Quatrième
de couverture : Un professeur
de latin-grec houellebecquien s'engage en politique pour des raisons peu
avouables, qui lui coûteront 7500 euros. Une Emma Bovary moderne
se pâme devant un start-uppeur en marche. Un dîner proustien
donne à l'expression « en même temps » une saveur
inattendue. Au cours de son enquête sur une campagne présidentielle,
Emmanuel Carrère bascule dans une introspection sans concession
qui se solde par une violente douleur au nombril, tandis qu'Eddy Bellegueule
veut en finir avec Édouard Louis... |
David
SPECTOR (né
en 1971)
|
Les
livres lus pendant la semaine
- Samedi
: C.-F RAMUZ, La grande peur dans la montagne
(Suisse)- Dimanche : Ludmila OULITSKAÏA, Sonietchka (Russie) - Lundi : Iván REPILA, Le puits (Espagne) - Mardi : Amos TUTUOLA, L'ivrogne dans la brousse (Nigéria) - Mercredi : Georg BÜCHNER, Lenz (Allemagne) - Jeudi : Claudio MAGRIS, Temps courbe à Krems (Italie) - Vendredi : David SPECTOR, 7500 € : pastiches politico-littéraires (France) |
Repères
sur le parcours de David Spector Presse : articles, interview Les 12 pastiches La préface |
(12
participants à la semaine lecture |
Avis à distance |
Fanny
Un peu de fraîcheur et d'humour que j'ai d'emblée trouvés
très appréciables puisque pour ma part je l'ai ouvert à
la suite de Lenz.
Je n'ai pas boudé mon plaisir de lecture notamment avec le pastiche
de Houellebecq qui m'a fait beaucoup rire.
Sur le fond cependant je ne sais pas quoi penser. Je l'ai lu comme une
lecture de vacances divertissante et cela a rempli son office, même
si je pense que j'aurais préféré diluer davantage
chacun des récits dans le temps.
L'auteur est érudit et il connaît
ses classiques mais je me suis parfois demandé s'il n'avait pas
usé d'artifices un peu faciles pour parodier ou pasticher les auteurs
(oui les jeux de scène de Feydeau, les longues phrases de Proust,
la disparition de Perec... pour ne citer qu'eux) .
Mettre dans une même recueil des auteurs tels que Proust ou Nabokov
et Levy, cela me laisse également perplexe...
J'ouvre à moitié et vous souhaite une bonne dernière
soirée dans les montagnes.
Monique L
Si jai apprécié les clins dil aux uvres
des divers auteurs. Les jeux de mots les distorsions mont paru lourds.
Jai du mal à comprendre lidée du livre autour
de Macron. Cest intelligent, érudit, mais cela na pas
fonctionné. Cela ma fait penserà un tour de force
détudiant à la suite d'un pari. Lauteur sest
sans aucun doute donné du mal surtout pour la disparition à
limage de Perec (cest une performance !). Je reconnais
avoir parfois survolé certains passages. Jouvre au ¼.
Nathalie
Je nai pas eu le temps de terminer le livre, mais comme le dit si
bien la préface on ne peut samuser que sur les textes quon
connaît. Jai donc lu le Houellebecq avec beaucoup de plaisir,
le Proust ma amusée, mais je me pose la question de savoir
s'il y a déjà du discours indirect de libre, chez Proust !!
Car il est considéré comme inventé par Flaubert au
XIXe siècle. Jai lu aussi Emmanuel Carrère avec pas
mal de plaisir. Je trouve géniale lidée de tisser
la métaphore filée sur les 7500 € : Macron va être
très riche !
Etienne
Mon dernier avis. 7500 euros : fermé. Clairement la verrue
au milieu de cette belle sélection. Pourtant lauteur a un
certain talent, c'est senti et ça se lit très bien mais
j'ai trouvé que l'intérêt de ce livre est proche du
néant. J'ai eu du mal avec son concept de pastiche (entre le plagiat
et la caricature ?), qu'apporte-t-il ? Si certains livres ne
me laissant aucune impression quelques jours plus tard, celui-là
ne m'en laissait pas la moindre trace une heure après. C'est un
exercice de style au sens le plus pur, une bouffonnerie érudite
journalistique m'as-tu-vu (finalement assez proche de ce qu'on peut lire
dans Le Canard enchaîné par exemple). Quel mal à
ça ? Aucun, c'est de la pure détente, même niveau
qu'un mot-croisé ou un sudoku, mais je trouve aussi (voire plus)
drôle de lire un Houellebecq que son pastiche de Houellebecq. Le
thème faussement irrévérencieux du macronisme m'a
amusé une fois puis franchement rasé, un peu comme si on
on me racontait 12 fois la même blague... En fait, ça m'a
fait un peu l'effet de quelqu'un qui me dit "hey tu vas voir j'en
ai une super drôle, elle est hilarante", clin d'il-clin
d'il-clin d'il,
ça ne marche (pour moi) jamais
Ah oui et je viens de lire la postface, paroxysme de malaise : il
explique ses blagues...
Catherine
Pour finir en beauté cette semaine de lecture à distance,
les pastiches mont bien fait rire. Ils sont globalement très
réussis. Coup de bol, javais lu tous les auteurs sauf Bruno
Lemaire (même Marc Levy chut..., jai lu le premier de ses
livres Et
si cétait vrai). Sinon ça aurait été
moins drôle.
Donc un brillant exercice de style. Jai particulièrement
aimé Houellebecq, Emmanuel Carrère, Nabokov, Flaubert. Le
dénominateur commun, le don de 7500 euros pour la campagne de Macron,
ajoute à la drôlerie, donne un côté plus satirique,
même si cest un peu inégal dun pastiche à
lautre.
On admire la prouesse. Est-ce que cest plus quune prouesse ?
Je ne sais pas, pas sûr. Mais le plaisir est là, donc jouvre
aux ¾.
En direct à 2000 m |
Jacqueline
Dès que j'ai eu le livre en main, je me suis précipitée
sur le pastiche de Proust - pastiche qui, en soi, est déjà
une gageure ! Ça ne m'a pas convaincue.
Les propos de Norpois
sont déjà dans Proust un pastiche d'un discours officiel
prudent et un peu creux alors, qu'il vante les mérites de Macron,
ouais ! Bonne idée ! Mais que le narrateur qui dans Proust retranscrit
ce discours avec un humour distancié, ici y adhère au point
d'en devenir autre...
Quant au style, difficile de le pasticher avec talent. Seul peut-être
le maître lui-même comme dans ce passage de la prisonnière
où Proust met dans la bouche d'Albertine un long développement
sur les glaces que le narrateur admire en se félicitant de son
influence !
Ensuite, j'ai repris depuis le début ce livre mal commencé
sans très bien en saisir l'intérêt. Je ne connais
peut-être pas assez la littérature contemporaine pour apprécier
: J'aime les histoires qu'un romancier me raconte avec son style qui contribue
à mon intérêt tout en échappant complètement
à mon analyse. J'attendais un éclairage sur ce style et
je n'ai trouvé qu'une épinglée de tics... Cela ne
m'a pas empêchée de rire parfois de bon cur. J'ai adoré
le pastiche de Marc Lévy (je ne l'ai jamais lu et ne le connais
que par les critiques impitoyables du Masque et la plume !)
Je préfère lire Houellebecq que son pastiche et n'ai pas
compris l'intérêt de l'ensemble. J'ouvre ¼ pour le
rire.
Claire souffrant et n'attendant même pas son
tour
J'interviens après ce quart qui me déprime car j'ouvre en
grand, c'était un délice. Je ne connaissais pas Lévy
- cruelle découverte pour lui. Contrairement à l'assassin
Etienne, j'ai apprécié la postface, qui rajoute une couche
délicieuse. Pour moi, l'ensemble forme uvre : que c'est réussi,
que c'est exquis, et que c'est subtil !
D'où la question : mais qui est donc ce mec qui a pu faire ça
et qui n'est pas du tout universitaire spécialiste de littérature !
Un économiste brillant certes, mais un économiste. Il faut
lire l'interview, extra : c'est
subtil, pas prétentieux. Intéressante est la délicate
différence entre pastiche et parodie. Et Pierre Jourde qui rêve
d'être pastiché ! Les deux livres que nous avons lus
ici, le premier et le dernier, Sonietchka
et celui-ci, tous deux parlent de littérature et forment pour moi
une boucle de plaisir qui enchâsse les autres livres plus mitigeants
pour moi.
Muriel
Moi j'ouvre à moitié. Il y a des auteurs que j'ai lus, comme
Carrère, mais que je ne connais pas assez pour apprécier
le pastiche. J'ai apprécié ceux de Proust et de Feydeau,
particulièrement rigolos. J'ai admiré le travail du gars.
Il réussit à causer le plaisir par des éléments
de langage. C'est difficile de juger un pastiche.
Geneviève
C'est drôle, c'est léger, c'est sympa comme choix pour une
dernière lecture de la semaine. Drôle et léger, mais
inégal. Réussi avec Houellebecq, moins convaincant avec
Proust. J'ai ri pour le texte sur Emmanuel Carrère où il
raconte comment il se fait piéger par Macron qui lui donne l'impression,
comme à chacun, qu'il ne parle que pour lui. Dostoïevski c'est
réussi avec les notes et le choix de la préface académique,
c'est drôle les diminutifs. Feydeau ça marche mais ça
apporte moins. Flaubert c'est un peu plat. Bruno Lemaire, c'est assez
drôle mais un peu "gros". Il y a une bonne progression.
Mais ce livre ne va pas me marquer.
Annick
A
C'est un point de vue littéraire. C'est intéressant, mais
difficile. Ça attise la façon de lire un livre. Il connaît
les auteurs. Marc Lévy, je ne connaissais pas mais en quatre pages
je sais. Je suis déçue par Proust, on ne retrouve pas son
écriture. "Bellegueule", c'est facile il renverse le
tout. Modiano c'est bien fait. "Lolito", que c'est drôle.
"La disparition", c'est très politique, très bien
fait. Bref, une idée géniale, dans l'ensemble du livre,
j'ai rigolé, j'ai pris beaucoup de plaisir.
Manuela
Houellebecq, c'est drôle je connaissais. "Lolito", très
drôle aussi. Bruno Lemaire est passé dans toutes les infos
en Espagne pour un
beau discours qu'il a fait sur la littérature et l'importance
des livres...
Je n'ai pas bien compris le fond. Il y a trop de choses que je ne connais
pas.
(Lisa, titillée par cette gloire internationale, nous trouve en moins de deux un extrait du dernier livre de Bruno Lemaire, ministre de lEconomie, des Finances et de la Relance, qui nous enchante... tiré de son dernier livre, Lange et la bête, publié s'il vous plaît aux éditions Gallimard, et où il raconte sa première rencontre avec Emmanuel Macron :
"Il se tut, me fixa de son regard bleu sur lequel glissaient des éclats métalliques, comme un lac accablé de soleil dont il aurait été impossible, sous le scintillement des reflets, de percer la surface.")
Lisa
Comme pour Claire, ce fut un délice. C'est hilarant : les plus
drôles sont Carrère, Nabokov et Levy. On arrive à
reconnaître le style même, en n'ayant pas lu Feydeau, Proust
dont on reconnaît le style. Carrère p. 61-62, c'est drôle
et bien vu. Pour Levy, les phrases en italiques sont les plus bêtes
et ce sont celles qui sont authentiques : c'est hilarant, j'adore.
C'est une prouesse et en plus c'est contre Macron, donc forcément
ça a tout pour me plaire ! C'est léger, tout en étant
dur à faire. Cet économiste, il est incroyable !
Je pense que j'offrirai ce livre à différents types de public...
Fanfan
Je me suis bidonnée, mais je me suis demandé : est-ce bien
un livre pour le groupe lecture ?... Cest en tout cas un exercice
de style parfaitement réussi notamment Houellebecq, Carrère,
Lemaire. Un exercice de style excellent. Je suis heureuse davoir
fini la semaine avec ce livre, même si ce nest pas un grand
livre.
Manuel
Mon tiercé, c'est Bruno Le Maire / Houellebecq / Carrère
/ Feydeau / Dostoïevski
Sabine
Ce n'est plus un tiercé, mais un quinté.
Manuel
Il y a des baisses de régime (Proust n'est pas très réussi),
mais ce qui est intéressant, c'est le fond qui colle à l'actualité.
La gageure des 7500€ est bien tenue. C'est bien de finir avec ce
livre.
Sabine
Je suis ravie. Proust, c'est lui qui m'a donné l'idée du
style. C'est la façon dont on parle plus que le fond. L'idée
est géniale. Proust est inimitable, tout comme Flaubert l'était
pour Proust.
Le pastiche de
La disparition, un grand texte, est très réussi.
L'exercice est intéressant, et intelligemment réalisé.
Ça fait réfléchir sur le fond et la forme. Comme
Tarantino, c'est complet. Avec des baisses de régime, certes. Merci
pour l'interview.
Françoisequi
avait, sans l'avoir lu, milité de façon déterminante
pour le choix de ce livre (bravo !)
Je me classe parmi les enthousiastes : ça m'a éclatée.
Houellebecq, on a l'impression de le lire. Proust, j'ai marché.
Lolito, j'étais écroulée, c'est très très
drôle. Levy, on n'a plus besoin de le lire. Eddy Bellegueule, c'est
"facile", mais quelle bonne idée, cette inversion. Feydeau,
Dostoïevski pour moi, ça se déguste comme un
bonbon. Bruno Lemaire, c'est le seul qui soit de la politique fiction.
La préface de Pierre Jourde,
j'ai aussi beaucoup aimé. J'admire le talent de David Spector.
Rozenn (après
coup)
J'ai trouvé du plaisir à lire ces pastiches : bien faits,
autour d'une idée bien trouvée. Je n'avais pas tout à
fait terminé et je l'ai fini avec le même plaisir. Mais que
me reste-t-il après coup de cette lecture ? En fait, pas grand-chose.
Oui, je le passerai autour de moi éventuellement.
Danièle (n'a pas lu sur place, avis
en attente...)
Repères
sur le parcours de David Spector Presse : articles, interview Les 12 pastiches La préface |
VOYONS LE BRILLANT
PARCOURS...
- Né en 1971 : où on ne sait pas, et d'une façon
générale aucun potin à l'horizon ! Ou du moins
pas encore...
- 1989 : reçu
à Normale Sup, il obtient
ensuite l'agrégation de mathématiques.
- 1998 : thèse en sciences économiques, Trois
essais sur l'"conomie politique de l'information,
sous la direction de Roger
Guesnerie, à l'EHESS.
- 1997 à 2001 : professeur assistant au MIT (Massachusetts Institute
of Technology) ; sûr qu'il cause anglais couramment...
- 2007 : en parallèle à ses activités universitaires,
il fonde avec des associés un cabinet de conseil, MAPP, qui intervient
dans des affaires de droit de la concurrence.
- 2018 : Coup de théâtre ! KPMG,
leader de laudit, du conseil et de lexpertise comptable, fait
lacquisition de MAPP
; David Spector rejoint KPMG.
Ses principaux domaines de travail, dit Wikipedia,
sont la théorie microéconomique, son application au droit
de la concurrence et l'histoire des débats économiques.
Tout ça, c'est de l'économie, mais attention ! On sait bien
que la politique n'est pas loin... et justement, il est l'auteur de La
gauche, la droite et le marché, éd. Odile Jacob,
2017 : livre qui reçoit le Grand
Prix BFM Business du livre éco. Vraiment le premier de la classe
!
PRESSE sur notre
livre
- "Le Gang des pastiches",
David Fontaine, Le Canard enchaîné, 26 janvier 2022
- ''Envie de vous amuser ? Voici 7500
€ : Pastiches politico-littéraires" !, lecteurs.com,
propos recueillis par Karine Papillaud, 8 février 2022. UNE
INTERVIEW À NE PAS LOUPER
- "David
Spector : Pastiche mode demploi", Pierre Poligone, Zone
critique, 24 février 2022
- "David Spector, 7500 € :
vous satirerez bien de votre zone de confort ?", Edouard
Girard, Causeur, 14 mars 2022
- "7 500 €, de David Spector :
toutes les voix comptent", Stéphanie Dupays, Le Monde
des livres, 15 avril 2022.
LES 12 PASTICHES
Ce sont des variations sur une campagne présidentielle
à la manière de
- Michel Houellebecq Adhésion
- Marcel Proust En même temps
- Vladimir Nabokov Lolito
- Patrick Modiano Souvenirs brumeux de lancien monde
- Marc Levy Lui et elle
- Eddy Bellegueule En finir avec Édouard Louis
- Emmanuel Carrère Le Nombril
- Théodore Dostoïevski Frime et financement
- Georges Feydeau LHôtel du Nouveau Monde
- Gustave Flaubert Normandie Tec
- Georges Perec La Disruption
- Bruno Le Maire Ma patronne, quelle femme !
LA PRÉFACE
Pourquoi une préface de Pierre
Jourde ? Pas parce que nous avions lu, lors de la semaine lecture
de 2014, Pays
perdu et La Première pierre de Pierre Jourde...
Pierre Jourde s'est lui-même livré au pastiche : Le
Jourde & Naulleau, sous-titré "Précis de
littérature du XXIe siècle", de Pierre Jourde et Éric
Naulleau (Mots & Cie, 2004, rééd. augmentée en
2008 chez Mango, 2015 chez Chiflet et Cie) est un pastiche des ouvrages
scolaires Lagarde et Michard.
Un des rêves de Pierre Jourde serait d'être pastiché,
écrit-il dans une de ces chroniques dans Le
Nouvel Obs...
Dans sa préface au livre de David Spector (à lire
ici), il évoque des auteurs de pastiches, et parmi eux,
un duo qui précéda le sien :
Paul Reboux (écrivain, journaliste et peintre 1877-1963) et
Charles
Müller (1877-1914, dont le nom est inscrit au Panthéon
de Paris), qui publie des séries de pastiches à partir de
1908. Grasset dans la collection "Les Cahiers rouges" a réédité
la manière de de ce duo.
L'histoire du pastiche littéraire existe : Paul
Aron a écrit Histoire
du pastiche, PUF, 2008.
On peut lire de Paul Aron un article en ligne "Le
pastiche comme objet détude littéraire : quelques
réflexions sur lhistoire du genre", Modèles
linguistiques, n° 60, 2009.
Nos cotes d'amour, de l'enthousiasme
au rejet :
|
||||
à
la folie
grand ouvert |
beaucoup
¾ ouvert |
moyennement
à moitié |
un
peu
ouvert ¼ |
pas
du tout
fermé ! |
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