Quatrième de couverture :
Il est de retour dans la ville et le pays quil a quittés
il y a trente ans pour présenter son dernier livre, donner un concert,
et aussi échanger deux paires de chaussures de luxe, pour sa mère
et sa femme. Une étrange et sublime adresse, Picquier, 2004, 272 p. Quatrième de couverture : En cette Étrange et sublime adresse, un jeune garçon de Bombay vient à Calcutta passer ses vacances en famille. Il fait chaud bien sûr, sa mère et sa tante passent de longues journées allongées sur le grand lit. Sandeep et ses cousins chahutent sur le petit, un lézard lorgne un moustique égaré, le temps semble être arrêté. On attend le soir pour monter sur la terrasse observer les terrasses voisines une jeune fille dans un sari fraîchement repassé, une autre qui apprend à chanter tandis quen bas, le cinéma en plein air bat son plein. Parfois, à la recherche dune faible brise, la famille sentasse dans la voiture en direction des ghats, et assiste au déferlement des lumières et des néons mystérieux. |
Amit Chaudhuri
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Quelques informations | |
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Des repères concernant Amit Chaudhuri - Ses publications - La traductrice d'Amit Chaudhuri - Articles, vidéo, radio sur Amit Chaudhuri - On a failli le rencontrer... - La littérature indienne peu connue ? Du moins par nous... - Les attentats de 2008 mentionnés dans le livre |
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Nos cotes d'amour decrescendo | |
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Denis
Je suis les consignes et ne viendrai pas ce soir. En outre, je n'ai vraiment
rien à dire sur le bouquin, que je ressens comme un aimable bavardage
narcissique que je ne conseillerai pas, surtout à des lecteurs
ne sachant rien de Bombay. J'ouvrirai ¼. Bonne soirée
quand même !
Brigitte(avis
transmis)
Je l'ouvre à moitié. En effet, je pense que je ne fais pas
partie du public à qui ce livre est destiné. De mon point
de vue, l'auteur s'adresse essentiellement à ceux qui connaissent
Bombay et qui y ont vécu, ce qui n'est absolument pas mon cas.
J'ai passé une quinzaine de jours dans le nord du Pendjab, au Pakistan,
et je retrouve ici quelques éléments dont j'avais pu mesurer
le poids, à savoir l'importance pour la population de la Séparation
d'août 1947, ainsi que la présence de nombreux éléments
architecturaux (plus ou moins bien entretenus) dus aux Britanniques.
Je remarque aussi que la vie des classes moyennes est presque la même
dans toutes les grandes villes du monde, malgré des cultures profondément
différentes.
La construction du livre est assez particulière, dans le sens que
75% du texte est consacré à une sorte d'introduction. C'est
seulement autour de la page 123 (sur 160) qu'apparaît enfin Ramu !
Ce qui relance l'intérêt de la lecture, un peu "lente"
pour ceux qui n'ont jamais mis les pieds à Bombay, ni en Inde.
Sinon, la lecture est facile, on sent que l'auteur a du métier,
il maîtrise tout à fait son art.
Pour nous, les membres du groupe lecture "Voix au chapitre",
il est particulièrement savoureux de trouver cités des livres
que nous avons lus ensemble (Rue
des boutiques obscures, Le
Dieu des Petits Riens). On retrouve également
beaucoup de nos préoccupations, à commencer par notre obsession
concernant le distinguo entre
Auteur et Narrateur, mais aussi des sujets comme l'écriture, la
nouvelle (Maupassant), le roman
et les livres courts !
Catherine (un
collègue étant contaminé, préfère ne
pas nous exposer)
Ami de ma jeunesse ne m'a pas enthousiasmée. Je n'ai pas
réussi à accrocher à cette déambulation nostalgique
dans Bombay.
Je ne connais pas l'Inde ; j'ai lu très peu d'auteurs indiens,
le seul roman qui me vienne en tête étant L'Équilibre
du monde de Mistry ; j'étais donc très motivée
par cette lecture mais elle m'a laissée sur ma faim. J'ai eu le
sentiment d'un récit décousu ; on parcourt Bombay à
la suite du narrateur (qui semble très proche de l'auteur même
s'il qualifie son uvre de roman) et on s'y perd un peu ; il
m'a manqué les notes en bas de page qui m'auraient aidée
à ne pas me mélanger dans les noms, les rues... Le personnage
de Ramu m'a semblé assez insaisissable, à la fois absent
et omniprésent. J'ai malgré tout été sensible
à l'ambiance du livre, à la réflexion sur le temps,
les lieux du passé, aux descriptions du Taj, de la nourriture pârsi.
J'ouvre Ami de ma jeunesse à moitié. Je viens de
commencer Une étrange et sublime adresse, qui me plaît
nettement plus de prime abord.
Laura(internaute
espérant intégrer un jour le groupe)
Jai voulu lire Ami de ma jeunesse et Une étrange
et sublime adresse, mais, évidemment, il fallait que le premier
narrive jamais par la poste. En revanche jai bien reçu
Une étrange et sublime adresse que jai lu en grande
partie (il doit me rester une cinquantaine de pages) mais je nai
pas eu le temps de le terminer, il y a tellement dautres livres
à lire en même temps à la fac... Mais je vais quand
même donner mon avis sur celui-ci !
En le commençant, je ne me suis pas du tout sentie dépaysée
comme avec Les Heures. On peut
presque dire que le livre ma tout de suite mise en confiance. (Jai
déjà des difficultés à écrire cette
critique, parce quen réalité le livre ne me donne
pas un avis tranché, mais il nen ressort aucun paradoxe non
plus, jai plutôt une impression évanescente et atmosphérique.)
Que dire ! Ce nest pas un livre remarquable qui marquera lhistoire,
du moins la mienne, mais ce nest pas non plus un livre que je dédaigne
et méprise, loin de là. En me plongeant dedans à
plusieurs reprises dans la journée, je garde cette impression étrange :
celle de rentrer à la maison, dans la sécurité et
la douceur. Jy perçois les différentes senteurs, la
lourdeur des baumes et des parfums ; les couleurs chatoyantes des
saris ; la chaleur de lair. Je pense que cest un livre sans
histoire, dans les deux sens du terme : il ny a pas de récit
précis qui pourrait attiser lintérêt dun
lecteur frivole, et cest aussi un livre qui ne fait pas de vagues,
ce nest pas À rebours,
il nen émane pas un lieu sombre intellectuel et décadent.
Ce livre respire linnocence, peut-être grâce aux descriptions
de la vie des enfants, de la famille, je ne sais. Du côté
de lécriture, je nai rien à redire, même
si cest une traduction, cest particulièrement agréable
et fluide. Et le récit laisse percevoir des touches dhumour,
parfois innocent, parfois un peu douteux tout de même (lemployée
des voisins qui se rince lil sur les fesses nues des enfants),
mais qui na fait que rajouter un peu plus de charme. Alors javoue
que ça me fait énormément de bien, le temps de quelques
jours, de sortir de mes livres de philo ou de la noirceur de Lautréamont
ou dAurevilly. Amit Chaudhuri a vraiment écrit un bon livre
à mes yeux. Je suis heureuse davoir pu découvrir ne
serait-ce quun peu la littérature indienne. Pourtant, ce
ne sera pas un livre que je recommanderai, probablement afin de le garder
pour moi, dans ma sphère personnelle, dans ce quil y a de
secret chez moi. Bien que jaie peur de loublier vite, on verra
bien.
Mais pour le moment, ¾ ouvert !
Nathalie
(avis
transmis juste après la décision de fermeture de tous les
établissements scolaires)
Je ne serai pas longue car je n'ai pas le temps aujourd'hui, dans cette
folle journée où l'on doit quitter "tout" en quelques
heures et surtout mes élèves pour rédiger une longue
critique.
J'ai beaucoup aimé les deux textes bien que l'on puisse considérer
les deux comme deux textes de genres différents. Le premier dont
on ne sait s'il est autobiographique bien que le nom de l'auteur y apparaisse
tardivement, et le deuxième sous-titré "roman",
mais où l'on croit deviner derrière chaque page l'ombre
de l'auteur.
Comment parler des deux sans se mélanger ? Le premier est
absolument sensationnel dans sa façon non linéaire d'aborder
les moments d'une vie, mais aussi la réflexion sur ce qu'est l'exil
et ce que peut représenter le "retour au pays natal".
Le narrateur exprime que bien que n'habitant plus la ville, il est un
habitant de la ville à part entière. J'ai aimé l'amitié
entre ces hommes, j'ai aimé les descriptions qui, si elles sont
moins recherchées dans le premier, sont vraiment souvent très
justes et très évocatrices dans le deuxième. J'ai
aimé la construction de l'uvre. Il m'a semblé qu'elle
était pleine de virages et d'angles droits. Ce livre est vraiment
original et je comprends qu'il puisse dérouter.
J'ai aimé cette vie à volets clos sous la torpeur, les moments
de sieste (dans le deuxième), la transcription de la vision de
la vie des adultes par les enfants.
Tout est rendu avec précision, joie et fantaisie. C'est un livre
propice à la rêverie. Un qui vous fait toucher du doigt un
ailleurs. J'aime les tableaux très visuels qu'il offre, les scènes
d'intérieurs nuancées et plongées dans la lumière
dorée d'une fin de journée, le bruit de la douche, la moiteur
du lit où s'allongent les femmes.
Évidemment, j'ai eu envie de me dire que l'Inde qu'il partage ne
peut être qu'une Inde intime, subjective, réduite à
une lorgnette. Je n'ai pas cherché à le lire de façon
sociologique. Il est flagrant que les castes inférieures sont des
ombres à peine visibles. On sent bien que celles qui sont à
l'extérieur du "harem familial" (cf. Le
harem et les cousins de Germaine Tillion une référence
à lire pour ceux qui ne connaissent pas !) n'existent pas
pour la famille. La servante a une existence mais on se moque d'elle,
celui qui vient nettoyer les toilettes n'est qu'une ombre dont on se moque
aussi et dont le nouveau-né ressemble à un petit paquet
de viande (comme le fait le personnage principal de La
Tresse) n'existe pas non plus en tant qu'être humain au
sens d'humanité. Mais je m'en fiche. Je me dis qu'il serait dommage
d'en faire une lecture "politique". J'ouvre aux ¾.
Annick L
Au début jai trouvé que cette sorte de journal de
voyage était agréable à lire, et dépaysante
; mais je me suis vite lassée. Je ne me sens pas concernée
par la méditation qui accompagne le récit du narrateur,
de retour dans la ville de sa jeunesse. Sauf en ce qui concerne lévocation
de son vieil ami Ramu, comme une ombre à laquelle il prête
vie par petites touches, ou celle qui renvoie à lhistoire
de Bombay, son évolution au fil du temps, les séquelles
de lattentat.
Par rapport à ce que dit Nathalie, ma lecture est sans doute plus
politique : son point de vue, celui dun gosse de riche auto-satisfait,
est trop étroit. Il ne sintéresse quaux lieux
et aux personnes qui le renvoient à son milieu social, et tout
ça ma paru assez vain et futile. Enfin lensemble est
décousu, sans fil cohérent.
Peut-être que si j'avais lu l'autre livre, ma lecture en aurait
été éclairée. Mais, en comparaison, par exemple,
dune uvre comme Le
Dieu des Petits Riens, il manque tout ce qui peut en faire la
richesse : une puissance d'évocation, une véritable
composition, et des enjeux intéressants. Je louvre au quart.
Si la traductrice avait été là je lui aurais posé
des questions sur l'éditeur, qui appartient au groupe L'École
des loisirs, et sur son catalogue de non-fiction.
Françoise
J'ai été déçue aussi par L'ami de ma jeunesse.
J'ai trouvé chouette de découvrir un autre auteur indien.
Je me suis dit ça vient de la traduction : il y a des tournures
bizarres, des répétitions. Mais c'est le récit, qui
part dans tous les sens. Son ami, on le voit par petites touches, mais
on ne voit pas qui c'est, l'impression n'est pas suffisante, ne permet
pas de le capter.
J'aurais souhaité des renvois d'édition pour expliquer des
expressions qui figurent telles quelles. On reste sur sa faim.
Le personnage véritable, c'est le Taj, avec ces attentats de 2008
traumatisants. C'est vaguement évoqué. Là aussi je
suis restée sur ma faim. Si on se laisse porter, bon d'accord,
mais ça reste en surface.
Comme Annick l'a évoqué, Arundhati Roy, avec
|
Voilà Françoise dans le train de Calcutta où elle a acheté le livre d'Arundhati Roy The Ministry of Utmost Happiness ("Le Ministère du Bonheur Suprême"). |
Certes ce n'est pas le même propos, l'Inde et ses conflits,
on est loin de tout ça, avec ce petit microcosme de gens aisés,
être membre du club, etc. ce n'est pas son sujet, on ne sort pas
de là. Il donne l'impression que
ce soit vrai ou faux d'ignorer tout le reste. On n'a pas l'impression
qu'il s'intéresse à quoi que ce soit d'autre.
Et il aurait pu placer Bombay dans son contexte.
J'ouvre au quart. Pourtant il a une bonne tête
Annick
Il est charmant !
Françoise
Mais il n'y a pas le moindre recul, la moindre critique par rapport à
sa vie. Je trouve ça dommage, même si ce n'est pas son propos.
Geneviève
J'ai plus aimé que vous. D'abord je suis très sensible aux
grands hôtels, qui sont comme des cocons ; si je pouvais, je vivrais
dans un hôtel. Le fait que les gens te reconnaissent ou pas, c'est
très intéressant. Et il y a aussi ses points de vue : sous
un pont, d'un balcon. J'aime aussi la nostalgie.
Claire
Le narrateur dit pourtant qu'il ne ressent pas la moindre nostalgie.
Geneviève
(qui a lu le texte original en anglais)
Petit à petit, je me suis accrochée à la relation
avec son ami. On ne sait pas en quoi on a changé, soi-même,
l'ami qui change, lui, nous renvoie à soi-même. Le fait que
la relation est difficile à caractériser, c'est intéressant.
Je ne suis pas gênée que ça se passe dans un milieu
bourgeois, ça existe et ça change des livres qui mettent
toujours en scène une Inde pauvre ; ça m'intéresse,
ce point de vue. Certes il y a de la frustration. À propos des
attentats de 2008, j'ai espéré avoir quelque chose autour
de ça. Il y a aussi le déclassement de la famille : j'attendais
plus. Mais je me suis laissé capter. Et j'aime la fin.
Pour autant cette histoire un peu flottante, légère, m'a
donné du plaisir, mais qui ne me laissera pas grand-chose. Il y
a beaucoup de charme, c'est un peu flottant, un peu modianesque.
Quant à l'anglais, il est un peu étrange, très simple.
J'ouvre à moitié.
Claire (qui va abuser au nom du fait qu'on est
peu nombreux)
Pour être dans le bain indien, j'ai assisté à une
conférence sur Bombay dans la littérature indienne contemporaine
à la librairie Le
Phénix où je n'étais jamais allée.
Françoise
La librairie des anciens maos ?
Claireet
Peut-être... mais aujourd'hui, elle se consacre outre la Chine au
reste de l'Asie. Bref, la conférence faite par un journaliste spécialiste
de l'Inde, Patrick de Jacquelot, était très intéressante,
car il présentait rapidement auteur et livre, disait pourquoi il
l'aimait et en lisait un extrait. Il a bien expliqué comment cette
mégapole monstre est, selon le mot de Rohinton Mistry (auteur que
nous avions lu) "une usine à histoires" et on voyait
bien l'impact de la ville sur les personnages et la narration (voir
les livres ici). Je suis tombée de haut en découvrant
notre roman et ses déambulations à Bombay dans des milieux
plus feutrés les uns que les autres même si cela
donne un côté documentaire au livre... Le narrateur m'a très
vite agacée et j'ai fini exaspérée. L'écriture
fade déportait en effet mon attention sur le narrateur : ses
valeurs, sa condescendance si ce n'est son mépris, ses intérêts
(suis-je reconnu, mes livres sont-ils bien là), l'intérêt
vital de son entourage féminin (la couleur de chaussures de marque),
son côté m'as-tu-vu avec ses lectures, tout ça sans
aucun recul ne serait-ce qu'humoristique. Les attentats sont au même
niveau que "j'ai mangé du homard". L'intensité
dramatique arrive quand il voit un cafard et, ouf, on le change de chambre...
Certes un personnage peut être même abject et le livre génial
de par l'écriture. Il ne se passe rien (exprès, car j'innove
dans le roman)... et c'est surtout dans l'écriture qu'il ne se
passe rien pour moi. L'ami, susceptible d'être central, n'a pas
d'existence. L'intrigue est nulle et l'écriture ne pallie pas ce
vide, ne donne aucune ampleur à la superficialité de son
personnage et à sa démarche de retour sur le passé.
Le livre fini, le clou a été pour moi la présentation
blablateuse qu'il fait de son propre livre (vidéo
ici), j'en étais mal pour lui... J'ouvre ¼ pour
le voyage en classe de luxe.
Après ça, j'ai lu Une
étrange et sublime adresse : quelle bonne
suprise ! C'est très différent ! Il ne se passe pas grand
chose non plus, mais il y a une jolie peinture de la famille élargie
indienne, du point de vue du héros qui est un enfant et que l'on
associe à l'auteur même si le livre est à la troisième
personne : j'ai aimé être plongée dans l'univers décrit,
l'importance des rites religieux alors qu'on est athée ; j'ai
aimé des comparaisons fortes (par exemple la servante se nettoie
chaque soir avec un torchon qui a l'air sale mais qui est en fait "aussi
propre que l'âme d'un criminel accusé à tort",
les femmes drapent "leur
corps dans des saris chatoyants, soigneusement lissés, comme du
papier brillant autour de bonbons", "les
bras de son grand-père l'emprisonnaient comme la Muraille de Chine").
Je rejoins là l'impression positive de Nathalie et j'ouvre aux
¾ (cela me fait une moyenne de ½...). On retrouve dans ce
livre l'attitude hautaine, regardant de haut, figée vis-à-vis
des serviteurs et par rapport aux femmes : on perçoit une adhérence
à l'organisation hiérarchisée, voire sclérosée
de la société, d'autant plus étonnante vue d'ici
que l'auteur est parfaitement oxfordisé.
Vers les trois quarts du livre, les têtes de chapitres qui avaient
un numéro prennent un titre tout à coup et le "je"
apparaît, puis disparaît dans le chapitre suivant, j'ai trouvé
ça intéressant en me disant : on passe 20 ans plus tard
quand il est devenu adulte. Il s'agit en fait d'un roman suivi de nouvelles.
Je n'avais absolument pas vu, n'ayant pas regardé la page de garde,
ni le sommaire ; et je vois que ce n'est d'ailleurs indiqué ni
sur la première de couverture, ni sur la quatrième. Je n'avais
pas vu non plus qu'il y avait un glossaire et m'en suis aperçue
à la dernière page.
Geneviève
Si, regarde, c'est indiqué :
Claire
Je n'avais pas regardé ça et étais entrée
directement dans le texte, mais de toute façon, il n'y a pas d'astérisques
qui auraient permis de savoir quand se reporter au glossaire...
J'aurais aimé poser des questions à la traductrice :
- sur l'auteur (puisqu'elle le connaît) qui a vraiment beaucoup
de cordes à son arc (romancier, prof de fac et essayiste, donc
théoricien sur la littérature, et chanteur : j'ai écouté
des morceaux et j'aime beaucoup)
- sur la littérature indienne et notamment la définition
de la non fiction, sur la place littéraire de Chaudhuri
par rapport aux autres auteurs
- sur la traduction bien sûr : choix de traductrice ou d'éditeur
de ne pas mettre de notes ? de mettre un glossaire ou non ? pourquoi certains
mots y figurent et d'autres pas ? pourquoi le titre du livre Le Dieu
des Petits Riens n'est pas celui de la traduction en vente (mais Le
Dieu des petites choses) ? et surtout des questions sur les difficultés
rencontrées, par exemple, je me suis arrêtée sur un
jeu de mots difficile à rendre :
La traduction
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L'original
|
Je métends sur le lit. La chambre a été rénovée. Je déteste ce mot, ce son vibrant, comme si une personne enrhumée essayant de dire refourguée ; je ne lutilise jamais sans une pointe dironie. |
I lie back. Theyve refurbished the room. I loathe the word, its blunt sound (as if someone with a cold were trying to say furnished), and dont use it without irony. |
Richard (après
la soirée)
|
|
Quand j'ai lu ces phrases en anglais je me suis dit : cela ne va pas être facile à traduire, s'agissant d'un jeu de mots anglais. Je suggère "comme si une personne enrhumée essayait de dire "remeublée". Si 'refurbish' correspond bien à 'rénover', 'refurnished' ne renvoie pas à "refourgué" mais "meublé à neuf" (et non "refilé"). |
Fanny
J'avais l'impression de passer à côté du livre. Plus
j'avançais, moins j'avais envie de continuer.
Les phrases sont assez jolies. La référence à la
différence auteur/narrateur
m'a fait sourire.
Mais c'est trop référencé, car je ne connais pas
l'Inde, cela ne m'a pas parlé. Le rapport à son ami aurait
pu être prenant, c'est plat : un support pour parler de lui. Parmi
les souvenirs, je n'ai pas vu les sentiments, ce qui rend le livre un
peu ennuyeux. Ce que je regrette.
J'ai vu autrement les attentats : avec une pudeur pour ne pas en dire
plus.
Les chaussures : je n'ai pas été passionnée et cela
ne m'a pas fait sourire.
Il n'y a pas de titre dans les chapitres, pas de sens au découpage.
Il n'y a pas de fil narratif.
Claire
Pas de fil évidemment... il écrit au fil de la plume.
Monique L
Je l'ai lu très facilement.
Je n'ai pas ressenti d'agacement. Mais je n'ai pas accroché à
cette ballade légère. J'ai apprécié la nostalgie,
lévocation des changements mais ne connaissant pas la ville,
jai manqué de repères.
Claire
Pardon Monique, j'ajoute que j'avais installé ma tablette à
côté du livre et j'ai regardé sans arrêt des
images des lieux évoqués. Et aussi quand il évoque
l'artiste Nikhil Chaganlal :
"N'y figure aucun personnage,
seulement des preuves de leur activité. Il y a un échiquier
sur le lit, un sitar et des tablas près du canapé, une canette
de Coca sur le tapis rouge vif : des couleurs d'une gaieté insupportable"
(p. 36)
Monique
Moi aussi et j'avais même le plan de Bombay sous les yeux. Mais
je suis resté extérieure, déçue par la ville.
Il ne me reste pas grand-chose de cette lecture. Trop en surface. Je n'étais
pas gênée que ce soit quelqu'un d'aisé ; il n'a pas
la même attitude que son père ; il cherche les traces de
ce qu'avait été sa famille.
Geneviève
Il y a la question de la non-appartenance.
Françoise
Le personnage c'est le Taj. Il y a même des visites de touristes
liées aux attentats qu'il évoque.
D'où
l'intérêt qu'il y aurait eu à rester sur ce thème.
Fanny
C'est trop référencé, c'est pour ça que ce
livre ne m'a pas parlé.
Annick
Oui le livre n'est pas auto-suffisant.
Geneviève
Je suis contente de l'avoir lu.
Claire
Moi aussi, comme TOUS les livres que nous avons
lus cette année que je n'ai guère aimés (Trouillot,
Gombrowicz,
Woolf, Chantal Thomas, Tolkien,
Cunningham)...
Lisa
(avis transmis après la soirée)
Jai peu lu de livres indiens, javais hâte de commencer
la lecture de celui-ci.
Et pourtant, dès le début, le livre mest tombé
des mains. Quel ennui ! Je nai pas du tout accroché
à cette histoire. Cest de lautofiction, mais dans quel
but ? Plus que de lautofiction, je dirais une sorte dautofiction
philosophique, avec des aphorismes inutiles : page 74 "regarder
cest rêver". Ah merci, cest profond.
Je nai ressenti de lempathie ni pour le narrateur, ni pour
Ramu.
La construction ma perdue, je nai pas réussi à
me situer temporellement. Je ne trouve pas que lauteur ait réussi
à faire vivre Bombay, même en lisant je ne visualisais rien.
Page 105 : "Jadore
les livres courts : dès la première page on sait que ça
va bientôt se terminer". Cest exactement ce
que jai ressenti en lisant le livre.
Je ferme.
Etienne
On respire enfin après ces deux dernières lectures qui m'avaient
fort déçu. Ne connaissant pas grand chose à l'Inde
d'une manière générale, j'ai trouvé tout d'abord
qu'Amit Chaudhuri était une porte d'entrée assez réjouissante,
car il est un transfuge à plusieurs niveaux, ce qui nous permet
d'entrer en véritable cheval de Troie dans un pays, une ville,
une culture, une Famille.
Malgré le maintien de sa classe sociale, je n'ai pas pu mempêcher
de penser à Annie Ernaux avec une certaine insouciance teintée
de nostalgie (bien qu'il s'en défende) en plus (et certainement
pas à Marcel Proust comme
j'ai pu le lire ; les critiques littéraires manquent tout
de même singulièrement d'imagination...). Le narrateur est
issu de la très haute bourgeoisie et maîtrise les codes de
la culture anglo-saxonne (et a fortiori occidentale), mais reste viscéralement
attaché à ses racines.
Mais quelles racines ? Et c'est là que tout semmêle
volontairement : Calcutta ? Bombay ? L'image mentale d'un
lieu fantasmé de son enfance ? Sans donner véritablement
une réponse, il nous suggère que plutôt tout lieu
possède une charge émotionnelle qu'il est possible de réveiller
instantanément en se laissant porter. Cela m'a fait un peu penser
à cette notion de
psychogéographie de Guy Debord : c'est finalement le lieu
le personnage principal, qui dicte les lois du récit.
Le verre reste tout de même à moitié plein, car il
manque une dimension symbolique ou transcendante au récit à
mon goût et je reprocherais une certaine nonchalance à l'écriture.
J'ouvre donc à moitié.
Avis en attente de Annick A Christelle Richard Séverine
QUELQUES INFORMATIONS | |
-
Des repères concernant Amit Chaudhuri
|
Des
repères concernant Amit Chaudhuri
- Né à Calcutta en 1962. Grandit à Bombay. Son père
est le premier PDG indien de Britannia Industries, sa mère est
chanteuse.
- Études à Bombay puis à Oxford en littérature.
Thèse
sur la poésie de D.H. Lawrence
- Professeur de littérature
contemporaine à luniversité anglaise de lEast
Anglia. Il y a enseigné l'écriture créative et a
supervisé des doctorants en creative writing, puis un cursus de
creative writing a été inauguré à Calcutta
sous sa direction.
- Premier roman : Une étrange et sublime adresse en 1991
(traduit en 2004) qui le fait connaître aussi bien dans les pays
anglo-saxons quen Inde. Succès des romans suivants.
- Jouant de la guitare, ayant appris le chant avec sa mère et l'ayant
étudié sérieusement, il est aussi un chanteur reconnu,
se référant à la tradition classique de lInde
du Nord ou y mêlant jazz, blues, rock : on peut écouter
les deux styles ICI.
- Vit entre Londres et Calcutta. Marié à Rosinka Chaudhuri
avec qui il a une fille, Aruna.
Ses
publications
- 7 romans, dont nous lisons le dernier. Le seul roman non traduit est
Odysseus
abroad
- un recueil de poèmes, St.
Cyril Road and Other Poems (2005) et des nouvelles Real
Time (2002, classées "non fiction")
- des essais, une anthologie :
une anthologie de littérature indienne moderne : The
Picador Book of Modern Indian Literature (2001)
sa thèse D. H. Lawrence and "Difference":Postcoloniality
and the Poetry of the Present (2003)
Clearing a Space: Reflections on India, Literature and Culture
(2008)
sur Calcutta traduit en français Calcutta: Two Years
in the City (2013)
Telling Tales: Selected Writings, 1993-2013 (2013)
On Tagore: reading the poet today (2013).
- Le site de l'auteur : amitchaudhuri.com
La traductrice d'Amit Chaudhuri
Simone Manceau a traduit, avant Ami de ma jeunesse que nous lisons,
6 autres livres d'Amit Chaudhuri :
Une
étrange et sublime adresse, Picquier,
2004
|
Râga
d'après-midi
Picquier, 2005 |
Freedom
Song
Picquier, 2005 |
Un
nouveau monde Picquier, 2007
|
Les
immortels
Aux Forges de Vulcain, 2012 |
Calcutta :
deux ans dans la ville,
Hoëbeke, 2014
|
Simone Manceau a traduit de l'anglais également Radhika Jha (Inde), Shashi Despande (Inde), Kunal Basu (Inde), Amit Chaudhuri (Inde), Narendra Jadhav (Inde), Neel Mukherjee (d'origine indienne), Aatish Taseer (d'origine indienne), Tahmima Anam (née au Bengladesh), Feryal Ali Gauhar (Pakistan), Daniyal Mueenuddin (Pakistan) et de nombreux livres anglo-saxons mais non asiatiques (voir fiche de la BNF).
Articles, vidéo, radio sur
Amit Chaudhuri
- sur Ami de ma jeunesse : deux courtes
critiques
Florence Noiville, Le Monde,
12 septembre 2019
Virginie Bloch-Lainé, Libération,
26 octobre 2019
- sur Ami de ma jeunesse : l'auteur présente son livre à la librairie Mollat (vidéo ici : 4 min 57, septembre 2019)
- sur Ami de ma jeunesse : titre d'un livre d'Alice
Munro, livre qu'il aurait rêvé d'avoir écrit et qu'il
a écrit (voir ici)
- sur Une étrange et sublime adresse :
"Enfance
à lire", Françoise Le Bouar, La Revue des livres
pour enfants, n° 260, 2011 : un article détaillé
sur le roman
Jeux de Bengale,
Natalie Levisalles, Libération, 27 mai 2004
Amit Chaudhuri-Rohinton
Mistry : les sentiments intouchables, Claude Michel Cluny, Le Figaro
littéraire, 22 avril 2004
- sur les livres "qui l'ont fait" : Books that made me, The Guardian, 7 septembre 2018 (en anglais)
- sur sa musique :
son article prônant la fusion des
musiques : "Le
manifeste d'un grand musicien indien : pour une autre musique fusion",
Courrier international, 23 janvier 2008
Amit
Chaudhuri et le lapsus auditif, Matthieu Conquet, France
Culture, 19 septembre 2014, 6 min
- dans le cadre d'une semaine sur les écrivains indiens à l'ENS : entretien entre Amit Chaudhuri et Laetitia Zecchini, traductrice, spécialiste de la littérature indienne contemporaine, 57 min, 17 septembre 2014 (uniquement en anglais)
- à France Culture, à l'occasion du Festival des écrivains du monde sur son livre sur Calcutta, La Grande Table, par Caroline Broué, 19 septembre 2014, 30 min.
On a failli le rencontrer...
L'Inde était justement invitée d'honneur au Salon
du livre 2020. Amit Chaudhuri devait
intervenir scène
Agora le 20 et le 22 mars, ce qui
nous aurait permis de l'entendre dans la foulée de la lecture ;
le coronavirus en a décidé autrement.
Il est prévu au festival Étonnants
Voyageurs en juin 2020...
La littérature indienne peu connue ?
Du moins par nous...
Quels livres indiens avons-nous lus dans le groupe ? Un seul (!)
auteur est vraiment indien :
- Le
Dieu des Petits Riens dArundhati Roy, qui est bien indienne
et vit en Inde
- L'Équilibre
du monde de Rohinton Mistry, qui est canadien dorigine indienne
- Haroun
et la mer des histoires de Salman Rushdie, britannique dorigine
indienne
- À la courbe du fleuve, puis L'énigme
de l'arrivée de Naipaul : britannique, né à
Trinidad, grands parents venant dInde.
Compte rendu de deux rencontres récentes par Claire :
- sur Bombay dans la littérature contemporaine ICI
- sur la poésie indienne LÀ.
Et deux articles de ce mois-ci (mars 2020) :
- "L'Inde à la page",
Gladys Marivat, magazine Lire : l'état de la littérature
indienne
- "Écrivain en Inde,
un métier à risques", Sophie Landrin, correspondante
à New Delhi pour Le Monde, 20 mars 2020
Les
attentats de 2008 évoqués dans L'ami
de ma jeunesse
Les attaques de novembre 2008 à Bombay sont une série de
dix attaques terroristes coordonnées qui ont eu lieu du 26 au 29
novembre 2008 à travers Bombay, la capitale financière et
plus grande ville de l'Inde.
Ces attaques ont eu lieu à la gare centrale, dans deux hôtels
de luxe, l'Oberoi Trident et le Taj
Mahal Palace & Tower, au restaurant touristique populaire Leopold
Cafe, à l'hôpital Cama, au centre communautaire juif
Loubavitch, au siège de la police.
188 personnes, dont au moins 26 ressortissants étrangers, ont été
tuées et 312 blessées.
L'équipe terroriste était composée de 10 militants
islamistes entraînés au Pakistan sans appui direct du gouvernement,
9 d'entre eux ont été tués et un fait prisonnier.
Alors que ce seul rescapé, jugé en Inde, a été
condamné à mort et exécuté le 21 novembre
2012, sept autres Pakistanais soupçonnés d'être liés
à l'attentat sont en cours de jugement au Pakistan.
D'autres attentats eurent lieu antérieurement :
- Le 12 mars 1993, la ville de Bombay avait déjà été
touchée par une série d'attentats à la bombe. Un
total de 13 bombes explosent contre la bourse de Bombay, des banques,
des hôtels, des marchés. La vague d'attentats fera 257 morts
et plus de 700 blessés.
- Le 11 juillet 2006 a eu lieu une série de sept attentats à
l'explosif commis quasi simultanément en fin de journée
à l'heure de pointe dans des gares et trains de banlieue de Bombay
en Inde, dans un intervalle de 20 minutes. Les
pompiers, qui ont dû lutter contre des incendies sur les sept sites
des attentats. Les grandes villes du pays ont été
placées en alerte après ces actes de terrorisme non revendiqués
pour le moment, rappelant ceux de Madrid
en 2004.
Nos cotes d'amour, de l'enthousiasme
au rejet :
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