Alexandre POUCHKINE : Eugène Onéguine, roman en vers, trad. du russe André MARKOWICZ,
Actes sud, 2005, 320 p. ; rééd. Actes sud Babel, 2008, 384 p.

Quatrième de couverture : “Placé du côté de la légèreté, du sourire, le roman de Pouchkine est unique dans la littérature russe : il n’apprend pas à vivre, ne dénonce pas, n’accuse pas, n’appelle pas à la révolte, n’impose pas un point de vue, comme le font, chacun à sa façon, Dostoïevski, Tolstoï, ou, plus près de nous, Soljénitsyne et tant d’autres, Tchekhov excepté…
En Russie, chacun peut réciter de larges extraits de ce roman-poème qui fait partie de la vie quotidienne. A travers l’itinéraire tragique d’une non-concordance entre un jeune mondain et une jeune femme passionnée de littérature, il est, par sa beauté, par sa tristesse et sa légèreté proprement mozartiennes, ce qui rend la vie vivable.

A. M.

André Markowicz, qui s’applique depuis des années à faire connaître la richesse de la littérature classique russe, propose ici une remarquable traduction en octosyllabes rimés du chef-d’oeuvre de Pouchkine.
"Né à Moscou en 1799, tué en duel en 1837 à Saint-Pétersbourg, Alexandre Pouchkine n’est pas seulement le plus grand poète russe, il est à l’origine de la langue russe moderne ; il a lancé tous les débats qui, à travers le XIXe siècle et jusqu’à aujourd’hui, ont fondé la vie intellectuelle de la Russie."

Eugene Oniéguine, trad. Nata Minor, annexes et notes de Léonid et Nata Minor, Points Poésie, 2018

Amour déçu, trahison, jalousie, regrets. Pourquoi diable ce jeune Oniéguine, bienheureux héritier oisif, s’acharne-t-il à agir avec tant d’emphase ? Est-il guidé par la force de ses sentiments ou par le poids de son ennui ? Cet anti-héros, éternellement suspendu entre le sublime et le ridicule, embrasse un destin à la fois tragique et banal… qui est aussi le nôtre.

Alexandre Pouchkine (1799-1837) est un poète, auteur, dramaturge et romancier russe. Il est notamment l’auteur de La Dame de pique, du Convive de pierre et de La Demoiselle Paysanne.

"La littérature russe est née avec Pouchkine."
Henry Troyat

Alexandre Pouchkine (1799-1837)
Eugène Onéguine (1833)

Nous lisons ce livre pour le 19 octobre 2025.
Nous avions lu La Dame de pique en 1993 et La Fille du capitaine en 2022.

DE LA DOC
Voilà ›de la doc sur Pouchkine
mise en ligne lors de notre lecture précédente : Pouchkine a-t-il vraiment existé ? M
ais il a écrit quoi, s'il est mort si jeune ? Et ses premiers débuts poétiques ? Pouchkine est olé olé. Il a plein d'ennuis. Des traces partout. Les traductions. Etc.

L'OPÉRA
Eugène Onéguine, de Pouchkine à Tchaïkovski : en 5 min très intéressante, on découvre comment le livre devient un opéra, par Dorian Astor, dramaturge au Théâtre national du Capitole : ›youtube.com

Voir l'Opéra ?
- In extenso, la mise en scène de Stéphane Brunschweig au Théâtre des Champs-Elysées en 2021, 2h30 : dailymotion.com
- En 1 min, le même... : theatrechampselysees.fr

LA TRADUCTION ET LE TRADUCTEUR D'EXCEPTION
Celle de
André MARKOWICZ est à privilégier. Mais il y en eut d'autres, une douzaine, dont une de notre cher Tourgueniev :

- en 1863 par Ivan Tourgueniev et Louis Viardot parue en deux parties dans la Revue nationale et étrangère, t. 12 & 13, et publié par la Bibliothèque russe et slave : Eugène Onéguine

- en 1868 par Paul Béesau , en ligne sur wikisource, ou gallica, dédié à "son excellence le Prince Wladimir Odoiefsky, hommage de profonde vénération", publié par Hachette-BNF : Eugène Onéguine, publié par la République des lettres : Eugène Onéguine, 2022

- en 1902 Gaston Pérot, préface Émile Haumant, éd. Tallandier

- en 1980 par Maurice Colin, traduction et commentaire, Editions universitaires de Dijon : Eugène Oniéguine

- en 1986 par Michel Bayat, préface de Stanislas Fumet, J'ai lu : Eugène Onéguine

- en 1990 par Nata Minor, éd. du Seuil, coll. "Le Don des langues" : Eugène Oniéguine : roman en vers ; éd. Points Poésie, 2018 : Eugène Onéguine

- en 1994 par Roger Legras, Eugène Oniéguine, Lausanne, éd. l'Âge d'homme, coll. Classiques slaves : Eugène Onéguine

- en 1996 par Jean-Louis Backès, Folio classique : Eugène Onéguine

- en 2005 par André Markowicz, Actes Sud ; rééd. 2008 Babel : Eugène Onéguine

- en 2010 par Charles Weinstein, éd. L'Harmattan : Eugène Onéguine

- en 2012 par Florian Voutev, éd. La Bruyère : Eugène Onéguine ; éd. bilingue, Strasbourg, Vibration éditions, 2022 : Eugène Onéguine

- en 2018 par Tetyana Popova-Bonnal, éd. bilingue, Independently published : Eugène Onéguine

- Jacques Chirac aurait effectué dans sa jeunesse une traduction française d'Eugène Onéguine, mais qui n'a pas été publiée...

Et voici un article sur la traduction d'Eugène Onéguine dans d'autres langues (anglais, coréen, italien...) : "La traduction d’Eugène Onéguine de Pouchkine – étude comparative multilingue", Simon Kim, revue TTR (Traduction, terminologie, rédaction), n° 1, 1er semestre 2012.

On peut entendre notre traducteur lire Eugène Onéguine : un CD mp3, 14h38, lu par André Markowicz, Daredjan Marcowicz (sa mère), Françoise Morvan (sa compagne traductrice), éd. bilingue Theleme, 2017, cliquez ›ICI pour entendre le début du chapitre 2 ; Markowicz se plante et recommence :

L’ennui traquait notre Onéguine
Dans un village délicieux
Où l’homme simple, j’imagine,
Aurait cent fois béni les cieux.
Le manoir, seul, sur une butte,
Préservé des bourrasques brutes,
Dominait un cours d’eau. Plus loin,
Prairies et champs dorés, le soin
Des hommes, bigarraient les terres ;
On distinguait quelques hameaux ;
Erraient, paisibles, des troupeaux
Et des ombrages solitaires
Menaient au parc ensauvagé,
Où la dryade aimait songer.

Lisez les pages que consacre André Markowicz à Eugène Onéguine dans son Dictionnaire amoureux de Pouchkine d'André (Plon, 2025).
- Voici trois extraits :

Au matin du 3 janvier 2016, alors qu'il n'avait pas encore neigé à Pétersbourg et que tout le monde attendait l'hiver, une amie avec laquelle nous communiquons sur Facebook ouvre sa fenêtre et découvre que sa cour est recouverte d'une neige immaculée. Elle publie une très belle photo de cette neige. Je vois cette photo et, sans réfléchir, je poste un commentaire, en russe : "La nuit du 3". Elle répond : "J'ai vu ton commentaire, et j'ai souri aux larmes."
Le fait est que, la nuit du 3, c'est la nuit où Tatiana se réveille et voit la neige. C'est la première strophe du cinquième chapitre :

L'automne que les gens vécurent
Dura, tarda sur les foyers.
Tout attendait dans la nature ;
L'hiver ne vint que pour janvier,
La nuit du trois. […]


Cette nuit du 3, c'est notre schibboleth. Tout le monde comprend ça en Russie. C'est tout simple, et c'est indiscutable. Chaque Russe raconterait des dizaines d'anecdotes du même genre : Eugène Onéguine est lié à la vie quotidienne de chacun, il est le lien, souriant et léger, de toute personne qui sait lire.
J'ai entendu Onéguine avant de naître, je le sais, comme on dit, de source sûre. Parce que ma mère le disait, juste comme ça, pour elle-même. Ensuite, ma grand-mère le disait aussi - pour me bercer. Je le sais parce que, me raconte-t-on, elle se fatiguait de me bercer (sans doute refusais-je de m'endormir parce que je voulais que ça dure toute la vie), et moi, je lui disais que j'allais me bercer tout seul, qu'elle pouvait se coucher tranquillement. Elle me laissait seul et refermait la porte - je n'avais pas deux ans -, et là, elle m'écoutait qui marmonnais :

Donc, Tatiana, ce nom je l'ose.
Ni par le charme de sa sœur...
Ma mère, elle, a appris ses premières strophes d'Onéguine dans son enfance, pendant le blocus de Leningrad. Elle expliquait qu'elle restait là, dans une pièce où la température était glaciale, avec, de temps en temps, les bombes qui tombaient, sans rien à manger (sa tante est morte de faim). Elle savait qu'il ne fallait jamais dire qu'elle avait faim. Que, ça, c'était interdit. Elle se répétait la strophe d'Onéguine sur les repas chez "Talon" :

Il file chez Talon ; il dîne En compagnie de Kavérine.
Il entre - un jet mousseux d'Aÿ De la comète qui jaillit ;
Il s'offre du roast-beef qui saigne,
Des truffes, luxe de nos jours,
Et du foie gras fait à Strasbourg,
Tout ce par quoi la France règne,
Puis, couronnant le roquefort,
Un ananas de sucre et d'or.

(I, 16, 5-14)

Évacuée de Leningrad avec ma grand-mère, qui était le médecin attaché à un convoi d'orphelins qu'on envoyait loin du front, là encore, sous les bombardements aériens, et pendant ce temps infini du voyage, pour calmer les enfants, elle, qui avait leur âge ou était encore plus jeune, elle allait de groupe en groupe et leur récitait Onéguine - et ça les apaisait. Bouleversée de la voir, une dame qui se trouvait dans le même convoi lui a offert sa petite édition d'Onéguine et, pendant de longues années, cette édition aura été son talisman.

- et tout le chapitre sur Eugène Onéguine dans le Dictionnaire amoureux de Pouchkine ›ici.


Nos cotes d'amour, de l'enthousiasme au rejet :
                                        
à la folie
grand ouvert
beaucoup
¾ ouvert
moyennement
à moitié
un peu
ouvert ¼
pas du tout
fermé !


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