|  Extrait de Goodreads
  Quatrième de couverture : « Dans 
        le Maroc des années 1940, Mohamed assiste terrorisé au meurtre 
        de son frère par son propre père. Fuyant le "monstre", 
        il erre dans les bas-fonds de Tanger, côtoie la famine et la délinquance. 
        De ces nuits à la belle étoile, il gardera le goût 
        du sexe et lamertume de la prison. La vérité crue 
        et laudace littéraire de Mohamed Choukri ont fait de cette 
        autobiographie une uvre culte.
 Né dans le Rif marocain, Mohamed Choukri (1935-2003) 
        est lauteur de romans ? notamment Le 
        Temps des erreurs, de nouvelles, de pièces de théâtre 
        et dessais qui lont placé parmi les auteurs majeurs 
        de la littérature arabe. "Un texte nu. Dans la 
        vérité du vécu, dans la simplicité des premières 
        émotions." (Tahar Ben Jelloun) » Cette autobiographie publiée en 1980 a deux autres 
        volets publiés en 1994 et 1996 : Le 
        Temps des erreurs et Visages. 
 
 
  Le pain nu, première édition en 1973, traduit en anglais 
        par Paul Bowles
 |  | Mohamed Choukri (1935-2003)Le pain nu
 
Nous avons lu pour le 31 mars 2017 ce 
        livre traduit en 1980 par Tahar Ben Jelloun, avec une préface 
        du traducteur.C'est la lecture de Rue 
        des voleurs de Mathias Énard qui nous a donné envie 
        de lire ce livre. Les personnages 
        du roman évoquent en effet à plusieurs reprises le livre 
        (voir ICI ces passages).Voir en 
        bas de page des infos sur le livre, l'auteur, la traduction.Jacqueline (avis transmis) J'ai aimé le style direct et sobre pour évoquer et la misère, 
        et la force vitale de l'enfance et de la jeunesse.
 Pour moi, l'auteur a su créer un monde plus "vrai", plus 
        crédible que Boualem 
        Sansal. Il est entré en résonnance avec celui de Mathias 
        Énard dont j'imagine qu'il a eu connaissance... Il m'évoque 
        Calaferte 
        pour la situation et la haine du père mais aussi 
        Arenas pour la force vitale... Merci à Tahar Ben Jalloun pour 
        la traduction et merci à qui l'a proposé. La suite Le 
        temps des erreurs 
        m'a paru avoir un peu moins d'unité. Ouvert aux ¾.
 Séverine
  La tentation est grande de vouloir parler de ce livre en le comparant 
        à celui lu précédemment. Peut-être parce que 
        les deux traitent de l'enfance des deux narrateurs, à peu près 
        à la même époque et dans des milieux défavorisés 
        (mais certes pas dans le même pays). Si je cède à 
        cette envie de comparer, je dirais que je préfère de loin 
        Le pain nu à L'amie 
        prodigieuse. Certes, dans Le pain nu, le contexte est beaucoup 
        plus rude et plus violent que pour notre amie Elena, mais je trouve qu'il 
        y a une force, une brutalité dans le style qui ne peuvent pas laisser 
        insensible. On rentre dans le livre en se prenant un coup de poing dans 
        la figure. C'est direct, c'est cru. Et il y a une drôle d'impression 
        d'intemporalité et d'universalité : on en oublie parfois 
        qu'on est au Maroc, et on a du mal à situer l'époque.
 Ce destin terrible m'a rappelé Kyra 
        Kyralina de Panaït Istrati : on est dans le même 
        cas de figure, et dans l'histoire, et dans la vie des auteurs (deux autodidactes 
        qui pour l'un a appris à lire et écrire tardivement et qui 
        pour l'autre a appris le français tout seul). Ça m'a rappelé 
        également Rue 
        des voleurs avec ce personnage principal éloigné 
        de sa famille (l'un par ce qu'on l'a renié et l'autre parce qu'il 
        veut fuir la violence) qui essaie de s'en sortir et enchaîne les 
        métiers honnêtes ou malhonnêtes et pour qui le sexe 
        est une question centrale. Le sexe justement, parlons-en : il participe 
        de l'intérêt du livre, car remis dans le contexte de l'écriture 
        de ce roman, on comprend toute la dimension révolutionnaire que 
        prend la crudité des descriptions. En tout cas, je remarque que 
        les prostituées ont été de tous les livres que nous 
        avons lus récemment : Rue 
        des voleurs, Rue 
        Darwin
 et dans Kyra 
        Kyralina !
 Pour apporter un bémol à mon commentaire, je dirai que plus 
        j'avançais dans ma lecture et plus je peinais : passé 
        la découverte du style et de la force du texte, j'ai trouvé 
        que l'on entrait dans une succession de situations qui peu ou prou étaient 
        toujours les mêmes. Donc, mon intérêt s'est émoussé. 
        Pour finir, je ferai deux remarques : dans tous les derniers romans 
        que nous avons lus, les livres et l'écriture ont été 
        des personnages importants de chacune des histoires. Et j'ai été 
        interloquée par le fait que la religion ne soit pas plus présente 
        que cela, mais j'ai tout de même noté cette phrase sur laquelle 
        je conclurais : "Tout 
        ça arrive à cause du vin et des femmes dans un pays musulman 
        gouverné par des chrétiens". Une citation 
        qui pourrait donner à réfléchir aujourd'hui encore
 Je l'ouvre à moitié. Bonne soirée !
 Monique L
  (avis 
        transmis) Difficile de parler de ce livre qui m'a pourtant fait une forte impression.
 Ce n'est pas à proprement parler une uvre littéraire. 
        En tout cas, ce n'est pas ce que j'en retiens, mais un témoignage 
        fort et sans retenue sur un monde que je ne connais pas. Des mots crus 
        qui dépeignent de façon très réaliste le quotidien 
        d'un gosse qui mène une vie de galère. Dans l'extrême 
        pauvreté, Mohamed n'a pas le choix, la vie le force à déraper.
 Les dérives sont sinon inéluctables tout au moins faciles. 
        On ne peut pas blâmer. C'est un livre désabusé. J'ai 
        été saisie par la froideur déconcertante avec laquelle 
        la scène traumatisante et monstrueuse de la mort du petit frère 
        a été relatée.
 Un autre fait m'a marquée et que je trouve terrible, c'est que 
        malgré la haine que Mohamed ressent pour son père brutal 
        et alcoolique et la révolte qu'il n'a cessé d'enfouir en 
        lui, il ne lui vient pas à l'idée de contrer son autorité. 
        Pour lui, c'est impensable ! "Je 
        vous l'ai dit : il est comme un Dieu. Mais qui lui a donné 
        ce pouvoir ?"
 Une lumière à la fin puisqu'admirant et enviant un de ses 
        amis, un érudit, qui lui parle du Coran et lit des nouvelles du 
        journal, il veut apprendre à lire et à écrire.
 J'ouvre en entier.
 L'écrivain marocain, Abdellah 
        Taïa très visible ces derniers temps, et qui a vécu 
        son enfance dans le Maroc des pauvres, évoque fréquemment 
        cette uvre qu'il dit avoir lu en cachette, comme tout le monde.
 Monique S
  (avis 
        transmis) J'ai lu Le Pain nu, pourtant je ne peux juger sur l'écriture 
        de l'ouvrage (style, choix et montage des séquences souvenirs) 
        car de qui est-ce ? Choukri dans son premier jet ? Oral ou écrit 
        (pourquoi pas, la littérature fut d'abord une superbe littérature 
        orale) ou alors retravaillé par celui qui lui avait commandé 
        ses mémoires ? Et puis cette drôle de traduction de 
        Tahar ben Jelloun... Comment savoir qui a fait quoi... Encore un livre 
        "accrocheur" sur le plan éditorial et économique 
        me dis-je, sur les dessous pas toujours jolis de la culture du Maghreb. 
        Néanmoins, j'ai lu ce livre sans m'ennuyer, parce qu'écrit 
        par quelqu'un qui a vécu ces événements, je me suis 
        attachée à voir comment la violence subie forme des bourreaux. 
        Cette question me turlupine depuis que j'ai pris connaissance des méfaits 
        tragiques du nazisme, puis bien d'autres, jusqu'aux islamistes aujourd'hui. 
        Quel est le germe, où se trouve le point de non-retour qui, mieux 
        connus, pourraient nous aider à ne pas basculer dans ce type de 
        comportements ?
 Pour "ouvrir le livre", j'hésite un peu... disons ½ 
        pour l'intérêt sociologique.
 Nathalie R
  Je n'ai rien écrit cette fois, mais je suis venue avec des vivres. 
        (Nathalie montre d'autres livres d'auteurs nés 
        au Maroc : Confidences 
        à Allah de Saphia 
        Azzeddine, de Mahi Binebine Les 
        Funérailles du lait et Le 
        seigneur vous le rendra. Elle évoque aussi Stéphanie 
        Gaou, libraire à Tanger.)
 J'ai beaucoup aimé car j'ai vécu au Maroc, il n'y a pas 
        si longtemps. Et par rapport à ce que décrit le livre, pour 
        moi, pas grand-chose n'a changé : à Casablanca, je voyais 
        des maisons avec piscine et non loin et des gamins de 7ans qui sniffaient. 
        Parmi mes élèves, certains tombaient dans le coma profond. 
        Mahi Binebine, 
        qui est aussi peintre, sculpteur, raconte dans Le 
        seigneur vous le rendra, une sorte de pendant à ce livre, 
        comment un enfant a son corps modifié par les mendiants pour pouvoir 
        mendier. Quant au viol masculin c'est commun, car il y a une frustration 
        énorme, on ne peut en effet aller à l'hôtel sans être 
        marié. Stéphanie Gaou évoque une femme qui à 
        son tour consomme les hommes dans Capiteuses. 
        J'aime beaucoup la littérature marocaine. Ici, je suis choquée 
        par l'écriture hors norme : est-ce qu'il avait été 
        enregistré avant l'écriture ? Il y a des passages poétiques. 
        C'est une histoire noble. Avec plein de choses dans ce livre, qu'on m'avait 
        conseillé et qui était interdit. En effet, il dénonce. 
        Il m'a beaucoup émue. J'ouvre complètement...
 Catherine
  Alors c'est un livre qui ne laisse pas indifférent. J'ai aimé 
        la première moitié, c'est très percutant. L'assassinat 
        du frère par exemple
 C'est très cru depuis le début, 
        très prenant, mais
 au bout d'un moment mon intérêt 
        a décru. Toutes ces dérives en détail m'ont un peu 
        ennuyée à la fin. J'ai été étonnée 
        car on parle très peu de religion, avec tout ce sexe très 
        cru, par rapport par exemple à Rue des voleurs, où 
        la référence à la religion existe, ici c'est un univers 
        sans religion. Il est vrai que c'est moins récent. Avec ce style 
        très cru, c'est vraiment un livre réduit à l'essentiel. 
        Le style comme l'histoire sont très percutantes. J'ai surtout été 
        saisie par le début. Cet enchaînement de livres sur le Maghreb que 
        nous avons lu (Anima 
        de Wajdi Mouawad, Rue 
        des voleurs de Mathias Énard, Rue 
        Darwin de Boualem Sansal, et maintenant Le pain nu de Mohamed 
        Choukri), c'est très déprimant... Pas d'autre réflexion 
        sur l'écriture. C'est terrible comme histoire. Je l'ouvre à 
        moitié.
 Françoise DJe ne vais pas en dire beaucoup. Je suis aussi très étonnée 
        que la religion soit absente. Il n'arrête pas de picoler et de baiser. 
        Ça m'a surprise. Que le récit soit crédible, oui, 
        tout à fait. Après
 je ne sais pas comment dire
 
        qu'est-ce que c'est que cette traduction ! Il l'a pas vraiment écrit 
        ce livre. Il a fait ça au fur et à mesure, c'est Bowles 
        qui a écrit. Est-ce que j'ai compris ou pas ? C'est Tahar 
        Ben Jelloun qui l'a traduit ? Je trouve que c'est mal traduit. De 
        toute façon sa préface est nulle
 Une fois tout ça 
        posé, cette histoire est à la fois banale et extraordinaire ; 
        on sait qu'il s'en sort. Oui, parfois c'est poétique mais on retombe 
        très vite dans le trivial. Pour moi ce n'est pas un objet littéraire, 
        c'est le reflet d'une époque, il n'y a pas de dimension romanesque, 
        c'est un récit. Point.
 ClaireQue veux-tu dire par "pas de dimension romanesque" ?
 Françoise
   C'est juste un témoignage.
 Et à sa mort il a eu les honneurs du Maroc !
 Donc, je n'y ai pas trouvé un intérêt très 
        important. Ça ne m'a rien appris, sauf ce qu'il a vécu, 
        lui, Mohamed Choukri. Heureusement le livre n'était pas gros
 
        J'ouvre au ¼.
 Fanny
  Le mot qui revient le plus, c'est le mot "cru" et effectivement 
        c'est un mot central. Pour ma part, j'ai trouvé qu'on était 
        au plus près ce qu'a vécu cet enfant. Je n'ai rien lu autour 
        du livre. J'ai une certaine admiration pour le courage et la capacité 
        à écrire un livre par rapport à son illettrisme, 
        et du coup cela a orienté ma lecture, j'ai eu du mal à critiquer. 
        Car j'étais au plus près de son ressenti d'enfant : 
        on est avec lui, collé à ce qu'il a vécu. Le côté 
        cru des termes ne m'a pas choquée. C'est la réalité 
        de ce qu'il a vécu. Le style est assez baroque avec des phrase 
        très poétiques ("Il 
        avait fait taire les oiseaux qui chantaient dans mon ventre" 
        p. 85). Par rapport à la religion, 
        je ne sais pas si c'est si absent que ça (et on est décalé 
        par rapport à notre époque) ; p. 132 on lit : 
        "Tout ça 
        arrive à cause du vin et des femmes dans un pays musulman gouverné 
        par des chrétiens. Nous ne sommes ni des musulmans ni des chrétiens." 
        Par contre, effectivement, même si j'ai beaucoup aimé, j'ai 
        dû le poser pour lire autre chose, mais quand je le reprenais j'avais 
        du mal à le quitter. De l'ennui ? Non pas forcément, 
        mais une forme de lassitude. J'ai dû le feuilleter pour aujourd'hui 
        afin que les choses me reviennent. Et sur le contenu, bien des choses 
        au bout de 10 jours ne me reviennent pas. J'ouvre aux ¾.
 Annick ACe livre m'a saoulée. J'ai fait des efforts. Toutes les descriptions 
        m'ont ennuyée. Effectivement c'est très violent. J'ai lu 
        après sur le livre. Je me suis dit que c'est pas de la littérature. 
        C'est pas parce que tu as souffert que tu peux en faire un livre.
 NathalieC'est pas un roman !
 Annick
  Oui, mais une vie pareille pourrait toucher. Je n'ai rien ressenti. Si 
        ce n'est de l'ennui par rapport à l'écriture. Y pas de belles 
        phrases. J'ai eu un intérêt par rapport à la vie du 
        Maroc. J'ouvre ¼ parce que l'intérêt c'est qu'il ait 
        pu écrire ce livre. La poésie moi je ne la vois pas, je 
        trouve ça très pauvre. Pour moi ce n'est pas de la littérature.
 DanièleIl y a peut-être deux niveaux dans ce livre. D'une part il y a la 
        société, avec la violence verbale, crue, la lutte pour la 
        survie, la faim. Et on comprend pourquoi il a été interdit 
        au Maroc vu l'image qu'il décrit. Les femmes sont considérées 
        par les personnages masculins comme le mal, la rouerie. La violence envers 
        elles est normale : la première femme battue que connaît 
        le narrateur, c'est sa mère, le premier homme violent c'est son 
        père. Bien qu'il haïsse son père pour sa violence, 
        il imagine, enfant, qu'il n'y a pas d'autre voie dans cette société : 
        il fera comme son père.
 D'autre part, le personnage lui-même. Je ne trouve pas le livre 
        désabusé, il y a même une forme d'optimisme. Finalement, 
        il a un rapport avec les femmes qui n'est jamais violent. Lui les traite 
        comme des êtres humains. Il est ébloui par leur beauté 
        et plutôt gentil avec elles. De ce point de vue il se démarque 
        de l'univers masculin dans lequel il évolue. Dès le début 
        il apprend tout tout seul. Que les femmes pleurent plus que les hommes, 
        par exemple ! Il décide de voler tous le gens qui l'exploiteraient, 
        je trouve ça très mûr, il s'est forgé une réflexion 
        à partir de son vécu. Et il n'a pas de tabou sexuel, il 
        avoue aimer ces choses, qui sont pourtant mauvaises. Il est poussé 
        par son désir dans une société qui ne lui envoie 
        que des images de frustration. C'est un portrait de personnage à 
        part. Le narrateur ne se glorifie pas de cette attitude, cela est présenté 
        en creux, de manière douce et subtile. Ce potentiel de réflexion 
        et de dignité, cette énergie positive vont de pair avec 
        son envie d'apprendre à lire et à écrire. Cela lui 
        ouvrira des voies, son destin à lui.
 Ce qui m'a choquée plutôt, c'est la traduction. Tahar Ben 
        Jelloun a mis beaucoup trop son grain de sel comme le montre l'article 
        dans lequel on voit des exemples de traduction littérale et ce 
        que Ben Jelloun en fait. Et les formules "Que veux-tu ?" 
        invraisemblables ! Ça m'a donné envie de connaître 
        l'opinion d'un traducteur. Quant à la religion, il n'y avait pas 
        les problèmes qu'il y a maintenant et qui nous rendent sensibles.
 PlusieursTu l'ouvres comment ?
 Danièle
   Ah
 c'est une difficulté
 je donnerai mon avis quand 
        je saurais quelle est la part de Tahar Ben Jelloun dans ce livre... Ça 
        me fait chuter à ½ et ce pourrait être ½ plus 
        ou ½ moins
 Richard
   J'ai une opinion très négative. Je cherche toujours quelque 
        chose de nouveau qui m'attire. C'est quasiment un documentaire sur la 
        culture marocaine. Un rapport sociologique pourrait faire la même 
        chose.
 Je me suis emmerdé. Pour une fois, j'ai pu terminer un livre du 
        groupe une semaine avant, le samedi saint
 Je l'ai réouvert 
        pour ce soir : tout le côté scatologique me déplaît, 
        les événements qu'il raconte, il y en a trop. Oui, il y 
        a quelques phrases philosophiques, mais tout est en style télégraphique. 
        Je ne me suis pas amusé. Je ne l'ouvre même pas !
 Claire
   J'étais très contente de lire ce livre que Mathias 
        Énard nous avait annoncé comme un grand livre. 
         Au début j'ai trouvé cela prenant, sidérant, 
        cette violence, cette crudité (le mot qui m'est venu comme vous 
        Fanny, Catherine). Puis je me suis lassée, j'ai trouvé que 
        ça patinait, ça tournait en rond, cela manquait de "construction". 
        Les personnages n'étaient pas "campés". J'ai guetté 
        les éléments de contexte historique (par exemple espagnol) 
        qui me remotivaient en m'instruisant. Certes, la présence de l'alcool, 
        du sexe, de la prostitution changent de l'univers musulman habituel. Mais 
        le narrateur ne m'inspire pas d'empathie, sa psychologie est frustre voire 
        floue. D'accord, c'est horrible, mais l'immoralité règne, 
        aucune valeur ou sens n'apparaît pour cet homme qui écrit 
        20 ans après les faits et à qui la distance de l'écriture 
        permettrait une forme de réflexion sur la dureté de la vie 
        et il y a juste ce programme "La vie il faut la vivre".
 Avec tous les coups qu'il reçoit, je me disais au cours de la lecture 
        qu'il devrait être défiguré voire infirme et non beau 
        gosse... donc n'en rajoute-t-il pas ?...
 Seul élément positif : la bisexualité paraît 
        très naturelle. Donc j'ai saturé et fini par lire (parcourir) 
        à toute vitesse. J'ouvre ¼ seulement, contente cependant 
        d'avoir découvert un "classique".
 Se posent par ailleurs la question de l'élaboration de ce texte 
        et le rôle du traducteur.
 Geneviève
  Je suis très étonnée par vos commentaires ! 
        J'ai l'impression de ne rien comprendre. Et votre rapport à la 
        traduction... Le livre existe par lui-même ! Celui qu'on a 
        lu, c'est celui-là !
 ClaireOn peut quand même s'interroger sur le rôle de la traduction...
 Geneviève (qui est par ailleurs spécialiste 
        de la question)Mais c'est un rapport fantasmatique à la traduction ! Moi je ne 
        lis pas comme ça. Même si quand je lis un auteur anglais, 
        je lis en anglais. Et je m'en fous de savoir s'il l'a vraiment écrit 
        lui-même. Je m'en fiche, je ne vais pas faire une enquête. 
        Et on est hors sujet quand on cherche à dire que ce n'est pas de 
        la littérature...
 Brouhaha... Brouhahahah... Brouhahahahaha... GenevièveC'est ce que j'ai entendu : y a pas de belles phrases !
 J'ai un passé de documentaliste en lycée professionnel alors 
        que je venais du monde de la littérature jeunesse, conçue 
        pour la classe moyenne bourgeoise, je me sentais à côté 
        de la plaque. Donc je me suis documentée et j'ai conseillé 
        ce livre aux (grands) gamins, j'étais gonflée quand j'y 
        pense.
 PlusieursAh oui !
 GenevièveEt ça a marché ! Aucun n'est revenu vers moi avec des réflexions... 
        Beaucoup étaient touchés par la réalité de 
        ce qui était vécu.
 Quant à la religion, là aussi c'est une vision fantasmatique. 
        Je vais deux trois fois par an au Maroc, il y a une fascination pour l'alcool.
 Il y a de beaux personnages de femmes. Et ce sentiment d'étrangeté 
        qu'a ce garçon par rapport à l'amour (il y a toujours quelque 
        chose qui s'effondre).
 Je l'ai relu avec intérêt, je le trouve toujours "VRAI". 
        Je l'ouvre complètement.
 Henri
     Je trouve que ce livre a le mérite d'exister. Il a un caractère 
        initiatique et j'ai un il bienveillant puisque par l'intermédiaire 
        de la littérature, il va aller plus haut. Je l'ai lu comme Richard 
        rapidement. 15 jours après il ne m'en restait pas grand-chose. 
        Sauf l'épisode de la contrebande. J'ai oublié l'épisode 
        espagnol. Je ne vois pas pourquoi on ramène la religion ; parce 
        que c'est le Quart Monde, on s'interroge sur la religion ?
 Soit 
        on peut considérer que le contexte instrumentalise ce livre, soit 
        on le considère comme un "objet" qui raconte une histoire, 
        son histoire (intéressante par rapport au confort dans lequel on 
        le lit) : il y a une énergie vitale, assez positive. Il va 
        faire son chemin sans se laisser influencer par les courants (machiste 
        par exemple). C'est de la littérature, tout est de la littérature, 
        mais ce n'est pas le genre de livre qu'on ouvre pour le plaisir de la 
        littérature, de l'écriture littéraire. Ces témoignages 
        ont le mérite d'exister. Ça parle de choses qui concernent 
        tout le monde. Je l'ouvre entre 0 et ¼ ou ½ pour faire politiquement 
        correct. Il me semble que la vie de Momo que raconte Romain 
        Gary, c'est bien plus romanesque...
 ClairePourquoi ce sous-titre "récit autobiographique" ? 
        On n'indique pas ce sous-titre pour les livres de Christine Angot
 
        Et la préface que je trouve détestable assimile le narrateur 
        à l'homme de façon dévalorisante. A la radio, 
        j'ai entendu Ben Jelloun en parler d'une manière pas sympa.
 À la fin du film adapté de ce livre, qui montre bien la 
        violence, il y a une très belle image : au cimetière, 
        on voit Choukri lui-même et derrière un enfant qui ramasse 
        des herbes pour faire de la soupe comme dans le livre, c'est poignant.
 GenevièvePour revenir à la traduction, ce livre-là a été 
        rejeté au Maroc. Le traducteur donne une version recevable pour 
        un public français.
 Brouhaha à nouveau... GenevièveTout traducteur transforme. Même ce que vous dites (sur l'article 
        qui étudie la traduction) est transformé
 NathalieIl y a une magnifique hypotypose pages 113-114.
 
 TousGloups... ???
 NathalieUne 
        hypotypose ? C'est une technique littéraire qui rend comme 
        vivante la scène.
 Qu'est-ce qui appartient au traducteur, qu'est-ce qui appartient à 
        l'auteur ? Et l'influence possible des Confessions de Rousseau ?...
 ClaireJ'ai trouvé sur le blog d'Emmanuelle Caminade une analyse 
        très fine de sa difficulté à être touchée 
        par l'authenticité du récit en raison de l'écriture, 
        avec des exemples de langage soutenu qui ne vont pas ("que 
        m'importe", "Arrêtez 
        ces spéculations")...
 NathalieEst-ce que la façon dont Georges Sand pour faire parler les paysans 
        ne choque pas de la même manière ? Et celle d'Eugène 
        Sue pour faire parler les voleurs ?
 ClaireEt si on lisait Les 
        Mystères de Paris
 NathalieLa façon dont la transcription des dialogues évolue, notamment 
        du 17e au 19e siècle. Et par rapport à la dissonance, dans 
        ce roman, contrairement à Sand où il y a une unité 
        de style...
 Catherine... si on décroche, c'est peut-être justement en raison de 
        la dissonance qu'on sent dans le style.
 ClaireAu Salon du livre où le Maroc était invité, j'ai 
        écouté Abdellah Taïa qui rendait hommage à Choukri, 
        en insistant sur le témoignage de la misère partagée 
        et non sur sa plume. Il donnait l'impression de l'idolâtrer. C'est 
        le premier romain marocain traduit en français, c'est historique, 
        et à ce titre je suis contente de l'avoir découvert. 
        Le pain nu aurait été interdit au Maroc en 1998 
        suite au 
        choix de ce roman par une enseignante et aux plaintes des parents.
 NathalieActuellement, à la douane marocaine, il y a des contrôles 
        des livres, par exemple concernant des données géographiques. 
        On arrache des pages.
 GenevièveIl y a une omerta concernant tout ce qui touche à la sexualité. 
        L'auteur ici une sorte de fascination pour les femmes, sans mépris, 
        contrairement aux autres personnages.
 Danièle (qui a aussi vécu en Afrique du nord)Les hommes ne peuvent pas payer une dot, souffrent des interdits liés 
        à la sexualité. Il y a de nombreuses femmes divorcées 
        dans les grandes villes, en réalité ce sont des femmes répudiées.
 D'autres lectricesRenée (de Narbonne)
  Je me suis plongée dans Le pain nu sans aucune préparation, 
        ni quatrième de couverture ou préface (j'aime bien rester 
        vierge devant un texte).
 Le témoignage de cet enfant est bouleversant, on se doute vite 
        que c'est autobiographique. Ce père monstrueux qui tord le cou 
        à son fils comme on faisait aux poulets, qui bat l'enfant et sa 
        mère pour une peccadille, ne peut être que haï.
 La façon dont il raconte la faim (la vrai faim que nous ignorons 
        tous) m'a touchée, et on comprend sa descente dans les bas-fonds, 
        le vol pour se nourrir.
 Cependant, j'ai trouvé qu'il se délectait trop à 
        raconter les scènes de sexe et de viol. J'ai pensé : c'est 
        écrit en 1970 ? Voilà quelqu'un qui a lu Genet, la 
        poésie en moins ! Et bingo ! J'ai vu ensuite qu'il a 
        écrit plusieurs livres sur Genet...
 Le témoignage s'en trouve affaibli : il ressasse des 
        expériences sexuelles sans intérêt (voir la fin !!!)
 Selon votre critère : ouverture du livre à demi pour... 
        la faim.
 Anne
   Il commence dur, ce témoignage sur l'enfance maltraitée, 
        et se poursuit dur. L'empathie prend au ventre dès les premières 
        lignes. Une leçon de vie impressionnante. Tout mon respect à 
        celui qui a pu en sortir et qui a pu trouver les mots pour le dire. D'autant 
        que si l'enfant "Mohamed Choukri" était indéniablement 
        prisonnier de son entourage, de parents désespérés, 
        d'un milieu social carencé, d'un pays inorganisé dans une 
        époque spécifique, cet enfant des rues était avant 
        tout prisonnier des traumatismes qui s'étaient emparés de 
        son corps et de son psychisme. Il a fallu une énergique métamorphose 
        pour les soigner. Bravo pour la façon dont l'auteur réélabore 
        ses premiers émois sexuels et ses obsessions, mêlés 
        à l'idéalisation d'une déesse-mère-détruite 
        et femme inaccessible. La critique bourgeoise arabe parle de subversivité
 
        je ne leur souhaite pas de voir comment on érotise la douleur pour 
        en sortir. Peut-être d'ailleurs ont-ils perdu de vue la matière 
        dont ils vivent, la littérature, tant ils se sont défendus 
        de l'insoutenable "vrai" qu'elle contient. En poursuivant la 
        lecture, le développement de cette sexualité débridée 
        m'a semblé aller de soi et présenter la seule issue au "sans 
        issue" : il est urgent de calmer la faim et l'humiliation et 
        surtout d'échapper à l'ombre envahissante d'une grave dépression. 
        Mohamed est jeté dans les raies de la répétition. 
        Il ne connaît pas d'autres façons de faire que celle qu'il 
        a subi. Il est désolant en effet de voir comment l'enfant s'approprie 
        cette violence sans pouvoir rien en penser. Au fond, me suis-je dit, c'est 
        ça la malédiction, une masse écrasante de non dicible. 
        Mohamed ne sait pas d'où il vient, ne sait pas pourquoi il est 
        là (pourquoi moi ?), ne sait pas où il va. Il n'y a 
        pour lui aucun trompe l'il au contraire de La 
        rue Darwin. Pourtant Mohamed trouvera finalement une structure 
        et des règles apportées par un homme, comme un beau cadeau 
        dont il pourra s'emparer : l'alphabétisation. Celle-ci le 
        conduira vers la voie de la sublimation. Peut-être toutefois, ferai-je 
        ici une critique. Je me suis laissé emmener dans les affres masculines 
        d'une sexualité et d'une jouissance impérative et tyrannique, 
        mais à l'instar des très fines descriptions des fantasmes 
        érotiques, j'aurais aimé voir plus clairement le fil rouge 
        des mutations progressives de l'intérêt du jeune homme pour 
        le savoir. Cette transformation de la violence et de l'érotisme 
        exacerbé vers la culture m'a semblé surgir trop brusquement 
        sans que j'en comprenne les détours. Les prémisses de la 
        curiosité pour l'écriture sont certes évoquées 
        mais en quelques lignes et tard dans le livre. Il y a peut-être 
        tout un aspect psychologique au sein de la métamorphose, dont je 
        veux bien croire qu'elle a eu lieu étant donné la qualité 
        du roman, qui m'a manqué. J'aurai mieux compris alors la voie positive 
        qui l'a amené à accepter d'un homme ce cadeau si fertile 
        de l'apprentissage alors que jusqu'alors il refusait tout. Cela aurait, 
        me semble-t-il, élargi l'histoire au-delà du subversif  provocation 
        dont s'est emparée la censure  et aurait approfondi 
        le déploiement de la résilience.
 J'ouvre ce livre avec plaisir jusqu'aux trois quarts.
 Muriel
   J'ai trouvé ce récit autobiographique 
        intéressant, avec des descriptions bien campées des bas-fonds 
        de Tanger.
 Le lecteur est vite embarqué dans l'errance misérable de 
        Mohamed, au travers d'un texte énergique car il est cru, violent, 
        brutal (un peu comme Anima).
 Mais je n'ai pas apprécié les répétitions 
        vulgaires qui au bout d'un moment lassent, pour ne pas dire exaspèrent : 
        "je te cracherai dans 
        le trou du c...", "je 
        te pisserai dans le c..."
 On se doute bien que l'auteur ne va pas utiliser la langue de Molière, 
        mais l'accumulation de mots orduriers n'apporte pas grand-chose.
 Heureusement que le livre ne fait que 160 pages sinon, je n'aurais pas 
        été jusqu'à la fin. Vous l'aurez compris : je 
        n'ai pas aimé.
 Le groupe de Tenerife a lu ce livre l'été 
        2021
 Nieves
 D'habitude je fais mes commentaires tout de suite après avoir fini 
        la lecture de l'ouvrage, cependant, cette fois-ci, il s'est écoulé 
        pas mal de temps avant de mettre par écrit mes impressions. Ce 
        n'est pas parce que ça m'a déplu, plutôt le contraire. 
        Mais ça m'a surtout impactée. Ces descriptions si acharnées, 
        implacables et rageuses des ambiances, du monde de misère et de 
        violence où vit le protagoniste m'ont coupé le souffle, 
        même si des fois on trouve des passages subtils et poétiques, 
        en particulier quand il parle des femmes et du sexe, bien qu'il n'ait 
        pas le concept de l'amour, ce qui semble normal étant donné 
        que dans sa vie personne ne lui a montré de l'amour. Il ne vit 
        que par les sensations à propos de ce qu'il voit ou de ce qu'il 
        touche. Il vit l'instant avec toute l'intensité d'un enfant ou 
        un adolescent qui survit au jour le jour, toujours au bord du gouffre.
 Je remarquerai cependant le passage où, encore enfant, il décrit, 
        en la regardant en cachette, Amina, belle fille de famille aisée 
        qui suit tout un rituel avant de plonger nue dans l'eau. Un corps qui 
        réagit sans aucun artifice devant un beau spectacle, car c'est 
        la sexualité qui semble l'arracher ponctuellement à toutes 
        les misères vécues depuis son enfance, l'extrême pauvreté, 
        la violence, la famine, les drogues. C'est terrible et presque miraculeux 
        qu'une personne nourrie de tout ce qu'il peut avoir de plus odieux dans 
        ce monde ait pu devenir un grand écrivain.
 Je pense que c'est un cas exceptionnel et c'est la raison pour laquelle 
        ce petit bouquin a produit une sorte de déflagration chez beaucoup 
        de lecteurs, en particulier, dans son pays où il a été 
        longtemps censuré. J'invite à lire l'histoire et une part 
        des commentaires à propos de ce texte où Choukri a osé 
        parler sans ambages de toutes les détresses humaines dont personne 
        avant n'avait osé le faire.
 
  
        DOCUMENTATION SUR LE 
          LIVRE ET SUR L'AUTEUR
 - 1972-2002 : 30 ans de l'écriture 
          à la publication au Maroc
 - Quelques repères biographiques
 - Ses uvres traduites en français
 - Que dit l'auteur lui-même ?
 - Controverses concernant Tahar Ben Jelloun :
 sur 
          la publication
   sur 
          la traduction
 - Le pain nu et la télévision
 - Le pain nu au cinéma
 
 1972-2002 : 30 ans de l'écriture 
        à la publication au Maroc- Écrit en 1972. Aucune 
        maison d'édition n'a voulu le publier pour des raisons "morales".
 - Traduit :
 en 1973 en anglais par Paul Bowles
 en 1980 en français par Tahar Ben Jelloun
 en 1989 en espagnol par Abdellah Djbilou.
 - Publié en arabe à compte 
        d'auteur en 1982.
 - Censuré en 1983 au Maroc sur décision 
        du ministère de l'Intérieur. Les conservateurs religieux 
        reprochent à l'auteur d'entacher l'image de la société 
        marocaine et de porter atteinte à la religion musulmane. Ils l'accusent 
        d'encourager la déviance morale et sociale.
 - Autorisé en 2002 : la censure 
        est levée, soit une année avant la mort de l'auteur.
 Durant toute cette période, l'ouvrage circule dans un cercle très 
        restreint d'intellectuels, d'universitaires et de penseurs libéraux 
        : il est lu en privé et rangé dans les bibliothèques 
        personnelles à l'abri des regards.
 Quelques repères biographiques- 1935 : Mohamed Choukri naît à 
        Beni Chiker, dans le Rif. Sa langue maternelle est le berbère (rifain).
 - 1942 : la misère pousse sa famille à émigrer vers 
        Tanger, puis vers Tétouan et Oran.
 - 1946 : à 11 ans après une dispute familiale, il quitte 
        sa famille pour Tanger où il vit sans domicile, voleur, contrebandier 
        d'occasion et prostitué. Il est analphabète.
 - 1955 : à 20 ans il fait une rencontre qui change le cours de 
        sa vie ; il est arrêté et emprisonné par les 
        Espagnols qui occupaient le nord du Maroc ; durant son séjour 
        en prison, il côtoie un partisan de l'indépendance qui commence 
        à lui apprendre à lire et à écrire.
 - 1956 (année de l'indépendance du Maroc) : il quitte 
        Tanger, s'inscrit à Larache à 21 ans dans une école 
        pour apprendre à lire et écrire ; il persévère, 
        poursuit ses études (École normale) et devient instituteur, 
        puis professeur.
 - Années 60 : il revient à Tanger, continuant de fréquenter 
        bars et maisons closes.
 - 1966 : paraît sa première nouvelle ; il est découvert, 
        publié et traduit grâce à Paul Bowles ; il collabore 
        ensuite régulièrement à des revues littéraires 
        arabes, américaines et anglaises. À la même époque, 
        il fréquente aussi Jean Genet et Tennessee Williams.
 - 1973 : c'est le premier volet de sa biographie Le pain nu, traduit 
        en anglais par Paul Bowles, qui le fait connaître d'abord dans le 
        monde anglo-saxon, puis en France grâce à la traduction en 
        1980 de Tahar Ben Jelloun.
 - 1995 : il obtient le prix 
        de l'amitié franco-arabe (prix littéraire).
 - 2003 : il meurt l'hôpital de Rabat d'un cancer ; il est inhumé 
        au cimetière Marshan en présence du ministre de la culture, 
        de hauts fonctionnaires, de personnalités du monde de la culture 
        et du porte-parole du Palais royal. Éloges dithyrambiques à 
        sa mort, y compris dans le monde arabe : revue de presse ICI.
 - Les relations avec ses frères et surs n'étaient 
        pas ... terribles, raconte le site d'actualité marocain TelQuel 
        ("La 
        seconde mort de Choukri", 16 septembre 2006). En revanche, il 
        fait bénéficier d'une pension à vie sa domestique, 
        Fathia, qui passa près de 22 ans à travailler pour lui. 
        Avant de mourir, il a souhaité que soit crée la 
        fondation Mohamed Choukri (qui prend forme concrètement en 
        2013) possédant ses droits d'auteur, ses manuscrits et travaux 
        personnels.
 
 Ses uvres traduites 
        en français1980 : Le Pain nu, Paris, éd. Maspero 
        (collection 
        "Actes et mémoires des peuples")
 1992 : Jean Genet et Tennessee Williams à Tanger, Paris, 
        éd. Quai Voltaire
 1992 : Le Fou des roses, Paris, éd. La Découverte
 1994 : Le Temps des erreurs, Paris, éd. du Seuil, deuxième 
        volume de l'autobiographie
 1993 : Jean Genet à Tanger, Bruxelles, éd. Didier 
        Devillez
 1996 : Jean Genet, suite et fin, Bruxelles, éd. Didier Devillez
 1997 : Paul Bowles : le Reclus de Tanger, Paris, éd. 
        Quai Voltaire
 1996 : Zoco Chico Bruxelles, Bruxelles, éd. Didier 
        Devillez
 A noter : Le Pain nu est le premier roman marocain traduit 
        en France, suivi plus de 10 ans après par Le 
        Jeu de l'oubli de Mohamed Berrada (précise Farouk Mardam-Bey, 
        directeur de la collection "Sindbad" d'Actes Sud, dans 
        Libération)
 
 Que dit l'auteur lui-même...- De son parcours et de son 
        uvre ? Réponse à 
        travers une interview 
        très intéressante sur Rif Planète, où 
        il évoque ses différents livres, les auteurs qui comptent 
        pour lui, etc.
 - Le pain nu : une autobiographie romanesque ou un document sociologique ? 
        "Quand j'ai 
        dit faire de mon autobiographie Le pain nu un document plus sociologique 
        que littéraire, je voulais dire par là..." (voir 
        la suite ICI)
 - Le pouvoir de l'écriture et le rejet de ses écrits ? 
        "Et puisque le pain des gens est politisé, écrire pour 
        en parler ne saurait qu'être un engagement politisé" 
        (voir la suite ICI)
 - Et à la radio, deux 
        entretiens à France Culture  : en 
        1998 (dans son appartement au dessus d'un café qui lui servait 
        de bureau, au milieu de ses oiseaux en cage, des plantes et des livres, 
        il raconte le Tanger de son enfance, sa rencontre avec Jean Genet, Tennessee 
        Williams ou Paul Bowles) et en 2003 dans le petit café Le Ritz 
        qui fut le dernier lieu où il donnait ses rendez-vous, en compagnie 
        de son ami écrivain Mohamed Berrada ; 
        Tahar Ben Jelloun qui est longuement interviewé n'est 
        pas tendre...
 Tahar Ben Jelloun le 
        traducteur : controverse sur la publication- En 1972, dans un article paru dans Le 
        Monde, Tahar Ben Jelloun qualifie les démarches de Bowles 
        publiant des Marocains de Tanger de "technique de viol".
 - Pourtant, dans un article paru en 1978, dans Le 
        Monde, il ne met pas en cause Bowles au sujet de Choukri : 
        "Paul Bowles connaît la vie de Choukri. Il lui propose de 
        la raconter et de publier son récit chez Owen. Le livre paraît 
        en décembre 1973." Et pas davantage, dans la préface 
        au Pain nu datée de 1979 : "L'écrivain américain 
        Paul Bowles a adapté le récit de Choukri et l'a publié 
        en 1973 aux éditions Peter Owen à Londres sous le titre 
        For 
        Bread Alone".
 - C'est Mohamed Choukri lui-même qui, en 1986, dévoile les 
        coulisses, racontant comment s'est déroulée la traduction-écriture 
        du Pain nu en anglais : "Lorsque 
        Paul Bowles m'a demandé d'écrire mon autobiographie, j'ai 
        répondu sans hésiter : Mais, je l'ai déjà 
        écrite. Elle est chez moi. Bien évidemment, je n'avais 
        pas écrit une seule phrase. Mais elle était déjà 
        inscrite dans mon esprit. Je comptais l'écrire après avoir 
        eu un peu de succès littéraire." (suite 
        ICI)
 - En 2010, Tahar Ben Jelloun ouvre 
        lui-même une controverse qui se retourne contre lui. Il prétend 
        qu'après qu'un ami commun, Mohamed Berrada, l'a incité à 
        se lancer dans la traduction du Pain nu, il aurait découvert 
        que le manuscrit du livre n'existait pas : "C'est au moment 
        où je me lançais dans la traduction de l'autobiographie 
        de Choukri, Le Pain nu, que je découvris le subterfuge de 
        Bowles. Quand je demandai le manuscrit de son livre, je me rendis compte 
        qu'il n'existait pas. Choukri m'apportait chaque jour cinq ou six feuillets, 
        écrits la veille". Cette  
        version de Tahar Ben Jelloun est alors contestée par le romancier 
        et critique littéraire Mohamed Berrada à qui Choukri avait 
        donné le manuscrit intégral de son roman, antérieurement 
        à la traduction française (voir les détails ICI).
  Tahar Ben Jelloun le 
        traducteur : controverse sur la traductionUne analyse très fine de la traduction de Tahar Ben Jelloun et 
        de son rôle dans l'orientation du roman par Salah Natij (Université 
        de la Sorbonne Paris IV) : "Le 
        Pain nu de Mohamed Choukri et l'aventure de la traduction" 
        est très éclairante. Ce même article analyse la critique 
        arabe du Pain nu. Il montre également l'effet en retour 
        de la traduction sur l'original !
 Un autre article sur la 
        traduction montre l'effet des choix du traducteur, qui radicalise la critique 
        de lautorité parentale et patriarcale dans la société 
        marocaine et aggrave la misère de la famille de Choukri. Ben Jelloun 
        embellit parfois l'image de la femme. Quant à la religion, il a 
        tendance à aggraver et, parfois, expliciter la critique des valeurs 
        islamiques. ("Quand 
        la traduction libère : le cas du Pain nu de Mohamed Choukri", 
        Mustapha Ettobi)
 
 Le Pain nu à 
        la télévision - Apostrophes 
        du 15 février 1980 (15 min avec Choukri) : dans cette émission 
        consacrée aux souvenirs d'enfance, Bernard Pivot reçoit 
        avec Mohamed Choukri dont Le Pain nu vient de sortir chez Maspero, 
        Jean d'Ormesson, René Barjavel, Robert Sabatier, Hubert Comte ; 
        le livre est alors censuré au Maroc.
 - En 2001, dans un documentaire de Planète 
        Thalassa (7 min), Choukri évoque ses débuts : "Paul 
        Bowles, il m'a présenté à cet éditeur qui 
        s'appelait Peter Owen. Alors il m'a demandé si je pouvais écrire 
        mon autobiographie. Je lui ai dit je l'ai chez moi, je l'ai déjà 
        écrite. Il m'a dit alors on signe un contrat provisoirement. On 
        l'a signé. Ce soir-là dans mon café à côté 
        de là où j'habite, j'ai demandé une petite bouteille 
        de vin et j'ai commencé à écrire le premier chapitre. 
        Et je lui dis à la fin à Paul Bowles que le livre il n'était 
        pas écrit. Alors il m'a dit pourquoi vous m'avez fait signer un 
        contrat sur un livre qui n'existe pas ? Et je lui ai répondu : 
        c'est le défi berbère. C'est comme ça." 
        Choukri évoque aussi Jean Genet, on voit sa tombe au Maroc...
 
 Le Pain nu au cinémaUn film, en ligne, Al-Khubz 
        Al-Hafi (Le Pain nu) de Rachid Benhadj, adaptation du roman, a 
        été présenté à Cannes en 2005, dans 
        une production italo-franco-algérienne. Le rôle principal 
        y est tenu par l'acteur marocain Saïd 
        Taghmaoui. Durée : 1h40.
 
   
        
           
            | Nos cotes d'amour, de l'enthousiasme 
                au rejet : |   
            |          |   
            | à 
                la foliegrand ouvert
 | beaucoup¾ ouvert
 | moyennement 
                à moitié
 | un 
                peuouvert ¼
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