, sincère, émouvant, joliment illustré.

"Le soleil des indépendances" : un titre prometteur mettant l'éclairage sur les Indépendances avec un I, comme une période unique de l'Histoire.
J'ai adoré les premières pages : l'évocation de ce mort dont l'ombre marche jusqu'à son village natal. J'ai aimé les expressions uniques, comme une langue à part mais que tout le monde comprend "il avait fini", il "n'avait pas soutenu un petit rhume", tous ces euphémismes pour dire la mort de façon anecdotique et légère.
J'ai aimé le ton du conteur s'adressant à son lecteur/auditeur.
Par la suite...
Je suis ennuyée car ce roman contient tout ce que j'aime : de l'humour, de la dérision, de l'ironie, un vocabulaire extrêmement riche, une prose rythmée, des personnages pittoresques. Mais je me suis peut-être lassée du ton uniforme, des métaphores permanentes, de ce rythme constant, de cette absence de pause. Si cela confère à l'ensemble une réelle jubilation, j'aurais aimé plus de nuances, de contrastes.
Je reconnais que l'évocation de l'excision, du viol est traitée avec une certaine gravité qui a généré en moi une réelle compassion.
J'ai aimé la distance satirique du narrateur par rapport au contenu : l'explication par le génie (du viol, de la grossesse nerveuse), les travers du socialisme et du parti unique, la théorie du déplacement, cause de tous les maux de l'Afrique pour Sery.
Mais je suis restée bloquée, de façon incompréhensible, au milieu du roman. Impossible d'aller plus loin, malgré des tentatives répétées et même une relecture de certains chapitres...
Texte ouvert à moitié (au sens propre).

J'ouvre en grand Récitatif, cette nouvelle de Toni Morrison (ainsi que la postface de Zadie Smith) pour son originalité, sa force, le trouble que cela suscite, et ce, pour deux raisons :
Tout d'abord, j'avoue avoir lu en me disant clairement au départ qui est noire et qui est blanche, puis, sans me le formuler vraiment, en me disant qu'il y a des trucs qui ne collent pas tout à fait, même si, après tout pourquoi pas... Qui ne collent pas à quoi ? Àma façon de me représenter la Noire, la Blanche, aux préjugés qui sont les miens (et sans doute ceux de beaucoup d'autres) puisque Toni Morrison en joue en permanence pour déstabiliser le lecteur. Cela amène à une prise de conscience que l'analyse de Zadie Smith renforce.
Par ailleurs, la scène concernant Maggie est troublante puisqu'il y est question de cruauté et de culpabilité, au point de semer le doute sur ce qui s'est réellement passé. Une explication est avancée par Twyla : "Maggie c'était ma mère qui dansait" et un lien établi entre elle et Maggie. "Je savais qu'elle ne hurlerait pas, qu'elle ne pouvait pas, exactement comme moi et j'étais contente de cela".
Et, que les fillettes aient été actives ou passives, le trouble reste car, entre ce que l'on a fait ou pas fait (les coups de pieds), il y a ce qu'on voulait faire, ou aurait voulu faire. Or, "Le vouloir, c'est le faire."
Pour moi, Zadie Smith résume parfaitement les choses "Morrison veut que nous ayons honte de la manière dont nous traitons ceux qui sont impuissants, bien que nous aussi nous sentions impuissants."
Voilà pour moi l'essentiel, même s'il y aurait beaucoup plus à dire sur ces deux textes très riches.

Les vies d'après : ½
La mémoire délavée : ¾
Les soleils des indépendances : ½
Récitatif : en grand

Philippe
Ce roman de Kourouma, Le soleil des indépendances, n'est pas pour moi une fable, mais un récit historique de l'Afrique subsaharienne postcoloniale, moins de 10 ans après les indépendances. L'incapacité à mettre en place un régime politique stable contribue à opprimer les sociétés tribales et ceux qui avaient collaboré avec les colonisateurs. Le parti unique et la mainmise sur l'économie ont bloqué la société naissante.
Sery le compagnon de captivité de Fama, à tout compris, "les malheurs et les guerres en Afrique sont dus aux migrations dont les colonisateurs sont responsables". "Les étrangers sont responsables de tous les maux". "Nos étudiants et nos intellectuels nous ont dit de chasser les français, mais sans les français pas de travail".
Aujourd'hui, 65 ans après les indépendances des Pays d'Afrique subsaharienne, rien n'a changé. L'instabilité politique conduit ces pays à demander une aide, non désintéressée à la Chine et à la Russie, comme au 19e siècle à l'Angleterre et à la France. Les mêmes causes produisent les mêmes effets. Ils n'ont rien appris de leurs histoires coloniales. Les peuples souffrent, migrent en grande majorité en Afrique subsaharienne et peu vers l'Europe (3% des subsahariens vivent à l'étranger, 70% dans un autre pays de la région et 15 % en Europe). L'auteur, né en Côte d'Ivoire, pays des Ébènes dans le livre, vivait au Togo.
Dans ce roman politique, je ne vois que constat, pas de proposition de solution et pas de note d'espoir. Dommage.

J'ai pris du plaisir à lire Les vies d'après ce roman, comme le roman Paradis que j'avais lu en 2021 quand Gurnah a obtenu le Nobel de littérature.
Les destins croisés de Ilyas et de Hamza, enrôlés volontairement pour l'un, et après rapt d'esclave pour l'autre, dans l'armée coloniale allemande de l'Afrique de l'Est au début du 20e siècle, m'a intéressé. Le contexte historique de cette région dont je ne connaissais que le nom Tanganyika, deviendra une partie de la Tanzanie, pays de naissance de l'auteur, né en 1948, devenue indépendante en 1961.
La construction de l'intrigue est excellente, et l'écriture précise d'un universitaire anglais.
"La vie d'après" pour les deux mercenaires de l'armée vaincue est bien différente : Hamza blessé reste au pays, se cache, s'intègre progressivement et épouse la sœur de l'autre Afiya. Ilyas migre en Allemagne, y fera sa vie sans jamais donner de nouvelles à sa sœur qui le pense mort au combat. Il épouse une Allemande, aura des enfants, sera pro-nazi en militant pour la restitution des colonies allemandes perdues au Traité de Versailles mettant fin à la Première Guerre Mondiale. Il sera interné et mourra en camp de concentration pour avoir enfreint les lois raciales de 1935 en ayant des relations interdites avec une aryenne : un comble pour les choix de Ilyas !
Je suis ravi que l'on m'ait donné l'occasion de faire cette lecture estivale.

Les soleils des indépendances : ½
Les vies d'après : en grand
La vie et demie : fermé

Marie-Thé
J'ouvre à moitié La mémoire délavée qui m'a plutôt déçue : je trouve qu'il y manque un je ne sais quoi, quelque chose qui le fasse "décoller", ça reste plat, tout paraît contrôlé ; j'ai l'impression que l'auteure voulait s'appliquer à rendre une bonne copie... Peut-être ne voulait-elle pas faire de vagues ; d'ailleurs n'a-t-elle pas peur de l'eau ?
Le sujet de ce récit m'interpellait pourtant, l'histoire des coolies venus depuis l'Inde pour remplacer les esclaves noirs, a été exactement la même à l'île Maurice et à la Martinique. D'accord, La mémoire délavée raconte l'histoire douloureuse de la famille de Nathacha Appanah, son histoire dans la grande histoire. Je me suis d'ailleurs parfois emmêlée entre trisaïeul, bisaïeul, aïeul...
Mais où est l'effervescence, le foisonnement, la langue savoureuse, la violence aussi, que l'on trouve par exemple chez Raphaël Confiant dans Case à Chine, relatant aussi des histoires particulières dans la grande histoire...
Ceci dit, dès le début j'ai été interpellée par le vol des étourneaux, suivant comme les humains "des couloirs de migration"..., leur murmure secret, leur communication à la tombée du jour. Et puis bof à la fin, c'est devenu lassant. (J'aurais préféré une allusion au dodo, cet oiseau endémique de l'île Maurice et disparu depuis longtemps par la faute des humains).
J'ai pensé en lisant ce récit aux recruteurs qui exploitent les migrants.
Je retiendrai encore l'importance de la transmission, la transmission orale des origines, pas de généalogie. Cependant, très intéressant, l'auteure met l'accent sur le peu d'importance qu'attachaient ses ancêtres à la mémoire de leurs prédécesseurs : vivant dans des conditions si difficiles, "comment croire qu'on peut être un souvenir précieux, une mémoire à transmettre ?" "Respecter les coutumes et les traditions de notre communauté mais pas forcément connaître ceux qui les avaient léguées." Je relève encore cette "image proprette" qu'a Nathacha Appanah de ses ancêtres, c'est une "mémoire délavée".
Passage vraiment invraisemblable (p. 46) : le trisaïeul de l'auteure affecté au domaine sucrier, fin 19e, travaillait dès 6h, prenait un petit-déjeuner à 8h, avait une pause entre midi et 14 h, rejoignant alors ses camarades ou sa femme, au foyer en fait. De quelle époque parle-t-on ici ???
Je relève des phrases fortes, comme : "Les enfants disparus ne s'effacent pas." Ou des images, l'eau noire de l'océan Indien vue comme une menace, de la perte de son "indianité".
J'aime la mer rassurant la mère, les mots tristes du grand père écourtant son séjour en Inde : "Il y a trop de misère là-bas, trop de chagrin. Je voulais rentrer chez moi."
Si de génération en génération, on gravit un peu "l'échelle sociale", l'arrachement des grands-parents à la plantation et ses conséquences m'ont été difficiles à supporter : mise au ban, trahison - le grand-père les a intégrées.
Je retiens encore l'importance de la couleur : "être claire de peau (...) la couleur avant le caractère"...
À noter, les moments chaleureux avec parents et grands-parents réunis, le portrait de la grand-mère secrète et superstitieuse, généreuse et méfiante : "nous protéger contre ce qui ne se voit pas (...) contre le dehors." Étonnant encore, la grand-mère "avait intégré...que sa langue maternelle était une langue mineure et inférieure." Le dominé finit par croire que ses dieux ancestraux sont inférieurs aussi (pour les examens il valait mieux prier la Vierge Marie).
Importante est la force des liens familiaux : un exemple parmi tant d'autres, la mère un peu "magicienne" qui guérira son fils de la polio... Importance du silence encore qui dit beaucoup.
Triste est la fin : "je ne suis pas restée longtemps (...) Le souffle de la mort"... Mais c'est grâce aux grands-parents de Nathacha Appanah que ce récit, ces mots, existent.
Finalement, même si je garde mes réserves du début, je trouve que ces pages renferment tendresse et émotion, précieuse transmission...

La mémoire délavée : ½

Chantal
La première partie de La vie et demie m'a enchantée, transportée ailleurs ! Je lisais un conte africain magistralement écrit, avec l'imaginaire, le réel, le faux, le vrai mêlés ; les personnages, vivants, morts, re-vivants ; les lieux vrais et fantastiques ; les bruits, les couleurs… : on est en Afrique, rien de notre froid rationnel !
Et, omniprésente, la réalité cruelle et tordue des "puissances étrangères qui fournissent les guides providentiels et les forces spéciales", avides de continuer de profiter des richesses de leurs anciennes colonies. La Françafrique ! Nous !
L'humour terrible couvre la description de la violence et la douleur récurrentes, les massacres des étudiants qui se rebellent, et Martial le chef résistant, tué et découpé, qui revient encore et toujours fantôme au demi-corps, qui recrée perpétuellement les opposants aux dictatures qui se succèdent. Quel talent !
J'ai noté le passage, étrangement "actuel", des livres brûlés (pendant 9 ans, 9 mois, et 11 jours !) : brûlés parce qu''ils contiennent les mots "enfer", "douleur", "fesses". Les dictatures reprennent toujours les mêmes procédés, "si on n'est pas craint on n'est rien" !!, dit le chef présidentiel.
Puis la deuxième partie, c'était trop ! Je l'ai lue, oui, mais j'ai tout mélangé ! Les personnages qui changeaient de noms, les vrais les faux, donc je n'ai pas eu l'engouement du début, même si je voyais bien la satire sous-entendue. J'avais l'impression qu'il me manquait "l'africanité" !
Mais tout de même quel talent ! Je l'ouvre à ½.

J'ai aimé lire Les vies d'après : une lecture qui m'a entraînée dans une Afrique colonisée, période bien avant celle de Labou Tansi. Les réalités décrites ici sont tout aussi violentes, les souffrances des populations tout aussi grandes, mais... j'ai trouvé une écriture très "européenne", très classique. L'auteur n'écrit pas en "Africain", mais en "Européen" qu'il est, puisque éduqué, formé au Royaume-Uni. Ma lecture a donc été fluide, tranquille, le texte coule, comme une rivière, loin des tumultes de Labou Tansi !
L'histoire entremêlée d'Ilias et d'Hamza et de leur famille est quasiment présentée de manière chronologique, on ne s'y perd pas, parmi les guerres, les massacres incessants, un peu comme à la lecture d'un manuel d'histoire : je m'attachais plus à ces deux jeunes hommes, à leur vie, plongée dans la "grande Histoire". Et, j'ai re-découvert cette grande Histoire dont je ne connaissais que des bribes (plutôt françaises). J'ai regardé les cartes de l'époque, tous les pays d'Afrique découpés et colonisés par tous les grands pays européens, chacun voulant sa part du gâteau, pour le pouvoir, et surtout les ressources !
J'ai noté bien sûr la (non) place des femmes qui subissent (j'ai écouté sur France Inter les admirations littéraires d'Alain Mabanckou, sur Mariama Bâ, une écrivaine africaine féministe au début 20e siècle).
Ce livre m'a plu, je mets un bémol à cause de la fin du roman que l'auteur a "expédiée" à mon avis ! Le petit Ilias qui part à la recherche du tonton Ilias dont on est sans nouvelles, émigré en Allemagne, devenu nazi, puis envoyé en camp de concentration pour avoir, lui noir, couché avec une aryenne. Bof.
Donc je l'ouvre aux ¾.

La vie et demie : ½
Les vies d'après
:
¾

Cindy
Mauvaise pioche avec Sony Labou Tansi : trois pages au début et deux au milieu ont été insupportables ! Cette cruauté qui est racontée ne sert à rien dans une réflexion globale africaine avec des descriptions d'une horreur ! On les connaît et pas la peine de les lire ! Je veux oublier ! J'en fais encore des cauchemars. Et pourquoi avoir choisi ce livre ?

La vie et demie : fermé

Edith
J'ai lu les quatre livres proposés, lus à des degrés divers d'intérêt.

Ainsi, avec un plaisir de texte et une motivation soutenue pour Mémoire délavée de Natacha Appanah. Le motif des étourneaux évoque pour moi la difficulté à trouver une forme qui convienne à son récit, aux formes toujours mouvantes telles que représentées dans le livre et illustrées par quelques photos, un langage à fouiller, des émotions non transmises, perdues, à inventer pour traduire la mouvance du souvenir "délavé", instable, silencieux… Et avec des changements de formes pour ces oiseaux migrateurs (comme la famille de Appanah, migrants coolies indiens). J'ouvre en grand.

Ce fut une découverte agréable, celle de Mia Couto et son roman Terre somnambule, dès les premiers chapitres, diminuant en intérêt pour ma part du fait de la construction. La couverture est intrigante, sombre présage d'un monde abimé. Je l'ai lu en premier dès début juillet ; j'ai commencé à le relire pour rafraîchir ma mémoire "oubliée" du fait je pense de la narration alternant les deux récits... Chaque chapitre avait tendance à "recouvrir" le chapitre précédent, comme l'annulant. La construction ne m'a pas convaincue car elle me détournait de l'avancée du destin de Tuahir et Muidinga, un "vieux et un gosse s'en vont sur la route" - ces deux personnages que j'avais adoptés d'emblée et qui m'évoquaient le duo père et fils du roman de Cormac McCarthy La route : je ne voulais pas les abandonner au bénéfice d'une autre intrigue.
Les cahiers m'ont embrouillée : je compte sur le groupe pour - comme le précise la quatrième de couverture - que Kindzu livre la clé de leur destin.
J'ai apprécié l'avant-propos "Naissance d'une langue" et j'ai savouré l'invention des mots ainsi que les trois citations : Croyance des habitants de Matimani, Parole de Tuahir et Platon à l'orée du premier chapitre ; elles collent bien au propos du livre. J'ouvre à demi.

Sony Labou Tansi et son roman La vie et demie m'ont agacée et intriguée et j'ai poursuivi la lecture pour l'arrêter p. 77 par manque de disponibilité et je le regrette. Je voulais du plus "facile".
Ce roman un peu foutraque aurait pu me plaire par l'outrance que j'aime parfois lire dans des revues (Charlie Hebdo) et que j'apprécie aussi dans certains spectacles.
L'auteur adopte un mode particulier de récit où les descriptions de l'horreur, de la violence des propos et des situations sont dans la surenchère. Un grand guignol des horreurs, parti pris de l'auteur, soutenable pour moi-même car c'est une métaphore, malgré une lassitude réelle et ressentie et ci-dessus évoquée. Soutenable si l'on accepte (et j'en ai accepté un peu) l'histoire de chaïdana et la démonstration de la dictature jusqu'à l'absurde. J'imagine ce texte sur scène car l'auteur est aussi dramaturge : costumes, musiques, personnages bariolés…, et là c'est moi qui m'emballe !
Pour ce livre-là, un gros regret de l'avoir abandonné par lassitude certes, mais le retour que vous en faites me donnera peut-être le courage de le reprendre.
Pour ce livre aussi, je n'ai pas pris le temps d'aller consulter l'importante documentation fournie par Voix au chapitre. Merci pour ces découvertes.
Ouvert à demi pour l'espoir ressenti d'un texte "si peu accueillant".

Un intérêt pour l'histoire pour Les vies d'après où je me suis attachée aux personnages et à leur devenir. C'est un roman classique un peu déstabilisant dans sa construction, d'où peut-être le titre. Dans la quatrième partie, Khalifa, Ilyas, Hamsa Bi-Asha, Afia et Ilyas fils de Khalifa, se retrouvent dans la même unité de lieu pour une fin du récit dévoilant l'histoire de Ilyas le frère.
J'ai apprécié de connaître le contexte historique, de découvrir une guerre colonisatrice double, anglaise et allemande, inconnues de moi. Je n'ai pas pris le temps de lire les suppléments concernant l'auteur, dommage.
Le vocabulaire, simple, inclut des mots en langue des héros, mais que j'avais du mal à prononcer. Ce roman en anglais, traduit donc en français, nous donne des mots de la culture de l'auteur, agréable bien que difficile à lire.
La couverture est-elle évocatrice d'un récit colonial dès les premiers chapitres ?
Je ne savais pas que cet auteur avait reçu le prix Nobel de littérature.
J'ai aimé ce classicisme littéraire, plus confortable après le livre de Mia Couto (à la très jolie poésie des mots inventés, le travail remarquable de la traductrice dit le commentaire) et surtout après Sony Labou Tansi : fatiguant !!!
Ouvert aux ¾.

L'écoute en podcast d'Une si longue lettre Mariama Bâ, je l'ai savourée… en fermant les yeux. C'est le récit classique d'une femme qui se laisse séduire par un bel homme et qui est "trompée"(classique) par ce dernier et qui, de ce fait, se détermine lors de son veuvage et, bien que courtisée, et sensible à cette approche par un homme de bien qui l'a aimée jadis, elle refuse cette nouvelle alliance. Le récit est donné sous la forme de lettres échangée avec une amie.
Grand ouvert car ce récit théâtralisé, avec des voix d'Africains rendent le texte plus présent.

De ces 5 découvertes et à part Appanah, je n'offrirai pas ces livres pour le plaisir de lecture que j'ai ressenti, mais surtout pour le plaisir de la découverte d'une littérature et d'auteurs ignorés auparavant.

La mémoire délavée : en grand
Terre somnambule : ½
La vie et demie : ½
Les vies d'après : ¾

Une si longue lettre
: en grand


LES LECTEURS du nouveau groupe parisien
réuni le 12 septembre 2025

Cliquez pour lire leurs avis sur les différents livres

AudreyChristineFrançoise H Jean-Paul
LahcenMargot Monique M Nathalie

Françoise H
J'ai beaucoup aimé La vie et demie parce que son auteur s'autorise de nombreuses libertés. Il emploie un style nourri d'inventions langagières et sous-tendu par un humour ravageur. Il fait le portrait d'une folie celle d'un État imaginaire d'Afrique nouvellement indépendant dont le destin le conduit à l'enfer (une dynastie d'autocrates, des citoyens abandonnés à leurs conditions misérables, des guerres auxquelles se mêlent les puissances étrangères). La vie est demie est un livre difficile à lire à cause du sujet (la violence omniprésente), de l'histoire (enchaînement de nombreux faits) et des procédés de narration (intervention de revenants, invention de personnages qui changent d'identités) mis en scène par Sony Labou Tansi. Et pourtant c'est une formidable fable sur la dictature et sur la capacité des peuples à résister à l'oppression. J'imagine qu'une pièce de théâtre lui donnerait toute sa puissance tragi-comique. Je l'ouvre en grand.

La vie et demie : en grand

Audrey
J'ai trouvé La vie et demie d'une puissance extraordinaire. J'ai été très intéressée par la place qu'il fait au corps dans son récit et ça m'a beaucoup interrogée. Dès les premières lignes, il nous met au contact d'un corps, celui d'une figure de l'opposition, mis en pièces par le tyran suprême et avec la plus grande des cruautés. Un corps meurtri, martyrisé, dépecé... Mais... ça m'a fait penser à du Tarantino, c'est-à-dire que d'office on sent que ça va se passer ailleurs. Le corps se retrouve d'emblée comme minimisé, comme si l'auteur le réduisait lui-même en bouillie pour mieux mettre en avant ce qui peut en émerger. De ce corps en loque, émerge en effet la voix de Martial, qui devient une figure de l'opposition au pouvoir, une voix de la résistance, plus forte que le corps lui-même, elle continuera à vivre bien que sans corps. Finalement le corps semble réduit à une part infime de l'identité, une part non essentielle à la vie.
La parole devient inextinguible, chez Martial notamment : sa parole s'affiche sur les murs et prend la forme de traces, de mots ineffaçables. Et là je ne peux m'empêcher de faire le parallèle avec le livre que j'ai entre les mains, celui de Sony Labou Tansi, qui va circuler de mains en mains et laisser une trace ineffaçable. Il devient lui aussi la voix de la dénonciation, de la critique du pouvoir.
Le livre m'a beaucoup fait penser à Rabelais par son outrance, qui devient fable burlesque par moment, par sa surenchère qui déborde d'imagination foisonnante.
J'ai trouvé aussi intéressant le double positionnement du regard du narrateur, consécutivement positionné à l'extérieur du palais du tyran, puis à l'intérieur : au tout début du livre il se place à l'extérieur du pouvoir en nous donnant à voir d'emblée le pire du pire. L'auteur se place alors du côté du peuple, du lecteur lambda ou de la victime, c'est-à-dire du côté de l'être abasourdi par la somme des horreurs, des crimes, des humiliations commises. On en est à la première page et on se demande comment on va pouvoir dépasser cette horreur. Mais en se positionnant ensuite du côté du pouvoir, à l'intérieur du palais du tyran, il nous fait entrer là où se fabrique sans cesse l'invention de l'horreur. Le tyran est toujours capable d'inventer pire, de repousser la limite jusqu'à l'absurde, jusqu'à l'invraisemblable. Sony Labou Tansi au fond, par le choix de sa fable outrancière, délirante parfois, traduit le réel, le reflète. Il se le réapproprie, il le transcrit et ainsi touche à mon sens au cœur du vrai et nous place au cœur du réel ! Comment mieux rendre le délire d'un pouvoir tyrannique, que par cette fable délirante ? Ce livre c'est ce qui demeure, ce qui perdure, au-delà de la succession des tyrans, comme les mots de Martial et ses traces noires. Sony Labou Tansi est celui dont les gouvernements absurdes qu'il immortalise ici dans leur folie destructrice ne se débarrasseront jamais... comme Martial que nul ne peut faire taire, Sony Labou Tansi mobilise les foules (presse, lecteur, écrivains admiratifs). Ses excès sont savoureux, étourdissants. Dans ce livre, on fait entrer des déserts des jardins foisonnants dans une seule pièce et on écrit à la main des lettres qui font 142 000 et quelques pages, un seul homme se déplace avec des centaines de milliers de gardes pour assurer sa sécurité, des villes et des vies et des pays entiers se construisent et se détruisent en un claquement de doigts. On touche au fantastique par moment mais… c'est surtout extrêmement efficace !
J'ouvre ce livre en grand. (Voir ›analyse détaillée d'Audrey)

J'enchaîne ici avec le livre de Natacha Appanah que j'ai lu à la suite de La vie et demie dans lequel j'ai trouvé comme un écho au précédent. Je la cite p. 18, quand elle parle du numéro qui est attribué à ses aïeux qui arrivent à l'île Maurice "ces numéros me bouleversent je sais qu'il devait les retenir comme laisser-passer (...) ce sont ces chiffres qui les identifient d'abord et avant tout, pas leur nom qui est trop compliqué, pas leur visage qui ressemble à tant d'autres, pas leur langue que personne ne comprend vraiment. La déshumanisation immédiate que provoque l'attribution d'un numéro à un être humain ne m'échappe pas". Cela la rejoint cette idée que le corps ne suffit pas à dire qui l'on est... ici dans l'indifférence on "devient" quelqu'un, au milieu de la masse de ces corps entassés et transportés puis exploités, une fois numéroté, tamponné... Et p. 138 un très beau passage sur son souhait que la mort et la vie s'équilibrent dans une sorte de justice qui rendrait la mort à l'image de la vie de ceux qui partent : "j'aimerais parfois que l'existence soit un matériau à peser sur une balance. Une existence avec une masse, un volume calculé à partir d'actions, d'ambition, de labeur, d'adversité. Une balance qui équilibrerait et vie et mort, à l'image de celle de la justice et ainsi, l'existence de mes grands-parents aurait eu certainement une fin douce et sereine, une mort heureuse". Cela résonne à nouveau comme un écho du livre La vie et demie et me renvoie à tous ces hommes et ces femmes tués de manière arbitraire, gommés, évincés malgré leur labeurs leurs émotions, leur adversité, leurs ambitions, par ces tyrans évoqués par Sony Labou Tansi.
Dans un texte (et dans un monde !) où la justice n'est pas même évoquée ! En revanche dans la forme on est bien loin du texte précédent. L'écriture de Natacha Appanah est d'une grande douceur, d'une extrême poésie et j'ai beaucoup apprécié cette écriture qui se cherche, qui se révèle sous nos yeux, avec cette image superbe du vol des étourneaux. J'ai aimé ce texte qui s'assume dans sa recherche et son tâtonnement, son émotion, sa fonction intime souvent très émouvante. Et sa dimension politique bouleversante. Et puis c'est un beau livre : du beau papier, de belles images. Ce livre met de la beauté et de la poésie là où, pendant des décennies, se sont accumulés labeurs et humiliations.
J'ai trouvé que ces livres se répondaient beaucoup l'un l'autre. J'ouvre celui de Appanah aux ¾.

La mémoire délavée : ¾
La vie et demie : en grand

Monique M
La mémoire délavée : Je suis très heureuse d'avoir découvert Natacha Appanah, femme écrivain habitée par un imaginaire poétique, un univers émotionnel et spirituel intense nourri par l'histoire de ses ancêtres et ses racines indiennes qui lui insufflent me semble-t-il, une prescience, une relation à l'invisible, l'inconscient, l'indicible, si rare chez les individus et qui est naturel, évident chez elle. Son écriture poétique, vibrante fait résonner un passé inconnu, celui des traces que ceux qui nous précèdent ont laissées en nous à notre insu. Et elle le relate de façon vivante, légère, poétique, humaine tout en étant très juste. On sent l'éprouvé, le vécu. J'aime ce questionnement, cette façon intérieure intense, infiniment juste qu'elle a pour raconter l'histoire de sa famille, cette recherche qui est à la fois personnelle et universelle. Cela fait de ce livre très émouvant, un livre mémoire. À travers l'histoire de ses grands- parents, elle restitue l'histoire de ces coolies indiens abusés par des recruteurs sans scrupules qui, après l'abolition de l'esclavage, sous promesse de ressources mirifiques, ont signé des contrats malhonnêtes, les engageant à travailler dans les champs de canne à sucre de l'île Maurice pour des salaires de misère. 1500 000 coolies dont 85% d'Indiens seront engagés dans les colonies britanniques de 1834 à 1920. Même phénomène dans les colonies françaises de la Réunion, la Martinique, la Guadeloupe. Natacha Appanah décrit très bien la vie des coolies dans les plantations, la préservation de leurs coutumes, leurs rituels, leur fierté (le grand-père victime de l'injustice du contremaître, le frappe et est condamné à la prison), leurs médications ancestrales : pansements à base de plantes, bains et pouvoir de régénération de la mer.
Son art, sa capacité à appréhender l'invisible, lui confèrent des associations d'idées, des rapprochements insolites extrêmement justes et puissants, par exemple le parallèle qu'elle fait entre la mémoire diffuse des événements passés et le vol groupé des étourneaux, le soir au crépuscule, dont l'éloignement ou la proximité sont semblables à l'effet diffus de la mémoire, sa présence ou sa dissolution dans l'espace et le temps. Elle va plus loin encore lorsqu'elle parle du murmure de ces oiseaux, de leur communication bec à bec, de leur souci eux aussi de migration vers des régions plus accueillantes, soulignant ainsi ce besoin, cette nécessité universelle qu'humains ou animaux ont de se protéger pour survivre. Elle a des phrases d'une fulgurante vérité et humanité, elle dit par exemple :"Tant qu'il y aura la mer, la misère, des dominants et des dominés, il y aura des migrants et des bateaux pour transporter les hommes vers un avenir meilleur". À un moment, elle parle de cet enfant perdu par ses grands-parents lors de leur arrivée à Port Louis et je ne peux m'empêcher de penser à ce bébé rejeté par la mer depuis un esquif de migrants sur une plage au Moyen-Orient. L'Histoire, L'Histoire des hommes qui perdent ce qu'ils ont de plus cher et qui se répète éternellement de génération en génération.
J'ouvre en grand.

En revanche je n'ai pas réussi à aller au-delà de la page 70 pour La vie et demie dont la violence m'a déconcertée. Après avoir entendu les avis élogieux d'Audrey et Françoise sur ce livre, je pense que je suis passée à côté.

La mémoire délavée : en grand
La vie et demie : fermé

Lahcen (qui a lu les 4 œuvres de l'été)
Le Soleil des Indépendances
d'Ahmadou Kourouma m'a plongé dans un véritable voyage onirique à travers les turbulences des pays africains post-indépendance. L'auteur adopte un ton caustique, parfois sardonique, pour raconter les errances de Fama, personnage tragique tiraillé entre tradition et modernité. À travers son récit, Kourouma critique férocement les rites ancestraux vidés de leur sens, les séquelles de la colonisation et la dérive autoritaire des dictateurs africains. J'ai été dérouté par la langue de l'auteur, mêlant français classique et tournures africanisées, ce qui a parfois rendu la lecture difficile. Néanmoins, l'histoire m'a captivé, notamment grâce à la force et la profondeur du personnage de Salimata. Kourouma y déploie toute sa puissance d'écriture pour dénoncer avec intensité l'horreur de l'excision et la condition féminine. La douleur intime de Salimata m'a profondément touché, incarnant la voix de milliers de femmes réduites au silence. Le style est exigeant, mais la richesse du propos mérite l'effort. Kourouma ne se contente pas de raconter : il accuse, il expose, il secoue. Ce roman m'a donné envie de découvrir d'autres œuvres de cet auteur engagé et lucide. J'ouvre ce roman au ½.

La vie et demie de Sony Labou Tansi m'a frappé d'abord par l'omniprésence de l'absurde, poussé ici à son paroxysme. Chaque page semble baigner dans une violence sanglante, qui finit par saturer l'imaginaire du lecteur. Pourtant, au détour de certaines phrases, j'ai découvert des fulgurances philosophiques qui donnent une profondeur inattendue au récit. Ces éclats de pensée auraient pu ouvrir des respirations, mais ils restent étouffés par l'excès de cruauté et d'horreur. L'histoire de la première Chaïdana, qui aurait pu me captiver, s'est transformée en un chemin monotone où mon intérêt s'est progressivement éteint. J'ai senti la volonté de l'auteur de choquer et de dénoncer, mais la démesure a fini par m'ennuyer. En refermant le livre, je n'ai retiré aucun plaisir de cette lecture, seulement une impression de trop-plein et de lassitude. Je ferme ce livre.

La mémoire délavée de Natacha Appanah est un livre profondément vrai, porté par la voix sincère et sans détour de Nathacha Appanah. L'autrice se confronte avec une rare honnêteté à son histoire familiale, sans chercher à l'embellir ni à la justifier. Les figures des grands-parents, marqués par l'exil, le silence et la douleur, sont d'une humanité bouleversante. À travers eux, Appanah donne chair à une histoire méconnue : celle des coolies, travailleurs sous contrat venus d'Inde, souvent oubliés des récits postcoloniaux. Ce texte est bien plus qu'un témoignage : c'est un essai vibrant sur la mémoire, la transmission, et les tabous familiaux. L'autrice montre comment certaines générations préfèrent effacer ce passé pour protéger, ou contrôler, celles qui suivent. La Mémoire délavée réussit à faire surgir l'histoire des marges, dans une langue sobre, lumineuse, et d'une grande justesse émotionnelle. J'ouvre ce livre en grand.

Les soleils des indépendances : ½
La vie et demie : fermé
La mémoire délavée : en grand

Margot
La mémoire délavée : une écriture d'un épisode de l'histoire ? (Les coolies, un transport de bétail, l'absence d'identité, de géographie, de terre, de "chez soi" et des fiches administratives sèches) : non. Plutôt une écriture incertaine et en volutes et qu'inuit les circonvolutions de la flèche du temps. Celle qui traverse les lignées et parvient jusqu'à vous, jusqu'à nous, lecteurs, jusqu'aux larmes. Une écriture de la reconstitution ? (À travers les parents, les histoires racontées, la maison des grand parents) : non plus. Une écriture de la trace, de l'emprunt et de l'absence, jusque dans le creux et l'espace de ces enfants disparus à l'arrivée. (P. 46 "Le souvenir des enfants égarés a tout de même résisté à l'effacement (…) un fantôme, une rumeur qui continue à passer de bouche en bouche. Comme le murmure des étourneaux." L'écriture d'une fiction ? Oui, résolument : p. 45, "Il faut me pardonner parce que ce n'est qu'une hypothèse, et là, (…) c'est l'histoire que je choisis." Et elle donne le meilleur de la fiction : elle l'ancrer dans une absence, un silence, une incompréhension, une intrigue. Et toujours dans ce pas de côté que franchit Natacha Appanah, dans les silences de ses grands-parents mis au ban, et qui malgré ce bannissement donnera naissance à la maisonnée des souvenirs d'enfance et à ce grand-père qui trouve, retrouve l'envergure d'un personnage. Elle ancre la fiction dans le ciel et les paysages des vols d'étourneaux, dans l'incertitude de ce qu'elle en écrira. P. 16 "Quand revient le temps des étourneaux, mon visage est souvent levé vers le ciel crépuscule dans l'illusion d'y apercevoir avec clarté et sincérité mon propre récit de migration…". Les étourneaux marqueront le mouvement de cet éternel retour de sa propre histoire. Dans le vol incompris de ces milliers d'ailes vont s'incarner les récits, la silhouette des grands parents, les champs de canne à sucre, les babils de la communauté, l'auvent de leur petite maison et ils vivront tous, là, le temps d'une saison des oiseaux. Ces oiseaux qui donnent l'espace immense à ce récit tremblant et qui frissonne à chacune de ses pages. Une merveille ! Et une lecture aux larmes. Ouvert en grand.

La mémoire délavée : en grand

Jean-Paul
Je suis toujours assez dubitatif quand un ouvrage est bâti, même si cela peut dépasser ce cadre, sur un sujet intimiste et personnel, comme La mémoire délavée.
Natacha Appanah nous fait découvrir au travers de la vie de ces ancêtres une histoire méconnue de la "fin de l'esclavage" qui conduit à remplacer cette main-d'œuvre de l'ile Maurice par des "engagés" indiens appelés à les suppléer dans les plantations. Ces engagés fuient la misère de leur pays, espérant trouver de meilleures conditions de vie.
L'autrice ressuscite ses ancêtres, leur redonnant une dignité, eux résumés à un numéro, des sans noms occupés à survivre. Nous les voyons progressivement se faire une place sur cette nouvelle terre, tout en ayant soin de garder leurs traditions et leur croyance.
Ce livre largement autobiographique est porté par une douceur et une grande poésie qui en fait une ode à tous les exilés "tant qu'il y aura des mers, tant qu'il y aura la misère, tant qu'il y aura des dominants et des dominés, j'ai l'impression qu'il y aura toujours des bateaux pour transporter les hommes qui rêvent d'un horizon meilleur."
Malgré ma réticence de départ, j'ouvre ce livre entre ¾ et entièrement.

La mémoire délavée : entre ¾ et grand

Nathalie (avis transmis)
La vie et demie a été une lecture plus que laborieuse. Un vrai pensum. Je n'ai jamais autant souffert pour une lecture. J'ai bien compris le message de l'auteur de ce conte horrible que je comprends parfaitement.
Certains éléments m'ont fait penser à Rabelais, auteur que j'aime énormément, comme les nombres astronomiques avec énumération diverses. Mais si cela peut prêter à sourire au début, on se lasse du procédé qui est usé jusqu'à la corde. L'énumération des Jean par exemple devient vite ennuyeuse. Sans compter la violence permanente que l'on doit subir à presque toutes les pages.
Aucune lumière dans ce roman, aucun espoir. Aucun des personnages ne m'a accroché, même pas Martial, résistant même dans la mort mais dont le fantôme veut contrôler toutes les femmes de son sang.
Je ferme ce livre que j'ai lu jusqu'à la lie et qui m'a empêchée de lire La mémoire délavée.

La vie et demie : fermé


Littérature africaine

Pourquoi la littérature africaine ?
Nos lectures précédentes liées au "continent noir"
Des expositions
actuelles concernant l'Afrique
Une visite guidée
Un film

40 émissions de radio, 40 auteurs classiques

Émissions concernant les auteur.es que nous lisons
Des femmes !


Pourquoi la littérature africaine ? Pourquoi et comment des invités ?


D'où vient cette idée ? Voilà des raisons d'emporter l'adhésion à ce choix de lectures pour l'été 2025.

• Notre ignorance
La découverte cette année d'un roman "classique" soudanais d'un auteur, Tayeb Salih, dont personne dans le groupe n'avait jamais entendu parler, nous prouve qu'il y a donc des classiques à découvrir - ignorants que nous sommes.
Dans le groupe breton de Voix au chapitre, à l'occasion de cette lecture, est mentionné un auteur africain inconnu de nouveau pour la plupart d'entre nous, Chinua Achebe, et son livre Tout s'effondre.

• Tirthankar Chanda et la mine aux trésors de ses émissions
S'ensuit la découverte, en se renseignant sur cet auteur, d'une série d'émissions remarquables de 5 min chacune sur RFI (Radio France Internationale) par Tirthankar Chanda : une série intitulée justement "Littérature classique africaine", et commençant précisément par ce roman d'Achebe (émission d'où est extraite la chouette carte africano-livresque ci-dessus).

Les émissions en moins de 5 min comportent quatre entrées : présentation de l'auteur, situé dans la littérature de son pays, le contenu du livre (que raconte ce roman ?), l'intérêt littéraire du livre (pourquoi faut-il lire ce roman ?) ; on peut écouter les émissions, mais aussi lire le contenu transcrit - pratique !

Les pays représentés sont nombreux : Afrique du Sud, Bénin, Cameroun, Congo, Côte d'Ivoire, Djibouti, Ghana, Guinée, Kenya, Mali, Maurice, Nigeria, Sénégal, Somalie, Soudan, Zimbabwe.
Parmi les 40 romans "classiques" présentés, figurent des auteurs déjà programmés à Voix au chapitre (un gage de qualité ?...). Nous ne partons pas tout à fait à zéro... Voici le détail des livres lus ›ici.

Cette série de 2020 a été suivie d'une autre émission
Chemins d'écriture, consacrée aux écrivains d'Afrique et de la diaspora : une émission toujours très courte chaque semaine, sans interruption depuis, par le même journaliste, Tirthankar Chanda, qui permet d'élargir notre choix.

Mais qui est-il donc ? Tirthankar Chanda travaille à RFI depuis 1994 ; il a également contribué à Jeune Afrique, Le Monde diplomatique, à L'Humanité. Il a enseigné les littératures postcoloniales de l'Inde et de l'Afrique à l'université Paris 8 et à l'Inalco (Institut national des langues et civilisations orientales). Voix au chapitre l'a invité pour la séance de rentrée de septembre après avoir découvert ses émissions
L'été 2018, nous avions expérimenté avec beaucoup d'intérêt la lecture au choix parmi une sélection à notre intention d'une spécialiste de la littérature d'une grande aire géographique : "Littérature chinoise contemporaine" (Chine continentale). La littérature chinoise est mal connue, mais l'Africaine ? Pas un paragraphe dans La bibliothèque idéale de Bernard Pivot. Il est temps qu'on s'y mette !
Quelle chance ! Tirthankar Chanda
a accepté de participer à notre séance du 5 septembre 2025. C'est avec lui qu'ont été choisies les lectures communes pour l'été.

Outre ses émissions centrées sur l'Afrique, ses publications montrent une diversité
de sujets et de médias, par exemple :
- Dans Le Monde diplomatique : "Littérature indienne, quatre mille ans d'engagement social", ou à propos d'un auteur coréen Hwang Sok-yong que nous avons découvert lors de la semaine lecture : "Une sensibilité prolétarienne"
- un album illustré pour les 12-16 ans sur l'Inde contemporaine : Aujourd'hui l'Inde, Casterman-RFI
- aux éditions de l'École des hautes études en sciences sociales : "Édouard Maunick : le chantre de l'insularité et du métissage"
Il ne néglige pas le dernier Festival d'Avignon où il s'est rendu, en profitant pour interviewer les auteurs et comédiens de FRANÇÉ.

Une série estivale du Monde "À la (re)découverte des classiques africains"
Durant tout l'été 2021, Le Monde Afrique a mis à l'honneur les grands livres et les auteurs africains cultes qui ont marqué la littérature mondiale et ont trouvé leur place sur les étagères des bibliothèques de Ougadagou, Dakar ou Bamako comme de Paris, Moscou ou New York. Kidi Bebey qui signe la série dans Le Monde du 10 juillet au 28 août 2021 (avec AFP), est journaliste, éditrice et auteure française, née de parents camerounais. Notre sélection est représentée :
1 : Tout s'effondre, du Nigérian Chinua Achebe (1958), l'hommage à l'Afrique antecoloniale à l'heure de sa désagrégation
2 : Une si longue lettre, de la Sénégalaise Mariama Bâ, (1979), récit et manifeste sur la condition féminine au Sénégal
3 : Amkoullel, l'enfant peul, du Malien Amadou Hampaté Bâ (1991), fresque vivante d'une jeunesse malienne au début du XXe siècle
4 : Un caprice de la nature, de la Sud-africaine Nadine Gordimer (1987), saga visionnaire en Afrique du Sud à l'ère de l'apartheid
5 : Les Soleils des indépendances, de l'Ivoirien Ahmadou Kourouma (1968), roman réquisitoire sur le monde d'après
6 : Marou, de la Botswanaise Bessie Head (1971), un drame qui confronte les sociétés d'Afrique australe à leurs propres démons
7 : La Vie et demie, du Congolais Sony Labou Tansi (1979), un ovni littéraire qui dit la mocherie du monde
8 : Pétales de sang, du Kényan Ngugi wa Thiong'o (1977), le monument des lettres kényanes.
Kidi Bebey a poursuivi sa chronique littéraire africaine dans Le Monde : voir ses nombreuses contributions ›ici

Et elle sera avec nous et Tirthankar Chanda lors de notre séance !

• Une autre série d'été "Voix d'Afrique"
5 épisodes publiés dans Le Monde Afrique, entre le 18 et le 22 août 2025, commencent par Mohamed Mbougar Sarr, écrivain : "L'histoire n'est pas réversible, on ne peut pas défaire des siècles de colonisation".
Nous avions lu de cet écrivain La plus secrète mémoire des hommes, qui sera en février 2026 adapté au théâtre de la MC93 par Aristide Tarnagda. Signalons au même théâtre La vénus noire adaptée par Alice Diop en novembre 2025 (le texte de la poétesse américaine Robin Coste Lewis La vénus noire sera justement publié par Gallimard en novembre).

• Une collection africaine chez Gallimard ? Vous connaissiez ?

On fête cette année les 25 ans de la collection "Continents noirs" de Gallimard, consacrée aux écrivains d’Afrique et de sa diaspora, créée en 1999 et toujours dirigée par Jean-Noël Schifano. Tirthankar Chanda l'a bien sûr reçu au sujet de ces 25 bougies dans son émission Chemins d'écriture (05/01/2025, 04:38).

• Une collection africaine chez Actes Sud ? Vous connaissiez ?
La collection "Afriques" (avec un s) chez Actes Sud a eu pour premier titre Amkoullel, l’enfant peul. Dirigée par Bernard Magnier qui y publia une anthologie intitulée Poésie d’Afrique au sud du Sahara co-éditée avec l’UNESCO, elle s'appellera ensuite "Lettres africaines".
Deux entretiens de Bernard Magnier avec
Tirthankar Chanda
- à propos de la collection "Afriques : "Révolution du regard"
- à propos, plus tard donc, en 2010, , de la collection "Lettres africaines" : "Les littératures africaines sont entrées dans la bibliothèque du monde".


• Négritude, anticolonialisme
Côté essais, notre découverte des
Sœurs Nardal : à l’avant-garde de la cause noire, ou celle de Frantz Fanon, à travers une rencontre Sartre-Fanon lors d'une de nos lectures ou après avoir vu des films récents, nous mettent aussi dans le bain. Voir ›ici.

Des expositions relatives à l'Afrique
Juste quand nous nous intéressons à la littérature africaine ! Actuellement
visibles à Paris, elles ne sont pas dépourvues de liens avec la littérature : "Paris noir" au centre Pompidou, "Mission Dakar-Djibouti [1931-1933] : contre-enquêtes" au musée du Quai Branly, "Wax" au musée de l'Homme, "Corps et âmes" à la Bourse de Commerce. Voir le détail des expos ›ici.

Notre deuxième invitée
Rozenn découvre qu'elle connaissait Kidi Bebey, mentionnée ci-dessus pour une série littéraire dans Le Monde : celle-ci a accepté l'invitation de dernier moment et a ajouté ses éclairages à ceux de Tirthankar Chanda.
Kidi Bebey est journaliste, auteure et éditrice ; son père est le musicien et écrivain camerounais Francis Bebey :
- De 1993 à 2006, elle rédactrice en chef des magazines panafricains d'information pour la jeunesse à Bayard Presse : Planète Jeunes puis Planète Enfants (voir leur histoire ›ICI et une interview de Kidi Bebey à ce sujet).
- Elle a lancé chez Cauris Livres la collection d’albums "Lucy", consacrée à des personnalités historiques originaires d’Afrique : par exemple, le Roi Njoya du Cameroun, Oum Kalsoum, la Reine de Saba, Miriam Makeba (voir interview de Kidi Bebey au sujet de cette collection).
- De 2006 à 2009, elle produit et anime sur RFI l'émission quotidienne Reines d’Afrique, puis enchaîne avec la chronique L'Afrique des femmes diffusée chaque matin sur France Culture.
- Sa fiche ›wikipedia détaille la liste de ses nombreux ouvrages pour la jeunesse (dont Aimé Césaire). En 2016, elle publie son premier roman, Mon royaume pour une guitare (éd. Michel Lafon, rééd. Pocket 2018), inspiré de l'histoire familiale (voir son interview sur RFI par Tirthankar Chanda).
- Elle avait également soutenu une thèse originale en 1991 : La danse et ses exploitations littéraires chez les romanciers sahéliens et bantous
.
- Elle a aussi une expérience d'enseignement et de formation : elle a été institutrice au début de sa vie professionnelle. Elle est intervenue dans des formations (un exemple : en Guinée, sur le livre documentaire)
. Elle a animé des ateliers d'écriture, par exemple en résidence au Musée national de l'histoire de l'immigration en 2020, année où elle a été également invitée à Frankfort. Elle a été en résidence également à Dakar en 2023.
-
Pour en savoir plus sur elle : "LIRE LE MONDE" est une série d'entretiens de Bookwitty avec des auteurs du monde entier, qui dévoilent les coulisses de la création et parlent des livres qu'ils aiment (11 min en vidéo, 23 mars 2017, Kidi Bebey sur youtube).


36 lectures du groupe liées au "continent noir"


Les auteurs africains déjà lus dans le groupe

- 2000 : Amadou Hampâté Bâ (malien), Amkoulled, l'enfant Peul
- 2004 : J.M. Coetzee (sud-africain), Disgrâce
- 2004 : Nadine Gordimer (sud-africaine), Un Amant de fortune
- 2005 : Fatou Diome (sénégalaise), Le ventre de l'Atlantique
- 2006 : Alain Mabanckou (congolais), Verre cassé
- 2007 : Ahmadou Kourouma (ivoirien), En attendant le vote des bêtes sauvages
- 2013 : Cheikh Hamidou Kane (sénégalais), L'aventure ambiguë
- 2013 : J.M. Coetzee (sud-africain), Vers l'âge d'homme
- 2015 : Chimamanda Ngozi Adichie (nigériane), Americanah
- 2015 : André Brink (sud-africain), Une saison blanche et sèche
- 2016 : Ahmadou Kourouma (ivoirien), Les soleils des indépendances
- 2017 : Léonora Miano (camerounaise), La saison de l'ombre
- 2017 : Gaël Faye (rwandais), Petit Pays
- 2022 : Mohamed Mbougar Sarr (sénégalais), La plus secrète mémoire des hommes
- 2022 : Amos Tutuola (nigérian de langue anglaise), L'ivrogne dans la brousse
- 2024 : Tayeb Salih (soudanais), Saison de la migration vers le Nord

Auteurs antillais et haïtiens

- 1990 : René Depestre, Alleluia pour une femme jardin
- 1992 : Simone Schwarz Bart, Pluie et vent sur Télumée Miracle
- 2007 : Raphaël Confiant, Ravine du devant-jour
- 2010 : Dany Laferrière, Comment faire l’amour avec un nègre sans se fatiguer
- 2010 : Patrick Chamoiseau, Chronique des sept misères
- 2013 : Maryse Condé, Victoire, les saveurs et les mots
- 2013 : Aimé Césaire, Discours sur le colonialisme
- 2019 : Yanick Lahens, Bain de lune
- 2019 : Lyonel Trouillot, Kannjawou

Auteurs ou livres en rapport avec l'Afrique

- 1992 : Conrad, Au cœur des ténèbres
- 1997 : Karen Blixen, Le Dîner de Babette
- 2003 : Ryszard Kapuscinski, Ebène : aventures africaines
- 2004 : Jean-Marie Gustave Le Clézio, L'Africain
- 2006 : John Le Carré, La Constance du jardinier
-
2007 : Michel Leiris, L'Afrique fantôme
- 2007 : Russel Banks, American Darling
- 2009 : Barack Obama, Les Rêves de mon père
- 2013 : Jean Hatzfeld, Où en est la nuit
- 2022 : Claire de Duras, Ourika

- 2024 : Léa Mormin-Chauvac, Les sœurs Nardal, préface Alain Mabanckou

Question lauriers internationaux, nous avons lu deux des quatre prix Nobel : Nadine Gordimer (sud-africaine) et John Maxwell Coetzee (sud-africain aussi) ; il nous reste à découvrir Wole Soyinka (nigérian) et Abdulrazak Gurnah (tanzanien), justement au programme de cet été.


Expositions


Avant d'évoquer l'actualité artistique parallèle à nos lectures, rappelons l'existence du MUSÉE DAPPER, émanation d'une fondation, ouvert en 1986, qui organise des expositions, publie des ouvrages visant à mieux faire connaître les arts africains et également des ouvrages de littérature adulte et jeunesse.

Quatre expositions se tiennent précisément à Paris sur le monde noir. En voici successivement la présentation. Avec tout d'abord les 4 affiches et une curiosité : par quels journalistes du Monde ces expositions sont-elles chroniquées ?...


Philippe Dagen, LE critique d'art du Monde, rend compte de toutes les grandes expositions, Le Monde, 20 mars 2025

Roxana Azimi fait des enquêtes sur le milieu de l'art et des reportages pour Le Monde Afrique, 13 avril 2025

Carrément un supplément de 4 pages signées Harry Bellet (deux articles dont interview de la commissaire), Philippe Dagen (deux articles !), Emmanuelle Lequeux et Emmanuelle Jardonnet, Le Monde, 5 mars 2025

Valentin Perez
rend compte de la mode
et cet article est pu
blié dans le supplément M le magazine du Monde, 29 mars 2025

Au Centre Pompidou, "Paris noir : circulations artistiques et luttes anticoloniales, 1950-2000", du 19 mars au 30 juin 2025 : de la création de la revue Présence Africaine à celle de Revue noire, "Paris noir" retrace la présence et l’influence des artistes noirs en France entre les années 1950 et 2000, avec 150 artistes, de l’Afrique aux Amériques en passant par la Caraïbe, dont les œuvres ont rarement été montrées en France. Quelques compléments pour appréhender l'exposition :
- Podcast du musée commentant l'exposition ›ici (59 min ou en 14 séquences), à lire en transcription ›là
-
Interview de la commissaire de l'exposition, Alicia Knock, qui en indique les enjeux, par Valentine Servant-Ulguour, Vanity Fair, 20 mars 2025.
- Présentation de l'exposition en vidéo, 100 min ›ici avec Alicia Knock (commissaire de l’exposition), Florence Alexis et Christine Eyene (conseillères scientifiques de l’exposition), Ernest Dükü, Barbara Prézeau-Stephenson et Anthony Ramos (artistes), animation par Éva Barois De Caevel (commissaire associée), 19 mars 2025.
- Le plan de l'expo ›ici.
  
- Présence Africaine : une revue, une maison d'édition et une librairie. Présence Africaine est une revue panafricaine semestrielle, fondée en 1947 par Alioune Diop, éditée par la maison d'édition du même nom, fondée en 1949, et une librairie du Quartier latin à Paris, 25 bis rue des Écoles. La maison d'édition Présence Africaine est dirigée par la veuve du fondateur, Christiane Diop, puis par la fille du fondateur, Suzanne Diop.

On entre dans l'expo et on voit ce mur...


- Programme du colloque "Paris noir, circulations artistiques et luttes anticoloniales" au centre Pompidou et au musée du quai Branly ›ici.

- Pour finir, voici le début d'un bel article de Paul Bernard-Nouraud, qui exprime ce qu'on peut ressentir : "L’exposition Paris noir laisse manifestement un certain nombre de ses visiteurs à la fois perplexes et désorientés. Pour l’essentiel, la perplexité réagit à l’inégale qualité des œuvres présentées, quand leur accrochage moins strictement chronologique ou thématique que réticulaire favorise la désorientation. Sans nier l’hétérogénéité de l’ensemble ni les difficultés que l’on éprouve à s’y repérer, ce type de réactions trahit en réalité un malaise moins avouable, qui a partie liée avec l’ignorance à laquelle Paris noir confronte la plupart de ceux qui la parcourent, y compris parmi ceux (d’autant plus mal à l’aise donc) qui ont eu l’opportunité d’étudier l’histoire de l’art contemporain – puisque l’exposition embrasse la période 1950-2000.
Autrement dit, au moment même où cette exposition ouvre un horizon, elle découvre pour beaucoup un abysse ; et il est assez probable qu’une telle découverte suscite par suite chez une partie des visiteurs une forme d’agacement en prenant conscience que tout un pan de l’histoire de l’art contemporain ne leur avait pas été montré jusque-là, ni auparavant enseigné." ("Paris noir ou le principe de disparité", En attendant Nadeau, 10 juin 2025).

Au musée du quai Branly, "Mission Dakar-Djibouti [1931-1933] : Contre-enquêtes", du 15 avril au 14 septembre 2025.

Entre 1931 et 1933, la mission traverse 14 pays africains, tous sous domination coloniale à l’exception de l’Éthiopie. Elle acquiert 3 600 objets.
Michel Leiris participait à cette mission. Nous avons lu en 2007 son livre L'Afrique fantôme. dont le premier titre était De Dakar à Djibouti (1931-1933).
Nous avions alors bénéficié d'une visite spéciale pour le groupe (parisien et breton), le 2 juin 2007, de la partie Afrique du musée du Quai Branly, en rapport avec l'expédition que relate Michel Leiris.

L'exposition, une contre-enquête donc, est réalisée avec des experts africains.
- Dépliant de visite ›ici
- Des précisions sur le site du musée ›là, notamment des films dans les villages, réalisés dans le cadre de ces contre-enquêtes, dont voici deux exemples :
- À propos des objets réquisitionnés à Diabougou au Mali, malgré le refus du chef du culte : dans L’Afrique fantôme, Michel Leiris décrit ce rapt à la date du 7 septembre 1931 dans le journal qu’il publie à son retour en 1934 chez Gallimard. Ainsi
le boli en forme de quadrupède toura (bœuf) se trouvait dans le sanctuaire du kono avant d’être enlevé, recouvert d’une patine noirâtre, provenant essentiellement du sang coagulé des animaux qui y ont été sacrifiés ; la vidéo en ligne de 2 min 14 montre les échanges avec le chef de village et des villageois, le directeur du musée national du Mali et ses collègues le 27 mai 2023, ; L'Afrique fantôme est sur la table...

- À Gondar en Éthiopie : la vidéo de 2 min 32 présente la rencontre avec Emmahoy Tiena Kebbede, filmée et conduite en septembre 2024 par Sisay Sahile Beyene, commissaire de l’exposition et professeur à l’Université de Gondar. Emmawayesh est la fille d'ato Bogale et de weyzero Melkam Ayyahou, riche et de lignée noble. Élevée par sa mère, une importante chef des esprits appelés zar à Gondar, Emmawayesh savait lire et écrire en geez et en amharique. À ce titre, elle joue un rôle important dans le recueil d’informations sur les zar auprès de Michel Leiris. Ce dernier entretient une relation ambiguë avec cette femme. Après le départ de la mission, Emmawayesh a succédé à sa mère dans le culte des zar et a assuré la continuité de la tradition jusqu'à sa mort.
- Seule vidéo qui n'est pas en ligne, mais qu'on peut regarder au musée au cours de l'exposition, un échange avec la cinéaste Alice Diop qui prépare un film, adaptation de L'Afrique fantôme. Elle avait déjà fait une lecture-spectacle avec Sylvain Prudhomme à propos de ce livre : ›ici et ›là

À la Bourse de Commerce, l'exposition "Corps et âmes", du 5 mars au lundi 25 août 2025.
Une centaine d'œuvres de 41 artistes de la Collection Pinault offre une exploration de la représentation du corps dans l'art contemporain, avec une bonne place accordée au tournant des années 1960, entre révolution sexuelle et mouvements féministes, antimilitaristes et antiracistes.
L’une des œuvres les plus anciennes de "Corps et âmes" est aussi l’une des plus célèbres : Noire et blanche, photographie de Man Ray de 1926, avec Kiki de Montparnasse qui tient d’une main un petit masque africain.
La sujétion coloniale, l’esclavage, la ségrégation, le racisme, ont une bonne place dans l'exposition qui comporte une forte proportion d’Africains-Américains. Pour une approche détaillée :
- le dossier de presse
- la visite audio avec les commissaires d'exposition, artistes et des biographies
- et même un dossier éducatif.

Au musée de l'Homme, exposition "Wax", du 5 février au 7 septembre 2025.
Le wax est ce tissu emblématique du continent africain dont les couleurs vives et les motifs variés ont traversé les frontières et les époques. Inspiré du batik - tissu d’origine indonésienne teint grâce à une technique de réserve à la cire -, industrialisé par les Européens, il a rencontré le succès en Afrique de l’Ouest, puis s’est diffusé sur le continent, et a une place de choix parmi les textiles africains. Pour en savoir plus sur l'expo :
- le dossier de presse
- une vidéo de TV5 monde, 7 février 2025, 3 min 5.


Une visite guidée


Les deux groupes parisiens Voix au chapitre bénéficient le 21 juin 2025 d'une visite guidée au Quartier latin par Kévi Donat, guide-conférencier, sur le thème "Paris Noir".

Depuis 2013, ses balades retracent l’histoire de grandes figures africaines, antillaises, et afro-américaines qui ont vécu dans la capitale.

Méconnue, la présence noire à Paris est attestée depuis l'Ancien Régime. Artistes, personnalités politiques ou intellectuelles, ces femmes et ces hommes ont entretenu un rapport différent avec la France. Surtout, ils ont marqué des quartiers de leurs empreintes, y laissant héritages et anecdotes. Voici trois parcours pour aller à leur rencontre :
- La Rive gauche dévoile une histoire intellectuelle noire, entre le Quartier latin et Saint-Germain-des-Prés, des grands écrivains afro-américains eau mouvement de la Négritude. C'est celle que nous avons faite.
- La Rive droite raconte une histoire populaire, de l'arrivée du jazz à Pigalle aux marchés africains de la Goutte-d'Or.
- Enfin, la Seine noire se concentre sur le statut des populations noires à Paris à travers ses institutions, du Code noir aux indépendances.

Vous n'étiez pas de la visite ? Pas grave, car vous pourrez :
- lire son livre, sorti en juin 2025, qui reprend les trois balades qu'il a créées, dont celle que nous avons faite : À la découverte du Paris noir aux éditions Faces cachées (extrait ›ici)
- l'écouter sur France Culture : "Kévi Donat, fou d'histoire. Balade dans le Paris noir", Le Cours de l'histoire, par Xavier Mauduit, 24 juin 2022, 52 min
- jeter un œil ou une oreille sur les différents épisodes du podcast qu'il réalise avec la Fondation pour la mémoire de l'esclavage : https://memoire-esclavage.org/podcast
- le voir sur Instagram : instagram.com/leparisnoir


Des films récents


Pour une plongée contemporaine au Cameroun : Les indomptables de Thomas Ngijo, acteur de stand-up par ailleurs, qui joue le rôle principal, (Quinzaine des cinéastes à Cannes 2025, 81 min).

Fanon, film franco-québéco-luxembourgeois réalisé par Jean-Claude Barny (2025, 133 min), relate la dernière partie de la vie (1953-1961) de Frantz Fanon, né en 1925, psychiatre, militant anticolonialiste, essayiste, originaire de la Martinique, incarné à l'écran par Alexandre Bouyer.

Un deuxième film est sorti peu après en France : Franz Fanon, l'Algérien Abdenour Zahzah (2025, 90 min), qui incarne Fanon.|

Fanon est une figure majeure de l'anticolonialisme et inspire les études postcoloniales.
Dans ses écrits, il analyse les conséquences psychologiques de la colonisation à la fois sur le colon et sur le colonisé. Dans ses livres les plus connus comme Les Damnés de la Terre, il analyse le processus de décolonisation sous les angles sociologique, philosophique et psychiatrique. Ses livres
:
- Peau noire, masques blancs, 1952, rééd. Points, 2001.
- L'An V de la révolution algérienne, 1959, rééd. La Découverte, 2011.
- Les Damnés de la Terre, 1961 (préface de Sartre, publié par François Maspéro), rééd. La Découverte, 2002.
- Pour la révolution africaine : écrits politiques, 1964, rééd. La Découverte, 2006.
- Œuvres, La Découverte, 2011.
- Écrits sur l’aliénation et la liberté, La Découverte, 2015, recueil d'écrits psychiatriques : articles scientifiques, thèse, articles du journal intérieur du pavillon de l’hôpital de Blida-Joinville de 1953 à 1956, deux pièces de théâtre écrites à Lyon durant ses études de médecine (L’Œil se noie et Les Mains parallèles), correspondance et textes publiés dans El Moudjahid après 1958, non repris dans Pour la révolution africaine.
- Écrits sur l’aliénation et la liberté, Œuvres II, La Découverte, 2018.

Dès ses premiers écrits, il se réfère à Jean-Paul Sartre (notamment à Réflexions sur la question juive, montrée dans le film).
Par l'entremise de Claude Lanzmann qui l'avait connu en Tunisie, une rencontre est organisée à Rome en 1961. Elle est largement décrite dans un livre que nous avons lu en 2010, Le Lièvre de Patagonie :

"Simone de Beauvoir et moi sommes allés accueillir Fanon à l'aéroport de Rome, nous lui avons réservé une chambre dans notre hôtel et avons dîné tous les trois avec Sartre dès le premier soir. Quelque chose d'impensable et de jamais vu est alors advenu : Sartre, qui écrivait le matin et l'après-midi, quelque soient les circonstances ou le climat (il écrivait à Gao, au Mali, par 50 degrés), qui ne transigeait jamais avec son temps de travail - il n'y avait aucune dérogation possible, aucune justification possible à la dérogation -, s'est arrêté de travailler pendant trois jours pour écouter Fanon. Simone de Beauvoir aussi. Ils ont éprouvé exactement la même chose que moi à El Menzah. Fanon donnait à ceux qui écoutaient un sentiment d'urgence absolue : parce qu'il était littéralement habité par la mort (la leucémie le vainquit six mois plus tard) et le savait, il y avait chez lui une fièvre du récit, ses paroles incendiaient. C'était en même temps un homme tendre, d'une délicatesse, d'une fraternité contagieuses. Il s'est donc mis à parler de la révolution algérienne et de l'Afrique, comme il l'avait fait avec moi et dans les mêmes termes. Je ne le répéterai pas. Il était entraînant, convaincant, on ne pouvait pas lui faire d'objections, toute objection face à lui devenait une petite objection. On ne peut objecter à la transe d'un prophète. Nous savons aujourd'hui que l'Afrique réelle n'a pas été l'Afrique rêvée par Fanon et qu'elle n'a pas du tout évité le Moyen Âge. La réalité africaine, c'est le Rwanda, le génocide des Tutsis, c'est le Congo, le Liberia, le Sierra Leone, le Darfour, j'en passe. (...)
Toujours est-il que, pendant trois jours, Sartre n'a pas travaillé. Nous avons écouté Fanon pendant trois jours. Qui parlait de l'Angola, qui parlait de Holden Roberto, le chef de l'Unita (...). Mais il parlait aussi de Césaire, de la littérature de la Caraïbe, de toute son expérience comme médecin, chef de l'hôpital psychiatrique de Blida. Ce furent trois journées éreintantes, physiquement et émotionnellement. Je n'ai jamais vu Sartre aussi séduit et bouleversé par un homme. Il allait de soi qu'il écrivait la préface des Damnés de la terre, dont Fanon lui avait apporté le manuscrit." (Le Lièvre de Patagonie, Gallimard, 2009, p. 362-363)


40 émissions, 40 auteurs classiques


Les 40 titres correspondent chacun à une émission de la série Littérature classique africaine par Tirthankar Chanda.
La liste ci-dessous comporte :
- un lien direct le livre et l'auteur, titre de l'émission, sa date, sa durée
- une courte présentation du livre
- le lien sur l'éditeur du livre et le nombre de pages
- est précisé si nous avons déjà lu l'auteur, avec un lien sur nos avis.

Nota bene : certains livres indisponibles se trouvent facilement d'occasion grâce au site Chasse aux livres.
  1. L'émission : Tout s'effondre de Chinua Achebe (nigérian de langue anglaise), 21/03/2020, 04:43
    Le Monde s'effondre (titre modifié dans sa deuxième édition), le chef-d'œuvre du Nigérian Chinua Achebe, père du roman africain moderne, raconte la destinée tragique d'un héros pré-colonial tenté de se mesurer à la puissance de l'envahisseur britannique.
    Le livre : Tout s'effondre, trad. de l'anglais Pierre Girard, Actes Sud Babel, 224 p. (indisponible) En ligne en vo ›ici

  2. L'émission : Une si longue lettre de Mariama Bâ (sénégalaise), 22/03/2020, 04:39
    Apologie poignante de l'égalité homme-femme dans la société musulmane, Une si longue lettre de la Sénégalaise Mariama Bâ est devenu un classique de la littérature africaine moderne. Il est au programme des écoles et des universités à travers le continent.
    Le livre : Une si longue lettre, éd. Litos, 176 p. En ligne ›ici

  3. L'émission : Les Soleils des indépendances d'Ahmadou Kourouma (ivoirien), 28/03/2020, 04:06
    Nous revenons sur un grand roman ivoirien qui a renouvelé la fiction africaine contemporaine, le chef d'œuvre d'Ahmadou Kourouma, Les Soleils des indépendances.
    Le livre : Les soleils des indépendances, Points, 216 p. (lu dans le groupe en 2016). En ligne ›ici

  4. L'émission : Disgrâce de John Maxwell Coetzee (sud-africain de langue anglaise), 29/03/2020, 04:13
    Adapté au cinéma avec John Malkovitch dans le rôle principal, le roman du Sud-Africain John Maxwell Coetzee, Disgrâce, s'est imposé comme un classique incontournable de la littérature africaine contemporaine. Il a été qualifié de chef-d'œuvre par la critique internationale.
    Le livre : Disgrâce, trad. de l'anglais Catherine Lauga du Plessis, Points, 288 p. (lu dans le groupe en 2004)

  5. L'émission : L'Aventure ambiguë de Cheikh Hamidou Kane (sénégalais), 04/04/2020, 04:03
    L'Aventure ambiguë paru en 1961 est un roman phare du corpus littéraire africain. À travers le récit de son protagoniste écartelé entre l'Afrique et l'Occident, ce roman met en scène les craintes, les dilemmes et les drames de l'élite africaine au sortir de la colonisation.
    Le livre : L'aventure ambiguë, 10/18, 192 p.
    (lu dans le groupe en 2013)

  6. L'émission : L'Autre moitié du soleil par Chimamanda Ngozi Adichie (nigériane de langue anglaise), 05/04/2020, 04:00
    Héritière de la grande tradition littéraire du Nigeria, Chimamanda Adichie est une grande voix de l'Afrique anglophone. Son superbe roman tolstoïen sur la guerre du Biafra, L'Autre moitié du soleil, est entré dans le répertoire des classiques de la littérature contemporaine.
    L'autre moitié du soleil, trad. de l'anglais Mona de Procontal, Folio, 672 p. (Nous avons lu dans le groupe un autre livre de cette autrice, Americanah, en 2015)

  7. L'émission : Le Pauvre Christ de Bomba par Mongo Beti (camerounais de langue française), 11/04/2020, 04:28
    Récit iconoclaste des efforts apostoliques de l'Église catholique en Afrique, sur fond de suprématie coloniale, Le Pauvre Christ de Bomba du Camerounais Mongo Beti fit scandale lors de sa parution en 1956. L'Église empêcha sa distribution au Cameroun et son éditeur Robert Laffont arrêta sa commercialisation. Roman anticlérical, anticolonial, mais avant tout une œuvre puissante et inventive.
    Le livre : Le pauvre christ de Bomba, Présence africaine, 350 p. En ligne ›ici

  8. L'émission : Pétales de sang de Ngugi wa Thong'o (kenyan de langue kikuyu et anglaise), 12/04/2020, 04:07
    Dans Pétales de sang, un roman-fleuve de près de 500 pages, il est question de beauté assassinée et de promesses non tenues dans le Kenya postcolonial. Son auteur Ngugi wa Thiong'o figure dans la liste des écrivains africains nobélisables.
    Pétales de sang, trad. de l’anglais Josette Mane, Présence africaine, 476 p.

  9. L'émission : Les Interprètes de Wole Soyinka (nigérian, prix Nobel), 18/04/2020, 04:37
    Prix Nobel de littérature 1986, poète et homme de théâtre, le Nigérian Wole Soyinka est aussi l'auteur de deux grands romans essentiels du corpus littéraire africain dont Les Interprètes, son premier roman paru en 1965. Qualifié de "roman d'un poète", l'ouvrage mêle le registre poétique et mythologique à la satire sociale et met à nu les forces et les faiblesses de la société nigériane renaissante au terme d'une longue nuit de domination coloniale.
    Le livre : Les Interprètes, Présence africaine, 413 p.

  10. L'émission : Le Pleurer-rire d'Henri Lopes (congolais), 19/04/2020, 04:16
    Le Pleurer-Rire est le grand roman africain des années 1980, sous la plume du Congolais Henri Lopes. À travers les mille frasques de son personnage-potentat au langage fleuri qui exerce sur son peuple une dictature atroce, le romancier explore la problématique du pouvoir et du contre-pouvoir. Ce roman qui s'inscrit dans une conception polyphonique de l'écriture romanesque, a contribué au renouvellement de la littérature africaine francophone.
    Le Pleurer-rire, Présence africaine, 372 p.

  11. L'émission : Les Bouts de bois de Dieu d'Ousmane Sembène (sénégalais), 25/04/2020, 04:17
    Classique de la littérature africaine de langue française, régulièrement réédité en format de poche, Les bouts de bois de Dieu est un roman militant sous la plume du Sénégalais Ousmane Sembène. D'inspiration marxiste, le récit met en scène la lutte des classes à l'œuvre dans l'Afrique coloniale à travers l'évocation romancée de la grève des cheminots du Dakar-Niger de 1948. D'une écriture serrée et sans manichéisme aucun, le roman n'a pas pris une seule ride.
    Le livre : Les bouts de bois de Dieu, Pocket, 380 p. (indisponible, en ligne ici)

  12. L'émission : Saison de la migration vers le Nord de Tayeb Salih (soudanais), 26/04/2020, 04:14
    Le roman Saison de la migration vers le Nord sous la plume du Soudanais Tayeb Salih est un chef-d'œuvre de la littérature arabe contemporaine. Paru en 1966 et traduit depuis en une trentaine de langues, ce roman raconte la quête identitaire de l'élite intellectuelle arabe post-coloniale. Ce roman tragique dont l'action se partage entre Londres et l'hinterland soudanais a fait la réputation de Tayeb Salih, comparé souvent à l'Égyptien Naguib Mahfouz, le prix Nobel de littérature.
    Le livre : Saison de la migration vers le Nord, Babel, 176 p. (lu dans le groupe en 2024)

  13. L'émission : L'Étrange destin de Wangrin ou les roueries d'un interprète africain par Amadou Hampâté Bâ (malien), 02/05/2020, 04:28
    Grand défenseur de la tradition orale africaine, connu pour ses Mémoires devenues des best-sellers, le Malien Amadou Hampâté Bâ est aussi l'auteur d'un roman remarquable. L'Étrange destin de Wangrin raconte les contradictions de la société coloniale ouest-africaine à travers les aventures d'un interprète ambitieux et rusé qui défie le pouvoir de l'administration française pour se hisser au sommet de la puissance et de la fortune. Situé au carrefour du document ethnologique et de la fiction moderne, ce récit touche le lecteur contemporain par la tension entre l'exercice du libre arbitre et la problématique de la prédestination qui est au cœur de son intrigue.
    Le livre : L'Étrange destin de Wangrin, 10/18, 384 p. (Nous avions lu dans le groupe un autre livre de cet auteur, Amkoulled, l'enfant Peul, en 2000)

  14. L'émission : Une aiguille nue de Nuruddin Farah (somalien de langue anglaise), 03/05/2020, 04:26
    Condamné à l'exil pendant de nombreuses années, le romancier somalien Nuruddin Farah a élevé à travers son œuvre magistrale d'une quinzaine de romans et d'essais un monument émouvant à la mémoire de son pays natal plongé dans une guerre civile interminable. La Somalie, le "pays qui est dans ma tête" était déjà le protagoniste de son premier grand roman Une aiguille nue, paru en 1976. Inspiré d'Ulysse, ce roman raconte un récit joycien de pérégrinations dans les rues de Mogadiscio, sur fond d'amours perdus et de réflexions sur les heurs et malheurs d'une société somalienne à la dérive. Un classique des lettres africaines post-indépendance à découvrir ou redécouvrir.
    Le livre : Une aiguille nue, Mémoire d'encrier ; Une aiguille nue, trad. de l'anglais Catherine Pierre-Bon, L'Or des fous, 256 p. (indisponible)

  15. L'émission : Fille de Burger de Nadine Gordimer (sud-africaine, prix Nobel), 09/05/2020, 05:00
    Célèbre romancière de l'Afrique du Sud, prix Nobel de littérature 1991, disparue en 2014, Nadine Gordimer avait fait de sa fiction un puissant outil de dénonciation des brutalités perpétrées par son gouvernement contre la population noire du temps de l'apartheid. Paru en 1979, son septième roman, Fille de Burger, met en scène l'héritage intellectuel d'un grand activiste anti-apartheid qui a réellement existé, tout en s'interrogeant sur le coût humain et familial de l'engagement politique. Ce roman est l'un des grands livres sous la plume de la magistrale chroniqueuse des heurs et malheurs de son pays que fut Gordimer.
    Le livre : Fille de Burger, trad. de l'anglais Guy Durand, Points, 528 p. (Nous avions lu dans le groupe un autre livre de cette auteure, Un Amant de fortune, en 2004)
    (Moins volumineux ? Le conservateur, Grasset "Les Cahiers Rouges", 378 p.)

  16. L'émission : La Vie et demie par Sony Labou Tansi (congolais), 10/05/2020, 04:49
    Le Congolais Sony Labou Tansi, disparu en 1995, à l'âge de 48 ans, était l'un des écrivains les plus novateurs de la littérature africaine contemporaine. Révélé dans les années 1970 grâce au concours de théâtre organisé par Radio France Internationale, son théâtre prolifique et profondément subversif, jouit d'une audience internationale. Sony était aussi romancier, avec six romans à son actif. Ses romans ont révolutionné l'écriture romanesque, en rompant radicalement avec le social réalisme qui a longtemps caractérisé la fiction africaine. Son premier roman La Vie et demie, devenu un classique francophone, est plus proche de l'imaginaire merveilleux latino-américain que de Balzac ou de Zola.
    La vie et demie, Points, 176 p.

  17. L'émission : Les Vierges de pierre de Yvonne Vera (zimbabwéenne de langue anglaise), 17/05/2020, 04:47
    Disparue en 2005, à l'âge de 40 ans, la romancière zimbabwéenne Yvonne Vera est l'auteure d'une œuvre littéraire brève mais prometteuse d'inventivité et de poésie. Cette œuvre, composée de 5 romans et un recueil de nouvelles, explore les drames de l'histoire contemporaine du continent africain à travers le vécu des femmes, réduites trop longtemps à la domesticité et au silence. Récit tragique de la terrible guerre civile qui a ensanglanté le Zimbabwe au début de son indépendance, son dernier roman Les Vierges de pierre est un chef-d'œuvre représentatif du style éclaté et puissamment poétique de son auteure.
    Le livre : Les vierges de pierre, trad. de l’anglais Geneviève Doz, Fayard, 234 p.

  18. L'émission : Pelourinho de Tierno Monénembo (guinéen, prix Renaudot 2008), 24/05/2020, 04:44
    Prix Renaudot 2008, Tierno Monénembo est romancier, avec à son actif treize romans. Né en Guinée en 1947 et exilé de son pays depuis l'âge de 23 ans, il a publié une œuvre majeure qui fait une large place à la nostalgie et à l'exil. Partagés entre la maison introuvable et le monde, ses romans font voyager à travers les pays où il a séjourné plus ou moins longuement (Côte d'Ivoire, Sénégal, France, Brésil, Cuba, Algérie). De livre en livre, il a construit une fiction-monde à nulle autre pareille dans le champ littéraire africain, invitant ses lecteurs à le suivre dans l'intimité des sociétés et de leurs vécus. Dans Pelourinho, son cinquième roman, Tierno Monénembo retrace la quête éperdue d'un écrivain africain au Brésil.
    Le livre : Pelourinho, Seuil, 224 p. (indisponible)

  19. L'émission : La Route de la faim par Ben Okri (nigérian, de langue anglaise), 31/05/2020, 04:39
    Héritier de la riche tradition littéraire de son pays, le Nigérian Ben Okri donne avec La Route de la faim l'un des romans les plus marquants et les plus inventifs de la littérature africaine moderne. À travers les aventures d'un enfant-esprit de la mythologie yoruba, qui renonce à son immortalité pour vivre la fascinante mais tragique réalité du monde, ce roman met en scène les heurts et malheurs de l'Afrique contemporaine où la misère gagne sur la brousse.
    La route de la faim, trad. de l’anglais Aline Weill, Robert Laffont, Pavillons poche, 640 p. (indisponible)

  20. L'émission : Murambi, le livre des ossements par Boubacar Boris Diop (sénégalais), 07/06/2020, 04:41
    Romancier et essayiste, le Sénégalais Boubacar Boris Diop est l'une des voix majeures de la littérature africaine contemporaine. En 1998, il avait participé à la résidence d'écrivains "Rwanda : écrire par devoir de mémoire" pour comprendre les faits et les rouages du génocide rwandais. Son roman, Murambi, le livre des ossements (2000), né de cette expérience, nous éclaire avec une extrême lucidité sur la barbarie humaine en temps de conflit.
    Le livre : Murambi, le livre des ossements, Zulma, 224 p.

  21. L'émission : Terre somnambule par Mia Couto (mozambicain de langue portugaise), 14/06/2020, 05:29
    "Je suis un Blanc qui est Africain ; un athée non pratiquant ; un poète qui écrit en prose ; un homme qui a un nom de femme ; un scientifique qui a peu de certitudes sur la science ; un écrivain en terre d'oralité." Ainsi parle le Mozambicain Mia Couto, l'un des romanciers africains contemporains les plus connus. Traduit dans une vingtaine de langues, à la fois poète et conteur, biologiste de profession, Couto livre à travers son œuvre romanesque riche d'une dizaine de titres mémorables, l'histoire de son pays, ses tragédies et la formidable résilience de son peuple. Son premier roman, Terre somnambule qui raconte en témoin engagé l'indépendance du Mozambique et de la guerre civile meurtrière qui s'est ensuivie, est le sujet de la chronique littéraire du jour.
    Une autre émission Chemins d'écriture : "Dans ce pays, la guerre avait mort la route", ainsi commence Terre somnambule de Mia Couto, 09/03/2025, 04:11
    Classique de la littérature africaine moderne, le premier roman du Mozambicain Mia Couto Terre somnambule a été traduit en 33 langues. Traduit en français deux ans après sa parution en 1992, mais épuisé depuis, il vient d'être retraduit. Il s'agit d'une version plus audacieuse, avec pour ambition, comme le précise la quatrième de couverture du livre, d'être à la hauteur "de la créativité de Mia Couto qui a voulu construire un langage qui rende compte d'une nation à la recherche de sa propre image". Entretien avec Elisabeth Monteiro Rodrigues, traductrice de Terre somnambule.

    Le livre : Terre somnambule, trad. du portugais Maryvonne Lapouge-Pettorelli, Métailié, 243 p.

  22. L'émission : Cahier nomade par Abdourahman Waberi (djiboutien), 21/06/2020, 04:41
    Romancier, nouvelliste, essayiste, poète et aujourd'hui professeur de littérature française et francophone aux Etats-Unis, Abdourahman Waberi appartient à la génération d'auteurs africains d'après la décolonisation. Lyrisme, fable et humour sont les marques de fabrique de son écriture qui a renouvelé la littérature africaine à l'orée du XXIe siècle. L'un des tous premiers titres de Waberi, Cahier nomade a permis d'asseoir la réputation de cet auteur devenu une figure incontournable de ce qu'on appelle désormais la "littérature monde" en français.
    Le livre : Cahier nomade, Le Serpent à plumes, 156 p. (épuisé)

  23. L'émission : Sozaboy de Ken Saro-Wiwa (nigérian de langue anglaise), 28/06/2020, 04:24
    Nous connaissons le Nigérian Ken Saro-Wiwa comme militant écologiste qui, on s'en souvient, paya de sa vie son engagement contre les ravages environnementaux causés par les compagnies pétrolières dans le delta du Niger, sa région natale. Le 10 novembre 1995, il fut pendu haut et court par le régime de Sani Abacha qui se sentait visé par son combat acharné contre la corruption des puissants au Nigeria et "la mafia pollueuse de Shell". On connaît moins bien l'écrivain Ken Saro-Wiwa, conteur à la verve exubérante, romancier, poète et scénariste, qui fut le président de l'Association des écrivains nigérians. Il fut surtout l'auteur de Sozaboy, un grand roman contre la guerre, "l'un des meilleurs que le XXe siècle ait produit", selon le romancier anglais William Boyd qui a préfacé l'ouvrage.
    Le livre : Sozaboy, trad. de l’anglais Samuel Milongo et Amadou Bissir, Babel, 312 p.

  24. L'émission : Territoires de Nuruddin Farah (somalien de langue anglaise), 04/07/2020, 05:02
    Paru en anglais 1986, Territoires est considéré comme l'un des romans les plus aboutis du Somalien Nuruddin Farah. Roman politique par excellence, il raconte la guerre, la paix et des parcours individuels semés d'obstacles, sur fond de nationalisme montant au sein d'une population somalienne minée par des rivalités de clans. Il y a dans ce roman des prémices des turbulences qui vont conduire à la guerre civile somalienne.
    Le livre : Territoires, trad. de l'anglais Jacqueline Bardolph, Le Serpent à Plumes, 447 p. (épuisé)

  25. L'émission : Bénarès de Barlen Pyamootoo (mauricien), 05/07/2020, 04:30
    Le Mauricien Barlen Pyamootoo est un romancier singulier. Ses livres racontent des "géographies des âmes", aime-t-il dire. Romancier, mais aussi cinéaste, éditeur et beaucoup d'autres choses en même temps, Barlen Pyamootoo s'est fait connaître en 1999 en publiant son premier roman Bénarès, un "road novel" beckettien qui renouvelle la pensée des racines et du désir si chère aux écrivains de Maurice depuis plus de deux siècles.
    Le livre : Bénarès, L'Olivier, 92 p.

  26. L'émission : Un fusil dans la main, un poème dans la poche par Emmanuel Dongala (congolais), 11/07/2020, 04:51
    Chimiste de formation, Emmanuel Dongala est l'auteur de sept romans et de nombreuses pièces de théâtre. Depuis la guerre civile qui a ensanglanté son pays natal, le Congo-Brazzaville, l'écrivain vit aux Etats-Unis. Un fusil dans la main, un poème dans sa poche est son premier roman, paru en 1973.
    Le livre : Un fusil dans la main, un poème dans la poche, Le Serpent à plumes, 395 p. (épuisé)

  27. L'émission : Une Saison blanche et sèche par André Brink (sud-africain), 12/07/2020, 04:21
    Disparu en 2015 à l'âge de 80 ans, le Sud-Africain André Brink était un écrivain engagé et prolifique, avec une trentaine de romans, d'essais sur la littérature et de récits autobiographiques à son actif. Une saison blanche et sèche est l'un de ses ouvrages les plus connus, porté à l'écran par Hollywood. L'écrivain met en scène les rapports de pouvoir dans l'Afrique du Sud d'hier et d'aujourd'hui : homme/femme, maître/esclave, blanc/noir, sur fond de racisme et d'injustices. Marquée par l'ici et maintenant, mais aussi par les interrogations sur l'éthique et le moral, l'œuvre d'André Brink demeure profondément universelle.
    Le livre : Une saison blanche et sèche, Le Livre de poche, 416 p.
    (lu dans le groupe en 2015)

  28. L'émission : L'Ivrogne dans la brousse d'Amos Tutuola (nigérian de langue anglaise), 18/07/2020, 04:43
    "Je me soûlais au vin de palme depuis l'âge de dix ans. Je n'avais rien d'autre à faire dans la vie que de boire du vin de palme." Ainsi commence L'Ivrogne dans la brousse du Nigérian Amos Tutuola. Ce conteur hors pair a livré avec son personnage d'ivrogne errant dans la forêt magique à la recherche de son malafoutier défunt qui sut apaiser sa soif comme nul autre, l'une des figures inoubliables des lettres africaines. Traduit en français par Raymond Queneau, L'Ivrogne dans la brousse fut le premier grand succès de Tutuola. Son œuvre comprend six romans traduits en une dizaine de langues.
    Le livre : L'ivrogne dans la brousse, trad. de l’anglais Raymond Queneau, Imaginaire Gallimard, 154 p. (lu dans le groupe en 2022)

  29. L'émission : Batouala par René Maran (franco-guyanais, prix Goncourt 1921), 19/07/2020, 05:00
    Le monde littéraire africain célèbre en 2021 le centenaire de l'attribution du prix Goncourt à l'auteur franco-guyanais René Maran pour son roman Batouala. Ce roman, dont l'action se déroule en Afrique, révolutionna l'esthétique romanesque négro-africaine en rompant avec la littérature coloniale et en donnant la parole à ses protagonistes africains. Quelque chose change en littérature africaine. Batouala deviendra le livre de chevet des Senghor et des Césaire, des futurs champions de la négritude.
    Le livre : Batouala, Albin Michel, 272 p. En ligne ›ici.

  30. L'émission : Le Téléscope de Rachid par Jamal Mahjoub (britannique ayant vécu à Khartoum), 25/07/2020, 03:33
    Le Téléscope de Rachid est le quatrième roman sous la plume du Soudanais Jamal Mahjoub. Né dans l'Angleterre de l'après-guerre, l'écrivain a grandi à Khartoum et il vit à Barcelone, après avoir séjourné quelques années au Danemark. Auteur d'une dizaine de romans et de polars, il puise son inspiration dans les turbulences et les drames du monde postcolonial. Ses modèles ont pour nom Salman Rushdie, Kazuo Ishuguro, Timothy Mo, dont les questionnements réfléchis et audacieux sur la globalisation à l'œuvre lui servent de contrepoids à la bêtise et à la brutalité des fanatismes montants de toutes parts.
    Le livre : Le télescope de Rachid, trad. de l’anglais Madeleine et Jean Sévry, Babel, 352 p.

  31. L'émission : Le Ventre de l'Atlantique par Fatou Diome (sénégalaise), 26/07/2020, 04:17
    En 2003, avec son premier roman Le Ventre de l'Atlantique, la Sénégalaise Fatou Diome faisait une entrée fracassante en littérature. Il s'agissait d'un brillant premier roman, de construction maîtrisée jusque dans ses exubérances. À la fois caustique et tragique, le livre raconte "l'aventure ambiguë" d'une jeune femme sénégalaise, ballottée entre l'Europe qui la rejette car elle est Noire et son Afrique natale où elle n'a connu que le malheur et la honte à cause de sa naissance hors mariage. Étrangère partout, Salie, qui est aussi un peu Fatou Diome, cherche son territoire sur la page blanche devenue son ultime refuge.
    Le livre : Le ventre de l'Atlantique, Le Livre de poche, 256 p. (lu dans le groupe en 2005)

  32. L'émission : Notre pain de chaque nuit par Florent Couao-Zotti (béninois), 01/08/2020, 05:13
    Romancier, nouvelliste, homme de théâtre, Florent Couao-Zotti raconte l'Afrique contemporaine, ses violences urbaines, ses inégalités et ses turpitudes. Né en 1964, le Béninois appartient à la génération d'écrivains postcoloniaux qui ont renouvelé la littérature africaine.
    Le livre : Notre pain de chaque nuit, J'ai lu, 247 p. (épuisé)

  33. L'émission : À fleur de peau par Tsitsi Dangaremgba (zimbabwéenne de langue anglaise), 02/08/2020, 04:05
    Considérée comme une des figures de féminisme africain, la Zimbabwéenne Tsitsi Dangarembga a acquis une notoriété internationale en 1988, en publiant son roman culte À fleur de peau. C'est un récit autofictionnel qui raconte, à travers les heurs et malheurs de son héroïne Tambudzai, les discriminations contre les femmes dans la société patriarcale au Zimbabwe. À fleur de peau est le premier volume d'une trilogie, dont le dernier volet intitulé This Mournable Body a été sélectionné pour le Booker Prize 2020, prestigieux prix littéraire britannique.
    Le livre : À fleur de peau, trad de l’anglais Etienne Galle, Albin Michel, 267 p. (indisponible)

  34. L'émission : Le vieux nègre et la médaille par Ferdinand Oyono (camerounais), 08/08/2020, 04:33
    Né au Cameroun en 1929, Ferdinand Oyono fait partie de la première génération des romanciers africains en langue européenne. Il fut haut fonctionnaire, diplomate et ministre dans le Cameroun indépendant. Il est l'auteur de trois romans, qui témoignent des heurs et malheurs de la société coloniale. Le vieux nègre et la médaille, publié en 1956, est son ouvrage le plus connu et sans doute aussi le plus original et subtil dans sa dénonciation des iniquités du monde africain dominé.
    Le livre : Le vieux nègre et la médaille
    , 10/18, 192 p.
    Voir également Une vie de boy, Pocket, 192 p.

  35. L'émission : L'Age d'or n'est pas pour demain par Ayi Kwei Armah (ghanéen), 09/08/2020, 04:52
    Même si son œuvre est méconnue dans les pays francophones, le Ghanéen Ayi Kwei Armah compte parmi les plus grands romanciers de l'Afrique contemporaine. Il s'est fait connaître en 1968 en publiant The Beautyful ones are not born yet, un chef d'œuvre de littérature engagée et proche dans son écriture de la tradition moderniste occidentale. C'est dommage que la version française de ce magnifique roman, traduit par les éditions Présence Africaine, soit aujourd'hui introuvable.
    Le livre : L'Age d'or n'est pas pour demain, Présence africaine, 208 p. (indisponible)

  36. L'émission : Verre cassé d'Alain Mabanckou (congolais), 16/08/2020, 04:52
    "Le Congo est toujours mon point d'inspiration, le pays qui bat dans mon cœur", aime rappeler Alain Mabanckou, écrivain originaire du Congo-Brazzaville et l'un des écrivains africains les plus marquants de sa génération. Poète, romancier, essayiste, polémiste, professeur de littérature française aux États-Unis, l'homme est l'auteur d'une œuvre protéiforme, qui a remporté de nombreux prix littéraires prestigieux. Publié en 2005 et couronné par le prix des Cinq continents, son cinquième roman Verre cassé (repris en édition poche chez Points), s'est imposé comme l'un des textes incontournables des lettres africaines contemporaines.
    Le livre : Verre cassé, Points, 264 p.
    (lu dans le groupe en 2006)

  37. L'émission : La Maison de la faim par Dambudzo Marechera (zimbabwéen de langue anglaise), 22/08/2020, 05:29
    Né en 1952 et disparu à 35 ans d'une maladie liée au sida, le talentueux romancier zimbabwéen Dambudzo Marechera représente un moment de fulgurance éphémère dans la littérature de langue anglaise. Il a laissé derrière lui cinq ouvrages, dont le plus connu est La Maison de la faim. C'est un recueil de récits iconoclastes, aux accents autobiographiques, avec désespoir pour seul horizon d'attente.
    Le livre : La Maison de la faim, trad. de l’anglais Jean-Baptiste Evette et Xavier Garnier, Zoé, 160 p.

  38. L'émission : Les Rochers de Poudre d'Or par Nathacha Appanah (mauricienne), 23/08/2020, 04:45
    Née à l'île Maurice, Natacha Appanah a travaillé dans l'édition, la publicité et la presse, avant de se lancer dans l'écriture. Considérée aujourd'hui comme l'une des écrivains majeurs de Maurice, la romancière a à son actif neuf livres aux tonalités très différentes. Ses thématiques vont des heurs et malheurs de son île natale aux enfants fugueurs à Mayotte "impatients d'échapper à la gravité de leurs destins", en passant par les dysfonctionnements passionnels au sein des familles en France où l'écrivain vit depuis 1998.
    Le livre : Les rochers de Poudre d'Or, Folio, 240 p.

  39. L'émission : Le Fils d'Agatha Moudio par Francis Bebey (camerounais), 29/08/2020, 04:28
    Le Fils d'Agatha Moudio est le premier roman de Francis Bebey, qui a été journaliste, musicologue avant de venir à la littérature. Il était contemporain des premiers grands romanciers du Cameroun tels que Mongo Beti ou Ferdinand Oyono. Évoquant de manière décomplexée l'Afrique sous la colonisation, le roman a connu un grand succès populaire et a été traduit en anglais, allemand et polonais.
    Le livre : Le Fils d'Agatha Moudio, Coédition NENA/Éditions Clé, 139 p. (indisponible, mais en ligne ›ici)

  40. L'émission : Retour au paradis de Breyten Breytenbach (sud-africain de langue anglaise), 30/08/2020, 04:45
    À la fois écrivain et peintre, Breyten Breytenbach est un homme aux nombreux talents. Né en Afrique du Sud en 1939 et exilé en France depuis 1961, il est l'auteur d'une œuvre protéïforme, partagée entre poésies, romans, essais et journaux de voyage. Retour au paradis qu'il a écrit suite à un voyage en Afrique du Sud, sur le modèle d'Une saison en enfer rimbaldienne, est l'un de ses plus beaux livres, nourri d'inquiétudes sur l'avenir de son pays pourtant libéré du fléau de l'apartheid.
    Le livre : Retour au paradis, trad. de l’anglais Jean Guiloineau, Grasset, 336 p.

Des émissions concernant les livres programmés par Voix au chapitre pour septembre 2025


La série Littérature classique africaine de 2020 a été suivie d'une autre émission, Chemins d'écriture, consacrée aux écrivains d'Afrique et de la diaspora : une émission toujours très courte chaque semaine, sans interruption depuis, par le même journaliste, Tirthankar Chanda, que nous allons recevoir en septembre. Au 1er juin 2025, c'est plus de 250 de ses émissions que l'on peut écouter sur la littérature ! Voici celles qu'il a produites sur nos auteurs à lire :

SONY LABOU TANSI

L'émission : La Vie et demie par Sony Labou Tansi (congolais), 10/05/2020, 04:49
Le Congolais Sony Labou Tansi, disparu en 1995, à l'âge de 48 ans, était l'un des écrivains les plus novateurs de la littérature africaine contemporaine. Révélé dans les années 1970 grâce au concours de théâtre organisé par Radio France Internationale, son théâtre prolifique et profondément subversif, jouit d'une audience internationale. Sony était aussi romancier, avec six romans à son actif. Ses romans ont révolutionné l'écriture romanesque, en rompant radicalement avec le social réalisme qui a longtemps caractérisé la fiction africaine. Son premier roman La Vie et demie, devenu un classique francophone, est plus proche de l'imaginaire merveilleux latino-américain que de Balzac ou de Zola.
Le livre : La vie et demie, Points, 176 p.

ABDULRAZAK GURNAH

L'émission :
Une virée dans le monde de migrants et d'exilés, avec le prix Nobel de littérature Abdulrazak Gurnah (originaire de Zanzibar, de langue anglophone), 16/10/2021, 03:54
L'Afrique de l'Est était à l'honneur cette année en Suède, avec l'Académie suédoise décernant le prix Nobel 2021 au romancier britannique Abdulrazak Gurnah, d'origine tanzanienne. Peu connu du grand public francophone, l'Anglo-Tanzanien est le second écrivain africain d'Afrique noire subsaharienne à remporter ce prix prestigieux, après le Nigérian Wole Soyinka, distingué en 1986.

L'émission : (1/2) Voguer entre enfer et paradis dans l’Afrique précoloniale, avec Abdulrazak Gurnah (tanzanien écrivant en anglais), 25/06/
2022 - 07:24
Originaire de Zanzibar, le Britannique Abdulrazak Gurnah est le prix Nobel de littérature 2021. Il est l’auteur d’une dizaine de romans, des volumes de nouvelles et d’essais littéraires. L’écrivain était récemment à Paris à l’occasion de la réédition de ses trois romans traduits en français : Paradis, Adieu Zanzibar et Près de la mer qui avait été primé en 2007 par le prix RFI-Témoins du monde. Rencontre.
L'émission : (2/2) Abdulrazak Gurnah: "Personne ne m'a influencé", 02/07/2022, 03:28
Dans ce second volet, l'écrivain explique le pourquoi et le comment de son art poétique, revient sur ses obsessions et nuance la question des influences. Entretien.
Les livres :
- Paradis
, trad. de l'anglais Anne-Cécile Padoux, Folio, 336 p.
- Près de la mer, trad. de l'anglais Sylvette Gleize, Folio, 432 p.
- Adieu Zanzibar, trad. de l’anglais Sylvette Gleize, éd. Denoël et d’ailleurs, 365 p.

MIA COUTO

L'émission : (1/2) Revisiter les ténèbres du Mozambique colonial, avec le lusophone Mia Couto, 10/09/2022, 04:05
Grand nom des lettres lusophones africaines contemporaines, Mia Couto écrit pour "apprendre aux lecteurs à rêver". Journaliste, poète, romancier, chroniqueur, conteur, il est l'auteur d'une œuvre somptueuse et poétique, riche d'une trentaine d'ouvrages. Son nouveau roman, Le Cartographe des absences, s'inspire de la vie de son père, qui fut, lui aussi, journaliste et poète et engagé dans la lutte contre colonisation portugaise.
L'émission :
(2/2) Dans le sable mouvant de la mémoire, avec le Mozambicain Mia Couto, 17/09/2022, 04:03
C'est dans la ville de Beira, sur la côte du Mozambique, que se déroule l'action du nouveau roman de Mia Couto, écrivain phare de son pays. Le Cartographe des absences raconte le retour au pays natal d'un poète vieillissant, en quête des fantômes de son passé. À travers un va-et-vient poétique et baroque entre le passé et le présent, le personnage reconstitue le puzzle de sa vie, remontant à l'origine des traumatismes qui l'ont structuré. Entre histoire et nostalgie.
Le livre : Le Cartographe des absences, trad. du portugais Elisabeth Monteiro Rodrigues, Métailié, 347 p.


L'émission : "Dans ce pays, la guerre avait mort la route", ainsi commence Terre somnambule de Mia Couto (mozambicain de langue portugaise), 09/03/2025, 04:11
Classique de la littérature africaine moderne, le premier roman du Mozambicain Mia Couto Terre somnambule a été traduit en 33 langues. Traduit en français deux ans après sa parution en 1992, mais épuisé depuis, il vient d'être retraduit. Il s'agit d'une version plus audacieuse, avec pour ambition, comme le précise la quatrième de couverture du livre, d'être à la hauteur "de la créativité de Mia Couto qui a voulu construire un langage qui rende compte d'une nation à la recherche de sa propre image". Entretien avec Elisabeth Monteiro Rodrigues, traductrice de Terre somnambule.

Le livre : Terre somnambule, Métailié, 256 p.

NATHACHA APPANAH

L'émission : Les Rochers de Poudre d'Or par Nathacha Appanah (mauricienne), 23/08/2020, 04:45
Née à l'île Maurice, Natacha Appanah a travaillé dans l'édition, la publicité et la presse, avant de se lancer dans l'écriture. Considérée aujourd'hui comme l'une des écrivains majeurs de Maurice, la romancière a à son actif neuf livres aux tonalités très différentes. Ses thématiques vont des heurs et malheurs de son île natale aux enfants fugueurs à Mayotte "impatients d'échapper à la gravité de leurs destins", en passant par les dysfonctionnements passionnels au sein des familles en France où l'écrivain vit depuis 1998.

Le livre : Les rochers de Poudre d'Or
, Folio, 240 p.


L'émission : Descente dans les creux et les failles de la conscience, avec la Mauricienne Nathacha Appanah, 18/09/2021, 04:07
Journaliste de formation, la Mauricienne Nathacha Appanah s'est fait connaître en 2004 en publiant son premier roman Les rochers de Poudre d'or. Son œuvre, riche de huit romans, frappe par sa cohérence thématique et esthétique. Les traumatismes de l'histoire, le drame intime, la violence sont les thèmes privilégiés de ses récits, admirablement servis par une écriture lyrique et précise. Son nouveau roman Rien ne t'appartient est l'un des ouvrages incontournables de cette rentrée littéraire 2021.
Le livre : Rien ne t’appartient, Gallimard, 160 p. ; rééd. Folio, 2023


L'émission
:
Dans les pas des ancêtres migrants, avec Nathacha Appanah, 16/09/2023, 03:42
Nathacha Appanah est l'une des grandes voix des lettres françaises. Née à Maurice en 1971, elle est l'auteure d'une dizaine de romans dont les plus connus sont Les Rochers de Poudre d'or qui l'a fait connaître et Tropique de la violence. Les relations familiales, la mémoire, les questions géopolitiques sont ses thèmes de prédilection. Elle vient de publier La Mémoire délavée aux éditions de Mercure de France, à mi-chemin entre biographie familiale et autofiction.

Le livre : La mémoi
re délavée, Mercure de France, coll. Traits et portraits, 2023, 160 p.

AHMADOU KOUROUMA

L'émission : Les Soleils des indépendances d'Ahmadou Kourouma (ivoirien), 28/03/2020, 04:06
Nous revenons sur un grand roman ivoirien qui a renouvelé la fiction africaine contemporaine, le chef d'œuvre d'Ahmadou Kourouma, Les Soleils des indépendances.
Le livre : Les soleils des indépendances, Points, 216 p. (lu dans le groupe en 2016).

***********

Pour ceux qui souhaiteraient lire encore un autre Africain, en plus des 4 choisis, Tirthankar Chanda conseille :

ABDOURAHMAN WABERI

L'émission : Voguant entre fiction et biographie, avec Abdourahman Waberi, 08/10/2022, 04:14
Treizième roman sous la plume du Franco-Djiboutien Abdourahman Waberi, Dis-moi pour qui j'existe met en scène le dialogue entre un père et sa fille tombée subitement malade. Un récit poignant sur fond de peur de la finitude, de souffrance et d'enfance déchirée.
Le livre : Dis-moi pour qui j’existe ?, JC Lattès, 272 p.

L'émission : (1/2) Dans l'univers poétique de l'enfance et de la mémoire, avec Abdourahman Waberi, 04/12/2021, 04:11
L'un des rares écrivains francophones de la Corne de l'Afrique, Abdourahman Waberi a fait irruption sur la scène littéraire dans les années 1990 avec des nouvelles poétiques d'une grande virtuosité. En trente ans de pratique littéraire ininterrompue, l'écrivain djiboutien s'est imposé comme un auteur majeur de la littérature africaine contemporaine, alternant récit, nouvelles, contes et poésies. Son dernier roman Pourquoi tu danses quand tu marches ? vient de paraître en format poche.
L'émission :
(2/2) Dans le bruissement des mondes à venir, avec Abdourahman Waberi, 11/12/2021, 04:08
Nouvelliste, poète et romancier, le Djiboutien Abdourahman Waberi a construit en trente années de carrière littéraire une œuvre originale, conjuguant prose et poésie, satire et quête d'utopies. Dans le second volet consacréà cette voix importante des lettres africaines, retour sur la trajectoire littéraire de l'écrivain, ponctuée de ruptures, de questionnements et de renouveau.
Le livre : Pourquoi tu danses quand tu marches ?, Folio, 224 p.

Encore un ou deux ?...

HENRI LOPES

L'émission : Le Pleurer-rire d'Henri Lopes (congolais), 19/04/2020, 04:16
Le Pleurer-Rire est le grand roman africain des années 1980, sous la
plume du Congolais Henri Lopes. À travers les mille frasques de son personnage-potentat au langage fleuri qui exerce sur son peuple une dictature atroce, le romancier explore la problématique du pouvoir et du contre-pouvoir. Ce roman qui s'inscrit dans une conception polyphonique de l'écriture romanesque, a contribué au renouvellement de la littérature africaine francophone.
Le livre
: Le Pleurer-rire, Présence africaine, 372 p.

L'émission : (1/2) De Poto-Poto à Paris, avec le Congolais Henri Lopes, 19/06/2021,04:21
C'est en publiant en 1971, il y a 50 ans, son premier ouvrage de fiction, Tribaliques, que le Congolais Henri Lopes s'est fait connaître. Récompensé l'année suivante par le Grand Prix littéraire de l'Afrique noire, ce recueil de nouvelles a permis à l'auteur d'asseoir sa réputation de témoin attentif des heurs et malheurs de l'Afrique des indépendances. Menant de front une double carrière politique et littéraire, Lopes s'est imposé comme un romancier incontournable, auteur d'une œuvre importante, située entre critique sociale et introspection.
L'émission : (2/2) La condition métisse, avec Henri Lopes, 26/06/2021, 03:56
Suite de la chronique littéraire consacrée au congolais Henri Lopes. C'est en publiant en 1971, il y a 50 ans, son premier ouvrage, Tribaliques, que cet auteur s'est fait connaître. Dans les années 1990, il a renouvelé son inspiration en puisant son matériau romanesque dans son propre itinéraire de métis tiraillé entre la négritude et son ascendance européenne. Comment l'écriture de Lopes a épousé les mouvements de sa prise de conscience, tel est le sujet de ce second volet de la chronique.
Les livres
: Tribaliques, nouvelles (1971), La Nouvelle Romance, roman (1976), Sans tam-tam, roman (1977), Le Pleurer-rire, roman (1982), Le Chercheur d'Afriques, roman (1990), Sur l'autre rive, roman (1992), Le Lys et le Flamboyant, roman (1997), Dossier classé, roman (2002), Ma grand-mère bantoue et mes ancêtres les Gaulois, essai (2003), Une enfant de Poto-Poto, roman (2012), Le Méridional, roman (2015), Il est déjà demain, mémoires (2018)
.

TIERNO MONENEMBO

L'émission : Pelourinho de Tierno Monénembo (guinéen, prix Renaudot 2008), 24/05/2020, 04:44
Prix Renaudot 2008, Tierno Monénembo est romancier, avec à son actif treize romans. Né en Guinée en 1947 et exilé de son pays depuis l'âge de 23 ans, il a publié une œuvre majeure qui fait une large place à la nostalgie et à l'exil. Partagés entre la maison introuvable et le monde, ses romans font voyager à travers les pays où il a séjourné plus ou moins longuement (Côte d'Ivoire, Sénégal, France, Brésil, Cuba, Algérie). De livre en livre, il a construit une fiction-monde à nulle autre pareille dans le champ littéraire africain, invitant ses lecteurs à le suivre dans l'intimité des sociétés et de leurs vécus. Dans Pelourinho, son cinquième roman, Tierno Monénembo retrace la quête éperdue d'un écrivain africain au Brésil.
Le livre : Pelourinho, Seuil, 224 p. (indisponible) ; choisir : Les crapauds-brousse, Points, 192 p.

L'émission : Descente aux enfers du Camp Boiro, avec Tierno Monénembo, 27/02/2022, 03:50
Le Guinéen Tierno Monenembo compte parmi les grands romanciers africains. Ecrivain engagé contre la dictature et la gabegie politique dans son pays, il a longtemps vécu en exil, avant de rentrer au bercail en 2012. Il est l'auteur de quatorze romans dont le dernier intitulé Saharienne indigo, qui raconte les vivants et les morts dans le camp de concentration de Sékou Touré.
Le livre : Saharienne indigo, Seuil, 2022, 331 p.


Des femmes !


Par curiosité - et intérêt bien sûr - regroupons les femmes : elles sont vraiment nombreuses !

De Côte d'Ivoire

L'émission : Retour sur la crise post-électorale en Côte d'Ivoire, avec la Franco-Ivoirienne Véronique Tadjo, 06/10/2024 - 07:17 Poète, romancière, peintre, Véronique Tadjo a une vingtaine de livres à son actif. Elle est connue pour ses albums pour la jeunesse qu'elle illustre elle-même. Véronique Tadjo est à l'honneur ce dimanche dans Chemins d'écriture, à l'occasion de la sortie cet automne de son nouveau roman Je remercie la nuit, paru aux éditions Mémoire d'encrier.
Le livre
: Je remercie la nuit, éd. Mémoire d’encrier, 302 p.

D'Afrique du Sud

L'émission : Fille de Burger de Nadine Gordimer (prix Nobel), 09/05/2020, 05:00
Célèbre romancière de l'Afrique du Sud, prix Nobel de littérature 1991, disparue en 2014, Nadine Gordimer avait fait de sa fiction un puissant outil de dénonciation des brutalités perpétrées par son gouvernement contre la population noire du temps de l'apartheid. Paru en 1979, son septième roman, Fille de Burger, met en scène l'héritage intellectuel d'un grand activiste anti-apartheid qui a réellement existé, tout en s'interrogeant sur le coût humain et familial de l'engagement politique. Ce roman est l'un des grands livres sous la plume de la magistrale chroniqueuse des heurs et malheurs de son pays que fut Gordimer.
Le livre : Fille de Burger, trad. de l'anglais Guy Durand, Points, 528 p.
Un autre livre de Nadine Gordimer : Le conservateur, Grasset, coll. Les Cahiers Rouges, 378 p.

Du Cameroun

L'émission : Dans le chaos tragique de l'existence humaine, avec Hemley Boum, 13/02/2021 - 03:50
La romancière camerounaise Hemley Boum est l'auteure de quatre romans. Son dernier opus, Les Jours viennent et passent (Gallimard, 2019), a été couronné en 2020 par le prestigieux prix Ahmadou-Kourouma, qui récompense tous les ans un auteur d'expression française. "Chemins d'écriture" revient ce samedi sur le parcours peu commun de cette auteure talentueuse, héritière de la tradition littéraire camerounaise caractérisée par son goût pour l'ironie, la subversion et l'engagement social.
Le livre
: Les jours viennent et passent, Folio, 416 p.

L'émission : Entre le Cameroun et la France, avec la Franco-Camerounaise Kiyémis, 28/04/2024 - 03:58
Poétesse, afro-féministe, bloggeuse, la Franco-Camerounaise Kiyémis est une trentenaire aux multiples talents. Elle vient de publier ces jours-ci Et, refleurir, un roman inspiré de la trajectoire riche en témérités féministes et en rêves d'ailleurs de sa grand-mère maternelle.
Le livre
: Et, refleurir, éd. Philippe Rey, 382 p.

Du Sénégal

L'émission : Une si longue lettre de Mariama Bâ, 22/03/2020, 04:39
Apologie poignante de l'égalité homme-femme dans la société musulmane, Une si longue lettre de la Sénégalaise Mariama Bâ est devenu un classique de la littérature africaine moderne. Il est au programme des écoles et des universités à travers le continent.
Le livre : Une si longue lettre, éd. Litos, 176 p.
En ligne ›ici

L'émission : Le Ventre de l'Atlantique par Fatou Diome, 26/07/2020, 04:17
En 2003, avec son premier roman Le Ventre de l'Atlantique, la Sénégalaise Fatou Diome faisait une entrée fracassante en littérature. Il s'agissait d'un brillant premier roman, de construction maîtrisée jusque dans ses exubérances. À la fois caustique et tragique, le livre raconte "l'aventure ambiguë" d'une jeune femme sénégalaise, ballottée entre l'Europe qui la rejette car elle est Noire et son Afrique natale où elle n'a connu que le malheur et la honte à cause de sa naissance hors mariage. Étrangère partout, Salie, qui est aussi un peu Fatou Diome, cherche son territoire sur la page blanche devenue son ultime refuge.
Le livre : Le ventre de l'Atlantique, Le Livre de poche, 256 p.
L'émission : Dans le ventre de la vie, avec la romancière Fatou Diome,13/03/2021 03:53
Vingt ans après La Préférence nationale, le premier recueil de nouvelles révélant le talent de conteuse hors pair de Fatou Diome, la Franco-Sénégalaise renoue avec l'art de la fiction courte en publiant sa dernière collection de nouvelles. De quoi aimer vivre regroupe dix récits brefs, bâtis autour des éclopés de la vie et racontés avec un sens d'urgence et de drame. La Strasbourgeoise Fatou Diome est aujourd'hui l'auteure d'une œuvre littéraire majeure, composée d'une dizaine de titres, dont son premier roman, Le Ventre de l'Atlantique, l'un des plus grands succès de librairie africains de ces vingt dernières années.
Le livre : De quoi aimer vivre, Albin Michel, 2021, 233 p.

Du Nigéria

L'émission : L'Autre moitié du soleil par Chimamanda Ngozi Adichie, 05/04/2020, 04:00
Héritière de la grande tradition littéraire du Nigeria, Chimamanda Adichie est une grande voix de l'Afrique anglophone. Son superbe roman tolstoïen sur la guerre du Biafra, L'Autre moitié du soleil, est entré dans le répertoire des classiques de la littérature contemporaine.
Le livre : L'autre moitié du soleil, trad. de l'anglais Mona de Procontal, Folio, 672 p.
Et aussi Americanah, trad. de l'anglais Anne Damour, Folio, 704 p.
Nous sommes tous des féministes, Folio, 80 p.

L'émission : Littérature : descente dans les bruits et la fureur de Lagos, avec Tola Rotimi Abraham, 27/11/2021, 03:37
Passée par le programme d'écriture créative de l'université d'Iowa aux Etats-Unis, la Nigériane Tola Rotimi Abraham nous livre avec son premier roman, Black Sunday, un ouvrage de fiction étonnamment abouti. Un début prometteur.
Le livre
: Black Sunday, trad. de l'anglais Karine Lalechère, éd. Autrement, 32
7 p.

L'émission : Le jugement de Salomon, revu et corrigé par la Nigériane Oyinkan Braithwaite, 18/11/2023 - 03:56
Avec un premier roman devenu un best-seller international, la romancière nigériane Oyinkan Braithwaite est une figure montante des lettres nigérianes modernes. L'Une ou l'Autre, son second roman qui vient de paraître en français, est une réécriture grinçante mais réactualisée du jugement de Salomon. Antique et moderne.
Les livres :
- L’Une ou l’Autre, trad. de l’anglais Christine Barbaste, éd. La Croisée, 152 p.
-
Ma sœur, serial killeuse, éd. La Croisée, 244 p.

L'émission : Dans la chaleur et la poussière du Londres noir, avec Bernardine Evaristo (britannique et nigérianne, née en 1959), 12/03/2022, 03:46
Première femme noire à recevoir le Booker Prize en 2019 avec son magistral Fille, femme, autre, Bernardine Evaristo domine la littérature britannique du haut de son écriture délicieusement subversive. La parution en traduction française de Mr. Loverman, l'un des précédents romans de la Britannique racontant le "coming out" d'un dandy caribéen dans le Londres d'aujourd'hui, est une belle occasion de découvrir ou de redécouvrir la plume aux mille talents de cette écrivaine militante de la cause noire. La
voix de l'héroïne est annonciatrice des douze voix de femmes dans Fille, femme, autre, roman, qui a fait la renommée littéraire de "Mrs Evaristo".
Le livre : Mr. Loverman, trad. de l’anglais Françoise Adelstain, éd. Globe, 302 p, rééd. Pocket, 360 p. (publié en 2013), traitant de l'homosexualité masculine.
Et aussi : Fille, femme, autre (Girl, Woman, Other, 2019), Pocket, 576 p. Pour ce livre,  l'auteure a été colauréate du Booker Prize en 2019, conjointement avec l'écrivaine canadienne Margaret Atwood (pour Les testaments). De 19 à 96 ans, Amma, Dominique, Yazz, Shirley, Carole, Bummi, LaTisha, Morgan, Hattie, Penelope, Winsome, Grace, "douze femmes puissantes, apôtres du féminisme et de la liberté, chacune à sa manière, d'un bout de siècle à l'autre".

L'émission : Au cœur des silences et des désespoirs des migrants nigérians, avec Chika Unigwe (née en 1974 au Nigéria), 07/05/2022 - 04:16
Auteure de quatre romans et d'un recueil de nouvelles, Chika Unigwe partage sa vie entre le Nigeria et les États-Unis où elle vit aujourd'hui après avoir habité pendant une quinzaine d'années la Belgique. Son roman, On Black Sisters' Street, qui vient de paraître en français sous le titre Fata Morgana, a imposé cette écrivaine comme l'une des voix majeures des lettres africaines.
L'émission : Dans le sillage des femmes puissantes, avec Chika Unigwe, 14/05/2022 - 03:20
Premier roman de la Nigériane Chika Unigwe à paraître en français, Fata Morgana raconte les trajectoires riches en drames et en rêves de quatre prostituées africaines échouées sur les trottoirs d'Europe occidentale. Victimes des circonstances tragiques de la vie, mais aussi du chaos qui règne dans leurs pays, elles tentent de reprendre avec le courage du désespoir la maîtrise de leur vie. Un roman poignant et puissant.
Le livre
: Fata Morgana, trad. de l'anglais Marguerite Capelle, éd. Globe, 300 p.
(publié en 2007 publié en néerlandais en 2008 et par la suite publié en anglais). L'histoire de Sisi, Ama, Efe et Joyce qui ont quitté le Nigeria...

Du Zimbabwe

L'émission : Les Vierges de pierre de Yvonne Vera (zimbabwéenne de langue anglaise), 17/05/2020, 04:47
Disparue en 2005, à l'âge de 40 ans, la romancière zimbabwéenne Yvonne Vera est l'auteure d'une œuvre littéraire brève mais prometteuse d'inventivité et de poésie. Cette œuvre, composée de 5 romans et un recueil de nouvelles, explore les drames de l'histoire contemporaine du continent africain à travers le vécu des femmes, réduites trop longtemps à la domesticité et au silence. Récit tragique de la terrible guerre civile qui a ensanglanté le Zimbabwe au début de son indépendance, son dernier roman Les Vierges de pierre est un chef-d'œuvre représentatif du style éclaté et puissamment poétique de son auteure.
Le livre : Les vierges de pierre, trad. de l’anglais Geneviève Doz, Fayard, 234 p.

L'émission : Dans le zoo politique du Zimbabwe, avec NoViolet Bulawayo [1/2], 02/09/2023 - 06:14
Romancière zimbabwéenne, NoViolet Bulawayo illumine la rentrée étrangère 2023 avec son second roman Glory, un récit allégorique de l'histoire du Zimbabwe. Original, inventif et drôle, ce livre est une réécriture d'Animal Farm du Britannique George Orwell. Dans les rôles principaux, un cheval, une ânesse, un cochon et des chiens habillés en tuniques de toutes les couleurs.
L'émission : Dans la ferme des animaux, version zimbabwéenne, avec NoViolet Bulawayo (2/2), 09/09/2023 - 07:12
Dans ce second volet de la chronique consacrée à la romancière NoViolet Bulawayo et à son nouveau roman Glory, il est question des lendemains qui déchantent au Zimbabwe et de leur représentation sous la plume inventive d'une romancière montante, bourrée de talents. Avec deux romans à son actif et une grande intelligence narrative, la Zimbabwéenne s'impose comme une nouvelle star dans le firmament des lettres africaines.
Le livre
: Glory, trad. de l’anglais Claro, éd. Autrement, 449 p.

L'émission : À fleur de peau par Tsitsi Dangaremgba, 02/08/2020, 04:05
Considérée comme une des figures de féminisme africain, la Zimbabwéenne Tsitsi Dangarembga a acquis une notoriété internationale en 1988, en publiant son roman culte À fleur de peau. C'est un récit autofictionnel qui raconte, à travers les heurs et malheurs de son héroïne Tambudzai, les discriminations contre les femmes dans la société patriarcale au Zimbabwe. À fleur de peau est le premier volume d'une trilogie, dont le dernier volet intitulé This Mournable Body a été sélectionné pour le Booker Prize 2020, prestigieux prix littéraire britannique.
Le livre
: À fleur de peau, trad. de l’anglais Etienne Galle, Albin Michel, 267 p. (indisponible)
L'émission :
Tsitsi Dangarembga, romancière, cinéaste et militante féministe 05/12/2020 03:45
Tsitsi Dangaermbga est la grande dame des lettres zimbabwéennes. Elle s'est fait connaître en publiant en 1988 son premier roman Nervous conditions. "Le livre que nous avons tant attendu et que nous devrions tous lire", disait Doris Lessing de ce premier roman. Tsitsi Dangarembga est aussi cinéaste et militante féministe et politique.
Le livre
: Ce corps à pleurer, trad. de l'anglais par Nadine Carré, Mémoire d'encrier, 455 p.
L'émission : L'Afrique fantôme, selon Tsitsi Dangaremgba (1/2), 27/01/2024 - 03:57
La Zimbabwéenne Tsitsi Dangaremgba est romancière, mais aussi dramaturge, cinéaste, militante féministe. Son œuvre, partagée entre le politique et l'intime, puise son inspiration dans les failles de la société zimbabwéenne, préférant montrer les corruptions à l'œuvre, attirant l'attention sur leurs impacts sur les êtres et les choses, plutôt qu'à simplement les critiquer. Son dernier roman Ce corps à pleurer, récemment traduit en français, renoue avec les thèmes de la discrimination sociale et des violences patriarcales qui ont fait le succès de son chef-d'œuvre Nervous conditions, lauréat du Commonwealth Writer's Prize.

Le livre
: Ce corps à pleurer, trad. de l’anglais Nathalie Carré, éd. Mémoire d’Encrier, 455 p.
Littérature : l'Afrique fantôme, selon Tsitsi Dangaremgba (2/2), 03/02/2024 - 07:27
Paru en 2020 en Angleterre et disponible depuis peu en traduction française, Ce Corps à pleurer est le dernier volet de la trilogie romanesque de la Zimbabwéenne Tsitsi Dangarembga. Tambudzai, protagoniste de la trilogie, avait autrefois de grands rêves, mais elle est rattrapée aujourd'hui par la réalité du Zimbabwe postcolonial où se déroule l'action du nouveau roman. Gagnée par l'amertume et la frustration, elle voit ses rêves s'effilocher au fil des crises qui frappent son pays. Elle tente de survivre au jour le jour.

De l'île Maurice

L'émission : La Mauricienne Ananda Devi raconte le "Fardo" millénaire des femmes, 03/10/2020, 03:39
Le nouveau livre sous la plume de la romancière mauricienne Ananda Devi n'est pas un roman, mais un exercice original d'écriture publié en coédition avec le musée des Confluences à Lyon. Inspiré de la rencontre de l'auteure avec la momie d'une femme péruvienne, précolombienne, qui a vécu il y a trois mille ans, Fardo est un texte à mi-chemin entre anthropologie, histoire et réflexion sur l'art et l'écriture. Original dans sa forme, ce livre renoue toutefois avec les thématiques obsédantes de l'œuvre d'Ananda Devi, qui vont de la condition féminine à la violence sociale, en passant par la prise de parole par ceux qui n'ont pas droit à la parole. "Chemin d'écriture" brosse le portrait de cette autrice prolifique et féministe qui a fait de la littérature son outil d'exploration des continents de souffrances.
Le livre : Fardo, co-édition Cambourakis et Musée des Confluences, 65 p.
L'émission : Réfléchir sur le mystère de l'écriture, avec la Mauricienne Ananda Devi, 02/04/2022 - 07:12
On ne présente plus Ananda Devi. Figure majeure de l'espace littéraire francophone, cette romancière d'origine mauricienne est l'auteure d'une vingtaine de livres dont des romans, des recueils de nouvelles et de poésies, des récits. Son œuvre primée, célébrée, est enseignée dans les écoles et les universités de l'île Maurice et du monde. Elle vient de publier un essai sur l'écriture intitulé Deux malles et une marmite et un nouveau roman.
Les livres
:
- Deux malles et une marmite, éd. Project’îles, 2021, 127 p.
- Le rire des déesses, Grasset, 2021, 240 p. ; rééd. Livre de poche, 2024, 264 p.
L'émission : "Apocalypse Now", revu et corrigé par la Mauricienne Ananda Devi, 21/10/2023 - 04:21
Ananda Devi est la grande dame des lettres mauriciennes. Désignée "Voix de Maurice" par Le Clézio, elle raconte dans son nouveau roman les dérives de son île, où les bouleversements tectoniques s'ajoutent à l'avidité des hommes, menaçant de plonger le pays dans le chaos total. Fable sur la fin de la civilisation humaine, ce récit futuriste met en scène les caméléons qui attendent en coulisses que les humains finissent par s'autodétruire pour prendre leur place. Le livre : Le jour des caméléons, Grasset, 272 p.
L'émission : Dans la prison-musée de Montluc, avec la Franco-Mauricienne Ananda Devi, 25/08/2024, 04:50
"Aussitôt, le poids de la prison de Montluc s'installe, tel un oiseau lourd et familier, sur mes épaules", écrit la romancière Ananda Devi dans son nouveau livre, inspiré de son passage à la prison lyonnaise où elle a passé une nuit blanche, à l'invitation de son éditeur.
Le livre
: La nuit s’ajoute à la nuit, Stock, coll. "Ma nuit au musée", 293 p.

Du Rwanda

L'émission : La quête de la langue perdue et retrouvée, avec Beata Umubyeyi Mairesse, 03/09/2022 - 03:40
Lauréate 2020 du Prix des Cinq continents de la Francophonie pour son premier roman, la Franco-Rwandaise Beata Umubyeyi Mairesse s'est imposée comme l'une des voix majeures de la littérature africaine contemporaine. Elle publie cet automne son deuxième roman, Consolée, qui raconte, à travers la dérive mentale et physique d'une vieille dame énigmatique à la peau cuivrée, la colonisation et ses séquelles dramatiques sur les vies.
Le livre
: Consolée, éd. Autrement, 376 p.

L'émission : (1/2) Dans les confins des mémoires étiolées, avec la romancière Beata Umubyeyi Mairesse, 12/05/2024
Issue de la génération marquée à tout jamais par le génocide des Tutsi, l'écrivaine franco-rwandaise Beata Umubyeyi Mairesse puise autant dans son vécu personnel que dans l'histoire collective de son pays le matériau de son œuvre littéraire. C'est une œuvre qui se veut à la fois témoignage et méditation sur la lente descente de tout un peuple dans l'enfer génocidaire. À 45 ans, Béata Mairesse est l'auteure d'une dizaine d'ouvrages dont Le Convoi, à mi-chemin entre récit et (en)quête, qui vient de paraître aux éditions Flammarion. Le cheminement littéraire de cette auteure, considérée comme l'une des plumes les plus talentueuses des lettres rwandaises contemporaines, et son nouvel opus sont au menu de la chronique littéraire africaine de ce dimanche.
L'émission : (2/2) Beata Umubyeyi Mairesse, incontournable interprète des soubresauts de la postcolonie rwandaise, 19/05/2024 - 04:14
La romancière franco-rwandaise Beata Umubyeyi Mairesse est une survivante du génocide contre les Tutsis dont nous commémorons cette année le trentième anniversaire. Avec son nouvel ouvrage, Le Convoi, qui n'est pas un roman, elle livre le récit à la fois politique et intime de sa traversée de l'enfer génocidaire. Elle raconte sa propre histoire de fuite et de délivrance en l'inscrivant dans la grande histoire de la réappropriation de la mémoire collective par les dominés et les colonisés du monde.
Le livre
: Le Convoi, Flammarion, 333 p.

Du Ghana

L'émission : Eloge des femmes irrévérencieuses, avec la Ghanéenne Peace Adzo Medie, 23/09/2023 - 06:27
Universitaire spécialisée dans la politique internationale et des sujets liés à la question du genre, la Ghanéenne Peace Adzo Medie signe avec Sa seule épouse un premier roman lucide et ironique sur le patriarcat. Récit sentimental et social, ce passionnant tourne-page, riche en intrigues et frustrations, flirte avec les conventions des romans à l'eau de rose pour raconter le vécu des femmes africaines contemporaines aux prises avec les préjugés anti-féministes de leurs sociétés.
Le livre :
Sa seule épouse, trad. l’anglais Benoîte Dauvergne, éd. de l’Aube, 304 p.

De la Somalie

L'émission : À la recherche de la patrie imaginaire, avec la Somalo-Italienne Ubah Cristina Ali Farah, 29/07/2023 -04:14
Romancière, poète, scénariste, librettiste, l'Italienne d'origine somalienne Ubah Cristina Ali Farah est l'une des figures montantes de la littérature postcoloniale et de la migration. Titulaire d'un doctorat sur la culture populaire somalienne, elle partage sa vie entre l'enseignement, l'écriture et des projets associatifs interculturels. Elle a trois romans à son actif dont le premier, Madre piccola, vient de paraître en traduction française aux éditions Zulma.
Le livre : Madre piccola, trad. de l’italien François-Michel Durazzo, Zulma, 345 p.

De Madagascar

L'émission : Dans l'engrenage de la conquête coloniale à Madagascar, avec Michèle Rakotoson, 23/07/2022 - 07:37
Dans son nouveau roman Ambatomanga, la romancière malgache Michèle Rakotoson raconte la conquête coloniale de son pays au XIXe siècle, revisitant à travers la fiction les brutalités et la dévastation dont sa société ne s'est pas encore totalement remise. Auteure de plusieurs ouvrages de théâtre, nouvelles, essais, récits et romans, elle puise l'essentiel de son inspiration dans les réalités à la fois dramatiques et exaltantes de son Madagascar natal.
Le livre : Ambatomanga : le silence et la douleur, éd. Atelier des nomades, 2021, 268 p.



Nous écrire
Accueil | Membres | Calendrier | Nos avis | Rencontres | Sorties | Liens